Séance en hémicycle du 5 mai 2015 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Christian Estrosi, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe SRC

Ça commence mal !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, explosion record des demandes d’asile – de 44 % sur un an –, triplement de l’immigration irrégulière en 2014, hausse de 50 % sur le premier trimestre 2015 : voilà à quoi est confronté notre pays. Il n’y a plus aucun contrôle au col de l’Arche, porte d’entrée entre les Alpes-de-Haute-Provence et l’Italie. Pourquoi avoir supprimé trente postes au sein de la police aux frontières dans les Alpes-Maritimes, zone de transit de ces malheureux vers le nord de la France ? Et le ministre de l’intérieur hier soir, à Calais, encourageait les migrants à faire des demandes d’asile pour mieux rester chez nous. Je trouve cette situation intolérable.

Je vous ai demandé des renforts, monsieur le Premier ministre, mais cette demande est restée sans réponse. Vous savez pourtant depuis plusieurs semaines qu’il y a une pression de près d’un million de candidats au départ de l’Afrique. La responsabilité devrait relever en grande partie de la mobilisation de l’Union européenne pour ne pas laisser l’Italie, et par conséquent la France, confrontées à cette situation, mais les décisions prises sont dérisoires. Dès lors, il est de votre responsabilité de prendre des initiatives pour enrayer ce système de passoire généralisé.

Pour tarir ce problème à la source, voici trois propositions : réformer Schengen, quitte à en sortir ; mobiliser au niveau européen une flotte navale et aérienne sur les côtes du Sud ; frapper les trafiquants et les réseaux là où ils se trouvent, quitte à faire couler les bateaux vides avant leur départ.

J’attends vos propositions, monsieur le Premier ministre, pour que les trafiquants ne puissent plus laisser penser que la France est un Eldorado pour tous les immigrés d’Afrique.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Monsieur Estrosi, vous évoquez à juste titre la difficulté de la situation en Méditerranée centrale et appelez le Gouvernement à préciser sa position.

Tout d’abord, comme vous le savez, les demandes d’asile ont fortement augmenté en France entre 2007 et 2012 : elles ont été multipliées par trois. Pour ce qui concerne l’année 2014, elles ont diminué de 2,64 %, mais il est vrai que, depuis le début de 2015, elles connaissent une augmentation pour des raisons qui tiennent à la situation en Méditerranée centrale. Que faisons-nous pour y faire face ?

D’abord, nous augmentons très significativement les moyens de la police de l’air et des frontières : alors que 13 000 postes ont été supprimés dans la police et dans la gendarmerie entre 2007 et 2012, nous recréons des postes en nombre dans les services de police, notamment au sein de la police de l’air et des frontières, pour faire face à cette nouvelle situation et mettre en place le PNR – passenger name record.

J’ai par ailleurs donné des instructions pour qu’à Vintimille, c’est-à-dire aux frontières de votre département, il y ait des renforts très significatifs, comme cela a été le cas l’an dernier. Je tiens à vous donner des chiffres précis : il y a quinze jours, grâce à ces renforts, 890 migrants en situation irrégulière ont été reconduits à la frontière, et 390 l’ont été la semaine dernière. Le dispositif est donc efficace et fonctionne.

Ensuite, la France a fait des propositions au Conseil européen, que celui-ci a reprises : travailler avec les pays de provenance – je serai au Niger, la semaine prochaine, pour que nous puissions prendre en compte les migrants dès les pays de provenance – ; mettre en oeuvre une politique de protection des frontières extérieures de l’Union européenne ; appliquer au sein de l’Union européenne le partage des demandeurs d’asile afin que notre pays ne soit pas le seul à faire face à cette demande croissante.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Christophe Borgel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Brouhaha sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous demande, chers collègues, de bien vouloir faire moins de bruit : c’est très désagréable pour les orateurs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, quand on sait ce que ce mandat signifie sur le plan des responsabilités civiques, les mots manquent quand on découvre qu’ un maire, celui de Béziers en l’occurrence, a décidé de ficher des enfants parce qu’ils étaient musulmans. Il l’a dit crûment à la télévision publique : « Pardon de vous dire que les prénoms disent les confessions. Si vous vous appelez Mohammed… ». Mais dans la République laïque, un prénom, un nom, une origine ne renvoient pas à une croyance.

Doit-on rappeler à M. Ménard, qui décidément s’illustre dans la pratique d’un racisme sans limite, l’article 1er de notre Constitution ? « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » C’est particulièrement vrai pour les enfants de la République.

Ce scandale intervient dans un climat nauséabond, où on assiste à un véritable concours Lépine de la formule qui stigmatisera le plus nos compatriotes musulmans : « cinquième colonne », « remise en cause de la nationalité française », «

Exclamations sur certains bancs du groupe UMP

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

ces Français de papier qui nous envahissent ». N’en rajoutez plus !

Monsieur le Premier ministre, dans le discours, unanimement salué, prononcé en hommage aux victimes des attentats devant cette assemblée, le 13 janvier 2015, vous indiquiez : « L’islam est la deuxième religion de France. Elle a toute sa place en France. » Pouvez-vous garantir à la représentation nationale que le Gouvernement fera preuve de fermeté face aux agissements d’un maire qui a déshonoré sa fonction ?

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Monsieur le député, les faits que vous évoquez sont en effet d’une extrême gravité. Ils ne peuvent que choquer au plus haut point, comme l’attestent des déclarations venant de tous les bancs de cette assemblée.

Voilà un maire, un élu à qui les citoyens ont confié de grandes responsabilité, notamment la gestion de leurs écoles, qui établit des fichiers, une classification, des statistiques concernant les élèves de nos écoles en se basant sur une religion supposée, inférant d’un prénom ou d’un nom de famille une conviction religieuse. Cette pratique n’est pas seulement illégale ; vous l’avez dit, elle est contraire aux valeurs de la République. Elle fait honte au mandat qui a été confié à cet élu.

Monsieur le député, vous avez raison : la France ne distingue pas selon le prénom, le nom, la couleur de peau, la religion. La France, la République, c’est l’idéal de citoyens qui se retrouvent autour des mêmes valeurs.

S’il fallait une démonstration de ce qu’est la gestion d’une collectivité territoriale par l’extrême droite, par le Front national, la voilà faite. À une époque où l’on voudrait tout mélanger, tout confondre, où l’on voudrait brouiller les lignes, la réalité de l’extrême droite, la voilà ! L’extrême droite n’a pas changé, elle n’a rien renié de son passé ni de ses pratiques. Quand on est républicain, on doit combattre sans la moindre ambiguïté, la moindre hésitation, ces entreprises contre ce qui fait notre unité et notre cohésion, et en particulier notre bien le plus précieux : l’école.

Alors oui, il faut condamner, mais il faut aussi agir : de tels faits ne peuvent pas rester sans conséquences. C’est pourquoi la ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a demandé à la rectrice de Montpellier de saisir le procureur de la République afin de protéger les élèves de cette commune et de mettre immédiatement un terme à cette pratique.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Quand il s’agit de l’essentiel, c’est-à-dire de la République, de nos valeurs, de l’avenir de nos enfants, de la concorde, de la manière de vivre ensemble, les élus de la République doivent être exemplaires. Je le dis à tous, ici, une nouvelle fois : nous avons un devoir de vigilance. La République ne se défend pas uniquement par des mots, elle se défend aussi au quotidien : il faut être intransigeant, ne rien laisser passer. Le Gouvernement sera intransigeant et il ne laissera rien passer. Il appartient maintenant au maire de Béziers de répondre de ses actes devant la justice.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.

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La parole est à M. Jérôme Lambert, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Ma question porte sur trois faits d’actualité qui ont trait à la vie des entreprises de notre pays.

Nous venons d’apprendre que les dirigeants des plus importantes entreprises françaises, celles du CAC 40, avaient vu leurs revenus augmenter de plus de 10 % au cours de l’année passée. Cela représente au total la somme colossale de 153 millions d’euros !

Chaque année, nous évoquons cette situation car les dirigeants de nos entreprises persistent dans ce comportement, malgré la réprobation massive qu’il suscite, notamment parmi nous tous, ou presque, ainsi qu’au sein du Gouvernement, lequel s’est déclaré par le passé choqué par les augmentations octroyées à des dirigeants dont la politique de l’emploi aggravait le chômage dans notre pays. Selon la formule, on n’est bien servi que par soi-même. Une autre formule parle de privatisation des profits et de socialisation des pertes – des pertes d’emploi, en l’occurrence.

Pourtant, les politiques mises en place depuis trois ans – le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le pacte de responsabilité et de solidarité, sans parler du code de bonne conduite – visaient à d’autres résultats. Ces politiques semblent ne pas porter encore les fruits escomptés : les investissements stagnent, l’injustice salariale s’accroît et, pis que tout, le chômage continue de progresser.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans le même temps, le Gouvernement annonce la création d’une commission chargée de réfléchir aux mesures à prendre pour permettre aux entreprises à déroger aux règles du code du travail. Le rôle du Gouvernement ne serait-il pas plutôt de veiller à ce que les lois soient respectées ? Je rappelle que c’est au Parlement, ou à la négociation sociale, qu’il appartient de faire évoluer les réglementations.

Ces trois éléments – l’augmentation des revenus des dirigeants, celle du chômage et la volonté de déroger aux règles de protection des travailleurs – trouvent-ils une cohérence dans l’action du Gouvernement ? Sinon, qu’entendez-vous proposer pour redonner confiance aux Français ?

Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.

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La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du numérique.

Debut de section - Permalien
Axelle Lemaire, secrétaire d’état chargée du numérique

Monsieur le député, un patron qui décide de réduire sa rémunération pour augmenter celle de ses salariés : est-ce de la science-fiction ? Eh bien, non : c’est ce qui s’est produit tout récemment dans une start-up cotée à la Bourse de New York. Il faut cependant reconnaître que l’on n’est pas loin de la science-fiction ! La réalité, c’est effectivement une hausse constante des rémunérations des grands patrons du CAC 40.

Cela pose question sur le plan social, éthique, moral, mais aussi économique, lorsque ces rémunérations sont totalement déconnectées des performances des entreprises. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé en 2012 d’encadrer les situations qui dépassaient les limites de l’acceptable et que nos concitoyens ont raison de ne pas accepter.

C’est tout d’abord au secteur public qu’il revient d’être exemplaire. Les revenus des dirigeants y sont désormais plafonnés à 450 000 euros brut par an, et les rémunérations comprises dans une échelle de un à vingt.

Mais en cette période où se tiennent les assemblées générales, c’est surtout du secteur privé dont on parle. Dans les entreprises privées, la pratique du say on pay a été généralisée par le nouveau code AFEP-MEDEF. Plusieurs avancées ont renforcé le dispositif applicable afin d’assurer toute la transparence nécessaire au débat public et permettre aux actionnaires de contester les rémunérations scandaleuses.

Voilà ce qui a déjà été fait ; la loi Macron permettra d’aller plus loin, notamment en ce qui concerne les mandataires sociaux.

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La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Monsieur le Premier ministre, le couperet vient de tomber. Vallourec supprime 2 000 emplois dont la moitié en France, soit 10 % de l’effectif, dont 750 dans ses deux usines du Nord, qui s’ajoutent aux 200 suppressions du mois de février. Avec les emplois indirects, ce sont plus de 3 000 postes qui sont menacés dans notre pays. La courbe du chômage va encore être tirée vers le haut.

Il faut dire stop à ce massacre ! Le surchômage frappe déjà lourdement ces territoires, tel le Valenciennois qui refuse de revivre les décennies noires de liquidation de la sidérurgie.

Allez-vous refuser ce plan cynique du PDG Philippe Crouzet, qui prend prétexte de surcapacités de production pour justifier des aventures apatrides à la rentabilité court-termiste : implantations coûteuses au Brésil, aux États-Unis et au Moyen-Orient, accentuant ces surcapacités qui nous reviennent comme un boomerang ! Sauf à vouloir faire la preuve d’une impuissance d’État, votre rôle ne peut être d’accompagner ce plan de liquidation d’outils industriels performants, qui va jeter des salariés à la rue et dans le désespoir. Emparez-vous plutôt des conclusions unanimes de la commission d’enquête parlementaire de juillet 2013 : « Sidérurgie et métallurgie : un combat pour la souveraineté économique ». M. Macron dénonçait la semaine dernière la spéculation qui conduit au suicide industriel. Hic Rhodus, hic salta ! C’est le moment de montrer ce dont vous êtes capable avec Vallourec.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

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La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

« Et du chômage ! » sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Monsieur le député, la situation du groupe Vallourec est délicate, car, effectivement, qu’on le veuille ou non, ses deux marchés principaux, le pétrole et le gaz, se sont fortement réduits sous l’effet de la baisse des cours du pétrole. Par exemple, aux États-Unis, les forages de puits de pétrole ont diminué de 50 % par rapport à 2013.

La direction du groupe a décidé de réagir face à cette situation. C’est la raison du plan de restructuration qui a été annoncé – un plan, je le rappelle, à l’échelle du groupe, et pas uniquement à l’échelle française. Il appartient au groupe de présenter cette réorganisation aux représentants du personnel et de fournir toutes les explications et justifications nécessaires.

L’État et le Gouvernement veilleront à ce que les alternatives proposées permettent de réduire le nombre de postes supprimés, et à ce qu’elles soient sérieusement étudiées. Il convient de veiller également aux perspectives données à la base industrielle française du groupe, mais vous l’avez évoqué.

En ce qui concerne plus particulièrement l’aciérie de Saint-Saulve, à propos que laquelle la direction de Vallourec a annoncé qu’elle était à la recherche d’un partenaire majoritaire, l’État veillera à ce que Vallourec trouve une solution qui permette d’assurer la pérennité du site industriel. La question de la surcapacité de production d’acier de Vallourec en Europe ne saurait être réglée au détriment des sites de production français, en particulier de celui de Saint-Saulve. À cet égard, M. Emmanuel Macron, qui est en ce moment au Sénat, réunira demain matin les élus du Nord, d’ores et déjà mobilisés pour la sauvegarde de ce site industriel.

En tant que ministre du travail, je serai vigilant quant au contenu des mesures qui seront proposées dans le cadre du plan social européen pour limiter le plus possible le nombre de départs contraints et offrir des solutions à chacun des salariés.

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La parole est à M. Xavier Bertrand, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le Premier ministre, la jeunesse devait être l’un des grands défis du quinquennat du Président de la République. Or, aujourd’hui, l’anniversaire qui s’annonce est amer pour elle.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe UMP

Ça, c’est sûr !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Jamais il n’y a eu autant de jeunes sans avenir et sans emploi. Jamais l’apprentissage n’a autant reculé dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quant à la réforme du collège et des programmes, elle fait l’unanimité contre elle.

Un dernier mauvais coup vient d’être porté. Le 24 avril dernier, madame la ministre de l’éducation, vous avez annoncé que 100 millions d’euros seraient prélevés sur les réserves d’une cinquantaine d’universités et de grandes écoles dans notre pays. C’est irresponsable en termes de gestion,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…car, en définitive, vous prélevez… pardon, vous détournez, vous volez 100 millions d’euros à des établissements qui étaient vertueux et qui avaient constitué des réserves.

Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

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Il est vrai que savoir bien gérer n’est pas une spécialité socialiste, je vous le concède, mais, en attendant, vous prenez sur les réserves de ces établissements, tout simplement pour assurer des dépenses de fonctionnement. De la même façon, vous avez laissé entendre qu’en 2016 la même opération pourrait être reconduite. Comment voulez-vous faire entrer tout le monde dans un cercle vertueux quand l’État agit de cette façon ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C’est irresponsable en termes de gestion. C’est aussi irresponsable pour les régions, au premier rang desquelles la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, qui fournit le plus gros effort. C’est la région la plus durement touchée par le chômage et c’est celle que vous pénalisez le plus, madame la ministre !

Enfin, c’est irresponsable pour la nation. Vous cassez l’autonomie des universités parce que nous l’avions mise en place. Or, cette autonomie, nous en avons besoin.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous ne respectez pas les universités. Alors, je vous le demande : quand allez-vous comprendre que votre responsabilité est de bâtir l’avenir de la jeunesse et certainement pas de trahir celle-ci et de casser ce qui marche dans notre pays ?

Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur le député, il est dommage que la violence de vos mots et l’absurdité de vos propos discréditent ce que vous nous dîtes.

Protestations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Je répondrai cependant en détail. C’est vrai, le 27 avril dernier, nous avons présenté les dotations aux établissements d’enseignement supérieur à l’instance légitime, à savoir le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche – CNESER. Oui, nous avons décidé de mobiliser des fonds de roulement des universités, dont je rappelle ici que le montant global est de 1,5 milliard d’euros. Sur cette somme, nous avons décidé de mobiliser 100 millions d’euros, non pas pour en faire des économies mais pour les redistribuer à l’ensemble de l’enseignement supérieur, en particulier pour financer les emplois que nous nous sommes engagés à créer et qui voient bel et bien le jour : 3 000 emplois ont été créés auprès des établissements d’enseignement supérieur depuis 2012, et 2 000 doivent encore être créés d’ici à 2017.

Ce prélèvement a été opéré de façon extrêmement objective,

Exclamations sur les bancs du groupe UMP

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

en regardant les fonds de roulement des universités et en faisant en sorte de ne prendre que ce qui n’était pas mobilisé par des investissements. En d’autres termes, il s’agit uniquement des réserves dormantes des universités,

Huées sur plusieurs bancs du groupe UMP

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

que nous avons réutilisées et réparties autrement. Cela a concerné en France onze universités, vingt-cinq écoles et dix grands établissements. Cette opération ne met aucunement en cause la santé financière et budgétaire de ces établissements puisque ceux-ci pourront continuer à fonctionner exactement de la même manière et que, comme tous les enseignements d’enseignement supérieur, ils bénéficient par ailleurs, depuis 2012, d’une augmentation de 300 millions d’euros du budget des universités. En aviez-vous fait autant lorsque vous étiez aux responsabilités ? Ajoutez à cela, puisque vous parlez de la jeunesse, plus de 450 millions d’euros de bourses que nous avons distribuées depuis que nous sommes là. Monsieur Bertrand, vous admettrez que vous n’avez pas de leçons à donner.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP et sur quelques bancs du groupe GDR.

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La parole est à M. Olivier Faure, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’éducation nationale.

