Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 13 avril 2015 à 16h00
Renseignement — Discussion générale

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, madame la présidente de la commission de la défense, monsieur le rapporteur, sans vouloir indûment prolonger les débats, je crois qu’il est indispensable de faire le point sur l’esprit de ce texte de loi, et peut-être d’évoquer quelques réponses à des questions qui ont été posées, tout en sachant que les articles et les amendements nous fourniront l’occasion d’approfondir les sujets qui préoccupent les députés qui se sont exprimés à la tribune au cours de cette discussion générale.

Sur l’esprit de ce texte, il est évident que les techniques de recueil de renseignement sont susceptibles de porter atteinte à la vie privée, aux droits des personnes en matière de vie privée et de vie familiale, de porter atteinte à l’inviolabilité du domicile, ainsi qu’au secret de la correspondance. Ce sont des droits qui sont garantis par notre Constitution, bien entendu, inscrits dans notre code civil, essentiellement aux articles 9 et 10, ce sont aussi des droits que la France s’est engagée, dans ses relations conventionnelles, à respecter, puisqu’ils figurent à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Et le Gouvernement a eu le souci, constamment, dans l’écriture de ce texte, de respecter ses propres obligations, ses obligations inscrites dans le code civil, ses obligations conventionnelles, ses obligations constitutionnelles. Et c’est pour cela que nous avons eu le souci, constamment, en écrivant ce texte, de veiller à trouver la bonne mesure entre les nécessités opérationnelles et la protection des droits et des libertés.

Je rappelle que dans ce texte, dès le titre Ier, les finalités du recueil de renseignement sont énoncées, et les commissions des lois et de la défense ne se sont pas privées de proposer des précisions à cet énoncé.

Par ailleurs, deux principes sont très précisément et explicitement affirmés : celui de nécessité et celui de proportionnalité. Tout notre souci a été de faire en sorte que les moyens donnés aux services de renseignements leur permettent d’assurer la protection des Français contre les dangers qui les menacent, qu’ils soient liés au terrorisme ou à la criminalité organisée, qui sont souvent liés. Les vecteurs modernes sont utilisés de façon très sophistiquée pour frapper les Français, la loi donne aux services de renseignement les moyens d’assurer leur protection. Mais nous avons évidemment conservé le souci de nous prémunir des risques d’intrusion intempestive dans la vie privée et familiale des Français.

C’est donc avec ce souci que nous avons rédigé ce projet de loi, et c’est dans cet esprit que la composition et les missions de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ont été conçues. Le Conseil d’État, qui a montré depuis un siècle qu’il était tout à fait protecteur des libertés, sera compétent car il s’agit de remettre en cause des décisions prises par le Premier ministre et des actes accomplis par des services administratifs. Il pourra être saisi par la commission ainsi que par des citoyens. Je rappelle d’ailleurs que le Parlement pourra également exercer un contrôle, d’abord par le rapport annuel que devra lui remettre la Commission nationale, mais aussi parce que la délégation parlementaire peut se saisir à tout moment de tout sujet et entendre la Commission.

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