Intervention de Sandrine Mazetier

Séance en hémicycle du 15 juillet 2015 à 15h00
Réforme de l'asile — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Mazetier, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, nous voilà saisis en lecture définitive du projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile, à la suite de l’échec de la commission mixte paritaire qui s’est tenue le 10 juin dernier. Je ne reviendrai pas sur le contenu du texte, dont Mme la secrétaire d’État vient de rappeler les piliers.

En nouvelle lecture, les 30 juin et 7 juillet derniers, le Sénat a maintenu la position qu’il avait adoptée sur les principaux sujets de désaccord avec notre assemblée. Il a ainsi modifié à nouveau la composition du conseil d’administration de l’OFPRA, rétabli le délai de trois mois imparti à l’Office pour statuer en procédure normale, ramené à 90 jours le délai à l’issue duquel une demande d’asile est considérée comme tardive et rétabli la faculté pour l’Office de clôturer l’examen d’une demande d’asile lorsque le demandeur a abandonné son lieu d’hébergement.

Pour citer d’autres exemples, il a aussi réintroduit une disposition transférant le contentieux des décisions de refus d’entrée sur le territoire prises sur avis conforme de l’OFPRA à la Cour nationale du droit d’asile plutôt qu’au juge administratif de droit commun. Nous nous y étions opposés en première et en nouvelle lectures, nous nous y sommes évidemment opposés en CMP et nous nous y opposons toujours.

Le Sénat, en outre, a supprimé la mention, qui nous était chère, selon laquelle l’attestation de demande d’asile vaut autorisation provisoire de séjour.

Il a également rétabli le caractère facultatif de l’accompagnement social et administratif des demandeurs d’asile – là encore, nous avions longuement débattu de cette question en commission et dans l’hémicycle, à l’Assemblée – et supprimé l’entretien individuel systématique pour évaluer la vulnérabilité du demandeur.

Par conséquent, sur un certain nombre de points, que je n’ai pas tous énumérés, l’Assemblée nationale ne partage décidément pas les vues du Sénat.

Dans ces conditions, il apparaît à l’évidence que les désaccords qui persistent entre nos deux Chambres ne peuvent être tranchés qu’en donnant le dernier mot à l’Assemblée, comme le permet la Constitution. Le Gouvernement a donc demandé à l’Assemblée nationale de statuer définitivement.

Comme vous l’avez vous-même fait à l’instant, madame la secrétaire d’État, je rappelle qu’à ce stade de la procédure, l’Assemblée, conformément au dernier alinéa de l’article 45 de la Constitution, ne peut que reprendre le dernier texte voté par elle, modifié le cas échéant par un ou plusieurs amendements adoptés par le Sénat, en commission ou en séance publique.

Je vous propose donc, en vue de la lecture définitive, de reprendre le texte voté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, sous réserve de la reprise de plusieurs amendements – essentiellement rédactionnels – adoptés par le Sénat.

J’ai pour le reste donné un avis favorable à l’adoption des amendements du Gouvernement que Mme la secrétaire d’État a présentés à l’instant.

Je défendrai pour ma part trois amendements : l’un, qui n’est pas rédactionnel, à l’article 2 concerne la rédaction des dispositions relatives à l’exclusion ou à la cessation de la protection pour motifs d’ordre public et permet de sécuriser le périmètre des crimes et délits concernés ; les deux autres sont rédactionnels.

Avant d’achever mon intervention, je souhaite vraiment m’associer aux remerciements formulés par Mme la secrétaire d’État à l’endroit de nos collègues qui, sur de nombreux bancs de cet hémicycle, ont largement enrichi le texte et ont conféré à nos débats la hauteur nécessaire : nous parlons en effet du droit d’asile et non, je le répète une fois encore, de « fuites d’eau ». Nous parlons de femmes et d’hommes qui, pour l’essentiel, fuient des situations chaotiques et dangereuses dans lesquelles les droits individuels élémentaires sont gravement bafoués.

Je tenais donc à souligner la qualité de nos débats parce qu’elle n’est pas toujours au rendez-vous dans cet hémicycle et qu’en l’occurrence, elle y a toujours été.

En première comme en nouvelle lectures, cette réforme a été largement adoptée et je souhaite qu’il en soit de même à l’issue de cette lecture définitive.

Je souhaite que nous soyons fiers de ce que nous avons accompli parce qu’il s’agit de répondre à l’urgence face à des situations épouvantables, que notre continent a d’ailleurs déjà connues : l’afflux de demandeurs d’asile, les chiffres que nous évoquons sont analogues à ceux que l’Europe connaissait à la fin des années 1980 par exemple.

Il était donc temps de réformer les procédures qui expliquent quasiment à elles seules la crise et l’embolie de notre système, comme vous l’avez dit madame la secrétaire d’État.

Au terme de cette réforme, la République, parce qu’elle les protégera plus vite, protégera mieux des femmes et des hommes qui cherchent à être protégés et qui méritent protection. Nous serons ainsi fidèles à nos valeurs et à notre Constitution et, ce faisant, à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ce dont je vous remercie.

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