Madame la ministre, à l’évidence, l’éducation nationale n’est pas un sujet parmi d’autres : c’est la priorité de cette majorité. Il est logique que les projecteurs sont braqués sur chaque réforme touchant à l’éducation, parce qu’il s’agit de l’avenir de nos enfants, parce que les valeurs transmises et les savoirs enseignés à l’école peuvent toucher à l’idée que chacun se fait de la religion, de l’histoire, de la science, de la civilisation, et parce que l’école est le socle institutionnel de la République.

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C’est pourquoi chaque mesure est examinée au microscope. Cependant, à force de se focaliser sur des enjeux, certes légitimes mais de portée secondaire, ou de rechercher la polémique, on risque de perdre le fil de la nécessaire refondation de l’école.

À quel défi sommes-nous – êtes-vous – confrontés ? Au constat, établi notamment par le programme PISA, que la France est le pays le plus inégalitaire de l’OCDE en matière éducative.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En dépit du professionnalisme et de l’engagement personnel des maîtres, l’école conforte encore trop souvent les inégalités de naissance ou de territoire. Il fallait donc une réforme globale si on voulait mettre fin à l’école à deux vitesses.

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Le massacre du collège, vous appelez ça une réforme globale ? C’est scandaleux ! Quelle violence idéologique !

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Vous avez beaucoup entrepris depuis 2012. On forme à nouveau les enseignants, on en recrute par milliers. Désormais les moyens sont concentrés dans les établissements les plus défavorisés, la lutte contre le décrochage scolaire est engagée, la scolarisation avant trois ans se développe. Il est mis à disposition plus de maîtres que de classes dans le primaire, et les rythmes scolaires ont été adaptés aux rythmes d’acquisition.

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Maintenant, vous vous attelez à la réforme urgente du collège.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe UMP

Allô ! Allô !

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Madame la ministre, pouvez-vous, devant les élus de la République que nous sommes, restituer le sens de la refondation de l’école dans laquelle vous êtes engagée et qui fait notre fierté collective ?

« Allô ! Allô ! » et exclamations sur les bancs du groupe UMP.

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La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur le député, quand il a été élu, il y a bientôt trois ans, le Président de la République a dit qu’il ferait de l’éducation et de la jeunesse la priorité sur laquelle il voulait être jugé à la fin de son quinquennat.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe UMP

Non, c’était le chômage !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Cette promesse est aujourd’hui totalement respectée : il suffit de regarder le budget de l’éducation nationale, redevenu le premier budget de la Nation.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Ce sont en effet 65 milliards d’euros qui sont consacrés aux élèves, qui jusqu’à présent étaient davantage habitués aux suppressions de postes par dizaines de milliers et aux fermetures de classes par milliers. La droite avait même, par une étrange décision, fait disparaître la formation des enseignants chargés de leur transmettre les enseignements fondamentaux que l’on réclame désormais sur certains bancs.

Protestations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Je le répète : nous avons fait de l’éducation notre priorité, en rétablissant la formation initiale des enseignants, en donnant la priorité au primaire, en permettant la pré-scolarisation des enfants avant l’âge de trois ans, notamment dans les quartiers les plus en difficulté, pour les faire démarrer dans de meilleures conditions.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Oui, nous avons augmenté le nombre de postes de professeurs, et attiré de plus en plus de candidats aux concours de l’enseignement.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Nous abordons aujourd’hui le tournant délicat, important, essentiel de la réforme du collège. Si cette réforme s’impose, c’est parce que les résultats du collège ne font que se dégrader depuis dix ans. On ne peut pas se satisfaire qu’un élève sur quatre sorte du collègue sans maîtriser les fondamentaux en français, en mathématiques et en histoire !

Applaudissements les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Ceux qui nous font la leçon aujourd’hui ne s’en sont jamais souciés !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S’il vous plaît, un peu de calme ! Je sais bien que c’est la reprise, mais quand même !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Nous créons 4 000 postes supplémentaires au bénéfice d’une réforme qui met l’accompagnement personnalisé des enfants au coeur du système, qui multiplie les façons d’apprendre pour permettre aux enfants de s’approprier les savoirs,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous êtes les fossoyeurs de l’enseignement de l’histoire de France !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

…qui avance l’apprentissage des langues vivantes, dans l’intérêt de tous les collégiens.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous demande de faire preuve d’un minimum de calme ! Il y va de l’image de notre assemblée.

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La parole est à M. Éric Woerth, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, le bilan économique et social de François Hollande est désastreux. L’anniversaire de son élection ne sera pas célébré : il est vrai que les Français ne sont pas à la fête. Le chemin des désastres est souvent pavé de bonnes intentions ; votre bilan, lui, est pavé de mauvais résultats.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dressons ensemble un constat objectif. Vous vouliez qu’il y ait moins de chômage en France : il y a plus de chômage en France, plus de chômage des jeunes, plus de chômage des seniors, plus de précarité. Pire encore, sans crise, le chômage augmente plus vite sous François Hollande que sous Nicolas Sarkozy. Votre résultat, c’est 600 000 chômeurs supplémentaires en trois ans !

Vous vouliez moins de 3 % de déficit public : le compteur des déficits est bloqué à 4 %.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Et vous ? Vous êtes le ministre des 7 % de déficit !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ils ont baissé d’un peu plus d’un point en trois ans, soit trois fois moins vite qu’en sortie de crise entre 2009 et 2011.

Vous vouliez plus de croissance : vous avez réussi l’exploit d’éteindre durablement la croissance en France par des augmentations d’impôts massives, asphyxiant le pouvoir d’achat des ménages et l’investissement des entreprises.

Vous vouliez plus de simplicité : vous avez créé l’usine à gaz de la pénibilité.

Vous nous dites maintenant : « Tout va mieux. Notre politique est en train de réussir. Nous avions raison avant l’heure. » C’est prendre encore une fois des vessies pour des lanternes ! La performance d’un pays, comme celle d’un athlète, n’est pas une valeur absolue, mais relative : il faut la comparer à celle des autres pays. La réalité, c’est qu’à l’échelle internationale, la France décroche depuis trois ans.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La croissance y est deux fois plus faible qu’ailleurs, le déficit public se réduit à une vitesse de tortue, moins vite qu’ailleurs. Quand la plupart de nos partenaires créent de l’emploi, nous continuons mois après mois à créer du chômage.

Voilà quelle est la situation. Bien sûr, les astres nous sont favorables ; le pétrole, les taux d’intérêt, la politique monétaire de la Banque centrale européenne, tout concourt à relancer la croissance en France et en Europe, mais ces facteurs externes ne nous serviront à rien sans les réformes internes que vous avez courageusement choisi de ne pas faire. Vous venez de présenter à l’Europe un programme de stabilité qui ne fait, en réalité, que refléter l’instabilité de votre programme.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous mettre fin à ce décrochage que nous subissons depuis trois ans ?

Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Monsieur le député…

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Je devrais dire, en effet, monsieur le ministre, car vous avez été ministre un peu plus de trois ans, de 2007 à 2010, trois années que vous saluez dans votre diatribe enflammée. Pourtant pendant ces trois ans, la croissance a diminué et le PIB de la France a chuté ; et vous nous demandez une augmentation de la croissance !

Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Pendant ces trois ans, le chômage est passé de 8 % à 9,4 %, soit 600 000 chômeurs de plus. Pendant ces trois ans, le déficit a explosé, passant de 2,7 % à 7,1 %. Monsieur Woerth, dans ce domaine, je vous demande, à vous comme à d’autres, de faire preuve d’un peu de modestie et de pondération !

Protestations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Retrouver une croissance plus forte : c’est un vrai sujet, et c’est la bataille que nous menons. Je préférerais que vous me fassiez des propositions dans ce domaine, plutôt que de m’obliger à vous rappeler le désastre que fut l’action de votre gouvernement et la vôtre.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Faites des propositions pour réduire plus rapidement que nous le faisons le déficit public de la France – car nous avons, nous, diminué ce déficit ! Ne vous contentez pas d’affirmer de manière arbitraire qu’il faut faire 140 milliards d’euros d’économies supplémentaires, alors qu’à l’instant même, M. Bertrand vient de nous reprocher 100 millions d’euros d’économies…

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

… sur les réserves des universités, qui ont permis de financer des emplois supplémentaires de professeurs dans ces mêmes universités.

Vives protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Si vous avez des idées pour faire baisser le chômage, monsieur Woerth, vous feriez mieux de nous les soumettre : cela permettrait à la France d’avancer et au débat démocratique d’être de meilleure qualité que l’exercice auquel vous venez de vous livrer.

Protestations persistantes sur les bancs des groupes UMP et UDI. – Claquements de pupitres.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Rudy Salles, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, malgré vos allégations et votre recours à la méthode Coué, votre réforme du collège rencontre chaque jour une opposition de plus en plus vive. Les enseignants sont inquiets ; les parents d’élèves sont inquiets ; tous les défenseurs de l’école républicaine sont inquiets.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Et pour cause : vous envisagez de supprimer l’enseignement du latin, les classes européennes et les classes bilangues qui ont permis à l’allemand de rester la troisième langue vivante enseignée en France, car vous les jugez trop élitistes.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pire, vous vous apprêtez à affaiblir l’enseignement de l’histoire avec des programmes déséquilibrés qui ne réserveront qu’une place secondaire à tout ce qui fait la grandeur de la France, à ce qui nous rassemble en une communauté nationale et européenne de destin.

Sous couvert d’égalité, cette réforme abandonne l’idée de l’excellence et fragilise l’élitisme républicain. Vous allez ainsi procéder à un véritable nivellement par le bas et ce sont les enfants issus de familles défavorisées que vous allez le plus pénaliser

Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

car, madame la ministre, vous allez leur refuser le droit d’avoir les mêmes chances d’accéder au savoir et ainsi de dépasser leur condition par le travail et le mérite, ce droit au fondement même de notre pacte républicain !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre, ma question est simple : allez-vous abandonner ce projet de réforme néfaste et apporter enfin des vraies réponses aux inégalités de notre système scolaire, qui poussent 150 000 jeunes à en sortir chaque année sans diplôme ?

Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Monsieur le député, la ministre de l’éducation nationale a déjà eu l’occasion de répondre à deux questions sur la réforme du collège et des programmes, et je ne doute pas qu’elle y revienne dans un instant. Mais je tiens à vous répondre parce que précisément la jeunesse est notre priorité, parce que l’école est la priorité de ce quinquennat et que je ne supporte plus les contre-vérités de l’opposition sur cette réforme.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

C’est notre priorité pour les raisons évoquées par la ministre de l’éducation nationale : premièrement, l’école est redevenue le premier budget de la nation ; deuxièmement, nous avons décidé de recruter 60 000 enseignants pendant ce quinquennat, quand vous en avez supprimé des milliers

« Contre-vérités ! » sur les bancs du groupe UMP

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

; surtout – c’est un point essentiel qui explique que je ne puisse me retrouver dans vos propos, monsieur le député –, l’élitisme républicain c’est lutter contre les inégalités. Or, malheureusement, l’école ne cesse de reproduire ces inégalités depuis des années.

Nous voulons répondre d’abord à l’angoisse des familles, des classes moyennes et des couches populaires qui sont aujourd’hui en échec parce que la majorité précédente non seulement a mis en cause la priorité fondamentale qu’est l’école et supprimé des milliers de postes, mais a également saccagé – j’utilise ce mot à dessein – la formation des enseignants, que nous avons rétablie.

Protestations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Monsieur le député, il faut toujours regarder les choses en face. Pour restaurer cet élitisme républicain que vous appelez de vos voeux, il faut non seulement des moyens, mais également une refonte fondamentale de la pédagogie : c’est le sens de la réforme des collèges. Arrêtez ces contre-vérités : ni l’allemand, ni le latin, ni le grec ne seront supprimés.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Quant à la réforme des programmes, la ministre de l’éducation nationale l’a dit de manière très claire, elle est aujourd’hui en consultation.

« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

C’est une nostalgie que vous essayez de défendre, la nostalgie d’une France du passé.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Nous, nous voulons regarder l’avenir. Cette réforme, sur laquelle les enseignants notamment seront consultés pendant encore un mois, devra revoir notre roman national, non pas celui de la nostalgie, mais celui qui correspond à la réalité du monde d’aujourd’hui, qui arme les jeunes et les collégiens pour le XXIème siècle. Sortez de la nostalgie, regardez la réalité de ce que vous avez fait quand vous étiez au pouvoir et soutenez une réforme dont le pays et sa jeunesse ont besoin !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.– Huées sur les bancs du groupe UMP.

Réforme du collège

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, dans une lettre adressée à la ministre de l’éducation nationale, l’ancien Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a fait part de son inquiétude quant à l’enseignement de la langue allemande, malmené par la réforme des collèges. Cette inquiétude est partagée par notre collègue Pierre-Yves Le Borgn’, président du groupe d’amitié France-Allemagne, ainsi que par tous ceux pour qui l’entente franco-allemande a encore un sens.

Plus largement, c’est toute la communauté franco-allemande qui s’inquiète de cette réforme. En Allemagne, celle-ci suscite une vive émotion et tous nos collègues qui ont des contacts étroits avec nos amis allemands, comme Pierre Lequiller, peuvent en témoigner. Même l’ambassadrice d’Allemagne en France a exprimé sa préoccupation quant à l’affaiblissement de l’apprentissage de l’allemand en France.

Avec cette réforme, vous risquez de mettre à mal le couple franco-allemand que vos prédécesseurs ont construit pas à pas depuis soixante-dix ans et qui s’est décliné sur nos territoires par toute une série d’actions tant sur le plan éducatif – avec les classes européennes, les classes bilangues et les sections AbiBac – que sur le plan économique – avec les échanges universitaires ou des grandes écoles.

Plutôt que de remettre en cause ces actions, il faudrait bien au contraire encourager le développement des classes bilangues sur tout le territoire, comme c’est le cas, entre autres, dans les académies de Nancy-Metz et de Strasbourg. Monsieur le Premier ministre, cette réforme est à la fois une faute politique, une faute économique et une faute culturelle.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C’est le contraire qu’il faut faire. C’est un exemple de plus de politique de nivellement par le bas. Monsieur le Premier ministre, l’éducation nationale est l’avenir de notre pays ; sa politique doit être ambitieuse et doit donner à nos jeunes tous les moyens nécessaires pour réussir. C’est pourquoi vous devez renoncer à ce volet de la réforme, comme à l’ensemble de la réforme.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Madame la députée, vous savez le respect et l’estime que j’ai pour vous : je ne vous ferai donc pas l’affront ici de vous accuser de mauvaise foi.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Et pourtant, vous fondez votre analyse sur des rumeurs et des contre-vérités et je ne peux que vous inviter, comme je l’ai fait avec nombre d’entre vous, à lire une fois pour toutes le texte de cette réforme du collège.

En effet, cette réforme avance d’une année, de la quatrième à la cinquième, l’apprentissage de la langue vivante 2, ce qui favorisera toutes les langues vivantes 2, dont l’allemand : 25 % d’heures supplémentaires seront offertes aux collégiens pour cette langue vivante 2. Pour ceux qui ont choisi comme première langue vivante au cours préparatoire une autre langue que l’anglais, par exemple l’allemand, il sera possible d’apprendre l’anglais dès la classe de sixième : c’est une façon de promouvoir la diversité dans le choix des langues vivantes 1 en école primaire.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Pour s’assurer de la réalité de ce choix, le ministère de l’éducation nationale pilotera pour la première fois une carte académique des langues visant à garantir la présence sur l’ensemble du territoire de professeurs d’école susceptibles d’apprendre d’autres langues vivantes que l’anglais dès la classe de CP et jusqu’à la fin de l’école primaire, l’anglais pouvant être enseigné en sixième : c’est une véritable incitation à choisir ces autres langues.

Enfin, madame la députée, puisque je vous sais raisonnable, je vous rappelle qu’à la prochaine rentrée scolaire, nous ouvrirons 515 postes de professeurs d’allemand au concours, contre 200 en 2010. Pourquoi le ferions-nous si nous voulions tuer l’allemand ?

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Soyons donc honnêtes et admettons que cette réforme va dans le bon sens !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Anne-Christine Lang, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, après trois années passées dans l’opposition, l’UMP, préférant la polémique partisane à la vérité et l’amnésie à un examen objectif de ses erreurs passées, a décidé de se muer en donneuse de leçons.

Les Français, eux, n’ont pas la mémoire courte. Ils se souviennent des 1 850 milliards d’euros de dette publique, dont 650 générés sous le seul quinquennat de Nicolas Sarkozy. Les Français comprennent que la gauche a fait le choix du sérieux et de la constance……

Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

seuls à même de redresser notre appareil productif tout en préservant notre modèle social. Ce n’est pas un hasard si nous sommes la première majorité à faire baisser chaque année le niveau du déficit public. On ne joue pas avec l’argent public, parce qu’il s’agit de l’argent des Français, pas plus qu’on ne joue avec le destin des générations futures qui auront à supporter nos déficits d’aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C’est la raison pour laquelle nous avons entrepris d’assainir les comptes publics, et, monsieur le ministre, nous avons bien fait de tenir bon, car aujourd’hui nos efforts paient.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe UMP

Ah ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La Commission européenne, tant redoutée par nos prédécesseurs, salue notre politique.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour preuve, elle a relevé ses prévisions de croissance pour 2015 à plus de 1 %, et à 1,7 % pour 2016, se montrant ainsi plus optimiste que nous-mêmes. En conséquence, la Commission confirme notre prévision d’un déficit à 3,8 % pour 2015, alors qu’elle l’estimait à 4,1 % il y a quelques mois.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mieux encore, elle prévoit une stabilisation du chômage en 2015, et une baisse de celui-ci en 2016.

Monsieur le ministre, ce redémarrage de la croissance n’est pas le fruit du hasard. Rien ne tombe du ciel. Il y a certes un contexte favorable, du fait notamment de la baisse du prix du pétrole, mais il y a aussi tout ce que nous avons bâti ensemble : la réorientation de la politique européenne avec la baisse de l’euro et le plan Juncker, et, surtout, le soutien à l’investissement dans notre pays, via le pacte de responsabilité et de compétitivité.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics, que l’on écoute en silence.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Madame la députée, vous soulignez que, ce matin-même, la Commission a fait part de ses prévisions pour l’année 2015 et au-delà, s’agissant aussi bien de l’Europe que de la France. Vous avez eu raison de le dire : pour la première fois depuis de très nombreuses années, il existe une convergence entre les prévisions que le Gouvernement a soumises au Parlement et celles réalisées par la Commission.

