Les mauvaises années, le Parlement crée une autorité administrative indépendante, les bonnes années, deux ou trois. Cela fait beaucoup d’autorités administratives indépendantes ! Il peut arriver que nous leur donnions un pouvoir de régulation, parfois même un pouvoir de sanction, mais pour des cas qui ne relèvent pas du domaine régalien. Or ici, il s’agit des libertés individuelles et de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Il est normal que, en cas d’atteinte proportionnée aux libertés individuelles, ce soit le pouvoir exécutif, soit celui qui, aux termes de la Constitution, dirige l’administration, qui assume cette responsabilité.
Permettre à l’autorité administrative de décider, c’est ôter la responsabilité au Gouvernement. Dans une conception assez académique et orthodoxe de la séparation des pouvoirs, il n’est pas souhaitable que le Gouvernement délègue son pouvoir. Par ailleurs, en 1991, quand la loi a été adoptée, le Conseil d’État avait, comme de coutume, été consulté. Il avait alors fait remarquer que donner la responsabilité à l’autorité administrative en lui confiant un pouvoir de conformité serait une clause de non-constitutionnalité de la disposition. Il n’y a donc aucune raison que son jugement ait changé plusieurs années après.