Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 11 décembre 2012 à 15h00
Retenue pour vérification du droit au séjour et modification du délit d'aide au séjour irrégulier — Présentation

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, mesdames, messieurs les députés, la France est une terre d'accueil ; c'est son histoire depuis près de deux siècles. Pourtant, par un étrange paradoxe, l'immigration y fait débat, un débat qui n'éclaire pas toujours nos concitoyens car s'y mêlent trop d'approximations, de confusion et d'amalgames. S'y ajoutent des poncifs et des propos parfois haineux. « Les étranges étrangers » dont a si bien parlé Jacques Prévert ont été, ces dernières années, bien souvent, trop souvent montrés du doigt.

Notre pays a vu, au fil des époques, les nouveaux arrivants se succéder. D'abord de Belgique, d'Italie, d'Allemagne, d'Espagne et un peu plus tard de Pologne, ils vinrent ensuite du Portugal, d'Algérie, du Maroc, de Tunisie et d'Amérique latine, fuyant les dictatures, puis de Chine, du Sénégal ou encore du Mali. Ils viennent aujourd'hui, vous le savez, de tous les continents.

L'immigration a été, est et continuera d'être un apport, une chance pour notre pays – pour sa démographie, son économie, sa culture. Pour autant, une vérité doit être dite, rappelée, affirmée : l'immigration, pour être bénéfique, pour être un atout pour notre pays, doit être préparée, régulée, organisée, maîtrisée.

Aujourd'hui, la France accueille régulièrement chaque année 200 000 étrangers, certains pour une ou quelques années seulement, d'autres de manière plus pérenne. Bien évidemment, on ne peut pas additionner ces chiffres. Plus de 40 % d'entre eux viennent pour des raisons familiales. Le mariage d'un Français avec une personne de nationalité étrangère constitue l'une des premières causes d'immigration. L'immigration économique et les étudiants représentent 35 %. C'est sur ces éléments que, conformément à l'engagement du Président de la République, nous aurons un débat au Parlement au premier trimestre de l'année prochaine. Le quart restant sont des réfugiés politiques, étrangers malades ou visiteurs.

Eh oui, la France ne doit pas avoir peur d'accueillir, en fidélité à ses principes, une immigration régulière correspondant à des droits consacrés internationalement. Elle doit être consciente et de ses atouts, et de ses valeurs. L'ouverture au monde en est une. N'oublions pas que plus de deux millions de nos compatriotes sont eux-mêmes des expatriés. Cette ouverture a une conséquence : l'arrivée et la présence sur notre sol d'étrangers qui ont la volonté de vivre en France, d'y étudier, d'y travailler, de s'y intégrer. Des étrangers qui nourrissent aussi l'espoir d'une vie meilleure. Parmi tous ces étrangers, certains, à terme, après l'avoir voulu pleinement et après en moyenne seize ans de présence en France, deviennent citoyens français. Et nous devons être fiers de ces nouveaux Français.

L'immigration, c'est donc une part de l'histoire de notre pays, une part de ce qui l'a construit. La France doit aborder la question de l'immigration dans un esprit d'apaisement et de réalisme, avec générosité mais sans naïveté, avec fermeté mais sans arbitraire, en appliquant des règles claires et comprises de tous. C'est la volonté du chef de l'État et c'est la politique qu'entend mettre en oeuvre le Gouvernement.

Au cours de ces sept derniers mois, des mesures importantes ont déjà été prises. La circulaire du 31 mai 2011 relative à l'accès au marché du travail des étudiants étrangers a été abrogée, mais après combien de polémiques inutiles et d'injustices ? Après quel tort fait à l'image de la France dans le monde, en Afrique, en Chine, en Inde ? Cette circulaire était contraire à nos intérêts, était un non-sens pour notre pays, contradictoire avec les discours des dirigeants français quand ils se déplaçaient à l'étranger. Elle conduisait à refuser le séjour à des personnes étrangères hautement qualifiées, ayant étudié dans nos universités et dans nos grandes écoles, à des étudiants qui souhaitaient, à l'issue de leurs études, exercer leurs talents dans notre pays.

La circulaire du 31 mai 2012, que j'ai signée avec mes collègues Michel Sapin et Geneviève Fioraso, est venue rectifier cette situation en favorisant le changement de statut pour les étudiants les plus méritants.

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