Là où il n’y avait que divergences, confrontations, voire menaces de sanction, ce qui est toujours détestable quand il s’agit de l’Europe, il y aujourd’hui convergence entre la vision de la Commission et celle, souveraine, de la France.

Oui, l’activité reprend, tout comme la croissance, qui sera cette année, selon nous, de 1 % et selon la Commission de 1,1 %. Pour l’année prochaine, alors que nous prévoyions 1,5 %, la Commission européenne prévoit 1,7 %.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Quelle que soit l’exactitude de ces chiffres, l’évolution qu’ils indiquent est la même. Ce surcroît de croissance ne vient pas de nulle part, mais bien de la réorientation européenne et des décisions prises ici pour soutenir l’activité, les entreprises et l’investissement.

Vous l’avez également dit, la Commission prévoit, ce qui est peut-être le plus important, une stabilisation du chômage cette année, et une diminution l’année prochaine.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe UMP

Quelle victoire !

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Madame la députée, je suis de ceux qui considèrent que les prévisions ne font pas la réalité : nous devons poursuivre notre action dans la continuité et dans la cohérence. Ce sont cette continuité et cette cohérence qui donneront des résultats tangibles et durables. Croissance et recul du chômage seront les fruits de la politique que nous menons aujourd’hui.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Cécile Duflot, pour le groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe UMP

Ah !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, hier, sur France 2, Robert Ménard, maire de la ville de Béziers, a déclaré établir un fichier des origines religieuses des élèves de sa ville en fonction de leur prénom. Il se targuait même de se savoir ainsi dans l’illégalité, lançant de fait un défi odieux à notre conception républicaine du vivre ensemble.

Chacun doit bien saisir ce qui est en jeu dans cette démarche. Dans la ville de Béziers, nos concitoyens musulmans, ou supposés tels, sont dans le collimateur. Au-delà, ce sont les millions de musulmans de notre pays qui sont visés de manière injuste. L’assignation identitaire, qui revient à coller arbitrairement sur un prénom une étiquette religieuse est en effet anti-républicaine, offensante, excluante et discriminante. Ce sont nos valeurs qui se trouvent foulées aux pieds par un édile d’extrême-droite qui a visiblement décidé d’engager un bras-de-fer avec l’État de droit.

Ce profilage illégal ouvre la porte à toutes les dérives, et la République se doit de réagir avec la plus grande fermeté. Aujourd’hui, l’extrême-droite ne respecte pas les lois de notre pays, pas plus à Béziers qu’à Paris, où, lors du dernier discours de Mme Le Pen, le service d’ordre du Front national s’est comporté comme une milice, entrant dans un lieu privé pour arrêter des militantes, se substituant ainsi à la police, seule habilitée à mener ce type d’opération.

Monsieur le Premier ministre, la loi vous permet de suspendre un maire afin de mettre fin à des comportements dont la particulière gravité est avérée. Il y a des précédents. C’est pourquoi, monsieur le Premier ministre, nous souhaiterions savoir quelles suites vous donnerez à ces faits. Comptez-vous suspendre le maire de Béziers de ses fonctions au regard de la gravité d’actes qu’il revendique ?

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La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Madame la députée, la laïcité, principe constitutionnel au fondement de notre République, permet – je veux le rappeler ici car elle est souvent dévoyée – à chacun de vivre selon ses convictions, religieuses ou non, et organise l’indifférence de l’État et de la puissance publique vis-à-vis des appartenances religieuses, qui relèvent de la liberté de chaque citoyen.

Et voilà qu’un maire, M. Ménard, se revendiquant d’une extrême-droite qui depuis des années ne cesse d’en appeler à la laïcité pour mieux la dévoyer, en l’instrumentalisant contre une religion bien précise, avoue maintenant ficher les élèves de sa commune en fonction de leur appartenance religieuse, elle-même déduite de leur prénom.

Ce faisant, M. Ménard enfreint délibérément la loi, faisant fi de sa fonction de représentant de l’État dans sa commune. Au-delà de cette illégalité, il place son action en dehors du champ républicain, démontrant une fois de plus que l’extrême-droite n’a rien retenu des leçons de l’histoire.

M. Ménard est donc à la fois anti-républicain et indigne de son mandat électif, qui impose de faire respecter la loi par tous les citoyens, et d’abord en la respectant soi-même. La loi n’est pas à géométrie variable : c’est la raison pour laquelle, au-delà de la réprobation politique que mérite une telle attitude, j’ai demandé à la rectrice de Montpellier de saisir le procureur de la République, sur la base de l’article 40 du code de procédure pénale, afin de protéger les élèves de cette commune et de mettre immédiatement fin à ces pratiques qui déshonorent leur auteur.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes écologiste et SRC.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Je rappelle ici que tous les fonctionnaires, y compris les fonctionnaires territoriaux, sont tenus de respecter la loi et de signaler tout délit dont ils auraient connaissance.

Mesdames et messieurs les députés, la meilleure réponse face à ces provocations, qui ne visent qu’à saper le pacte républicain, est l’unité autour de nos principes, et notamment de la laïcité.

Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, SRC et sur quelques bancs du groupe RRDP.

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La parole est à M. Sylvain Berrios, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le Premier ministre, vous avez supprimé le financement de l’apprentissage de la musique au sein des conservatoires à rayonnement régional. Par souci de responsabilité, les maires ont assumé cette décision.

Vous avez imposé aux maires la semaine scolaire de quatre jours et demi. Non financée par l’État, elle coûte chaque année 500 millions d’euros aux communes, et n’apporte rien ni aux familles ni aux enfants. Par souci de responsabilité, les maires l’ont assumée.

Vous avez supprimé 3 milliards de dotations aux communes du jour au lendemain. Nous avons pris nos responsabilités et adopté des budgets municipaux en équilibre, conformément à la loi.

Tout cela a été possible grâce à une conjugaison d’économies et de fiscalité, que nous assumons à votre place, monsieur le Premier ministre.

Dans le même temps, votre gouvernement, qui prétend donner des leçons de bonne gestion, a présenté à la nation un budget insincère, à hauteur de 4 milliards d’euros.

La réforme de l’État est au point mort. Pire, les économies sont renvoyées à 2017, c’est-à-dire à vos successeurs, alors même que vous avez déjà levé plus de 80 milliards d’euros d’impôts supplémentaires depuis 2012.

Les maires sont en colère parce que vous demandez aux communes de faire ce que vous êtes incapables de réaliser.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les maires sont en colère parce que vous vous déchargez sur eux en leur demandant de créer des places de crèche, des maisons de retraite, des logements sociaux tout en coupant l’aide aux investissements.

Les maires sont en colère parce que vous rejetez sur eux votre incapacité à redresser le pays et à mettre fin aux gabegies.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.

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Monsieur le Premier ministre, quand cesserez-vous de prendre les maires comme variable d’ajustement de votre politique budgétaire ? Si, pour nous faire entendre, nos mairies doivent fermer, ne vous inquiétez pas, nous les fermerons !

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI.

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La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je crois qu’il est inutile, monsieur le député, d’opposer les différents acteurs de la dépense publique. Au moment où l’ensemble du pays semble constater que la France est l’une des championnes de la dépense publique, nous essayons de l’entraîner vers une réduction de la dépense.

Vous affirmez, à tort, que les efforts de l’État ne sont pas comparables à ceux des collectivités. Entre 2013 et 2014, l’État a diminué ses dépenses de 3,3 milliards d’euros. Ce ne sont pas des prévisions, ce sont des constatations.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Parallèlement, les collectivités locales ont augmenté leurs dépenses, parfois pour de bonnes raisons – vous en avez cité quelques-unes – de l’ordre de 3 %. Il n’y a pas de comparaison à faire et pas d’opposition à pointer.

Nous avons proposé une diminution des dotations aux collectivités locales, qui représente environ 1,5 % de leurs recettes.

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

À l’heure où la réduction de la dépense publique est indispensable, une telle baisse, d’ailleurs souvent compensée par les augmentations naturelles de la fiscalité – je me souviens que le Parlement a majoré les bases d’imposition de 0,9 % pour l’ensemble des contribuables –, nous paraît tenable.

Nous sommes d’ailleurs en discussion, vous le savez, avec l’ensemble des associations d’élus pour revoir les conditions de versement de la DGF, dont l’hétérogénéité et, j’ose le dire, l’injustice devraient être le premier facteur de colère des maires.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.

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La parole est à Mme Martine Martinel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la garde des sceaux, la France a récemment été choquée par de graves affaires de pédophilie à l’école.

En dépit de l’obligation de transmettre des informations, soulignée dans une circulaire du ministère de la justice de novembre 2001, dont la signature la plus récente par vous-même date de mars dernier, certains membres de la communauté éducative n’ont pas fait l’objet de signalement. Des enseignants, connus des services de police et condamnés pour le visionnage de vidéos et d’images pédopornographiques, ont pu continuer à exercer leur métier au contact d’enfants qu’ils ont agressés ou violés.

Si de tels faits ont été rendus possibles, c’est que la circulaire de 2001 n’est pas suffisante pour les contrer.

Madame la ministre, le Gouvernement, qui a montré son soutien total aux victimes et à leurs familles, s’est engagé à ce que de tels actes ne se reproduisent pas. C’est la raison pour laquelle, avec la ministre de l’éducation nationale, vous avez souhaité que soit rapidement examinée et adoptée une loi introduisant cette obligation de signalement. Ce texte imposera de transmettre les condamnations passées ou en cours des enseignants et encadrants ainsi que toute forme de poursuites engagées. Il devra concerner non pas uniquement l’éducation nationale, mais toutes les professions induisant un contact avec des enfants.

Il faut que, dès la rentrée prochaine, de nouvelles règles s’appliquent, que les administrations soient mieux informées, que les informations circulent et que les personnels soient mieux formés pour mieux réagir. Pouvez-vous nous détailler les mesures que vous allez mettre en oeuvre ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Les faits que vous évoquez, madame la députée, sont absolument ignobles. Les agressions sexuelles, déjà, sont insupportables, celles-ci ont concerné des enfants, sans aucun égard pour leur innocence, leur fragilité, leur avenir.

Nous devons tout mettre en oeuvre, et c’est à cela que s’emploie la ministre de l’éducation nationale, pour offrir un accompagnement de qualité à ces enfants, qui sont en souffrance, mais également à leurs parents, qui sont en colère, avec raison, et qui sont eux aussi en souffrance.

Nous faisons preuve d’empathie et de responsabilité, en assumant ce qui nous incombe. C’est la raison pour laquelle, avec la ministre de l’éducation nationale, nous avons réagi, en transparence et avec diligence : en transparence parce que nous n’avons rien voulu dissimuler de ces faits et de leur gravité ; avec diligence parce que, dès le lendemain de leur révélation, nous avons commandé une inspection conjointe de l’éducation nationale et des services judiciaires et demandé un prérapport pour la fin du mois d’avril, et nous nous sommes engagés auprès des parents à leur en présenter les conclusions. Nous étions donc hier à Villefontaine et les parents, en dépit de leur souffrance, ont été d’une grande dignité.

Nous avons engagé toute une série d’actions. Dès le 8 avril, nous avons rassemblé les recteurs et les procureurs généraux. Au terme de cette réunion, nous avons mis en place un groupe de travail, sous l’autorité de l’administration criminelle et des grâces, et engagé la rédaction d’un guide méthodologique. Dès le 1er juin, nous allons sécuriser la procédure de transmission des informations en inscrivant dans la loi à la fois le moment dans la procédure où le signalement doit être effectué, les agents qui sont concernés, tous ceux qui, bien au-delà de l’éducation nationale, sont au contact avec des enfants, ainsi que les infractions concernées. Et, avec le ministère de l’intérieur, nous travaillons à la modification des formulaires ainsi qu’à la base de données de la justice.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Xavier Breton, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

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Madame la ministre de l’éducation nationale, votre projet de réforme du collège est de plus en plus contesté. Il est contesté par les enseignants, par les parents d’élèves et, plus largement, par toutes celles et tous ceux qui ne se reconnaissent pas dans votre conception égalitariste de l’école.

Celle-ci vous conduit à imposer un nivellement par le bas. Nivellement par le bas, la suppression des classes bilangues et l’affaiblissement de l’apprentissage de l’allemand ; nivellement par le bas, l’atteinte portée à l’enseignement du latin et du grec, qui ne seraient plus reconnus comme des matières à part entière, mais qui seraient désormais enseignés à travers des ateliers interdisciplinaires dispensant un enseignement forcément superficiel. Madame la ministre, en ne prévoyant aucun horaire, aucun programme spécifique pour les langues anciennes, votre réforme les condamne.

Sous couvert de renouveau pédagogique, vous êtes en train de détruire l’héritage du passé. C’est cette même logique qui inspire la rédaction des nouveaux programmes, notamment de ceux d’histoire. Nous retrouvons là l’obsession de ceux qui, depuis plus de trente ans, s’obstinent à vouloir éradiquer la transmission de notre patrimoine culturel. On le voit bien dans ces nouveaux programmes d’histoire, qui s’appuient sur une lecture partiale et culpabilisante de notre nation,…

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…en ignorant délibérément nos racines et en occultant les grandes figures qui ont marqué et incarné l’histoire de notre pays.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Madame la ministre, derrière ces coups bas portés à l’enseignement de l’allemand, du latin ou de l’histoire, c’est le modèle même de notre école républicaine que vous voulez remettre en cause.

Mêmes mouvements.

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Comme dans la loi Peillon, les valeurs d’effort et de mérite sont dramatiquement absentes de votre projet de réforme du collège. C’est pourquoi nous vous demandons d’y renoncer.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur le député Breton, puisque les formules latines sont à la mode, je vais moi-même vous en rappeler une : « Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. »

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe UMP

En latin ! En latin !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur Breton, quel est le gouvernement qui, en cinq ans, a fermé 9 000 classes, alors qu’en trois ans, nous en avons recréé autant ? Monsieur Breton, quel est le gouvernement qui a supprimé la formation initiale des enseignants, alors que nous l’avons rétablie sitôt arrivés aux responsabilités ?

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe UMP

Sans le latin, sans le latin, la messe nous…

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Mes chers collègues, un peu de calme, s’il vous plaît !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Vous vous faites désormais le chantre des humanités, monsieur Breton, mais n’est-ce pas un des vôtres qui vouait aux gémonies La Princesse de Clèves, considérant que c’était une oeuvre trop intellectuelle pour les classes populaires ?

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Soyons sérieux deux minutes et convenons ensemble que vous n’avez pas de leçon à nous donner !

La réforme du collège a deux ambitions parfaitement assumées : la première, c’est de faire réussir chaque collégien en consacrant à cette entreprise les moyens nécessaires ; la deuxième, c’est de mettre fin à un collège à deux vitesses qui s’exonère à bon compte de l’échec du plus grand nombre en n’offrant des options qu’à quelques-uns.

Monsieur Breton, le latin et le grec vous paraissent absolument fondamentaux : ils le sont pour nous aussi, et c’est la raison pour laquelle nous les offrons à tous les collégiens et pas seulement à 20 % d’entre eux. Monsieur Breton, le bilinguisme vous apparaît indispensable dans le monde actuel : vous avez raison, et c’est pourquoi, plutôt que de réserver l’enseignement de deux langues vivantes à 15 % des collégiens, nous l’ouvrons à 100 % d’entre eux, dès la classe de cinquième.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Bien plus, le nouveau collège permettra aux enfants de bénéficier d’un accompagnement personnalisé de trois heures par semaine en sixième, de la possibilité de travailler en petits groupes…

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

…pour approfondir leurs connaissances, de dédoublements de classes, de l’interdisciplinarité, de la maîtrise de l’oral et de la réussite !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Philippe Gomes, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le Premier ministre, les Calédoniens doutent. Ils doutent du respect de l’équidistance entre indépendantistes et non-indépendantistes que votre gouvernement a érigé en l’alpha et l’oméga de sa politique calédonienne. La manifestation qui a eu lieu récemment à l’occasion de la venue du président de l’Assemblée nationale en Nouvelle-Calédonie l’a illustré.

Les Calédoniens doutent parce que, contrairement aux conclusions du dernier comité des signataires, le projet de loi organique qui sera examiné prochainement par notre assemblée est discriminatoire. Exception faite des Calédoniens qui ont voté lors du référendum sur l’accord de Nouméa, ce projet prévoit exclusivement l’inscription d’office des Calédoniens de statut civil coutumier, et non celle des natifs issus des autres communautés. Comment peut-on, dès lors, parler de destin commun dans le cadre de l’accord de Nouméa ?

Les Calédoniens doutent, parce que la question de la radiation de ceux qui sont arrivés avant 1998 n’est toujours pas traitée au fond. L’interprétation littérale des textes par la Cour de cassation, que vous avez rappelée lors d’une précédente réponse, n’est pas du tout conforme à l’esprit du législateur constituant. Toutes les interventions, qu’elles soient le fait de la droite ou de la gauche, lors du débat sur ce sujet au Parlement, en témoignent.

Ma question est double. D’une part, ces deux sujets majeurs pour l’avenir de notre pays seront-ils inscrits à l’ordre du jour du comité des signataires extraordinaire qui doit se tenir à la fin du mois ou au début du mois de juin ? D’autre part, vous engagez-vous solennellement devant la représentation nationale à faire en sorte que la politique menée par votre gouvernement en Nouvelle-Calédonie ne favorise pas une sensibilité au détriment d’une autre ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

Monsieur le député, la définition du corps électoral pour la consultation relative à l’accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté, qui interviendra au plus tard au deuxième semestre 2018…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

… est une question centrale, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire ici même. La manifestation qui s’est tenue à Nouméa le 24 avril dernier, à laquelle vous faisiez référence, atteste de la grande sensibilité, dont vous vous faites l’écho, des Calédoniens à ce sujet.

Le président Claude Bartolone a fait oeuvre utile en se rendant sur place à la tête d’une délégation parlementaire associant députés de la majorité et de l’opposition, qui comprenait notamment le président de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas, et je l’en remercie. Il m’a fait part des échanges qu’il a eu à cette occasion – je ne trahis pas un secret en disant qu’il m’a même appelé de Nouméa.

