Intervention de Véronique Massonneau

Séance en hémicycle du 6 juillet 2015 à 16h00
Accessibilité des établissements des transports et de la voirie pour les personnes handicapées et accès au service civique pour les jeunes en situation de handicap — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Massonneau :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, la loi de 2005 inscrivait dans notre droit de bonnes intentions en faveur de l’accessibilité. Elles auraient dû se concrétiser cette année en totalité. Or, dix ans après, le compte n’y est pas et nous ne pouvons que constater l’inadéquation entre les ambitions et la réalité des moyens mis en oeuvre pour les atteindre.

Nous pouvons tout de même nous féliciter de la dynamique engagée en faveur de l’accès à tout et pour tous. Cependant, cette dynamique n’a pas été suffisante et il reste aujourd’hui encore beaucoup à faire. De ce constat, nous devons tirer les leçons : l’idéal déconnecté du réel conduit à l’échec. Une loi mal appliquée est souvent une mauvaise loi, et c’est bien aux parlementaires de remettre en question les objectifs de chaque texte qu’ils votent. De la réalité à l’idéal, il y a les moyens et la volonté. Je crois profondément que c’est cet équilibre qui doit nous guider dans nos travaux législatifs. Or, force est de constater qu’entre 2005 et aujourd’hui, on a parfois manqué de volonté et on n’a pas su ou pu dégager suffisamment de moyens.

Si l’inclusion des personnes en situation de handicap doit être une priorité pour notre société, elle doit se faire en toute conscience des possibilités de sa mise en oeuvre. Les ambitions démesurées ne conduisent nulle part, comme nous pouvons le constater, si ce n’est susciter de la frustration. Alors que les petites communes font face à des situations budgétaires souvent difficiles, alors que les petits commerces font face à la grande distribution, leur imposer des travaux aux coûts insoutenables n’améliore en rien la vie des personnes en situation de handicap : in fine, chacun est insatisfait et l’exaspération est d’autant plus grande. Cette situation amplifie la défiance envers les politiques, déconnectés de la réalité, pour les uns, impuissants à régler les problèmes, pour les autres.

Nous avons aujourd’hui la responsabilité de rectifier le tir, de proposer à chacun des délais convenables et réalistes afin que nos grandes déclarations dans cet hémicycle puissent vraiment se concrétiser dans la vie des personnes en situation de handicap. C’est ce que proposent ces ordonnances, qui nécessitent malheureusement mais nécessairement de prolonger certains délais de mise en accessibilité.

Chers collègues, vous l’avez certainement constaté comme moi, les associations de personnes en situation de handicap sont très mécontentes et, pour beaucoup, ne veulent pas de ces ordonnances. J’entends leurs critiques légitimes et comprends leur frustration. J’entends aussi les ERP, qui font état de contraintes importantes ; de fait, les procédures de dépôt des agendas d’accessibilité programmé – les Ad’AP – sont lourdes et parfois incertaines.

Nous devons malgré tout demeurer exigeants, ne pas rouvrir des délais interminables, ne pas céder aux dérogations systématiques. Nous avons la responsabilité de comprendre le quotidien des personnes en situation de handicap, les difficultés permanentes et inacceptables qu’elles rencontrent, qui les laissent en marge de notre société. Il nous revient de comprendre quels sont les moyens d’y remédier concrètement et réellement afin qu’au plus vite, chacun, handicap ou non, puisse se déplacer en transports en commun, aller à l’école ou à l’université, travailler, se divertir. Vivre, en somme. N’ajoutons pas au handicap l’exclusion sociale. Pour cela, il est temps de cibler notre action parlementaire.

Je tiens à souligner le bon travail qui a été mené en commission, avec quelques avancées notables, comme les Ad’AP obligatoires pour les transports en commun, et j’en profite pour saluer le travail et l’écoute du rapporteur. Nous attendons que cet examen en séance se poursuive dans le même esprit.

Au regard des précisions que je viens de vous exposer, les écologistes souhaitent que les dérogations soient le moins nombreuses possibles, et que soient mis en place un accompagnement et un soutien financier lorsque les travaux d’accessibilité sont trop lourds pour certains établissements. Les délais peuvent alors être prolongés modérément, choix préférable à une dérogation pure et simple, qui ne permettra jamais l’accès à tous. Pour ces raisons, je défendrai l’obligation d’avis conforme de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité à l’égard des demandes de dérogation de mise en accessibilité préalablement à la décision du préfet.

Je souhaite conclure sur un message positif, en saluant les nombreuses initiatives en faveur de l’accessibilité qui ont néanmoins déjà été entreprises dans notre pays. Car si la loi de 2005 n’a pas rempli tous ses objectifs, ce serait une erreur de nier les efforts qui ont été faits par de nombreux Françaises et Français, particuliers, collectivités ou entreprises. Que notre action parlementaire de ce jour puisse les soutenir davantage et insuffler un nouvel élan en faveur de l’égalité envers nos concitoyens en situation de handicap !

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