Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du 16 juillet 2015 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Monsieur le secrétaire d’État, le groupe UDI voudrait vous décerner la médaille d’or de la dépense publique pour 2014, puisque c’est la première fois que notre pays est premier s’agissant du poids des dépenses publiques dans le produit intérieur brut. Jusqu’à présent, vous étiez second, et vous n’aviez donc que la médaille d’argent. Nous progressons, chaque année, dans le cadre de cette compétition internationale sur la dépense publique.

La raison de tout cela est très simple : au fond, votre majorité refuse, depuis le début du quinquennat, de mettre en place les grandes réformes structurelles dont le pays a besoin. C’est une fausse réforme de l’État et des collectivités territoriales qui nous nous a été présentée avec la loi NOTRe. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez été élu local pendant des années. Vous voyez donc bien que la thèse du Gouvernement selon laquelle cette réforme va modérer la dépense publique locale est entièrement fausse. Vous n’avez pas non plus opéré de réformes en matière de protection sociale et de santé. Vous n’avez pas réformé les retraites, vous avez même continué à aggraver la dérive des dépenses de retraite. La réforme du paritarisme est insuffisante. La loi sur la transition écologique est irréaliste. Il sera cruel de considérer cela dans dix ans. Enfin, la valorisation de la ressource humaine de notre nation est insuffisante.

Ce sont là autant de chantiers qu’il est urgent de reprendre et, tout simplement, de lancer, autant de chantiers que votre gouvernement n’a pas pris à bras-le-corps. Seules des réformes structurelles seraient à même d’endiguer la hausse continue de la dépense publique et de conduire à de véritables économies durables permettant de redresser les finances publiques.

Pour ne prendre qu’un exemple, je tiens à rappeler que la révision générale des politiques publiques, qui avait été mise en place par la précédente majorité, avait permis, sur la période 2009-2012, de dégager une douzaine de milliards de réduction de dépenses. C’était tout à fait insuffisant au regard de la situation des comptes de l’État, mais c’était un progrès. Et le non-remplacement, sous l’ancienne majorité, d’un fonctionnaire sur deux dans la fonction publique avait conduit à une baisse de 3 % des effectifs dans les services de l’État, soit une suppression d’à peu près 30 000 postes par an, puisqu’on comptait, à l’époque, à peu près 60 000 départs à la retraite.

À son arrivée au pouvoir, le Gouvernement a supprimé la RGPP qu’il avait tant critiquée, même s’il est vrai qu’il l’a remplacée par un nouveau dispositif qui n’est peut-être pas fondamentalement différent, et a promis à sa majorité une stabilisation des effectifs de la fonction publique. Or nous, membres du groupe UDI, avons dit et répété qu’il était impossible de réaliser des économies suffisantes sans réduire les effectifs de la fonction publique de l’État – y compris ceux des opérateurs de l’État. En effet, les dépenses de personnel de l’État représentent presque 42 % de ses dépenses nettes. C’est pourquoi nous avons déploré que le Gouvernement refuse de poursuivre l’effort de modernisation de l’État qui avait été engagé par la précédente majorité.

Toutefois, force est aujourd’hui de constater que vous n’avez pas respecté votre engagement. Pour ma part, je ne vous critique pas : je vous en félicite. Et je vous remercie, madame la rapporteure générale, de nous avoir donné les chiffres que nous demandions. Les effectifs de la fonction publique de l’État, opérateurs compris, ont baissé de 17 200 postes en 2013, mais, hélas, seulement de 5 000 postes en 2014. C’est moitié moins bien que ce que nous avions fait en 2013. En 2014, monsieur le secrétaire d’État, vous vous êtes relâché. Heureusement, que nos collègues ne regardent pas trop la loi de règlement – je ris toujours quand on ouvre des postes, parce que personne, à part Mme la rapporteure générale, ne regarde ensuite s’ils ont été pourvus. Il faut donc reprendre le mouvement de baisse, monsieur le secrétaire d’État.

Je veux saluer la prise de conscience du Gouvernement, tout en déplorant l’important décalage entre son discours et ses actes. Si la baisse des effectifs est nécessaire, la transparence sur la politique menée effectivement l’est tout autant.

Il en est de même en ce qui concerne les prélèvements obligatoires. Le Gouvernement a communiqué, à temps et à contretemps, sur leur baisse, afin de tenter de calmer ce qu’on appelle le ras-le-bol fiscal de nos concitoyens, assommés d’impôts et de cotisations sociales supplémentaires depuis le début du quinquennat.

Toutefois, les chiffres, monsieur le secrétaire d’État, encore une fois, démentent les affirmations gouvernementales. Hors crédits d’impôt, les prélèvements obligatoires passent de 44,7 % du PIB en 2013 à 44,9 % du PIB en 2014, soit près de 0,2 point de PIB, c’est-à-dire 4 milliards d’euros supplémentaires de pression fiscale. Et si l’on inclut les crédits d’impôt, ce qui est de bonne comptabilité, les prélèvements obligatoires passent de 45,5 à 46,1 % du PIB, soit 12 milliards d’augmentation de la pression fiscale en 2014. Tout comme pour la dépense publique, le Gouvernement ne procède pas à une baisse des prélèvements obligatoires, il essaie simplement de freiner un peu la hausse – c’est tout.

Quant au déficit, il demeure à un niveau particulièrement élevé, bien au-delà de celui de nos voisins européens. N’oublions pas que, dans son engagement no 9, le candidat François Hollande promettait de ramener les déficits publics à 3 % dès l’année 2013. Or, loin de se rapprocher de cet objectif, le déficit effectif n’a diminué que de manière tout à fait marginale, passant de 4,1 % en 2013 à 4 % en 2014. Et cette diminution de 0,1 point de PIB, c’est-à-dire fort peu de chose – 2 milliards d’euros –, tient essentiellement à la stabilisation des comptes de la Sécurité sociale et, surtout, à la réduction du déficit des collectivités territoriales françaises, qui passe de 8,5 milliards d’euros en 2013 à 4,5 milliards d’euros en 2014, soit une réduction de 0,2 point de PIB. Ce sont donc les collectivités territoriales qui font la très légère baisse. Pis, le gain de 0,2 point s’explique, hélas, pour moitié, par la chute des investissements – on vient d’avoir les chiffres de 2014 : ils ont diminué de plus de 10 % –, elle-même liée au cycle électoral, et, pour moitié, par la réduction des dotations de l’État aux collectivités territoriales.

Pour ce qui est de l’État et de ses administrations publiques centrales – APUC –, le déficit augmente et passe de 68,7 milliards d’euros en 2013 à 71,8 milliards en 2014, soit 3,1 milliards de plus. J’insiste sur ce dernier chiffre. L’augmentation est de 0,15 point. Que l’on ne nous parle donc pas de maîtrise des dépenses publiques !

Nous ne pouvons que nous élever contre cette méthode, qui consiste pour l’État à se contenter de demander des efforts considérables aux collectivités locales tout en augmentant lui-même son déficit. C’est également la crédibilité de la France qui est mise à mal auprès de nos partenaires européens, et ce alors même que la plupart de nos voisins ont fait des efforts considérables afin de respecter les objectifs communs et que le Gouvernement a la position que l’on sait à l’égard de la Grèce.

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