S’agissant des conditions et des modalités d’inscription sur la liste électorale spéciale en vue de la consultation, tous les partenaires souhaitent que cette inscription soit la plus facile possible pour les personnes appelées à participer au scrutin. Dans le même temps, il faut s’assurer que toutes les conditions juridiques du respect de l’accord de Nouméa, de valeur constitutionnelle, sont bien réunies.

Le Gouvernement a déposé un projet de loi organique qui sera examiné au Sénat à la fin du mois de juin prochain. Le Congrès de Nouvelle-Calédonie a émis dans ce cadre un avis très intéressant dans lequel il propose une série d’amendements. Le Gouvernement a déjà fait savoir qu’il se montrerait ouvert à l’égard de certaines de ces propositions. Le temps qui nous sépare de l’examen en séance doit nous permettre de travailler ensemble sur ces sujets dans la sérénité et dans la confiance.

Pour cela, le Gouvernement propose que, suite aux discussions qui ont eu lieu en présence du président de l’Assemblée nationale, une réunion se tienne à Paris dans les tout premiers jours du mois de juin, sous la forme d’un comité des signataires exceptionnel, dont l’ordre du jour doit encore faire l’objet de discussions. J’ai d’ailleurs demandé au haut-commissaire de préparer cette rencontre, de sorte qu’elle soit la plus fructueuse possible.

La Nouvelle-Calédonie – et je sais que vous partagez cette conviction – ne doit pas redevenir un enjeu de politique politicienne, et encore moins une raison de se déchirer, ici pas plus que là-bas. J’appelle donc tous les partenaires à se hisser à la hauteur des enjeux. L’État et le Gouvernement respecteront strictement l’esprit des accords de Nouméa et favoriseront à chaque fois le dialogue pour que nous trouvions ensemble – j’insiste sur ce point – la bonne solution pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie : n’en doutez pas un seul instant, monsieur le député.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt.

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L’ordre du jour appelle les explications de vote au nom des groupes et le vote par scrutin public sur l’ensemble du projet de loi relatif au renseignement (nos 2669, 2697, 2691).

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La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le rapporteur, chers collègues, ce projet de loi intervient dans un contexte lourd et exceptionnel que chacun mesure. Face aux menaces aussi bien internationales qu’intérieures, notre détermination pour combattre le terrorisme est sans faille. Les députés du Front de gauche ont toujours affirmé que le terrorisme, sous toutes ses formes, où qu’il se produise et quels qu’en soient les responsables, devait être fermement combattu. Nous ne sommes donc pas opposés au renforcement de la politique du renseignement.

Au contraire, nous partageons pleinement la volonté du Gouvernement d’offrir un cadre légal général aux activités des services de renseignement qui permettent de connaître et de prévenir les menaces pesant sur notre pays et sa population. Mais, précisément parce que l’enjeu est grave, il convient de refuser la précipitation.

Nous déplorons le recours à la procédure accélérée, alors même qu’il s’agit d’adopter des mesures par définition attentatoires aux libertés individuelles et dérogatoires au droit commun. Cette procédure d’urgence n’est pas à la hauteur de l’enjeu.

Surtout, nous refusons de céder à la tentation du tout sécuritaire et nous sommes très vigilants quant au respect des libertés individuelles. C’est pourquoi nous avons, durant la discussion en séance, exposé nos inquiétudes et proposé des amendements tendant à encadrer le recours à des techniques de renseignement très intrusives, pour des motifs étendus et souvent flous, dans des domaines qui dépassent largement la lutte contre le terrorisme.

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Ces inquiétudes sont largement partagées. De la CNIL au conseil national du numérique, en passant par le président de la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité – CNCIS –, Jean-Marie Delarue, du syndicat de la magistrature à l’Ordre des avocats de Paris en passant par le juge antiterroriste Marc Trévidic, de La Quadrature du Net à Amnesty International : tous dénoncent une extension préoccupante de la surveillance. Jusqu’au commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, qui s’émeut d’une « approche exclusivement sécuritaire ».

Malheureusement, l’examen du texte en séance n’a pas permis de lever ces inquiétudes. Très peu d’améliorations ont été apportées et tous nos amendements ont été rejetés tandis que les principales dispositions ont été maintenues.

Ainsi, le texte prévoit-il toujours de renforcer l’arsenal des services de renseignement par une légalisation des pratiques illégales existantes, sans intensifier le contrôle de leurs activités – pose de balises GPS pour suivre des véhicules, intrusion dans des lieux privés, utilisation de matériel très sophistiqué comme les logiciels-espions et les IMSI-catchers.

Il tend également à étendre le domaine du renseignement, qui dépasse largement le champ de la lutte contre le terrorisme. De nouveaux motifs d’action et une rédaction plus extensive des missions anciennes conduisent à un élargissement inquiétant du domaine d’intervention des services de renseignement.

Il organise, par ailleurs, une surveillance massive du trafic internet, analysé par un algorithme secret-défense. Il place le dispositif entre les mains de l’exécutif, évitant le contrôle par le juge judiciaire de mesures pourtant gravement attentatoires aux libertés individuelles. Enfin, le contrôle des dispositifs mis en place est insuffisant car l’instauration d’une commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la CNCTR, censée prendre la suite de la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, n’est qu’un leurre. De l’aveu de Jean-Marie Delarue, le président de l’actuelle CNCIS, cette nouvelle commission sera incapable de contrôler effectivement, et même a posteriori, les services secrets.

En définitive, nous considérons qu’au terme de l’examen de ce texte, l’équilibre entre le renforcement de la politique du renseignement et le strict respect des libertés individuelles n’est pas atteint. Comme le souligne François-Bernard Huyghe, directeur de recherche à l’institut de relations internationales et stratégiques : « Le problème n’est pas d’être pour telle proportion de liberté ou de sécurité : la finalité de toute prévention et répression est de garantir nos libertés contre ceux qui exercent des violences réelles. Sinon elles sont contre-productives en fournissant des arguments aux ennemis de nos démocraties. »

Aussi, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, chers collègues, réfutons-nous tous propos opérant une dichotomie manichéenne entre « ceux qui ont le sens de l’État et ceux qui, parfois, ne l’ont pas ».

Les députés du Front de gauche ont « le sens de l’État », « le sens de l’État de droit ». Aussi voteront-ils contre ce texte qui porte de graves atteintes aux libertés individuelles. Je sais que ce vote sera partagé par de nombreux autres députés sur les différents bancs, notamment ceux de la gauche.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.

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La parole est à M. Pascal Popelin, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Au moment de nous prononcer sur ce projet de loi relatif au renseignement, nombre d’entre nous ont en tête la célèbre formule de Benjamin Franklin selon laquelle « un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité, ne mérite ni l’un ni l’autre et finit par perdre les deux ». Ceux qui ont réfléchi, conçu, élaboré, puis discuté et amendé ce texte, se sont pleinement imprégnés de cet état d’esprit.

Notre droit avait besoin d’une loi traitant de la question du renseignement. Peu le contestent, parce que l’existence de règles claires est une garantie de liberté, en cette matière comme dans beaucoup d’autres, parce que notre pays est l’un des derniers à n’en pas disposer.

De ce retard, nous nous sommes efforcés de faire un atout : puisque nous figurons parmi les dernières grandes nations à légiférer en matière de renseignement, nous avons pu emprunter ce qu’il y avait de plus solide dans les législations étrangères, nous placer dans le haut des standards en matière de protection des libertés, nous inspirer de la jurisprudence désormais conséquente de la Cour européenne des droits de l’Homme sur le sujet. Légiférer, c’est faire entrer l’État de droit là où les fantasmes l’attendent le moins.

Les techniques d’écoute, de sonorisation, de géolocalisation, les algorithmes et autres Imsi-catchers existent. Leur usage est largement répandu, par des États, démocratiques ou pas, amis ou non, mais aussi malheureusement par des individus animés de motivations très éloignées de l’intérêt général, que leurs intentions soient simplement commerciales, économiques ou dramatiquement criminelles. Qui peut imaginer raisonnablement un monde débarrassé de ces pratiques, fussent-elles interdites par toutes les dispositions possibles et imaginables ?

Notre propos, par cette loi, consiste à fixer le cadre dans lequel une République telle que la France, pour défendre ses intérêts, pour protéger les Français, donc pour des motifs d’intérêt général précis, peut recourir à de telles techniques, de manière encadrée, contrôlée et sanctionnée en cas de manquement à ce corpus de règles.

Tel a été tout l’objet du long débat parlementaire qui s’est déroulé en commission puis en séance, à partir d’un projet gouvernemental mûri de longue date et déjà lui-même très largement inspiré de cette philosophie de protection des libertés.

C’est ainsi que nous avons précisé les finalités de la politique du renseignement de manière à ne laisser aucune place aux interprétations trop extensives et donc potentiellement abusives. Toutes les notions contenues dans la loi ont désormais une portée claire, que le travail de l’actuelle commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité – CNCIS – a contribué à calibrer depuis 1991.

C’est ainsi que nous avons renforcé les dispositifs de contrôle, en étendant notamment les prérogatives de la future commission nationale de contrôle des techniques de renseignement – CNCTR –, tant dans son rôle de conseil du Gouvernement que dans sa fonction de signalement des éventuels manquements aux règles édictées. De ce point de vue, la CNCTR aura incontestablement davantage de pouvoirs que l’actuelle CNCIS. Là où la loi de 1991 était extrêmement avare en matière de prérogatives, ce texte est au contraire prolixe.

C’est ainsi que nous avons clarifié les modalités de saisine du Conseil d’État et renforcé les règles déontologiques, grâce en particulier à la création d’un statut de lanceur d’alerte pour tout agent des services de renseignement. Du fait de la question préjudicielle, le secret défense ne sera plus un obstacle pour le juge administratif, ni pour le juge civil ou pénal.

D’autres étapes permettront sans doute d’améliorer ce projet de loi avant son adoption définitive. Pour qu’aucun doute ne subsiste avant son entrée en vigueur, le Président de la République a pris l’engagement de saisir lui-même le Conseil constitutionnel avant de le promulguer.

Au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen, j’appelle donc l’ensemble de la représentation nationale à voter en faveur de ce texte nécessaire qui, en dépit de tous les commentaires dont il fait l’objet, marque un réel progrès pour notre État de droit.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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La parole est à M. Éric Ciotti, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la garde des Sceaux, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le vote de ce projet de loi relatif au renseignement intervient dans un contexte où notre pays se trouve confronté à une menace terroriste d’une ampleur et d’une intensité inédites. La France est une cible, peut-être la première au monde. Les terroristes islamistes s’attaquent et se sont attaqués frontalement aux valeurs fondamentales de notre République et aux symboles essentiels de notre pays.

Hier, la menace était externe. Aujourd’hui, elle provient également de l’intérieur de nos frontières, de personnes socialisées et éduquées en France. Le nombre d’apprentis terroristes ne cesse hélas de croître. Plusieurs milliers de personnes – M. Le Premier ministre a cité le nombre de cinq mille individus – sont actuellement engagées de près ou de loin dans la mouvance terroriste et représentent une menace pour notre pays. Du temps des filières afghane ou pakistanaise, quelques dizaines de personnes – une cinquantaine tout au plus – devaient être chaque année surveillées par nos services de renseignement. Aujourd’hui, je le répète, ce sont plusieurs milliers de personnes qui sont engagées, de près ou de loin, dans la mouvance terroriste.

Nos services de renseignement et nos forces de l’ordre accomplissent un travail remarquable que je veux ici saluer et qui a permis de déjouer plusieurs dizaines d’attentats depuis le 11 septembre 2001, date à laquelle notre monde a basculé – même si depuis lors, je souligne que 102 Français ont péri victimes du terrorisme, en France et à l’étranger.

Cependant, le cadre légal, technique et logistique de l’activité de ces services est désormais inadapté, voire dépassé. Chers collègues, il est de notre devoir et de notre responsabilité de mieux protéger notre pays et d’adapter notre arsenal législatif à des actions terroristes en perpétuelle mutation.

Ce texte y contribuera utilement. C’est pour cela qu’il ne mérite ni excès d’honneur, ni excès d’indignité. Ce projet de loi est nécessaire, même s’il n’est pas suffisant. Il est insuffisant car la France, monsieur le Premier ministre, aurait eu besoin d’une véritable loi-cadre et d’une véritable loi de programmation de lutte contre le terrorisme, qui aurait notamment contenu un volet budgétaire, ainsi qu’un volet judiciaire qui fait ici cruellement défaut.

Ainsi, ce texte n’aborde pas la question des djihadistes de retour sur notre territoire, alors qu’ils font peser un risque évident sur la sécurité de nos concitoyens. Ainsi, vous refusez toujours la création de véritables centres de rétention et d’un dispositif de placement obligatoire.

Si ce texte est insuffisant, il est néanmoins nécessaire, car il dote d’un cadre légal des activités de renseignement déjà existantes. Ce projet de loi offrira en effet des outils pertinents et réclamés de longue date par les services de renseignement : interceptions de sécurité, accès administratif aux données de connexion, captation, transmission et enregistrement de sons ou d’images.

De plus, les débats en commission puis dans l’hémicycle ont permis d’en améliorer substantiellement le contenu. Je pense à la disposition consistant à inclure le ministère de la justice et de l’administration pénitentiaire dans le périmètre du recueil du renseignement, qu’a proposée notre collègue Guillaume Larrivé.

Tout au long des débats, pourtant, certains orateurs ont exprimé des inquiétudes concernant la protection des libertés individuelles. Il convient de les entendre et d’y répondre. Nous avons apporté des améliorations ; d’autres devront l’être encore. Le texte prévoit ainsi un encadrement strict des techniques de renseignement pour atteindre un juste équilibre. La commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la CNCTR, exercera un contrôle très clair, et un contrôle juridictionnel sera confié au Conseil d’État.

Monsieur le Premier ministre, chers collègues, nous avons toujours pensé que la guerre contre le terrorisme nécessitait de dépasser les clivages politiques.

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Nous n’aurons jamais la même attitude indigne que celle de certains lors de l’affaire Merah, ne l’oublions pas !

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Nous considérons cependant qu’il est de notre devoir de responsables politiques de mieux protéger notre pays. Il va de soi que le risque zéro n’existera jamais, mais la sécurité de nos concitoyens impose une détermination sans faille pour limiter au maximum le niveau de risque.

C’est la raison pour laquelle le groupe UMP, à l’invitation de son président Christian Jacob, prendra ses responsabilités en soutenant très majoritairement ce projet de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Sur l’ensemble du projet de loi, le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Michel Zumkeller, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, notre société a connu en vingt ans des évolutions technologiques majeures. Or, depuis la loi du 10 juillet 1991, notre législation n’a été modifiée qu’à la marge. Les criminels, les terroristes, les services de renseignement étrangers et les agences privées disposent de moyens de communication et de technologies sans commune mesure avec ce que la législation actuelle prévoit pour les contrecarrer.

Le renseignement est un acte de souveraineté par excellence. La mise en place d’un cadre législatif et réglementaire nouveau est donc nécessaire si nous voulons asseoir juridiquement des méthodes et des pratiques déjà mises en oeuvre.

Pour autant, nous ne légiférons pas pour six mois, ni même pour deux ans, ni uniquement en réaction aux attentats de janvier. Lorsque ces dispositions seront inscrites dans notre droit, elles y demeureront par-delà les alternances. À ce titre, mes chers collègues, nous devons rester prudents et vigilants.

Tout l’enjeu de ce texte réside dans l’équilibre entre l’encadrement de l’activité des services, les moyens que nous entendons leur donner pour garantir notre sécurité et la préservation des libertés individuelles. La protection des libertés est devenue un sujet d’autant plus sensible que les techniques progressent et se font de plus en plus invasives. Le débat en séance publique a permis d’inscrire – à notre initiative, notamment – la protection des données personnelles dans le texte. Nous nous en félicitons, mais il ne suffit pas d’édicter des principes. Le recours aux techniques de renseignement doit être strictement encadré, assorti des garanties nécessaires et de mécanismes de contrôle, en amont comme en aval.

Peut-on, à l’issue de cette première lecture, parler d’un texte équilibré ? En premier lieu, le champ des intérêts publics permettant de recourir au renseignement demeure trop large. Nous parlons d’intérêts majeurs de la politique étrangère, de violences collectives et, une nouvelle fois, de prévention de la criminalité et de la délinquance organisées – autant de termes qui couvrent peu ou prou le champ de la vie nationale. Devant l’immensité de ce champ, la commission doit être réellement en mesure de contrôler l’activité des services.

En deuxième lieu, la procédure d’urgence, si elle a évolué à plusieurs reprises, écarte toujours à ce stade l’avis préalable de la commission. Nous le regrettons, car cette situation laissera le Premier ministre seul juge de la mise en oeuvre des interceptions. Le texte aurait pu instaurer un régime d’astreinte garantissant le contrôle de la commission. C’est une proposition qui nous semblait concrètement réalisable.

S’agissant des algorithmes, qui constituent une technique de renseignement particulièrement intrusive ayant à juste titre occupé une part importante des débats, des garanties ont été apportées : l’autorisation ne peut être délivrée que pour une durée de quatre mois renouvelable, le champ technique de la mise en oeuvre de la mesure est limité aux éléments strictement nécessaires à la détection d’une menace terroriste, la disposition ne s’appliquera que jusqu’en 2018 et il ne sera pas possible de lui appliquer la procédure d’urgence.

Enfin, concernant la question primordiale du contrôle de l’utilisation de ces techniques, nous avions deux principales propositions : d’une part, ouvrir à la CNIL l’accès à tous les fichiers de la police et, d’autre part, centraliser les données collectées en un même lieu afin que la commission puisse effectuer son travail de contrôle dans les meilleures conditions. Si nous n’avons pas été entendus sur ces points, force est de reconnaître que le contrôle a néanmoins été amélioré au fil des débats.

Grâce à l’adoption d’un amendement UDI, la commission disposera d’un accès permanent aux autorisations, relevés, registres, données collectées, transcriptions et extractions. Elle contrôlera en outre les dispositifs de traçabilité des renseignements collectés mis en oeuvre par chaque service, ainsi que tous les locaux dans lesquels s’exerce la centralisation des renseignements collectés.

Deux autres avancées sont également à souligner. D’une part, la composition de la commission a été modifiée : la présence de six parlementaires permet de renforcer le contrôle démocratique de l’utilisation de ces techniques. D’autre part, une procédure spécifique sera applicable aux magistrats, aux avocats, aux parlementaires et aux journalistes. Cela correspond également à une demande du groupe UDI.

