Intervention de Éric Ciotti

Séance en hémicycle du 5 mai 2015 à 15h00
Renseignement — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la garde des Sceaux, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le vote de ce projet de loi relatif au renseignement intervient dans un contexte où notre pays se trouve confronté à une menace terroriste d’une ampleur et d’une intensité inédites. La France est une cible, peut-être la première au monde. Les terroristes islamistes s’attaquent et se sont attaqués frontalement aux valeurs fondamentales de notre République et aux symboles essentiels de notre pays.

Hier, la menace était externe. Aujourd’hui, elle provient également de l’intérieur de nos frontières, de personnes socialisées et éduquées en France. Le nombre d’apprentis terroristes ne cesse hélas de croître. Plusieurs milliers de personnes – M. Le Premier ministre a cité le nombre de cinq mille individus – sont actuellement engagées de près ou de loin dans la mouvance terroriste et représentent une menace pour notre pays. Du temps des filières afghane ou pakistanaise, quelques dizaines de personnes – une cinquantaine tout au plus – devaient être chaque année surveillées par nos services de renseignement. Aujourd’hui, je le répète, ce sont plusieurs milliers de personnes qui sont engagées, de près ou de loin, dans la mouvance terroriste.

Nos services de renseignement et nos forces de l’ordre accomplissent un travail remarquable que je veux ici saluer et qui a permis de déjouer plusieurs dizaines d’attentats depuis le 11 septembre 2001, date à laquelle notre monde a basculé – même si depuis lors, je souligne que 102 Français ont péri victimes du terrorisme, en France et à l’étranger.

Cependant, le cadre légal, technique et logistique de l’activité de ces services est désormais inadapté, voire dépassé. Chers collègues, il est de notre devoir et de notre responsabilité de mieux protéger notre pays et d’adapter notre arsenal législatif à des actions terroristes en perpétuelle mutation.

Ce texte y contribuera utilement. C’est pour cela qu’il ne mérite ni excès d’honneur, ni excès d’indignité. Ce projet de loi est nécessaire, même s’il n’est pas suffisant. Il est insuffisant car la France, monsieur le Premier ministre, aurait eu besoin d’une véritable loi-cadre et d’une véritable loi de programmation de lutte contre le terrorisme, qui aurait notamment contenu un volet budgétaire, ainsi qu’un volet judiciaire qui fait ici cruellement défaut.

Ainsi, ce texte n’aborde pas la question des djihadistes de retour sur notre territoire, alors qu’ils font peser un risque évident sur la sécurité de nos concitoyens. Ainsi, vous refusez toujours la création de véritables centres de rétention et d’un dispositif de placement obligatoire.

Si ce texte est insuffisant, il est néanmoins nécessaire, car il dote d’un cadre légal des activités de renseignement déjà existantes. Ce projet de loi offrira en effet des outils pertinents et réclamés de longue date par les services de renseignement : interceptions de sécurité, accès administratif aux données de connexion, captation, transmission et enregistrement de sons ou d’images.

De plus, les débats en commission puis dans l’hémicycle ont permis d’en améliorer substantiellement le contenu. Je pense à la disposition consistant à inclure le ministère de la justice et de l’administration pénitentiaire dans le périmètre du recueil du renseignement, qu’a proposée notre collègue Guillaume Larrivé.

Tout au long des débats, pourtant, certains orateurs ont exprimé des inquiétudes concernant la protection des libertés individuelles. Il convient de les entendre et d’y répondre. Nous avons apporté des améliorations ; d’autres devront l’être encore. Le texte prévoit ainsi un encadrement strict des techniques de renseignement pour atteindre un juste équilibre. La commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la CNCTR, exercera un contrôle très clair, et un contrôle juridictionnel sera confié au Conseil d’État.

Monsieur le Premier ministre, chers collègues, nous avons toujours pensé que la guerre contre le terrorisme nécessitait de dépasser les clivages politiques.

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