On a dépassé depuis longtemps le mythe de la bonne gendarmerie courant derrière les voleurs de poules et arrêtant les braconniers en état d'ébriété.
Au cours des dix premiers mois de l'année 2012, les agressions contre les forces de 1'ordre ont progressé de 5 %. Les armes utilisées par les malfaiteurs sont de plus en plus lourdes, et l'usage d'armes de guerre dans la rue se banalise. Il n'y a qu'à se pencher sur le cas de Marseille, qui connaît une vague sans précédent de règlements de comptes entre voyous.
Face à ce constat, il faut envoyer un signal fort de confiance à l'égard de nos forces de l'ordre.
Instaurer une présomption de légitime défense ne permettra pas de mieux protéger les policiers, au contraire.
D'abord, soulignons que, par principe, cela présuppose que les forces de sécurité soient contraintes de se faire tirer dessus, au risque d'être tuées, pour pouvoir légitimement se défendre. La simple présomption de légitime défense limiterait donc les possibilités d'action des forces de l'ordre alors que nous proposons d'encadrer et de mieux former ces dernières. Cela reviendrait à niveler par le bas les possibilités offertes à nos forces de l'ordre de sauver la vie d'autrui comme la leur. Cela mènerait à une inégalité de droit face à des situations égales : 42 % des usages d'armes à feu par les gendarmes ne seraient – à juste titre – pas couverts par cette présomption, et ce n'est pas acceptable.
La vraie question, derrière ce texte, est la suivante : lorsqu'un policier, que l'administration oblige à détenir une arme, tire sur un individu avec son arme de service, sauf à démontrer le contraire, veut-il pour autant le tuer ou le blesser ? Sans entrer dans le sujet, largement balayé par la jurisprudence, de la légitimité et de la proportionnalité de l'usage de la force, le plus simple est d'encadrer un usage large de l'arme à feu, de manière à permettre aux forces de l'ordre d'exercer, en leur âme et conscience, leur métier, plutôt que de donner une fausse exonération juridique ex ante aux policiers en la limitant au seul domaine de la riposte, d'autant que cette innovation juridique d'une présomption d'innocence ne serait pas efficace. La présomption de légitime défense n'efface pas la procédure, la mise en examen, l'inculpation et le procès. C'est à la fin du processus judiciaire que cette présomption entrerait en compte. On ne réglerait donc pas le fond du problème.
En outre, la légitime défense exclut de facto la réparation du préjudice, et donc renforce la dimension pénale du travail des forces de l'ordre, alors que les notions, distinctes, de responsabilité et de culpabilité pénale offrent un gisement intellectuel à creuser.
L'UMP préfère donc à une présomption de légitime défense une présomption de légitime confiance offerte à l'agent assermenté. Rien ne remplacera l'intelligence humaine de nos forces de l'ordre face à l'adversité.
Les policiers et gendarmes n'étant pas des justiciables ordinaires, ce texte propose ensuite de renforcer et d'élargir la protection fonctionnelle aux proches.
Lors de son examen en commission des lois, plusieurs articles de cette proposition de loi ont été déclarés irrecevables au motif qu'ils créaient de nouvelles charges. Nous ne comprendrions pas que le Gouvernement ne les reprenne pas à son compte car ils ont pour vocation de mieux protéger les policiers et leurs familles. En un mot, il s'agit bien de faire oeuvre de justice sociale, en protégeant le plus grand nombre.
Il y quelques semaines, le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, répondant à une question posée à la garde des sceaux, m'avait invité à être aux côtés de la majorité pour voter plus de moyens financiers pour les forces de l'ordre. J'avais été très déçu par le budget proposé et j'avais exprimé mon point de vue à cette même tribune devant le ministre. Aujourd'hui, au nom du groupe UMP, j'invite en retour la majorité à soutenir ce texte, qui offre plus de sécurité, d'égalité et de justice sociale à celles et ceux qui se battent jour après jour pour les citoyens de notre pays.
Je vous en supplie, monsieur le ministre, je vous en supplie, chers collègues : ayons un débat sur le fond. C'est le troisième texte dont nous débattons aujourd'hui, c'est le troisième texte pour lequel on nous explique qu'il y a un problème de procédure car vous voudriez présenter un autre texte plus tard. Nous sommes ravis d'être en avance sur notre temps, mais je vous propose de discuter du fond et pas uniquement de problèmes de rédaction ou de procédure. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)