Mes chers collègues, estimant que des garanties suffisantes ont été établies afin de concilier la préservation des libertés avec l’encadrement des activités de renseignement, le groupe UDI se prononcera majoritairement en faveur de ce texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

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La parole est à M. Alain Tourret, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Manuel Valls, Premier ministre

C’est Clemenceau qui monte à la tribune !

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, chers collègues, la France n’a que rarement aimé sa police. Elle a toujours ignoré le renseignement et les services. Au Royaume-Uni, les relations avec le MI-5 sont une affaire de gentlemen ; en France, on parle de barbouzes sur lesquels planent les ombres de Joseph Fouché et de Charles Pasqua.

Murmures sur les bancs du groupe UMP.

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Le renseignement serait donc une pieuvre qui s’attaque à toutes nos libertés : celle d’aller et venir, celle d’avoir un domicile inviolable, celle de tenir une conversation secrète. Chacun téléphone à toute heure de la journée sans même savoir s’il est ou sera localisé, s’il est ou sera identifié !

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Intellectuels et avocats, journalistes et actrices, toute notre élite vomit le renseignement ! Il suffit pour s’en convaincre de lire l’entretien donné par le bâtonnier de Paris, qui parle d’un mensonge d’État et d’un fourre-tout dans lequel domine l’arbitraire – excusez du peu, pour quelqu’un qui est tout de même encore l’un de mes confrères !

Les réserves de la commission nationale consultative des droits de l’homme sont paradoxalement soutenues par des personnalités provenant de l’extrême-droite,…

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Le bâtonnier de Paris est-il donc d’extrême-droite ?

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…de l’extrême-gauche et même de l’extrême-centre ! Elles sont aussi appuyées par le Front national, trop heureux, telle une Vénus effarouchée, de jouer le défenseur des libertés après avoir essayé de se faire le chantre de la laïcité ! On croirait rêver, monsieur le Premier ministre, en entendant Mme Le Pen parler de texte liberticide !

On peut certes écouter les positions divergentes ; on peut aussi et surtout reconnaître et accepter le fait que la République est menacée et que la sécurité est certainement la première des libertés. On peut également espérer trouver un large consensus grâce à un texte enrichi par des amendements qui ont renforcé les garanties nationales de contrôle des techniques de renseignement.

Le principe de proportionnalité entre les dangers encourus par la société et les atteintes à la liberté individuelle a été fort justement respecté, monsieur le rapporteur.

À pouvoirs renforcés, contrôles renforcés ! Voilà ce que n’ont cessé de rappeler le Premier ministre, le ministre de l’intérieur et le président de la commission des lois mais aussi, je dois le dire, les responsables de l’UMP. Ils ont raison ! il est vrai que cette loi ne s’applique pas qu’au terrorisme.

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Elle s’applique aussi à la criminalité organisée et au piratage industriel et économique de nos entreprises. Nous devons protéger nos entreprises, y compris contre nos meilleurs alliés, qu’ils soient allemands ou américains. La bataille pour l’emploi passe également par la loi sur le renseignement ! Encore faudrait-il que la France – c’est vous, monsieur le Premier ministre, qui êtes interpellé – s’applique à elle-même ce qu’elle demande à ses alliés et aux autres nations !

Faut-il réserver au Président de la République le droit de saisir le Conseil constitutionnel – qui n’est pas le Conseil d’État et n’a aucun avis à donner puisqu’il ne peut in fine qu’annuler telle ou telle partie du projet de loi ?

Il sera sans doute opportun, et je le dis au Président de l’Assemblée nationale, que les députés saisissent tous le Conseil constitutionnel, faute de quoi on en viendra à soutenir que seul l’exécutif présidentiel protège les libertés fondamentales… Or les libertés fondamentales sont d’abord le lot et la liberté chérie des députés !

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Le groupe RRDP, les radicaux et leurs alliés voteront unanimement un texte opportun et indispensable qui renforce la sécurité des Français au moment où celle-ci est gravement menacée. Ils sont convaincus que ce texte – qui devra, monsieur le Premier ministre, faire l’objet d’une procédure de revoyure – ménage les libertés, dans une période troublée, protège nos intérêts économiques, et surtout, mes chers collègues, assure la paix de la République.

Applaudissements sur divers bancs.

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La parole est à M. Sergio Coronado, pour le groupe écologiste.

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Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur et cher président de la commission des lois, nous avons tous, dans cet hémicycle, éprouvé la même émotion vive et profonde lors des attentats de janvier dernier. Néanmoins cette émotion ne peut être notre seule boussole au moment où nous légiférons.

La nécessité d’un encadrement de l’activité des services de renseignement n’est dans cette assemblée nullement contestée. La France accuse en effet un important retard par rapport aux autres démocraties occidentales. Nos services de renseignement disposent de moyens juridiques morcelés, issus d’une lente sédimentation de dispositions législatives sans cadre général.

La nécessité de légiférer est donc une réalité. Mettre un terme aux pratiques illégales, offrir un cadre normatif opérationnel et respectueux des libertés : telle est notre mission.

Mais cette nécessité ne justifie aucunement le recours à la procédure accélérée. Pourquoi préférer au grand débat citoyen et parlementaire une discussion et un vote au pas de charge ?

Un travail législatif de qualité suppose, comme l’a si souvent rappelé le président de la commission des lois, de consacrer à l’élaboration de la loi un temps suffisant, permettant un dialogue constructif avec la représentation nationale, avec l’ensemble des composantes de la société. Il s’agit d’éclairer les politiques publiques à venir et de travailler en toute sérénité, loin de l’emprise de l’émotion et sans précipitation.

Ce n’est que quelques mois après l’entrée en vigueur de la loi de 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, consécutives à l’affaire Nemmouche, et peu après deux autres lois de 2012 et 2013, consécutives à 1’affaire Merah, que nous avons débattu du texte sur le renseignement.

« Il s’agit d’encadrer les activités de renseignement », a martelé le Gouvernement, « et de légaliser des pratiques illégales mais tout à fait courantes » – sans pour autant se donner la peine d’évaluer l’efficacité de ces pratiques, ni de présenter, dans une étude d’impact succincte et d’une pauvreté manifeste, le moindre chiffrage de la mise en place des modalités techniques du recueil du renseignement ; sans s’interroger sur les conséquences économiques des dispositions proposées sur l’industrie numérique ; sans, enfin, analyser les dysfonctionnements et les échecs des services de renseignement dans la lutte contre le terrorisme.

Ce texte suscite débats, inquiétudes et critiques, dans cet hémicycle comme dans la société. On ne peut les balayer d’un simple revers de main par la simple invocation des impératifs de sécurité. Car ce texte concerne tout autant notre sécurité que nos libertés fondamentales, notre vie privée même. Il touche des pans très larges de la vie sociale, économique et politique, et jusqu’à la présence française dans le monde. Il encadre – certes pas suffisamment – et autorise aussi l’intrusion, la surveillance, le fichage, de manière trop large et pas uniquement dans le but de prévenir la menace terroriste.

Il va bien au-delà puisqu’il permet aux services de renseignement de recourir à des techniques de recueil d’information à la fois de grande ampleur et très intrusives pour la défense et la promotion des intérêts économiques, industriels et scientifiques du pays. Pour prévenir des atteintes à la forme républicaine des institutions, il autorise d’autres services que ceux du renseignement à recourir à ces mêmes techniques. Il assigne à l’administration pénitentiaire, contre la volonté même du Gouvernement, des missions qui lui étaient jusqu’à présent étrangères. Il met en place la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, dont l’avis n’est que consultatif et qui pourra être contournée en cas d’urgence, sans que l’urgence elle-même ne soit définie.

Le recours pour tout citoyen voulant contester des opérations de surveillance dont il serait l’objet est pour le moins virtuel et disparaît de fait lorsqu’il s’agit de communications avec l’étranger. Le texte habilite le recours à des techniques – sondes, algorithmes, IMSI-catchers – permettant la collecte de données d’une très grande ampleur sur les réseaux de communication, puisque c’est l’ensemble du trafic qui sera concerné : « Il s’agit de permettre de collecter de manière systématique, généralisée et indifférenciée un volume important de données, qui peuvent, le cas échéant, être relatives à des personnes totalement étrangères à la mission du renseignement ».

Les services de renseignement pourront utiliser des techniques intrusives pour récupérer les données techniques de connexion, de manière exceptionnelle, sans que soit définie l’exception, sans aucune précaution particulière, et sans limitation à la seule menace terroriste ; des correspondances pourront être également recueillies.

Nul ne vous accuse ici, monsieur le Premier ministre, de vouloir mettre en place une surveillance de masse, mais ce texte autorise des techniques qui permettent une surveillance de l’ensemble des activités sociales. L’article 10 introduit une forme d’immunité pénale tout à fait contestable pour les agents opérant à l’étranger.

Le texte rallonge en outre sans justification la durée de conservation des données. Il crée un « fichier terroriste » dont les dispositions n’ont été connues des parlementaires que la nuit précédant son adoption.

Imaginons un instant, monsieur le Premier ministre, ce qu’un autre gouvernement que le vôtre pourrait faire de ce si grand pouvoir que vous octroie aujourd’hui ce texte.

Pour les raisons que je viens de présenter, la grande majorité des députés du groupe écologiste a décidé de voter contre ce projet de loi.

Le débat au sein de notre groupe n’a pas opposé d’un côté des chipoteurs et de l’autre des liberticides, des inconscients contre des patriotes. Il a réuni des parlementaires conscients de la responsabilité qui leur incombe d’assurer à la fois la sécurité de nos concitoyens, la défense de leurs libertés fondamentales, et la protection de leur vie privée dans le respect de l’État de droit.

Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants: 566 Nombre de suffrages exprimés: 524 Majorité absolue: 263 Pour l’adoption: 438 contre: 86 (Le projet de loi est adopté.)

La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de M. David Habib.

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L’ordre du jour appelle le débat sur le rapport du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation du réseau culturel de la France à l’étranger. La conférence des présidents a organisé ce débat en deux phases.

Nous entendrons d’abord les orateurs des groupes puis le Gouvernement et procéderons ensuite à une séance de questions-réponses.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jérôme Lambert, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la France occupe dans le monde une place singulière. Alors qu’il compte quelque soixante-cinq millions d’habitants, soit moins de 1 % de la population mondiale, notre pays figure parmi les nations économiquement les plus puissantes. À quoi devons-nous cette situation ? Sans conteste à la force de nos entreprises, à leur capacité d’adaptation à l’environnement européen et mondial et à l’innovation dont font preuve nos centres de recherches publics et privés, mais nous la devons aussi à la place singulière qu’occupe encore dans le monde la culture française, c’est-à-dire au rayonnement des idées promues par la France au cours de son histoire. Sans cet état de fait que vient soutenir la langue française, la France n’occuperait pas une telle place dans le monde.

C’est pourquoi nous devons porter une attention toute particulière aux politiques mises en oeuvre afin que cette situation perdure et même se développe dans le monde de demain. Cet aspect de la politique étrangère de la France fait l’objet d’un rapport fort intéressant du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation du réseau culturel de la France à l’étranger. C’est à la demande du groupe RRDP que nous en examinons en séance publique les conclusions afin de nous assurer, compte tenu du caractère fondamental des enjeux, que le Gouvernement prendra toute la mesure des moyens à mettre en oeuvre aujourd’hui et demain pour conserver à la France, au moyen de sa diplomatie culturelle, son rayonnement intellectuel et la valorisation de son expertise.

Rappelons en quelques mots le dispositif français en la matière. Quatre ministères sont concernés, les affaires étrangères, l’éducation nationale, l’enseignement supérieur et la recherche et la culture et la communication, sans oublier les secrétariats d’État qui leur sont associés au premier plan desquels figure le vôtre, madame la secrétaire d’État Girardin, car chacun sait l’attention que vous portez à ce sujet. En fin de compte, de nombreux intervenants politiques sont responsables de ce sujet d’importance. Ils sont chargés de la gestion de plusieurs agences nationales sectorielles telles que l’Institut français, Campus France, France expertise international et l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger. Mais tout cela ne serait rien ou presque sans le relais et l’apport des réseaux locaux publics et privés que constituent les 161 services de coopération et d’action culturelle de toutes nos ambassades car notre réseau diplomatique demeure le troisième au monde juste après ceux des États-Unis et de la Chine.

Ces services, dont une centaine jouissent du statut d’établissement à autonomie financière, sont complétés par vingt-sept instituts français de recherche à l’étranger. Le réseau privé est aussi très important et joue un rôle complémentaire essentiel par le biais des Alliances françaises représentées dans 136 pays. Cette influence sur laquelle la France peut fonder toutes sortes de relations avec les pays tiers est aujourd’hui de plus en plus concurrencée par plusieurs nations ayant bien compris l’intérêt que présente ce domaine d’action. Nos concurrents sont traditionnellement les États-Unis, qui diffusent largement leur influence intellectuelle et culturelle, mais aussi l’Allemagne dans le cadre des 149 Goethe Institut qu’elle possède dans le monde et bien entendu la Grande-Bretagne qui dispose de 191 bureaux répartis dans 110 pays. Outre ces concurrents traditionnels, de nouveaux pays font preuve d’une très grande capacité à développer leur politique culturelle dans le monde, en particulier la Chine qui, en dix ans à peine, a implanté 435 Instituts Confucius sur tous les continents.

Tel est le contexte général dans lequel notre pays doit mener à bien sa politique culturelle à l’étranger, orientée pour l’essentiel par les crédits du programme budgétaire « Diplomatie culturelle et d’influence » dont nous constatons et malheureusement déplorons, compte tenu des enjeux, qu’ils sont en forte diminution depuis 2013, même si l’année 2015 semble constituer un palier dans la diminution. Est-ce parce que nous avons atteint le point bas ? J’espère en tout cas que les moyens de la politique d’influence, essentielle au rayonnement de notre pays, retrouveront de la vigueur et le plus rapidement sera le mieux ! Notons, pour nous en féliciter, que le nombre d’étudiants étrangers inscrits en master ou doctorat va croissant depuis 2012 pour atteindre 133 000 cette année, la France se classant en la matière au troisième rang mondial des pays d’accueil d’étudiants étrangers.

La part consacrée au financement de l’enseignement français est très importante car essentielle. Près de 300 millions de personnes sont francophones, réparties dans une trentaine d’États sur les cinq continents. Le français est l’une des rares langues à être enseignée dans presque tous les systèmes éducatifs du monde. Son statut de langue internationale reconnu officiellement à l’ONU, au Comité olympique et dans toutes les organisations internationales lui confère une place importante. C’est pourquoi les efforts entrepris par la France pour le développement de l’enseignement du français représentent 57 % des crédits alloués à la coopération culturelle, l’attractivité et la recherche internationales. Depuis quelques années, à la suite de la réforme initiée par la loi du 27 juillet 2010, une rationalisation des outils mis en oeuvre pour mener ces politiques a été entreprise. En pratique, les résultats s’avèrent modestes. Le nombre d’opérateurs dont dépend la visibilité de l’action de la France a peu diminué et les expérimentations de regroupement d’opérateurs décidées par la loi ont été interrompues en raison de l’incertitude des bénéfices escomptés et de l’importance du coût de leur mise en oeuvre.

C’est pourquoi le rapport d’évaluation arrive à point nommé. Il s’articule autour de sept points principaux, au premier rang desquels la nécessité d’adapter l’action géographique en fonction des publics visés et des outils mobilisés afin d’éviter de plaquer sur des situations distinctes des politiques similaires contre-productives. Suit la nécessité de renforcer l’attractivité du système éducatif français en vue d’en faire un outil d’influence meilleur encore. Le rapport préconise également le développement de la coopération scientifique et technique dans les pays qui sont un enjeu pour le nôtre et souligne la nécessité de rationaliser l’offre culturelle car la France participe chaque année à quelque 50 000 manifestations culturelles dans le monde, soit cinq fois plus que le Goethe Institut et vingt fois plus que le British Council. Il faut éviter autant que possible le saupoudrage tout en maintenant une présence souvent fort appréciée et mieux travailler à l’échelon interministériel afin de renforcer le pilotage stratégique et améliorer sa mise en oeuvre.

Enfin, nous devons trouver toujours plus de moyens afin de développer les synergies locales autour des acteurs français et de nos partenaires, en particulier les Alliances françaises, dans le cadre des conseils de l’influence française réunis autour de nos ambassadeurs. Telles sont quelques-unes des pistes suggérées par le rapport dont je mesure la pertinence en espérant qu’il ne restera par lettre morte, comme l’a été en grande partie la loi du 27 juillet 2010. Tel est le grand défi que nous devons relever car la France sera toujours la France tant qu’elle conservera un rôle important dans le monde en sachant profiter des synergies culturelles !

Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.

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Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je salue tout d’abord le travail de mes collègues François Loncle et Claudine Schmid, auteurs du rapport d’information sur l’évaluation du réseau culturel de la France à l’étranger dans le cadre du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques. Il convient de signaler d’emblée qu’on a parfois tendance, à l’heure de la diplomatie économique, à oublier que la présence française à l’étranger repose pour l’essentiel sur deux grands piliers, le réseau éducatif français qui compte environ 500 établissements dans le monde et le réseau des Alliances françaises qui compte plus d’un millier d’établissements et constitue le coeur même de notre présence culturelle et notre rayonnement à l’étranger. La France doit certes demeurer une puissance d’influence au service du redressement économique de notre pays mais la France doit surtout avoir pleinement conscience de l’importance de la culture dans sa diplomatie d’influence. Défendre et promouvoir la langue et la culture françaises doit constituer le coeur de cette politique.

Sa diplomatie d’influence doit être au service d’une diplomatie européenne afin de favoriser l’émergence d’une Europe plus solidaire et oeuvrer à une meilleure gouvernance de la planète ayant l’enjeu climatique pour priorité à l’heure de l’accueil de la COP 21. Or le dispositif français, qui comporte plusieurs agences réparties entre un réseau public et le réseau privé des alliances françaises, demeure complexe, dispersé et encore mal coordonné. Il est parfois le fruit de réformes avortées ou inabouties comme c’est malheureusement le cas de l’Institut français. Il est tout aussi regrettable que réformes et restructurations s’accumulent sans que soient proposés des changements de fond alors que les financements diminuent régulièrement. Des réductions budgétaires sont appliquées à l’ensemble du réseau, de sorte que tous les intervenants dénoncent un budget sinistré.

