Intervention de Sébastien Pietrasanta

Séance en hémicycle du 13 avril 2015 à 16h00
Renseignement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Pietrasanta :

Madame la présidente, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, il y a près de six mois, nous adoptions la dernière loi sur le terrorisme, une loi nécessaire et utile, qui avait déclenché la même polémique, les mêmes critiques et les mêmes procès d’intention que le projet de loi que nous examinons aujourd’hui. On nous accusait de vouloir, à travers la création de l’entreprise terroriste individuelle, mettre des centaines de Français sous les verrous. Six mois après, la justice n’a pas encore mis en oeuvre cette nouvelle peine. On nous accusait de vouloir paralyser internet à travers le blocage des sites. Six mois après, des sites internet faisant l’apologie du terrorisme ont bien été bloqués, sans la moindre difficulté technique.

On nous accusait déjà de mettre en place un Patriot Act à la française. Six mois après, les libertés de nos concitoyens sont-elles rognées ? Pourquoi vouloir systématiquement faire peur et inquiéter nos concitoyens ? Cette loi sur le renseignement est une loi nécessaire et attendue. Assurer la protection de notre souveraineté nationale et de nos concitoyens est une nécessité impérieuse face aux menaces protéiformes. Il était donc temps que notre démocratie donne à ses services de renseignement les moyens de travailler dans un cadre juridique modernisé et efficace. C’est ce que propose le texte que nous examinons aujourd’hui, qui est une avancée majeure pour l’État de droit.

Il est l’aboutissement d’une réflexion approfondie de notre président de la commission des lois, M. Urvoas, que je tiens à saluer. C’est bien parce que ce projet de loi n’est pas un texte d’émotion, ni de réaction qu’il est équilibré. Il donne un nouveau cadre légal, alliant sécurité et respect des libertés publiques et de la vie privée. Il met fin aux zones grises. J’ai la conviction que ce texte est protecteur des libertés. Face aux inquiétudes entendues de part et d’autre, concernant l’atteinte aux libertés individuelles, je rappellerai que nous ne sommes en aucun cas dans une opposition entre impératif de sécurité nationale et respect de l’État de droit et des libertés individuelles.

Les pouvoirs de la nouvelle Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, héritière de l’actuelle CNCIS, seront étendus. Elle détiendra des prérogatives indispensables ; elle émettra un avis préalable auprès du Premier ministre ; elle répondra aux demandes d’avis du Premier ministre, des présidents des assemblées et de la délégation parlementaire au renseignement. Elle aura la capacité de contester un avis délivré par le Président et de saisir le Conseil d’État. Nos concitoyens pourront, eux aussi, saisir le Conseil d’État, ce qui est une avancée considérable qui permet surtout de garantir le respect des libertés de tous. Le contrôle parlementaire sera lui aussi renforcé, avec la délégation parlementaire au renseignement.

À ces contrôles s’ajoute l’exigence de proportionnalité et de subsidiarité : plus les techniques seront intrusives, plus le contrôle sera grand ; et les techniques les plus intrusives ne seront possibles que si les autres techniques n’ont pas donné les résultats escomptés. Ces éléments prouvent la volonté du Gouvernement et de sa majorité de renforcer les libertés individuelles.

Une autre inquiétude couramment répandue concerne la surveillance des citoyens et la collecte des renseignements. La loi affirme le principe d’une surveillance limitée à quelques individus qui représentent une menace avérée. La mise en oeuvre d’une technique fera l’objet d’une surveillance limitée à quelques individus et devra préciser la personne concernée, les finalités et la durée prévue.

Quant à l’usage des IMSI catchers, qui suscitent de nombreux fantasmes, je me réjouis que le Gouvernement ait retenu ce dispositif que j’avais proposé avec Jean-Jacques Urvoas lors de la dernière loi sur le terrorisme. Il sera encadré et autorisé pour le terrorisme, l’espionnage et la criminalité organisée ou les violences graves portant atteinte à la sécurité publique. Il n’y aura donc pas de surveillance de masse. D’ailleurs, la loi prévoit de garantir la destruction des données non pertinentes sous trente jours. La loi prohibe les techniques de surveillance généralisée par la NSA. Toute demande sera écrite et motivée par les ministres de tutelle des services concernés. En outre, les récoltes seront centralisées et soumises à un contrôle absolu.

Il faut le répéter, inlassablement peut-être : la loi renseignement n’est en aucun cas un Patriot Act à la française. Les motifs de surveillance sont précis et inscrits dans un cadre légal ; la surveillance est ciblée, limitée dans le temps, en direction d’un individu constituant une menace avérée. Albert Camus disait : « Si l’homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout. » Madame la présidente, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, avec cette loi, nous aurons plus de sécurité, tout en garantissant nos libertés individuelles.

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