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit un budget de 2,8 milliards d’euros au titre de l’action extérieure de l’État, mais il accuse une fois encore une légère baisse par rapport à 2014.

Le modèle français garde néanmoins des objectifs pragmatiques. Il ambitionne de s’adapter aux nouveaux défis mondiaux, non seulement par la redéfinition des missions des différents organismes, mais également par leur répartition. La mission « Action extérieure de l’État » comprend ainsi quatre programmes, dont deux accusent un budget en baisse, et un tout nouveau, en prévision de la Conférence Paris Climat 2015.

Dans cette mission d’information et d’évaluation, les rapporteurs préconisent une redéfinition des priorités pour renforcer l’effet de levier des actions, mais aussi une meilleure organisation des baisses budgétaires.

Pour ma part, je constate que le rapport d’information indique clairement que « l’enseignement du français reste plus que jamais une priorité ». Les cours de français et les certifications représentent 75 % des ressources propres du réseau, et ils demeurent la première modalité d’action du réseau culturel à l’étranger. Je tiens néanmoins à souligner que le budget de l’AEFE, qui gère 488 établissements – 75 gérés directement, 156 établissements conventionnés et 257 établissements partenaires – est en baisse constante depuis plusieurs années, ce qui crée de fortes tensions entre les lycées français à l’étranger et les partenaires locaux, qu’il s’agisse des associations de parents d’élèves ou des fondations qui sont les véritables gestionnaires.

Je note également que le rapport propose de concilier les deux missions du réseau d’enseignement à l’étranger : l’accueil des enfants français et le rayonnement de la culture. Toutefois, je m’interroge sur les mesures recommandées en la matière, puisqu’il préconise des redéploiements dans les pays prioritaires, la recherche active de mécènes et une meilleure gestion des ressources humaines. Je crains que cette proposition ne soit annonciatrice de coupes budgétaires qui entraîneront notamment une diminution des effectifs, des fermetures de centres culturels ou encore la recherche quasi systématique de cofinancement des actions culturelles.

Nous ne pouvons que regretter la fermeture de nombreux instituts culturels ces dernières années. 19 centres ont ainsi été fermés en Europe occidentale entre 2000 et 2006. Rappelons que fin 2013, le Quai d’Orsay avait décidé de déménager l’Institut français de Berlin pour des raisons budgétaires, et que ce n’est qu’au prix d’une mobilisation citoyenne que cette décision a été abandonnée.

Mes chers collègues, alors que nous fermons, d’autres pays imitent notre système : la Chine avec ses centres Confucius, qui s’installent partout dans le monde, mais également l’Espagne avec les centres Cervantes, même si ce réseau reste moins important que le nôtre.

Pour ma part, représentant les Français de l’Amérique latine et des Caraïbes, je mesure au quotidien l’influence des Alliances françaises, de ce réseau culturel unique au monde, mais également la puissance du réseau éducatif. À l’heure de la diplomatie économique, n’oublions pas que la présence française se fonde essentiellement sur ces deux piliers.

Voilà de nombreuses années que le réseau culturel français à l’étranger souffre de la rigueur budgétaire des gouvernements successifs. Or, l’attrait pour l’international représente une chance pour notre pays dans le contexte de la globalisation. Ne laissons pas s’éteindre ces foyers d’influence française qui rapportent beaucoup à notre pays en termes touristiques comme en termes d’influence politique et de rayonnement culturel.

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La parole est à M. François Asensi, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Monsieur le Président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avec plus de 1500 implantations, de statut public et privé, la France dispose d’un outil unique au monde pour valoriser notre langue et nos oeuvres, au service de la diversité culturelle.

Je me félicite aujourd’hui de notre débat sur ce réseau, à l’initiative du groupe RRDP, à la suite du remarquable rapport publié en décembre 2013 par nos collègues François Loncle et Claudine Schmid.

Pour les députés du Front de gauche, ce débat est nécessaire à plus d’un titre.

Tout d’abord, je voudrais dire un mot sur les récentes réformes inachevées et globalement décevantes.

Dans le cadre de la RGPP, une première étape engagée en 2009 a vu la fusion des services de coopération et d’action culturelle, les SCAC, et des établissements à autonomie financière, les EAF, avec un gain incontestable en matière de lisibilité et de pilotage, même s’il a suscité des difficultés pour les agents et s’il s’est inscrit dans un objectif de baisse des dépenses.

Concernant la loi sur l’action extérieure de 2010, notre groupe a regretté un rendez-vous manqué. Le rattachement expérimental à l’Institut français était voué à l’échec, avec la confusion des missions, la perte de la défiscalisation et le coût de la réforme.

Aujourd’hui, l’Institut français réclame une redéfinition de ses missions. Des pistes intéressantes sont proposées par la Cour des comptes, comme le renforcement des saisons culturelles et des actions menées avec plusieurs postes du réseau.

Pour autant, je crois que nous sommes nombreux à convenir qu’après ces réformes multiples et parfois peu cohérentes, le temps est venu de la stabilité.

Tâchons désormais d’améliorer la vision et le pilotage. Je souscris pleinement à l’idée de renforcer le pilotage interministériel.

J’en viens au budget famélique dédié à ce réseau.

Le ministère des affaires étrangères a subi plus que d’autres une véritable saignée budgétaire depuis les années 1990. Ce constat est encore plus accablant pour le réseau culturel, avec 7 % de crédits de fonctionnement en moins depuis 2007 et une chute de 25 % des crédits d’intervention. En écho au cri d’alarme lancé par Bernard de Montferrand en 2010, l’effort de la France s’est affaissé à 190 millions d’euros, contre 288 millions pour le Goethe Institut et 242 millions pour le British Council.

Comment ne pas percevoir une forme d’incohérence entre des ambitions affichées au plus haut niveau et des moyens de plus en plus limités ?

Il n’est pas possible d’aller plus loin dans ces restrictions budgétaires, sauf à renoncer à l’universalité de notre réseau ou à faire de nos antennes culturelles de simples guichets de vente au service d’une vision purement marchande de notre culture.

L’effort de rationalisation auquel appelle le rapport de la Cour des comptes n’est que l’autre face de cette politique d’austérité qui menace notre réseau. Je regrette que le rapport se borne à défendre le statu quo budgétaire alors qu’il faudrait dégager de nouveaux moyens.

Pour terminer, je regretterai le manque de vision de notre politique culturelle à l’étranger.

La politique extérieure de la France a toujours été liée à la diffusion de ses arts et de ses idées hors des frontières. C’était notre manière de peser sur la conduite des affaires du monde.

De cette ambition culturelle et politique, qui au cours de l’histoire a été tantôt aliénante, tantôt émancipatrice, que reste-t-il aujourd’hui ?

Au nom d’une doctrine peu consolidée de la « diplomatie d’influence », la culture se voit rabaissée à un simple véhicule des intérêts économiques de nos multinationales. Nombre des préconisations abordées aujourd’hui sont imprégnées de cette vision utilitariste et court-termiste de la compétition économique de tous contre tous, qui a pourtant mené à la crise actuelle du capitalisme financier.

Conséquence de cette vision, les missions de service public du réseau culturel vont s’éroder à mesure qu’il devra faire appel à des sources de financement privées pour pallier le désengagement de l’État.

Nous sommes tout aussi inquiets des perspectives de fermeture d’antennes du réseau culturel. Qu’il faille s’adapter à l’émergence de nouvelles puissances, c’est une évidence, mais cela ne doit pas conduire à sacrifier la francophonie. Nous refusons que l’Afrique soit délaissée au motif de son faible niveau de développement économique, car ce continent, berceau de l’Humanité, représente aussi son futur.

Pour les députés communistes et du Front de gauche, le réseau culturel français, riche du dévouement et du professionnalisme de ses agents, doit contribuer à un monde multipolaire et créer les conditions du dialogue entre les cultures, au service d’un projet de paix et de progrès.

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La parole est à M. François Loncle, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le rapport que ma collègue Mme Schmid et moi-même avons réalisé s’appuie sur l’étude particulièrement instructive de la Cour des comptes, qui a permis de disposer d’un état des lieux précis.

Tout d’abord, je tiens à rappeler que les deux principaux vecteurs de l’image de la France à l’étranger sont les entreprises et la culture, y compris le réseau éducatif.

Or, la culture est souvent, en tout cas depuis 1994 et la fin des années Mitterrand, une variable d’ajustement budgétaire. Face aux contraintes qu’il subit depuis plusieurs années, le réseau culturel français à l’étranger a démontré une grande capacité de résilience et d’adaptabilité. Néanmoins, des réformes sont nécessaires si la France veut maintenir et dynamiser son influence, conserver et accentuer son rayonnement et son attractivité.

Dans ce but, nous formulons sept propositions principales.

Premièrement, donner de la stabilité à notre action culturelle et à notre réseau culturel. Notre présence culturelle à l’étranger doit s’inscrire dans le long terme.

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Il faut cesser de changer constamment les appellations et il convient de simplifier les structures, souvent trop nombreuses et aux contours mal définis. Il convient de fixer des directives politiques pluriannuelles, de fixer un terme final à la réforme et de rassurer les personnels sur la durée des contrats et les perspectives de carrière.

Deuxièmement, cultiver et renforcer les liens établis avec les étrangers – étudiants, boursiers, auditeurs, téléspectateurs, conférenciers, enseignants, artistes, stagiaires, internautes. Il est impératif de maintenir le contact avec tous les étrangers ayant fréquenté un établissement français, quel qu’il soit. Il faut, par exemple, multiplier les associations d’anciens élèves ou d’anciens stagiaires. Le Royaume-Uni et l’Allemagne sont très actifs en ce domaine.

Troisièmement, déterminer les zones géographiques prioritaires. La France doit indubitablement continuer à entretenir des relations historiques avec certains pays, notamment en Afrique. Elle doit certes privilégier les pays émergents, mais elle ne doit pas pour autant négliger certaines zones prometteuses, en particulier l’Amérique latine. Pour atteindre le double objectif d’une diplomatie culturelle et d’une diplomatie économique, c’est-à-dire une diplomatie de réelle influence, il faut aussi clairement faire un effort plus important en direction des pays non-francophones.

Quatrièmement, accroître notre présence en ligne et sur les ondes. C’est un enjeu essentiel. Il faut favoriser la création et la diffusion de programmes d’enseignement sur internet, promouvoir et accélérer la mise en place de banques de données et de bibliothèques virtuelles.

Cinquièmement, valoriser les secteurs d’excellence français. Il convient d’assurer la promotion de certains domaines où la France se montre particulièrement novatrice, comme la musique, le dessin animé, les jeux vidéo, mais aussi les biotechnologies, la robotique, etc. Il faut mettre en avant les artistes, les scientifiques, les écrivains, qui contribuent largement au rayonnement international de notre pays.

Sixièmement, mener une enquête sur l’image de la France. Il faut entreprendre, avec l’aide notamment des ambassades, des Instituts français, des Alliances françaises et des Instituts Français de Recherche à l’Étranger, une vaste enquête dans le monde, afin de comprendre comment est perçu notre pays et ce qu’il convient d’approfondir ou de corriger, afin de savoir quelles sont les attentes des étrangers à son égard – qui sont susceptibles d’évoluer.

Septième et dernière proposition, participer activement à la compétition universitaire internationale. La France doit faire davantage pour attirer les étudiants étrangers dans les universités françaises ; elle est en retard en ce domaine par rapport à l’Australie et au Royaume-Uni, ce qui est surprenant, car les droits d’inscription sont très élevés dans ces pays, alors que la France dispose d’atouts indéniables.

Je vous remercie de vos compliments et de votre soutien à propos de ce rapport, mes chers collègues.

Ces quelques propositions permettront à mon sens à la France de faire vivre et de stimuler un réseau culturel dense et diversifié.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et UDI.

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La parole est à Mme Dominique Nachury, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le rapport d’information dont nous débattons aujourd’hui est une nouvelle occasion de montrer notre attachement au prestige culturel de la France dans le monde.

Comme l’ont rappelé nos collègues rapporteurs, Claudine Schmid et François Loncle, la position historiquement pionnière de la France en matière de rayonnement explique la richesse de son réseau culturel extérieur.

Mais bien que nous puissions nous enorgueillir de cette position, il est nécessaire d’être lucide face aux nouveaux défis que notre nation doit relever dans un contexte de contrainte budgétaire et de concurrence accrue des puissances étrangères. J’y reviendrai dans un second temps.

Permettez-moi tout d’abord de rendre hommage à celles et ceux qui, par leur action, permettent à la France de rester au premier plan.

Je pense ici aux ministères, mais aussi aux agences nationales sectorielles comme l’Institut Français ou Campus France, au réseau des 161 services de coopération et d’action culturelle, aux 27 Instituts français de recherche à l’étranger ou encore aux Alliances françaises, présentes dans 136 pays.

S’il est important d’être conscients des évolutions que nous devons apporter à notre réseau, nous ne devons pas oublier qu’il fonctionne avant tout par l’implication d’hommes et de femmes.

Leur attachement au rayonnement culturel de la France mérite d’être salué.

Toutefois, force est de constater que notre réseau est confronté aujourd’hui à un tournant décisif.

Perte de vitesse de la francophonie, éloignement des cercles d’influence de la France par rapport aux grands pays émergents, difficulté de la France à imposer son image dans certains secteurs comme l’économie de pointe, ou encore nécessité d’adapter diplomatie d’influence et diplomatie économique, sont autant de défis que nous nous devons de relever.

De plus, ces défis s’inscrivent dans un contexte difficile, marqué par une plus grande compétition globale face aux nouveaux acteurs que sont par exemple la Chine, le Brésil ou l’Inde.

Enfin, nous devons garder à l’esprit que le contexte budgétaire national tendu est une contrainte forte.

Lors de la précédente mandature, nous avions réaffirmé notre volonté de restructurer le réseau culturel. La fusion des services de coopération et d’action culturelle et des centres et instituts culturels au sein d’établissements à autonomie financière, dans le cadre de la RGPP de 2008, avait été un premier pas vers cette rationalisation.

Dans le même esprit, la loi du 27 juillet 2010 avait pour objectif de renouveler le cadre de l’action extérieure de l’État dans trois domaines : l’enseignement supérieur, la recherche et la mobilité étudiante ; l’assistance technique et l’expertise internationale françaises à l’étranger ; la promotion de la culture française. Il est vrai, cependant, que cette réforme n’a pas eu tous les effets escomptés et qu’il convient aujourd’hui d’y apporter des ajustements. À ce titre, nous ne pouvons que nous féliciter des propositions formulées par nos collègues. Ceux-ci, après un long travail d’étude, proposent d’opérer une réorientation de notre réseau autour de deux grands axes que sont, d’une part, une meilleure définition des priorités de l’action culturelle et une modernisation des outils, et, d’autre part, un renforcement du pilotage du réseau culturel en adaptant ses moyens et en développant de nouvelles synergies. Les propositions contenues dans le rapport sont de qualité, et nous les approuvons.

Mes chers collègues, la grandeur de la France passe par son rayonnement culturel à l’international, et il est de notre devoir de tout mettre en oeuvre pour que celui-ci soit le plus important possible.

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La parole est à M. Meyer Habib, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la culture réside au coeur de l’identité politique de la France. Depuis des siècles, notre État contribue à l’épanouissement et à la promotion des oeuvres de l’esprit avec une vocation universelle. Le rayonnement international de notre culture, l’attrait du modèle français à travers les années et les frontières en est la preuve.

Aujourd’hui, la France dispose du plus grand réseau culturel à l’étranger au monde. C’est une immense fierté pour nous tous. Notre pays consacre un budget considérable, de l’ordre de 1,3 milliard d’euros par an, à l’action culturelle extérieure. Ce réseau constitue un atout considérable pour conduire une politique d’influence dans un monde de plus en plus globalisé et interconnecté.

L’excellent rapport d’information de nos collègues Claudine Schmid et François Loncle dresse un état des lieux de notre réseau culturel et définit des axes stratégiques pour défendre et renforcer l’influence de la France sur la scène internationale, car le monde a changé. Le contexte dans lequel se déploie notre réseau culturel a connu de profondes mutations au cours des dernières années. Je ne citerai que quelques évolutions majeures : l’affirmation de nouveaux acteurs de premier plan, à la fois clients et concurrents de la France – je pense naturellement aux pays émergents –, l’intensification de la compétition culturelle entre puissances, Internet, évidemment, qui a révolutionné les pratiques culturelles, et enfin, sur le plan interne, un contexte de tension budgétaire. Il s’agit aujourd’hui de faire mieux avec moins de ressources au service d’une diplomatie d’influence globale renouvelée.

Le présent rapport fait ressortir quatre grands défis. Un défi stratégique : quelle stratégie culturelle pour notre pays dans le monde à horizon de cinq, dix, vingt ans ? Quelles priorités ? Quelles ressources ? Un défi organisationnel : quelle structure pour le réseau culturel de la France à l’étranger ? Un défi humain : quelle gestion des ressources humaines pour optimiser dans la durée le capital humain du réseau culturel français ? Enfin, un défi européen, évidemment car, in fine, la construction européenne n’aboutira que par le rapprochement entre les peuples.

Premier défi : le défi stratégique. Cette question fondamentale revient à se demander comment exploiter l’atout que représente la culture et, partant, le réseau culturel au service de notre diplomatie d’influence. Le présent rapport définit un enjeu majeur : redéployer les ressources de notre réseau culturel en direction de pôles de croissance, dans les pays émergents. C’est un défi considérable. À cet égard, je voudrais évoquer le cas des lycées français à l’étranger. Ces établissements, souvent d’excellence, jouent un rôle de premier plan, non seulement dans la structuration des communautés françaises établies à travers le monde, mais aussi dans le rayonnement culturel de notre pays. Il y a quelques semaines, je me suis rendu dans les lycées Stendhal de Milan et Jean Giono de Turin, et je tiens à saluer le travail remarquable accompli par ces établissements et rendre hommage tant aux équipes pédagogiques qu’aux parents d’élèves. Ces lycées font honneur à la France.

Or, aujourd’hui, ces lycées français à l’étranger sont confrontés à deux enjeux majeurs. En termes de planification, ils ont besoin de visibilité sur leurs ressources pour accompagner leur croissance ; ils doivent redéfinir leur modèle économique par un recours accru à des financements externes ou des contrats locaux. S’agissant de l’attractivité, des évaluations doivent être mises en oeuvre pour s’assurer que le réseau des lycées français de l’étranger continue d’attirer les élites nationales, comme c’est encore souvent le cas actuellement.

Ensuite, il y a l’enjeu de la diplomatie globale. L’action culturelle doit s’articuler avec d’autres domaines, telle la promotion touristique. Par exemple, dans la promotion du tourisme, des coopérations plus systématiques entre Atout France et l’Institut français sont à rechercher.

Le deuxième défi est organisationnel. La structure du réseau culturel et ses processus de fonctionnement doivent être mis en cohérence avec la stratégie culturelle de la France. Deux priorités s’imposent : poursuivre le recentrage du pilotage et renforcer la programmation pluriannuelle pour accompagner l’alignement stratégique des acteurs du réseau.

Au niveau local, les processus de gestion doivent aussi être revisités pour optimiser les potentialités du réseau. À cet effet, deux pistes de travail ressortent. D’une part, les services de coopération et d’action culturelle doivent se mobiliser pour promouvoir les synergies et les complémentarités, notamment entre les instituts français et le réseau des Alliances françaises, qui jouent un rôle majeur dans l’enseignement de la langue française. D’autre part, des complémentarités sont à rechercher avec des services culturels étrangers, en particulier européens : j’ai appris, par exemple, que l’Institut français d’Athènes avait récemment coproduit une « nuit de la philosophie » en partenariat avec l’Institut Goethe.

Troisième défi : la gestion des ressources humaines. Il y a d’abord la question de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences au sein du réseau culturel. Ensuite, des efforts renforcés doivent être menés en matière de formation des personnels. Le métier de conseiller de coopération est en train de changer : le volet de la direction de projet occupe une place de plus en plus importante dans ses missions, à l’heure où il est amené à conclure des partenariats avec des acteurs locaux, qu’il s’agisse de centres de recherche, d’établissements d’enseignement, de mécénat ou d’industries culturelles.

Enfin, quatrième défi : le défi européen, auquel le rapport ne consacre, hélas, que des développements limités. Au sein de l’Union européenne, sans doute plus encore qu’ailleurs, le réseau culturel de la France doit naturellement être mis à profit pour influencer les élites de demain. Mais un autre enjeu d’envergure mérite d’être mis au coeur des priorités : la pleine utilisation de la culture pour cimenter l’espace européen. L’intégration européenne est loin d’être acquise et l’Europe reste au coeur de notre projet politique au XXIe siècle.

En ces temps troubles, pour ne pas dire terribles, que vit notre planète, le réseau culturel a un rôle crucial à jouer dans le renforcement des liens qui unissent les peuples et, d’abord, les régions frontalières, afin de constituer des bassins de vie transfrontaliers, des bassins d’emploi, des bassins d’activité. Il n’est pas concevable que, de part et d’autre des frontières franco-italienne, franco-espagnole ou franco-allemande, on communique en anglais ou, pire, que l’on soit dans l’incapacité de communiquer. Beaucoup reste à faire dans ce domaine. Pour parler de régions que je connais, la maîtrise du français recule dans le nord de l’Italie, ce qui ralentit l’intégration avec les régions PACA et Rhône-Alpes-Auvergne.

Dans ce domaine, les collectivités territoriales ont un rôle de premier plan à jouer par le biais de la coopération décentralisée. Je tiens, à cet égard, à saluer la très belle initiative de la commune de Menton, dans les Alpes-Maritimes – et féliciter par là même mon collègue et ami Jean-Claude Guibal, député-maire de cette ville – qui a permis l’ouverture d’une école maternelle et élémentaire publique dans la commune de Vintimille, en Italie.

La France, par sa culture, par son réseau culturel dispose d’atouts considérables pour imprimer sa marque sur le XXIe siècle. Engageons les actions nécessaires pour tirer le meilleur de notre potentiel.

Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.

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La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du développement et de la francophonie.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je vous remercie de votre invitation à débattre aujourd’hui du rapport d’information parlementaire sur le réseau culturel de la France à l’étranger.

Je salue les deux rapporteurs, M. François Loncle et Mme Claudine Schmid, et les félicite pour ce rapport de très grande qualité, nourri par de nombreuses auditions et des déplacements riches en enseignements, qui complète utilement, comme cela a été rappelé, les travaux de la Cour des comptes.

Ces remerciements ne sont aucunement l’expression d’une quelconque flagornerie. Ce rapport n’est pas allé, comme trop souvent, garnir une étagère des archives du ministère. Son caractère concret et opérationnel a permis une étude attentive ; toutes les propositions des rapporteurs ont fait l’objet d’une réponse circonstanciée du ministère, transmise à votre assemblée le 28 mars 2014. Un certain nombre d’entre vous ont insisté pour que nous soyons très rapidement opérationnels. Je peux vous dire que nous avons d’ores et déjà mis en oeuvre une action sur plusieurs points. Je me félicite de ce travail en commun, conforme à l’idée que je me fais des relations entre les pouvoirs exécutif et législatif.

Votre rapport souligne à juste titre la position pionnière de la France en matière de rayonnement international. Mais les chiffres de 2014 illustrent aussi l’intensité de son activité. Notre réseau d’enseignement français à l’étranger est constitué de plus de 500 établissements implantés dans 135 pays, pour 330 000 élèves scolarisés, soit une augmentation des effectifs de 50 % en vingt ans. Plus de 15 000 bourses du gouvernement français ont été attribuées l’an dernier. Dans le domaine plus strictement culturel, 29 000 manifestations culturelles ont été organisées en 2014 par le réseau et ont touché 24 millions de spectateurs ; 42 millions d’heures de cours de langue ont été dispensées aux élèves. Il faut davantage faire connaître ces chiffres.

Par facilité, je reprendrai aujourd’hui, dans nos discussions, l’expression de « réseau culturel ». Mais je veux rappeler que, si c’est bien l’une de ses missions essentielles, ce réseau n’est pas seulement culturel. C’est aussi un réseau de coopération, de développement et de solidarité internationale. Au-delà, ce réseau est très impliqué dans le rayonnement et l’influence de la France, et ceci inclut notamment la francophonie.

Cette précision renvoie à une réalité politique : celle d’une diplomatie globale, qui croise tous nos leviers d’action pour renforcer l’influence et l’attractivité de la France, sur tous les plans. Tel est l’objectif fixé par le Président de la République et par le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Dans un contexte évolutif et contraint, que vos rapporteurs ont fort bien analysé, le ministère adapte en permanence ses moyens et ses actions aux priorités définies dans le cadre de cette diplomatie globale. Dans cet esprit, notre réseau fait l’objet d’un renforcement de son pilotage et de ses instruments, d’une complémentarité accrue avec les Alliances françaises et d’une modernisation de ses moyens d’action pour accroître son autofinancement.

L’objectif de diplomatie globale implique une amélioration de la coordination interministérielle sur le terrain, sous l’autorité des chefs de poste. L’exigence de globalité de notre action extérieure, dont la diplomatie culturelle et de coopération est une dimension essentielle, a été posée dans la stratégie d’action culturelle validée par Laurent Fabius en 2013. Les ambassadeurs sont désormais invités à réunir systématiquement auprès d’eux un conseil en charge de l’influence et de l’attractivité. Ce conseil d’influence a pour objectif l’articulation entre toutes les dimensions de l’action diplomatique de la France : action culturelle, diplomatique, économique, politique des visas, promotion du tourisme, coopération universitaire, aide au développement. Cette façon de penser de manière commune, globale et complémentaire est importante. Il faut le dire davantage. Je l’ai souvent constaté sur le terrain : il faut absolument que les ambassadeurs soient les chefs de file de cette équipe France. Cette dernière doit avancer sur le terrain en étant plus visible.

Cette façon de penser nos outils de manière commune, globale et complémentaire se double d’une autre volonté : celle de renforcer des partenariats et des coopérations entre les acteurs économiques.

Je veux mentionner à cet égard Business France, les chambres de commerce et d’industrie et les entreprises, dont le rôle est également très important sur le terrain, ainsi que l’Institut français et l’Alliance française.

J’ai pu constater lors de mes visites en Tunisie, dont la dernière remonte à quelques jours, que lorsque l’équipe France est au travail avec une volonté commune et une cohérence d’action, le résultat est plus efficace, plus performant.

L’autre évolution marquante qui s’attache à cette diplomatie globale, c’est le choix d’un recours croissant à des opérateurs, qui mettent en oeuvre les différents volets de notre action. Aux opérateurs traditionnels comme l’AFD, l’Agence française de développement, l’AEFE, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, ou l’IRD, l’Institut de recherche pour le développement, sont venus s’ajouter les opérateurs issus de la loi de 2010, l’Institut français et Campus France. Enfin, une nouvelle génération d’opérateurs est née au cours des derniers mois : Atout France, désormais rattaché à notre ministère, et plus récemment encore Business France et Expertise France.

Là encore, deux chiffres donnent la dimension de cette action : les opérateurs sur lesquels le ministère exerce une tutelle, exclusive ou partagée, représentent un chiffre d’affaires de 1 milliard d’euros et emploient aujourd’hui 11 000 agents. Chacun de ces opérateurs correspond à une fonction précise, ce qui lui permet de déployer une spécialisation génératrice d’efficacité sur son métier propre.

Nous concentrons nos efforts davantage sur le pilotage de ce dispositif et son interaction avec le réseau diplomatique que sur une rationalisation supplémentaire dont la pertinence ne serait pas avérée. C’est nécessaire à l’échelon local, je l’évoquais à l’instant, mais cela s’impose aussi dans le pilotage de ces opérateurs ici même, à Paris. Il nous faut absolument renforcer ce pilotage, notamment par la désignation de responsables faisant référence dans leur domaine.

Ensuite, pour renforcer notre politique d’influence, la complémentarité entre le réseau public des Instituts français et le réseau associatif des Alliances françaises est également déterminante.

Le réseau des 400 Alliances françaises implantées dans le monde entier est une véritable richesse pour notre action et notre rayonnement, vous l’avez tous évoqué, mesdames, messieurs les députés.

Dans bien des cas, comme en Amérique latine, en Chine, en Inde ou encore en Russie, les Alliances françaises incarnent véritablement notre présence. La répartition des implantations respectives des Instituts français et des Alliances françaises dans chaque pays est le fruit d’une sédimentation historique qu’il faut respecter. Nous sommes cependant attentifs à la cohérence d’ensemble de ce réseau : les doublons ont été supprimés dans la plupart des capitales – il était important de le faire – et un dialogue permanent est mené sur l’implantation des différentes structures. Cet effort de cohérence et de complémentarité des réseaux doit être salué et, surtout, poursuivi.

Afin de rendre notre action plus efficace, il est indispensable de mieux identifier à la fois les pays et les publics prioritaires. La cartographie des emplois du réseau culturel évolue en fonction de ces impératifs. En 2014 et 2015, des redéploiements ont été réalisés en faveur des pays émergents de la Méditerranée et du Sahel. Ils ont été ciblés sur certaines thématiques, comme la diplomatie économique, l’innovation ou encore le climat.

S’agissant des publics visés, notre ambition est très claire : ouvrir davantage nos instituts culturels, nos coopérations, nos débats d’idées à la jeunesse, aux classes moyennes et à la société civile, comme c’est actuellement le cas sur les enjeux liés à la Conférence Paris Climat 2015.

Dans le même temps, il nous faut répondre à l’attrait pour la langue française, tant dans les pays émergents ou pré-émergents que dans certains pays dits francophones. Me déplaçant souvent en Afrique, j’ai pu mesurer le succès des cours de perfectionnement en français dispensés y compris dans des pays où l’enseignement public est censé être effectué en français.

Il nous faut donc conquérir de nouveaux publics, mais aussi mieux connaître les publics existants afin de fidéliser les centaines de milliers de bénéficiaires ou d’usagers de notre réseau. Il a donc été demandé à l’Institut français de mener un travail d’analyse de ses publics pour répondre à ce double objectif. Nous avons d’ailleurs hâte de connaître les résultats de ce travail, qui nous permettra de mieux répondre aux demandes et aux besoins.

Des actions sont d’ores et déjà menées dans ce sens. À titre d’exemple, le réseau social www.francealumni.fr, animé par Campus France, a été lancé en novembre 2014 pour assurer le suivi des anciens étudiants, chercheurs et boursiers étrangers. Ainsi que vous l’avez souligné tout à l’heure, monsieur Loncle, cet outil était indispensable pour maintenir un tel réseau actif. Dans de nombreux pays, cette mise en réseau via Internet se double de la création d’associations d’anciens boursiers, qui sont autant de relais d’influence pour notre pays et un véritable vivier pour la création d’entreprises locales et le développement des affaires.

Je suis habitée par la conviction que la langue française ne restera puissante que si elle est utile à ceux qui la partagent, en particulier dans leur démarche d’insertion professionnelle. Je pense que tous ces jeunes qui, aujourd’hui, sont attirés par la langue française, doivent pouvoir s’assurer que cette maîtrise sera pour eux une chance, qu’elle sera utile dans leur parcours.

Le renforcement du réseau passe aussi par sa modernisation et sa professionnalisation.

La formation initiale et continue des agents du réseau est par conséquent une priorité. Les crédits sont confiés aujourd’hui à l’Institut français, l’Alliance française bénéficiant quant à elle d’une subvention annuelle spécifique pour soutenir son plan de professionnalisation.

De nouveaux instruments de gestion ont été déployés, notamment le logiciel de gestion des établissements à autonomie financière. La mise en place, fin 2014, d’un contrôle interne budgétaire et comptable constitue une avancée significative, comme l’a relevé la Cour des comptes. L’organisation de réunions régionales de conseillers de coopération et d’action culturelle et la transmission régulière d’instructions de la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats aux postes ont par ailleurs permis un meilleur pilotage du réseau. J’ai tenu à participer personnellement aux travaux de certaines de ces réunions et j’ai pu y mesurer la valeur ajoutée que constitue ce réseau en termes de compréhension des enjeux locaux et de propositions d’action.

Il faut bien sûr évoquer les moyens d’action du réseau, qui sont également modernisés pour développer les ressources propres et les cofinancements. Le ministère contribue pleinement à l’effort de redressement des finances publiques ; j’ai déjà eu l’occasion de l’affirmer à plusieurs reprises ici depuis mon arrivée voilà plus d’un an.

Pour répondre aux inquiétudes exprimées par MM. les députés François Asensi, Sergio Coronado et Jérôme Lambert, je tiens à préciser que la baisse des moyens budgétaires est restée maîtrisée. Nous stabilisons les enveloppes les plus importantes : l’attractivité bénéficie de 86 millions d’euros depuis 2012, et le réseau culturel a été doté de 150 millions d’euros en 2015, ce qui ne représente qu’une baisse de 3 % par rapport à 2014. Quant à l’AEFE, elle a été totalement sanctuarisée et bénéficie d’une subvention de 410 millions d’euros.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

Il s’agit du chiffre exact, monsieur le député.

Dans ce contexte, nous nous attachons à optimiser les ressources et à promouvoir la recherche de cofinancements, en particulier dans les pays émergents, où les effets de levier sont les plus significatifs. En outre, il est systématiquement demandé à nos ambassades de se mobiliser pour entrer dans les critères des fonds européens. Les opérateurs sont soutenus dans leur recherche de financements extrabudgétaires et de nouveaux partenaires, parce qu’il est indispensable aujourd’hui de pouvoir travailler de cette manière. Les agents du réseau sont mobilisés sur ces enjeux, qui sont pour eux une priorité quotidienne. Ils ont pu me le confirmer voilà encore quelques heures.

Mesdames, messieurs les députés, je sais que chacune et chacun d’entre vous a une claire conscience de la course de vitesse dans laquelle nous sommes engagés contre les forces de l’obscurantisme et de l’intégrisme.

La lutte contre le terrorisme se mène évidemment sur le plan diplomatique, sur le plan militaire, mais aussi, j’y insiste, sur le terrain du développement et de l’action culturelle. À l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse, nous avons rappelé notre attachement à ce droit fondamental qu’est la liberté d’expression, et nous devons davantage la soutenir. Nos valeurs représentent encore, pour des millions de femmes et d’hommes, l’espoir d’une vie meilleure, plus juste, plus démocratique. La force et la diversité de notre réseau culturel sont un atout majeur et incontestable pour la diffusion de nos valeurs dans le monde. Ce constat n’est pas une incitation au repos ni à l’autosatisfaction, vous l’avez dit. Bien au contraire, il vise à pousser à l’action, à une action plus efficace jour après jour.

Nous devons donc continuer de rationaliser, moderniser, renforcer et adapter sans relâche ce formidable outil de diffusion de notre langue et de notre culture pour relever les défis de notre époque, du vingt et unième siècle. C’est à ce prix que l’universalité de notre message, de nos valeurs continuera d’être entendue et comprise à travers le monde.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous en venons aux questions. Je rappelle que questions et réponses ne peuvent excéder deux minutes chacune.

Nous commençons par une question du groupe UDI. La parole est à M. Meyer Habib.

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Madame la secrétaire d’État, le ministère des affaires étrangères et du développement international a fait le choix d’ajuster le réseau des lycées français à l’étranger aux réalités d’un monde qui change et de redéployer les ressources en direction des pays émergents.

Concrètement, les établissements situés dans les zones d’implantation traditionnelle, l’Italie par exemple, doivent faire face à la suppression de postes d’enseignants résidents au profit des pays émergents. Ces redéploiements s’inscrivent dans une démarche légitime et compréhensible dans un contexte de pression sur les finances publiques et compte tenu de la faible disponibilité d’enseignants de qualité dans certains pays en croissance.

Cependant, ces mutations ne peuvent s’exercer sans tenir compte de certaines exigences locales. Les suppressions interviennent notamment dans un contexte d’accroissement des effectifs scolaires. C’est le cas dans ma circonscription, par exemple en Italie ou en Israël. Les chefs d’établissement n’ont pas de visibilité suffisante sur le calendrier à venir, la répartition et l’ampleur des redéploiements prévus. Cette situation d’incertitude crée, dans ces établissements, des tensions sur la gestion des ressources.

Ma question est donc la suivante : le Gouvernement compte-t-il rendre public le détail des redéploiements de postes d’enseignants à venir pays par pays ? Et, question corollaire, compte tenu de la nécessité d’un recours accru aux contrats locaux, des actions sont-elles prévues pour améliorer l’égalité de traitement entre contrats de résidents et contrats locaux ?

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

Monsieur le député Meyer Habib, dans le droit fil du plan d’action pour l’enseignement français à l’étranger que le ministre avait arrêté en automne 2013, une première réunion interministérielle s’est tenue en novembre 2014. Cette consultation a permis de définir une feuille de route pour l’enseignement français à l’étranger. Notre réseau, actuellement implanté dans 135 pays, principalement en Europe, compte 500 établissements scolarisant 330 000 élèves.

Les ministres ont souhaité des évolutions progressives du réseau, tant en termes d’implantation que de redéploiement. Vous l’avez indiqué, les postes d’enseignants sont redéployés vers les zones prioritaires que sont l’espace francophone, les pays du Golfe et l’Asie émergente. Cette évolution ne pourra se faire que progressivement, chacun peut le comprendre, en raison des nombreux enjeux liés à nos établissements scolaires, en particulier le rayonnement et l’influence, et parce qu’il faut tenir compte de l’implantation locale et de la mobilité des enseignants. Une conférence des moyens se tiendra donc désormais chaque année afin d’anticiper la répartition des postes d’enseignants dans les différents dispositifs du ministère, notamment à l’étranger.

Vous avez demandé qu’il y ait plus de transparence, et que les redéploiements de postes soient publiés pays par pays. Ce n’est aujourd’hui pas prévu, mais sachez que nous aurions les moyens de le faire. J’en prends donc l’engagement devant vous. La première édition de la conférence se tiendra au second semestre 2015, et je m’engage à ce qu’il y ait ensuite des publications régulières.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie, madame la secrétaire d’État !

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La parole est à M. Sergio Coronado, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avant d’en venir à ma question, je formulerai deux remarques.

À mon collègue François Loncle, tout d’abord, je voudrais dire que l’Amérique latine n’est pas un continent « prometteur » pour le réseau culturel : celui-ci y est présent depuis fort longtemps et le maillage y est d’une densité sans égale. En Colombie, au Pérou ou à La Havane, où le Président François Hollande se rendra la semaine prochaine, les alliances françaises sont parmi les plus importantes au monde.

Je crains que ma seconde remarque ne soit un peu désagréable, madame la secrétaire d’État, mais on ne peut soutenir à la tribune de l’Assemblée nationale de telles erreurs concernant le budget de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ! Ce budget, qui s’élevait à 420 millions d’euros en 2010, n’a pas connu d’augmentation pendant plusieurs années. En 2013, il passe à 425 millions, puis diminue de 8,5 millions en 2014, soit une baisse nette de 2 %. Bref, il n’a pas été sanctuarisé. Je peux en témoigner puisque j’ai participé ici même au débat budgétaire, avec M. Le Borgn’, député des Français de l’étranger pour l’Allemagne et l’Europe de l’Est. Ce que vous avez dit à la tribune est une contrevérité.

Selon le Président de la République, les budgets à destination de la jeunesse et de l’éducation constituent une priorité gouvernementale. Sauf quand il s’agit des Français de l’étranger !

Ma question, madame la secrétaire d’État, concerne la francophonie. À ce propos, alors que vous évoquez la complémentarité nécessaire et l’amélioration de la coordination au sein du Gouvernement, j’ai trouvé très étonnant que le mois de la francophonie, qui mobilise l’ensemble de nos postes diplomatiques, se soit trouvé en concurrence avec un autre événement – du reste intéressant par lui-même –, « Goût de France ». Cette opération de prestige centrée sur la gastronomie a handicapé, si je puis dire, le succès du mois de la francophonie. Je puis vous assurer que les postes n’ont pas toujours très bien compris quelle était la coordination et la complémentarité entre les deux manifestations !

Dans le cadre de la défense et de la promotion de la francophonie, quelles démarches le Gouvernement entreprend-il pour mener une action concertée, complémentaire et durable avec ses partenaires européens et avec l’ensemble des pays francophones ? La question préoccupe à la fois les Français établis hors de France et notre réseau diplomatique : comment obtenir une puissance de frappe plus importante et plus pérenne dans la défense de la langue française ? Le français n’est pas seulement la langue de la République : c’est aussi la langue d’autres pays qui en font un usage tout aussi remarquable.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

J’ai participé sur le terrain aux deux événements que vous mentionnez, monsieur le député. Je me suis notamment rendue au Liban pour célébrer la clôture de tout un mois de célébrations organisées autour de cette francophonie active dans de nombreux pays.

Votre question sur les moyens pour atteindre une puissance de frappe suffisante est tout à fait pertinente. Sur le terrain, je peux mesurer le défi que constitue la vitalité de la démographie de nombre de pays francophones, notamment sur le continent africain. Si nous voulons effectivement atteindre en 2050 le nombre de locuteurs que promet un calcul encore assez grossier, il faudra en effet y mettre les moyens en étant davantage présents, tant par notre réseau culturel que par l’ensemble de nos autres réseaux.

Ce travail, nous le menons avec l’Organisation internationale de la francophonie, dont les quatre-vingts pays membres ou observateurs conduisent des actions concertées, en liaison avec différents opérateurs présents sur le terrain. C’est dans la pleine cohérence de ce partenariat qu’il faut rechercher la force de frappe.

Je veux aussi mentionner l’Office franco-québécois pour la jeunesse, l’OFQJ, acteur de premier plan qui a su évoluer avec son temps en s’ouvrant largement, au point que nous réfléchissons à une nouvelle structure qui pourrait s’appeler simplement « Office de la francophonie ». L’OFQJ, ce sont par exemple soixante-quinze jeunes – vingt-cinq Québécois, vingt-cinq Français et vingt-cinq francophones originaires d’autres pays – qui participeront en juillet prochain au forum mondial de la langue française à Liège. C’est ce type d’opération qui nous permettra, me semble-t-il, d’être plus visibles et plus lisibles dans nos actions, et surtout plus forts.

La francophonie institutionnelle n’est pas sans lourdeurs, convenons-en, mais les acteurs savent parfois s’unir et atteindre cette force de frappe que j’appelle comme vous de mes voeux, pour que cette langue française que nous avons en partage avec de nombreux pays connaisse de meilleurs jours encore, dans toutes les couches de la population.

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La parole est à Mme Gilda Hobert, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Madame la secrétaire d’État, le rayonnement de la culture française est naturellement au centre de l’action de la France à l’étranger, ainsi que vous l’avez amplement et brillamment souligné dans votre intervention. J’ajouterai que la culture ne peut être cloisonnée. Par essence, elle se nourrit de comparaisons, d’interactions, elle est hybride, diverse, toujours renouvelable et renouvelée.

Nous savons bien la place souvent incontournable que tiennent, localement, les instituts français et alliances françaises dans la vie culturelle des pays où ils sont implantés. Ils constituent parfois le seul accès à la culture et à la création en tant qu’ouverture sur le monde.

Au-delà de cette présence, je souhaiterais savoir ce que fait notre pays pour faire vivre la diversité culturelle, la stimuler et la promouvoir. Que fait-il pour construire des réseaux entre les créateurs ?

On ne peut en effet parler de culture sans citer les créateurs et ceux qui font vivre la création, qui suscitent réflexion et émotion – je veux parler des artistes.

Comment la France répond-elle aux attentes des artistes et des professionnels étrangers, notamment les plus jeunes d’entre eux ?

Plus largement, nos actions sont-elles orientées de façon à développer l’économie de la culture afin que nos partenaires – en particulier ceux du Sud – puissent bénéficier de la richesse de leur propre production culturelle ?

Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

Le soutien à la diversité culturelle et au développement d’une économie de la culture, madame la députée, fait partie intégrante des objectifs de notre aide au développement, comme le précise d’ailleurs la loi du 7 juillet 2014 d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale. Un grand nombre de dispositifs sont mobilisés à cette fin. Permettez-moi de citer cinq d’entre eux.

Tout d’abord la Fabrique des cinémas du monde, un fonds d’aide destiné à financer des projets de film partout dans le monde. Cette instance permet à de jeunes réalisateurs et producteurs de tourner un premier long-métrage montré ensuite au festival de Cannes.

Avec le ministère de la culture, nous accueillons également de jeunes artistes et professionnels de la culture dans les secteurs du spectacle vivant, des arts plastiques, des musées et du patrimoine. Ce programme, baptisé « Courants du monde », permet d’accorder quatre-vingts bourses par an.

Il faut aussi mentionner le programme « Afrique et Caraïbes en créations », qui contribue à la structuration des filières de l’industrie culturelle locale.

Les débats d’idées participent à la consolidation de la démocratie, en particulier auprès des jeunes, et nous y sommes tous très sensibles. Grâce au fonds d’Alembert, l’Institut français appuie l’organisation d’une cinquantaine de débats chaque année. Il faut encourager ces initiatives car les partenaires locaux, qu’ils soient publics ou privés, doivent pouvoir avoir de tels rendez-vous.

Enfin, nous sommes actifs en matière de citoyenneté, des médias et de gouvernance locale avec le programme SafirLab, qui permet de nouer le dialogue de façon durable entre des jeunes issus de la société civile. J’ai été particulièrement heureuse, après avoir les avoir reçus à Paris, de revoir les jeunes de la promotion 2015 à Tunis et de mesurer le chemin parcouru et tous les bénéfices tirés de cet accompagnement.

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La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Madame la secrétaire d’État, je pose cette question au nom de M. François Asensi, qui ne pouvait rester jusqu’à la fin de ce débat.

Les récentes réformes intervenues dans le sillage de la révision générale des politiques publiques et des réductions budgétaires ont touché de plein fouet les agents du réseau culturel.

Je tiens à saluer ici leur travail remarquable et à relayer leurs inquiétudes.

Entre 2008 et 2012, les effectifs ont baissé de plus de plus de 20 %. C’est considérable ! Au sein des postes culturels, la précarité s’est renforcée, tout comme le recours aux agents contractuels. Les recrutés locaux demeurent dans une situation défavorable. Le rapport dont nous débattons note d’ailleurs « la rotation importante de certains personnels » au détriment de la cohérence des projets.

Plus fondamentalement, il existe un malaise lié à l’avenir du réseau culturel qui se trouve menacé par les restrictions budgétaires.

Le 21 avril dernier, une large partie des personnels de l’Institut français s’est mise en grève en raison de la dégradation de ses conditions de travail et de l’absence de visibilité sur les missions de l’établissement.

À l’étranger, les redéploiements envisagés ou à venir de certaines antennes culturelles suscitent un émoi légitime : Venise, Porto, Groningue, Dresde, Praia… Le chiffre d’une vingtaine de fermetures a été évoqué, particulièrement en Europe, alors même que l’affaissement du projet européen nécessite une présence continue. La tentation est grande de se reposer sur les Alliances françaises, qui sont de droit privé, pour exercer cette mission essentielle. La Cour des comptes évoque même un « substitut du réseau culturel public ».

Madame la secrétaire d’État, quelles réponses apportez-vous face à ces inquiétudes ? Confirmez-vous les fermetures d’antennes envisagées et, dans cette hypothèse regrettable, quelles seront les garanties de reclassement pour les agents et les recrutés locaux des centres menacés ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

Comme je l’ai dit tout à l’heure, monsieur le député, le réseau s’adapte de manière constante en fonction des priorités politiques et thématiques qui conduisent notre politique d’influence et de coopération. C’est pour cette raison, en particulier, que nous adaptons notre dispositif en Europe.

Cela se traduit, certes, par la fermeture de quelques antennes – un peu plus d’une dizaine d’ici à 2017. Il ne s’agit cependant pas de suppressions, mais d’adaptations au sein d’un même pays.

Cette démarche permet également de redéployer des moyens humains dans les zones géographiques prioritaires, notamment dans les pays émergents. Des mesures adaptées sont prévues pour accompagner les agents locaux concernés par les fermetures.

L’essentiel, nous en conviendrons tous, est de conserver un réseau mobile et réactif qui utilise tous les atouts : agents, antennes culturelles, alliances françaises, mais aussi, comme l’a indiqué M. François Loncle, tous les amoureux de la culture et de la langue françaises.

Pour répondre à votre préoccupation, il est donc important de redire que, si des fermetures sont prévues, elles s’accompagnent de redéploiements dans une même zone géographique.

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Nous en venons aux questions du groupe socialiste, républicain et citoyen.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

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La langue française est reconnue comme la langue globale la plus forte après l’anglais. Elle est aussi la cinquième langue la plus parlée au monde.

Par rapport à d’autres langues, elle présente la particularité d’être souvent une langue désirée. Il existe une attente de français, une demande de français.

Les systèmes scolaires où le français est enseigné en tant que langue nationale ou en tant que langue étrangère permettent sa transmission. L’espace francophone en témoigne.

Chacun sait qu’il s’agit d’une langue littéraire, ce qui lui confère parfois, à tort, une connotation passéiste. Il s’agit aussi d’une langue juridique et scientifique, de surcroît langue officielle dans bon nombre d’institutions internationales.

Bref, le français est une langue actuelle, vivante, capable de concurrencer n’importe quelle autre langue, avec toute ce qu’il apporte de plus par rapport à la pensée unique.

Elle dépend aussi du réseau éducatif et culturel français à l’étranger. Je partage les sept préconisations de l’excellent rapport d’information de nos collègues, notamment celles relatives à l’exploitation du numérique et au développement du français à travers les réseaux artistiques, culturels ou encore scientifiques.

Dans un monde globalisé comme le nôtre, l’enseignement des langues est devenu un marché mondial, qui suppose, pour rester dans la course, de passer par le numérique. Dans ce domaine, madame la secrétaire d’État, comment le réseau culturel de notre pays se positionne-t-il ? Ma question est précise.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

Monsieur le député, je vais essayer de vous répondre de façon tout aussi précise ! Comme vous l’avez dit, le français est une langue désirée : 50 millions de personnes apprennent aujourd’hui le français, en tant que langue étrangère. Pour autant, nous ne pouvons pas nous reposer sur ces résultats, certes encourageants, mais encore insuffisants.

L’engagement bilatéral de la France en faveur de la diffusion de notre langue se situe à deux niveaux. Il s’agit d’abord d’intervenir pour consolider la place du français – c’est l’objet du projet « 100 000 professeurs pour l’Afrique », dans lequel nos opérateurs, notamment l’Institut français, sont largement impliqués. Notre engagement se concrétise également dans des activités directes d’enseignement, conduites par les réseaux culturels et scolaires français.

Dans ce domaine, le numérique prend une place croissante. Les 900 000 professeurs de français disposent depuis cette année d’un réseau social qui leur est spécifiquement dédié, l’IFprofs. Ce n’est qu’un outil numérique parmi tous ceux développés par nos opérateurs, en particulier l’Institut français. Ils mettent l’accent sur le français à objectif professionnel, avec des modules de formation à distance, modernisant ainsi les approches pédagogiques.

C’est le meilleur levier dont nous disposions pour démultiplier sur le terrain le nombre d’enseignants. Cette offre rencontre un réel succès, avec une forte progression des abonnements, des consultations des différents sites répertoriés et des téléchargements. Les nouvelles technologies doivent être davantage utilisées, afin que la francophonie progresse, mais aussi pour soutenir les enseignants, ceux de nos propres institutions comme ceux de l’ensemble des pays membres de l’OIF. Il nous faut encore davantage investir ce secteur.

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La parole est à M. Pierre-Yves Le Borgn’, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous interroger de manière très précise sur la politique immobilière de l’État, en relation avec les instituts culturels à l’étranger. Je suis l’élu d’une circonscription – l’Europe centrale et balkanique – où elle s’est exercée à deux reprises ces deux dernières années. À Berlin, la Maison de France a failli être vendue ; grâce à une action collective, l’État s’est heureusement ressaisi et a choisi de la conserver. Mais à Vienne, le palais Clam-Gallas, siège depuis très longtemps de l’Institut français, sera très vraisemblablement cédé.

En prolongement de la question d’André Chassaigne, je m’inquiète de la vague de fermetures potentielles, ayant à l’esprit ce qui se passe aujourd’hui à Lisbonne. Regardant depuis ma circonscription la politique de la France en matière immobilière, j’ai l’impression que le court terme – la recherche de recettes grâce à la vente – l’emporte sur le long terme – le projet culturel de la France dans les pays concernés.

Lorsque l’on vend ou que l’on ferme un institut qui existe depuis longtemps, c’est une histoire, un lieu de reconnaissance, un prestige, parfois même un espoir, que l’on sacrifie. Ce pourrait être le cas du palais Clam-Gallas, dont je ne comprends pas que l’État n’ait pas envisagé un moment la reconversion, pour y faire venir, au côté de l’institut culturel, les autres représentations diplomatiques multilatérales de la France en Autriche.

Dans ce cadre, et en guise de question subsidiaire, je vous demande d’entendre la voix des conseillers consulaires, les élus des Français à l’étranger. Certes, les instituts culturels ne sont pas destinés en priorité aux Français ; mais on peut imaginer qu’ils le sont un peu ! Or les élus consulaires sont la voix du terrain, l’influence, c’est tous les jours qu’ils la pratiquent. Il faut savoir les entendre, ne pas les ignorer ou les brider comme c’est le cas pour l’un d’entre eux, par ailleurs professeur au lycée français de Lisbonne, à qui l’on fait reproche d’avoir exprimé publiquement son regret de voir l’institut français de Lisbonne sacrifié.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie

Monsieur le député, votre question renvoie à une problématique générale : le ministère des affaires étrangères n’a pas de crédits immobiliers, hormis les recettes provenant des ventes. Certains bâtiments culturels sont concernés par cet effort global. Ainsi, le palais Clam-Gallas de Vienne, surdimensionné par rapport à notre action en Autriche, sera vendu. Nous trouverons de nouveaux bâtiments et développerons la présence française, notamment grâce au numérique.

Je comprends vos inquiétudes. Je veux vous dire que j’écoute les conseillers culturels à chacun de mes déplacements, leur consacrant un temps de rencontre à l’ambassade, de manière à ce qu’ils puissent eux aussi exprimer la réalité de leur quotidien. Le travail d’un ministre, d’un secrétaire d’État, consiste aussi à aller sur le terrain à la rencontre de ces acteurs et de recueillir leur vision des choses. Malheureusement, je ne me suis pas encore rendue au Portugal et n’ai pu entendre ces préoccupations. Mais s’agissant de l’institut français de Lisbonne, je veux vous assurer que ça n’est pas une fermeture qui est envisagée, mais un déménagement.

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Questions sur la politique du logement.

La séance est levée.

La séance est levée à dix-huit heures vingts.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly