La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les députés, ce projet de loi de règlement vous revient en nouvelle lecture car le Sénat a fait le choix, pour la troisième année consécutive, de le rejeter. Nous avons eu l’occasion de débattre, ici même et au Sénat, des différentes interprétations possibles du projet de loi de règlement mais je tiens à insister sur le sens d’un tel rejet, qui est devenu une option courante depuis quelques années, alors qu’elle était exceptionnelle avant 2013 : il fallait, en effet, remonter jusqu’au projet de loi de règlement pour 1998 pour trouver un rejet par le Sénat de ce texte très particulier.
Au-delà des différentes interprétations de l’exécution qui nourrissent nos débats, je voudrais rappeler le contenu de ce projet de loi et convaincre l’Assemblée nationale que le fait de rejeter un projet de loi de règlement ne fait pas sens.
Les quatre premiers articles du projet de loi se bornent à constater des données de l’exécution de l’année 2014. Ils relèvent du domaine obligatoire de la loi de règlement, prévu par l’article 37 de la loi organique relative aux lois de finances – LOLF – et par l’article 8 de la loi organique du 17 décembre 2012.
L’article liminaire constate le niveau du déficit public nominal qui a été mesuré par l’INSEE et le niveau du déficit structurel dont le calcul a été vérifié par le Haut conseil des finances publiques.
L’article 1er constate le montant des dépenses et des recettes du budget de l’État en comptabilité budgétaire ainsi que le solde qui en résulte.
L’article 2 fait état des modalités de financement de l’État en distinguant les ressources et les charges de trésorerie – c’est le tableau de financement.
L’article 3 établit les comptes de l’État en comptabilité générale, dont je rappelle qu’ils ont été certifiés par la Cour des comptes.
Les quatre articles suivants opèrent, comme il est d’usage, diverses régularisations postérieures à la clôture de l’exercice.
L’article 4 opère, pour chaque programme du budget général, des ajustements mineurs sur les autorisations d’engagement et les crédits de paiement. L’article 5 procède à des opérations de même nature sur les budgets annexes, de même que l’article 6 sur les comptes spéciaux. L’article 7 arrête le solde définitif du compte de concours financiers « Avances aux organismes de sécurité sociale », qui a été supprimé en loi de finances pour 2015.
Enfin, l’article 8 prévoit une disposition relative à l’application du régime de responsabilité des comptables, comme le permet le V de l’article 37 de la LOLF.
Ce texte se contente donc de constater l’exécution et de passer des opérations de régularisation comptable.
Nous avons eu des débats nourris, depuis le début de l’année, sur l’exécution 2014 et sur les enseignements que l’on peut en tirer. Bien entendu, nous avons pu avoir des divergences sur les résultats obtenus et sur l’interprétation à donner à cette exécution. Mais l’objet de ce projet de loi de règlement est, encore une fois, le simple constat factuel de l’exécution. C’est pourquoi j’invite l’Assemblée nationale à confirmer son vote de première lecture et à adopter une nouvelle fois ce projet de loi de règlement pour 2014.
La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, nous abordons donc l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014. En effet, le 6 juillet dernier, notre assemblée a adopté le projet de loi dans la rédaction du Gouvernement – je rappelle qu’aucun amendement n’avait été déposé par notre assemblée. Le 9 juillet, le Sénat a rejeté le projet de loi de règlement pour la troisième année consécutive, au prétexte que la politique budgétaire du Gouvernement serait critiquable. Face à ces positions irréconciliables, la commission mixte paritaire – CMP – réunie hier a donc échoué. Voilà pourquoi nous examinons le texte adopté en première lecture par notre assemblée.
Je tiens à rappeler que l’examen en nouvelle lecture des projets de loi de règlement est assez rare – M. le secrétaire d’État vient d’ailleurs d’en dire quelques mots – puisque ces textes se bornent à constater, dans un article liminaire, la réalité des dépenses et des ressources du budget de l’État ou des administrations publiques depuis l’adoption de la loi de règlement de 2012.
Le Sénat n’a rejeté qu’à six reprises les projets de loi de règlement adoptés par notre assemblée en première lecture. Il s’agissait des lois de règlement de 1981, 1983, 1998 puis, avec une constance assez inédite mais qui perdurera peut-être – nous le verrons dans les prochaines années –, des lois de règlement des années 2012, 2013 et 2014. Par ailleurs, le seul cas connu dans notre histoire de rejet de l’exécution des comptes par les deux chambres, l’Assemblée nationale et le Sénat, nous a été rappelé hier par M. de Courson en commission mixte paritaire.
C’est ainsi qu’en 1833, le Parlement alla jusqu’à refuser de ratifier les dépenses engagées en 1830 – les lois de règlement étaient adoptées quelques années après leur exécution – par le baron de Montbel, alors ministre de l’intérieur, pour inciter les troupes à combattre les insurgés des Trois Glorieuses.
Au-delà de cet épisode historique, quelles sont les conséquences juridiques des rejets consécutifs des projets de loi de règlement par le Sénat ?
En premier lieu, la LOLF n’en prévoit pas. Le texte ne serait donc pas adopté sans que la réalité des chiffres des dépenses et des recettes puisse être remise en cause.
En second lieu, malgré le rejet par le Sénat, les textes ont été jusqu’à présent systématiquement adoptés en lecture définitive par notre assemblée, qui a le dernier mot. Par conséquent, j’ai une lecture politique du vote de nos collègues sénateurs.
Dès lors, quelle serait la portée politique de ces rejets ? L’utilisation de la loi de règlement comme support d’une critique de la politique économique du Gouvernement me paraît un peu décalée. Rejeter l’exécution du budget ne permet pas de revenir sur les décisions passées ; en tout cas, c’est mon constat. Nos collègues sénateurs justifient ce rejet par les prévisions trop optimistes de la loi de finances initiale. Nous avons présenté, dans les derniers rapports, l’évolution des écarts entre les prévisions utilisées pour la loi de finances et l’exécution. Nous avons constaté que ces écarts ne cessaient de se résorber depuis 2012. J’invite donc l’actuelle opposition à réserver cette critique à la majorité précédente, car les écarts étaient beaucoup plus importants entre 2007 et 2012 !
En conclusion, je veux souligner que ce projet de loi de règlement est sincère. Les comptes ont été certifiés par la Cour des comptes. Les points qui pouvaient faire l’objet de réserves ont été clarifiés et les efforts constatés sont bien réels. En cohérence avec la position adoptée en première lecture, je propose donc d’adopter ce texte sans modification.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le secrétaire d’État, cette nouvelle lecture du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014 me conduit à vous rappeler les demandes d’informations faites par courrier en 2014 et qui sont restées sans réponse. La première, à laquelle vous attachiez la plus grande importance sous la précédente législature, porte sur la ventilation du plafonnement de l’impôt de solidarité sur la fortune – ISF – par décile de revenu et par tranche de patrimoine. Je vous ai écrit le 24 octobre 2014 pour obtenir le tableau à double entrée extrêmement instructif que vous connaissez bien et auquel mes prédécesseurs à la présidence de la commission des finances étaient d’ailleurs particulièrement attachés. Cela s’appelait alors, non pas « plafonnement », mais « bouclier fiscal ». Je vous ai à nouveau écrit le 5 mai 2015 et j’espère que nous obtiendrons prochainement la réponse.
La deuxième demande est liée à la première – mais peut-être Mme la rapporteure générale a-t-elle obtenu les chiffres dans le cadre de son rapport d’information, toujours très intéressant, sur l’application des mesures fiscales contenues dans les lois de finances, que nous examinerons la semaine prochaine : il s’agit des montants, en 2013 et 2014, des recettes encaissées au titre de la contribution exceptionnelle. Je vous ai écrit à ce sujet le 25 septembre 2014 et vous ai relancé au début de l’année 2015. Je pense que nous avons maintenant les chiffres définitifs pour 2014.
Troisièmement, je vous ai demandé par courrier des informations sur le retour et le départ de contribuables, sur la base du rapport prévu par la loi de finances rectificative de la fin de l’année 2012 et qui, à partir de trois types d’informations fiscales – l’impôt sur le revenu, l’exit tax et l’ISF – permet de repérer les contribuables dont on peut penser qu’ils ont quitté le territoire national ou sont revenus pour des raisons de nature plutôt fiscale.
Ce sont des données extrêmement intéressantes, que je lie à une question que je vous ai posée par courrier le 16 décembre 2014, à laquelle nous n’avons pas eu de réponse, portant sur l’écart constaté entre la prévision d’impôt sur le revenu et l’exécution. En effet, il y eut, en 2013 et en 2014, un écart de 5 milliards d’euros, qui a été d’ailleurs relevé, dans ses rapports, par la rapporteure générale. Nous nous demandons si cet écart entre la prévision et l’exécution n’a pas, pour partie, comme explication l’hyper-concentration de l’impôt sur le revenu. Je rappelle en effet que 1 % des foyers fiscaux paient 30 % de l’impôt sur le revenu, et que 1 pour mille paient 10% du total de cet impôt. Cela représente des sommes considérables concentrées sur un nombre restreint de contribuables !
Nous en déduisons qu’il suffit que quelques milliers de contribuables aux revenus très élevés quittent le territoire pour que cela provoque une hémorragie fiscale. Je pense qu’il est de l’intérêt de chacun d’entre nous d’essayer de comprendre les raisons qui expliquent ce phénomène.
La Cour des comptes, dans son rapport sur l’exécution 2014, note que les écarts par rapport aux prévisions seraient liés aux revenus des capitaux plutôt qu’aux revenus salariaux, ainsi qu’aux revenus des professions indépendantes. Nous aurions tout intérêt à avoir des explications. Je souhaiterais donc que nous puissions avoir assez rapidement des réponses à ces courriers dont une grande partie date de l’année 2014.
Monsieur le secrétaire d’État, ce projet de loi de règlement pour 2014 est le constat de l’échec de votre politique depuis votre arrivée au pouvoir en 2012. Il met également en lumière les contre-vérités du Gouvernement sur l’état des comptes publics.
En premier lieu, alors que vous vous félicitez d’une maîtrise de la dépense publique, et alors même que vous aviez promis un effort de 15 milliards d’euros d’économies pour l’année 2014, la dépense publique en volume a bel et bien continué d’augmenter plus vite en 2014 qu’en 2013.
En effet, vous avez massivement substitué à la dépense budgétaire des crédits d’impôts qui ne sont pas comptabilisés comme tels en comptabilité budgétaire mais qui, dans les faits, représentent une dépense de l’État et doivent bien entendu être financés. C’est d’ailleurs la position de l’INSEE dans le cadre du système européen de comptabilité nationale. C’est ainsi que la dépense publique totale en valeur, comme en 2013, a continué d’augmenter près de deux fois plus vite que le produit intérieur brut en 2014.
Ainsi, à en croire le Gouvernement, l’ensemble des dépenses publiques – État, Sécurité sociale, collectivités territoriales – a augmenté de 0,9 % en 2014, soit moitié moins que la croissance des dépenses en 2013, qui était de 1,6 %. Le Gouvernement se félicite d’avoir réduit presque de moitié la progression des dépenses, mais ce chiffre n’est pas exact, car si l’on inclut les crédits d’impôt, la progression s’établit en réalité à 1,6 % en 2014, contre une croissance du PIB de 0,8 % en valeur, soit un différentiel de 0,8 %. Donc, la dépense publique, au sens de la comptabilité nationale, augmente bien deux fois plus vite que la croissance en valeur du PIB.
Et pour 2013, les chiffres étaient les suivants : 1,8 % de progression des dépenses, crédits d’impôts compris ou non, puisque ces derniers étaient à peu près stables, contre 1,1 % de croissance en valeur du PIB. La croissance en volume, en 2013, était donc bien de 0,7 %, contre 0,8 % en 2014 ? Il n’y a donc aucun freinage, monsieur le secrétaire d’État, il y a même une très légère augmentation en volume.
Ainsi, il ne faut pas s’étonner que le poids des dépenses publiques dans le PIB, même hors crédits d’impôt, continue d’augmenter. Hors crédits d’impôt, les dépenses publiques consolidées – État, Sécurité sociale, collectivités territoriales – sont passées de 56,2 % du PIB en 2013 à 56,3 % en 2014. Et si l’on inclut, en bonne comptabilité nationale, les crédits d’impôt – tenez-vous bien, mes chers collègues ! – elles passent de 57 % à 57,5 %. C’est là un record historique.
Alors, monsieur le secrétaire d’État, je ne suis pas de ceux qui pensent que la vie est uniquement en noir et blanc. Quelques efforts ont été consentis, c’est vrai, mais ils demeurent notoirement insuffisants – il suffit de regarder les chiffres. Ce constat est d’ailleurs partagé par la Cour des comptes, qui a indiqué que la France se plaçait maintenant au plus haut niveau de dépenses de l’OCDE, alors que « la qualité des services publics n’est pas forcément à la hauteur ».
Monsieur le secrétaire d’État, le groupe UDI voudrait vous décerner la médaille d’or de la dépense publique pour 2014, puisque c’est la première fois que notre pays est premier s’agissant du poids des dépenses publiques dans le produit intérieur brut. Jusqu’à présent, vous étiez second, et vous n’aviez donc que la médaille d’argent. Nous progressons, chaque année, dans le cadre de cette compétition internationale sur la dépense publique.
La raison de tout cela est très simple : au fond, votre majorité refuse, depuis le début du quinquennat, de mettre en place les grandes réformes structurelles dont le pays a besoin. C’est une fausse réforme de l’État et des collectivités territoriales qui nous nous a été présentée avec la loi NOTRe. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez été élu local pendant des années. Vous voyez donc bien que la thèse du Gouvernement selon laquelle cette réforme va modérer la dépense publique locale est entièrement fausse. Vous n’avez pas non plus opéré de réformes en matière de protection sociale et de santé. Vous n’avez pas réformé les retraites, vous avez même continué à aggraver la dérive des dépenses de retraite. La réforme du paritarisme est insuffisante. La loi sur la transition écologique est irréaliste. Il sera cruel de considérer cela dans dix ans. Enfin, la valorisation de la ressource humaine de notre nation est insuffisante.
Ce sont là autant de chantiers qu’il est urgent de reprendre et, tout simplement, de lancer, autant de chantiers que votre gouvernement n’a pas pris à bras-le-corps. Seules des réformes structurelles seraient à même d’endiguer la hausse continue de la dépense publique et de conduire à de véritables économies durables permettant de redresser les finances publiques.
Pour ne prendre qu’un exemple, je tiens à rappeler que la révision générale des politiques publiques, qui avait été mise en place par la précédente majorité, avait permis, sur la période 2009-2012, de dégager une douzaine de milliards de réduction de dépenses. C’était tout à fait insuffisant au regard de la situation des comptes de l’État, mais c’était un progrès. Et le non-remplacement, sous l’ancienne majorité, d’un fonctionnaire sur deux dans la fonction publique avait conduit à une baisse de 3 % des effectifs dans les services de l’État, soit une suppression d’à peu près 30 000 postes par an, puisqu’on comptait, à l’époque, à peu près 60 000 départs à la retraite.
À son arrivée au pouvoir, le Gouvernement a supprimé la RGPP qu’il avait tant critiquée, même s’il est vrai qu’il l’a remplacée par un nouveau dispositif qui n’est peut-être pas fondamentalement différent, et a promis à sa majorité une stabilisation des effectifs de la fonction publique. Or nous, membres du groupe UDI, avons dit et répété qu’il était impossible de réaliser des économies suffisantes sans réduire les effectifs de la fonction publique de l’État – y compris ceux des opérateurs de l’État. En effet, les dépenses de personnel de l’État représentent presque 42 % de ses dépenses nettes. C’est pourquoi nous avons déploré que le Gouvernement refuse de poursuivre l’effort de modernisation de l’État qui avait été engagé par la précédente majorité.
Toutefois, force est aujourd’hui de constater que vous n’avez pas respecté votre engagement. Pour ma part, je ne vous critique pas : je vous en félicite. Et je vous remercie, madame la rapporteure générale, de nous avoir donné les chiffres que nous demandions. Les effectifs de la fonction publique de l’État, opérateurs compris, ont baissé de 17 200 postes en 2013, mais, hélas, seulement de 5 000 postes en 2014. C’est moitié moins bien que ce que nous avions fait en 2013. En 2014, monsieur le secrétaire d’État, vous vous êtes relâché. Heureusement, que nos collègues ne regardent pas trop la loi de règlement – je ris toujours quand on ouvre des postes, parce que personne, à part Mme la rapporteure générale, ne regarde ensuite s’ils ont été pourvus. Il faut donc reprendre le mouvement de baisse, monsieur le secrétaire d’État.
Je veux saluer la prise de conscience du Gouvernement, tout en déplorant l’important décalage entre son discours et ses actes. Si la baisse des effectifs est nécessaire, la transparence sur la politique menée effectivement l’est tout autant.
Il en est de même en ce qui concerne les prélèvements obligatoires. Le Gouvernement a communiqué, à temps et à contretemps, sur leur baisse, afin de tenter de calmer ce qu’on appelle le ras-le-bol fiscal de nos concitoyens, assommés d’impôts et de cotisations sociales supplémentaires depuis le début du quinquennat.
Toutefois, les chiffres, monsieur le secrétaire d’État, encore une fois, démentent les affirmations gouvernementales. Hors crédits d’impôt, les prélèvements obligatoires passent de 44,7 % du PIB en 2013 à 44,9 % du PIB en 2014, soit près de 0,2 point de PIB, c’est-à-dire 4 milliards d’euros supplémentaires de pression fiscale. Et si l’on inclut les crédits d’impôt, ce qui est de bonne comptabilité, les prélèvements obligatoires passent de 45,5 à 46,1 % du PIB, soit 12 milliards d’augmentation de la pression fiscale en 2014. Tout comme pour la dépense publique, le Gouvernement ne procède pas à une baisse des prélèvements obligatoires, il essaie simplement de freiner un peu la hausse – c’est tout.
Quant au déficit, il demeure à un niveau particulièrement élevé, bien au-delà de celui de nos voisins européens. N’oublions pas que, dans son engagement no 9, le candidat François Hollande promettait de ramener les déficits publics à 3 % dès l’année 2013. Or, loin de se rapprocher de cet objectif, le déficit effectif n’a diminué que de manière tout à fait marginale, passant de 4,1 % en 2013 à 4 % en 2014. Et cette diminution de 0,1 point de PIB, c’est-à-dire fort peu de chose – 2 milliards d’euros –, tient essentiellement à la stabilisation des comptes de la Sécurité sociale et, surtout, à la réduction du déficit des collectivités territoriales françaises, qui passe de 8,5 milliards d’euros en 2013 à 4,5 milliards d’euros en 2014, soit une réduction de 0,2 point de PIB. Ce sont donc les collectivités territoriales qui font la très légère baisse. Pis, le gain de 0,2 point s’explique, hélas, pour moitié, par la chute des investissements – on vient d’avoir les chiffres de 2014 : ils ont diminué de plus de 10 % –, elle-même liée au cycle électoral, et, pour moitié, par la réduction des dotations de l’État aux collectivités territoriales.
Pour ce qui est de l’État et de ses administrations publiques centrales – APUC –, le déficit augmente et passe de 68,7 milliards d’euros en 2013 à 71,8 milliards en 2014, soit 3,1 milliards de plus. J’insiste sur ce dernier chiffre. L’augmentation est de 0,15 point. Que l’on ne nous parle donc pas de maîtrise des dépenses publiques !
Nous ne pouvons que nous élever contre cette méthode, qui consiste pour l’État à se contenter de demander des efforts considérables aux collectivités locales tout en augmentant lui-même son déficit. C’est également la crédibilité de la France qui est mise à mal auprès de nos partenaires européens, et ce alors même que la plupart de nos voisins ont fait des efforts considérables afin de respecter les objectifs communs et que le Gouvernement a la position que l’on sait à l’égard de la Grèce.
Après l’échec qu’a constitué l’année 2014, le groupe UDI espérait que le pacte de responsabilité et de solidarité serait une opportunité de redressement pour notre pays, afin que l’année 2014 soit celle du retour de la croissance, de l’emploi et de la confiance. Il n’en a rien été et vous êtes aujourd’hui, monsieur le secrétaire d’État, face à un constat d’échec. Nous déplorons que le Gouvernement, plutôt que de reconnaître le dérapage des comptes de l’État en 2014 et de tenir un discours de vérité aux Françaises et aux Français, tente de dissimuler cette triste réalité derrière des artifices comptables.
Tout comme le groupe UDI, la Cour des comptes appelle de ses voeux des économies « structurelles significatives et pérennes ». Votre refus de les engager et de mener une action courageuse au service de la France empêchera toute relance durable de la croissance, et ce malgré la conjoncture internationale, qui s’est quelque peu redressée.
Le groupe UDI votera donc contre ce projet de loi de règlement.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission des finances, chers collègues, notre assemblée s’apprête à adopter en nouvelle lecture, et sans modification, le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014, déposé le 27 mai par le Gouvernement.
Bien que convenu, l’exercice de la discussion générale permet de retracer les rebondissements budgétaires de l’année 2014, dus en partie au contexte macroéconomique, mais aussi à la réorientation de notre politique générale, avec l’annonce par le Président de la République du pacte de responsabilité et de solidarité au mois de janvier, et le commencement de son inscription dans la loi de finances rectificative du mois de juillet.
Ces mesures ont eu un impact significatif sur les prévisions initialement inscrites en loi de finances, d’autant plus que le contexte économique – et plus particulièrement le niveau historiquement bas de l’inflation, constaté à 0,5 % seulement en 2014 – a drastiquement limité, avec un faible niveau de croissance, la progression des recettes. Toutefois, cette baisse des recettes ne traduit pas pour autant par une baisse du niveau des prélèvements obligatoires, qui subsistent en 2014 à 44,9 % du produit intérieur brut, après 44,7 % en 2013, malgré l’effort consenti envers les ménages de la première tranche de l’impôt sur le revenu – effort que nous saluons.
Cette discussion générale permet tout de même de soulever plusieurs débats. Premier sujet : le déficit. Le Gouvernement défend un niveau de déficit nominal au plus bas depuis la crise financière mondiale de 2008, à 4 % du PIB. Engagé à poursuivre la baisse cette année et l’année prochaine, en dépit des dépenses nouvelles qu’il assume, pour l’ensemble de l’Union européenne, en matière de lutte contre le terrorisme, et au plan intérieur, à la faveur d’outils concrets de lutte contre le chômage des jeunes avec les contrats aidés, le Gouvernement explique cette amélioration du déficit par sa gestion budgétaire sérieuse, adossée à une maîtrise historique de la hausse de la dépense en valeur, qui s’établit à seulement 0,9 % hors crédits d’impôts.
En 2014, les dépenses du budget général sont objectivement en baisse nette d’un peu plus d’1 milliard d’euros par rapport à 2013 – alors que 100 millions d’euros de baisse supplémentaire étaient votés en loi de finances initiale. Les dépenses liées à la charge de la dette sont elles aussi en baisse nette de 1,7 milliard d’euros par rapport à 2013, ce qui est in fine colossal. Mais celles-ci demeurent malgré tout deux fois plus importantes que celles planifiées initialement par le Gouvernement ! Cela pose, dans le contexte actuel, marqué par de très faibles taux d’intérêt, la question de la soutenabilité de la dette, car rien ne garantit à moyen terme le niveau favorable de ce refinancement.
Enfin, il faut évoquer les « mouvements réglementaires », qui s’élèvent en 2014 à près de 2 milliards d’euros entre les annulations et les reports de crédits vers l’exercice ultérieur. Ces mouvements réglementaires de crédits sont considérés par la Cour des comptes comme des « artifices comptables » plutôt que comme de véritables économies structurelles. Nous ne pouvons nier que le solde s’est dégradé de plus de 10 milliards d’euros entre 2013 et 2014 : le déficit s’établit à 85,6 milliards d’euros. Toutefois, nous saluons résolument le changement de paradigme – certes tardif dans le quinquennat – opéré par le Gouvernement à partir du programme de stabilité 2015-2018, et qui consiste à prendre désormais des taux planchers et non plus des taux plafonds pour les principales estimations macroéconomiques. Ce changement tend à nous prémunir durablement de ces divergences d’interprétation.
Car tout le monde s’accorde à reconnaître – et le groupe RRDP de concert – que les dépenses ont été bien maîtrisées et même stabilisées en 2014 : leur montant est inférieur de 6,34 milliards d’euros aux dotations initiales de la loi de finances. Tout le monde s’accorde également à reconnaître que les normes de la dépense, en volume comme en valeur, ont été respectées.
Le deuxième sujet est celui des recettes. Les recettes nettes en 2014 sont inférieures de 9 milliards d’euros à celles de 2013. Ces 9 milliards d’euros manquants représentent plus de 4 % des recettes, ce qui est considérable ! L’écart entre l’estimation de Bercy à l’automne 2013 et l’exécution observée dans ce projet de loi est également considérable : l’exécution est inférieure de 10 milliards d’euros à l’exécution. Au total, les recettes nettes constatées s’élèvent en 2014 à 217 milliards d’euros.
Le niveau constaté de la croissance – plus 0,2 % en 2014 –est assez décevant. Bien que positif, il est en deçà du niveau de croissance de l’ensemble de la zone euro qui s’élève à plus 0,9 %, et à rebours du mouvement global de résilience des économies avancées qui, dans leur ensemble, ont vu leur PIB augmenter l’année dernière de 1,8 %.
Si nous ne pouvons que nous féliciter que la zone euro soit sortie de récession, notamment poussée par l’expansion de l’activité en Espagne, aux Pays-Bas, en Allemagne et au Portugal, nous regrettons toutefois la situation de la France et le maintien de la récession en Italie l’année dernière. Cette croissance atone a été poussée, comme il est d’usage en France, par la consommation des ménages, malgré le ralentissement des prix, et notamment la consommation des ménages concernés par la réduction d’impôt sur le revenu votée dans le cadre de la loi de finances rectificative de juillet 2014, réduction que notre groupe appelait de ses voeux. Nous nous félicitons ainsi que le pouvoir d’achat des ménages se soit nettement repris en 2014, malgré la hausse nette de 2,2 milliards d’euros de recettes issues de l’impôt sur le revenu – ces recettes passent ainsi de 67 à 69,2 milliards d’euros entre 2013 et 2014.
Néanmoins, l’impact négatif du commerce extérieur, le repli massif de l’investissement, la contraction du secteur de la construction et, surtout, la confiance qui tarde à revenir dans les entreprises françaises, dont les marges ont pourtant été objectivement confortées par la montée en puissance du CICE, ont eu globalement raison de la croissance l’année dernière.
Venons-en au sujet du CICE. Par la faiblesse de son utilisation, celui-ci a finalement pesé positivement sur nos finances publiques, à plus 3,3 milliards d’euros ! Ces dépenses d’impôt sur les sociétés ont malgré tout représenté 6,5 milliards d’euros en 2014. À ce titre, compte tenu de l’importance des montants engagés et du peu d’effet avéré, à ce stade, sur le chômage de masse que subissent nos concitoyens, le groupe RRDP déplore que le Gouvernement tarde à remettre au Parlement le rapport « sur la création d’un observatoire des contreparties » au CICE, prévu à l’article 29 de la loi de finances rectificatives de juillet 2014, issu d’un amendement du groupe radical.
Si les incertitudes demeurent sur la montée en charge du CICE, outre la donnée tangible qu’il passe en 2015 à 6 % en métropole et 7,5 % en outre-mer, concernant l’évolution des autres dépenses fiscales, aucune incertitude ne plane : leur montant a dépassé en 2014 toutes les espérances du Gouvernement ! Programmées initialement pour un montant de 70 milliards d’euros, elles ont dépassé les 72 milliards d’euros, ce qui est véritablement colossal. Rappelons que sous l’impulsion de notre nouvelle majorité, le montant total de certains avantages fiscaux à l’impôt sur le revenu a fait l’objet d’un plafonnement global. À compter de l’imposition des revenus de 2013, le Gouvernement a introduit un plafonnement global général fixé à 10 000 euros, compte non tenu des réductions d’impôt pour investissements outre-mer et souscriptions au capital de SOFICA.
Nous saluons résolument cet effort de justice fiscale par le plafonnement global des avantages à l’impôt sur le revenu, mais nous rappelons que le plafonnement n’est ni une simplification ni une réforme de fond et que, comme l’observe malheureusement la Cour des comptes, notre maîtrise des dépenses fiscales reste « déficiente », car l’estimation de leur coût demeure partielle.
En conclusion, après ces quelques remarques, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste votera bien ce projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014, qui s’inscrit dans notre programme de stabilité.
Mon propos sera bref : je voudrais simplement réorienter un peu notre débat. Cette discussion me surprend, car nous n’examinons pas un nouveau budget pour la France, nous prenons simplement acte des comptes de l’année passée. C’est en effet l’objet des lois de règlement – textes qui intéressent fort peu nos collègues parlementaires, ce que je regrette, car je suis très attachée à la fonction du contrôle de l’exécutif par le Parlement. Or c’est bien à cet exercice que nous nous livrons actuellement.
En définitive, la loi de règlement est l’équivalent du compte administratif ou du compte de gestion dans les collectivités locales. Tout à l’heure, nous prendrons acte de ces comptes. Je n’y reviendrai pas sur le fond, puisque je pense que tout a été dit en première lecture, mais je tiens à souligner qu’un véritable effort de maîtrise et de stabilisation de la dépense a été accompli – les comptes ont été certifiés.
Pourquoi donc, chers collègues de l’opposition, être aussi catastrophistes, si ce n’est pour des raisons politiciennes, puisqu’une élection aura lieu en fin d’année ? Je pense que notre pays n’a absolument pas besoin de lanceurs d’alerte qui alarment l’opinion publique ; nous avons besoin, au contraire, de donner confiance aux entreprises et à nos concitoyens. Évoquer en permanence le prétendu « dérapage de la dépense publique » est préjudiciable à l’ensemble de la représentation nationale, et à notre pays lui-même.
La dépense publique n’est pas pour moi l’alpha et l’oméga – pourtant, j’agis sur elle partout où je le peux. Je voudrais pouvoir vous dire tous les efforts qui sont accomplis, notamment à l’Observatoire des achats de l’État ; je voudrais pouvoir vous décrire toutes les dépenses qui sont réduites ; mais ce n’est pas l’alpha et l’oméga. Je rappelle que notre pays est différent des autres à cet égard : la notion de service public induit forcément des dépenses. Nos collègues qui critiquent la dépense publique sont les premiers, en réalité, à proposer des dépenses supplémentaires !
De tout cela, nous reparlerons à l’automne prochain, au moment de l’examen du projet de budget pour 2016. En attendant, je salue à nouveau les efforts qui ont été accomplis. Je le répète : le groupe socialiste, républicain et citoyen votera ce projet de loi de règlement.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les propos aimables et rassurants tenus par notre collègue socialiste disent, en réalité, beaucoup de choses : les alertes seraient inutiles ; il faudrait avoir confiance ; le modèle français justifierait les dépenses publiques que nous connaissons. Excusez-moi, chère collègue : vous avez dit tout cela paisiblement et fort aimablement, mais vous avez tout faux !
Je trouve cela très caractéristique de la situation actuelle de notre pays. Avons-nous besoin de davantage de confiance ? En d’autres termes, la crise dont nous souffrons est-elle une crise de confiance ? La réponse est oui. Mais cette crise tient largement à l’état de nos finances publiques, et à une mauvaise compréhension de ce que peuvent être le développement et l’épanouissement de notre pays.
En outre, il est pittoresque d’entendre des personnalités politiques qui, avec leurs alliés, louent volontiers les vertus des lanceurs d’alerte, nous expliquer que nous n’avons justement pas besoin d’eux dans le débat politique – et plus spécifiquement dans les débats liés aux finances publiques. Eh bien oui, nous voulons être des lanceurs d’alerte. Nous l’avons dit lors de la première lecture de ce projet de loi de règlement, et nous le répétons lors de cette nouvelle lecture : il y a un dérapage de la dette de l’État. À la fin de l’année 2014, celle-ci a augmenté de 70 milliards d’euros. Pouvons-nous nous le permettre ? Cela inspire-t-il la confiance ? La réponse est non.
Vous le savez : les effets en France de la reprise mondiale et européenne sont particulièrement modestes, car la confiance n’est pas au rendez-vous dans notre pays parce que la dette n’est pas convenablement maîtrisée.
Les acteurs économiques craignent pour aujourd’hui et pour demain. Et ils ont des raisons de craindre car ils ont subi hier des augmentations de prélèvements obligatoires, l’aggravation du déficit public, la diminution des recettes, la dissimulation des dépenses par des artifices – cela a été démontrée par la Cour des comptes – et le recours injustifié au programme d’investissements d’avenir. Il est vrai que notre discussion du projet de loi de règlement du budget est désormais éclairée par le débat d’orientation des finances publiques pour l’année prochaine. Hélas, la discussion que nous avons eue au sujet des orientations budgétaires pour 2016 met en lumière la mauvaise maîtrise des dépenses.
Que proposez-vous pour 2016, chers collègues de la majorité, qui soit susceptible d’inspirer confiance ? Rien sinon une prétendue maîtrise des dépenses portant sur des dépenses de constatation et nullement sur les crédits des ministères, qui augmentent ! Comment voulez-vous que l’augmentation des crédits des ministères pour 2016 inspire confiance ? D’où vient la prétendue maîtrise des dépenses publiques ? D’économies de constatation sur le prélèvement pour l’Union européenne, qui certes diminue beaucoup par rapport à la loi de programmation, et nullement d’une gestion vertueuse des ministères et de l’action du Gouvernement ! D’où vient encore cette maîtrise ? De la charge de la dette car les taux d’intérêt ont baissé, mais chacun sait quel serait l’effet aussi rapide que considérable de leur augmentation même modeste ! Elle vient aussi de la baisse de la dotation des collectivités locales. Cette baisse n’est pas scandaleuse.
J’ai toujours eu la rigueur de le dire ! Mais quel est l’effort consenti par les ministères ? L’augmentation des crédits des ministères est un totem qui vous encombre depuis le début du mandat, ainsi que la gestion des emplois publics, en particulier l’augmentation des effectifs de l’éducation nationale qui n’est en rien justifiée et efficace, notamment en raison des problèmes de recrutement, et qui n’est pas davantage la condition de l’indispensable amélioration du service public de l’éducation. La qualité du service public auquel vous êtes attachés, chers collègues de la majorité, n’est pas toujours liée aux moyens budgétaires qu’on y consacre ; elle dépend des orientations que l’on prend ou, plus exactement, que vous ne prenez pas.
Par ailleurs, le projet de loi de règlement du budget est un constat, comme vous l’avez dit fort justement au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen, chère collègue Rabin. Ce constat est éclairé par la Cour des comptes qui souligne l’interruption de la réduction du déficit du budget de l’État engagée depuis 2010. Peut-on se permettre, dans l’exécution du budget 2014, d’interrompre la réduction du déficit du budget de l’État ? Non ! Et la dette progresse encore ! Les débats que nous avons eus au cours des derniers jours au sujet du projet de loi de règlement du budget comme de l’orientation des finances publiques ou des décisions et accords relatifs à la Grèce révèlent l’extrême confusion dans laquelle se trouvent la majorité et le Gouvernement.
Disons, pour faire simple et être indulgent, que deux politiques économiques de sens contraires coexistent : celle qui aime les entreprises et celle qui stigmatise les entrepreneurs. La politique budgétaire est illisible. Tantôt, elle vante les mérites sinon de la rigueur, terme que j’assumerais là où vous vous y refusez, monsieur le secrétaire d’État, en tout cas d’un certain sens de la discipline que vous évoquez parfois, tantôt elle flatte un modèle reposant sur les dépenses publiques. Vous ne pouvez pas espérer améliorer la situation des finances publiques tout en exaltant le même modèle politique que celui que vous exaltiez il y a dix, vingt ou trente ans ! Le monde a changé, monsieur le secrétaire d’État !
Mais nous n’avons pas tous été toujours parfaits, nous vous l’accordons volontiers, et je l’ai dit avec d’autres sur ces bancs.
Vous parlez toujours de la même chose ! Des vertus du libéralisme, de la potion libérale !
Nous faisons preuve en effet d’une certaine constance ! Compte tenu du degré de dégradation des finances publiques de notre pays, ayez au moins l’indulgence de ne pas en rajouter, monsieur le secrétaire d’État ! Nos dépenses publiques présentent le niveau le plus élevé d’Europe à plus de 57 % du PIB, soit neuf points de plus que la moyenne européenne ! Peut-on se permettre de persister dans cette divergence ? Notre dette est, en 2014, supérieure à 95 % du PIB, en dépit du niveau des prélèvements obligatoires ! Comme nous l’avons dit à propos de la Grèce, vous compris, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les députés de la majorité, avec vos propres contradictions, l’euro ne peut se passer de la convergence des politiques économiques des pays de la zone euro.
Mais la réalité, même si vous jouez avec la patrouille tout en dialoguant avec les institutions européennes, c’est que le gouvernement dont vous êtes membre et qui représente la France, monsieur le secrétaire d’État, ne satisfait pas aux exigences de la convergence ! En réalité, vous ne souscrivez pas à la nécessaire unité de la politique économique des pays de la zone euro ! Vous ne pourrez pas mener ainsi des politiques contraires éternellement et dire dans les cénacles européens le contraire de ce que vous faites en matière de gestion quotidienne de notre pays. Ces contradictions, parfois techniques, sont en réalité très faciles à comprendre. Il n’y a pas vraiment lieu de se demander pourquoi notre pays manque tant de confiance, chers collègues de la majorité. La réponse est simple : ce manque de confiance est le résultat, l’effet et le méfait de la politique que vous soutenez !
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, chers collègues, nous sommes à nouveau amenés à débattre du projet de loi de règlement 2014 qui a essuyé hier un échec en commission mixte paritaire. Je rappelle à Mme la rapporteure générale, qui explique ce rejet par des raisons politiques, que c’est non pas la politique économique, mais bien la politique financière et budgétaire de la France qui a été ainsi dénoncée hier au Sénat dans le cadre de la commission mixte paritaire.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez affirmé dans un communiqué « l’engagement du Gouvernement à poursuivre la dynamique de la réforme de l’État engagée depuis plusieurs années ». Fort bien ! Dès la première lecture du projet de loi de règlement du budget 2014, vous déclariez que « les efforts demandés aux Français portent leurs fruits » et que « les efforts paient, produisent des résultats et les chiffres le prouvent ». Cela relève selon moi du déni ! Vous avez même rédigé une longue réponse à la Cour des comptes pour contester ses conclusions. Selon vous, « l’analyse de la Cour propose une analyse incomplète qui minore les résultats obtenus en matière de maîtrise des dépenses publiques. La Cour ne prend pas suffisamment en compte le fait que des mesures de redressement d’ampleur ont été prises dès le projet de loi de finances pour 2014, […] que ces mesures ont été amplifiées par la suite ». Telle est votre réponse aux observations de la Cour !
Je dirai très simplement et avec pragmatisme que ce n’est pas en cassant le thermomètre que l’on fait baisser la température ! Tout cela ne suffit pas à masquer la divergence d’appréciation entre la Cour des comptes et vous-même. Je crains fort que nous ne démontrions une fois encore cet après-midi qu’il est possible de faire dire des choses radicalement différentes aux mêmes chiffres, tant notre appréciation de l’exécution budgétaire 2014 diffère de la vôtre. La Cour des comptes a émis de sérieuses réserves sur le budget de l’État pour 2014 dans un rapport d’une rare sévérité. Rien ou presque n’a trouvé grâce aux yeux de ses magistrats. Le Premier Président de l’institution, Didier Migaud, a dressé un constat accablant que je partage sans réserve.
Il déplore d’abord l’interruption de la réduction du déficit budgétaire pour la première fois depuis 2010. En effet, celui-ci est en hausse de 10,7 milliards d’euros par rapport à 2013. La Cour constate que les dépenses exceptionnelles ne suffisent pas à expliquer l’aggravation du déficit budgétaire qui résulte essentiellement d’une baisse des recettes nettes de 6 milliards d’euros par rapport à 2013 et d’une hausse des dépenses nettes du budget général de 4,2 milliards d’euros par rapport à 2013.
Le rapport déplore ensuite une progression soutenue de la dette qui atteint 1 528 milliards d’euros contre 1 457 milliards fin 2013, soit une augmentation de 71 milliards en un an.
Troisièmement, les recettes sont inférieures aux prévisions. En 2014, les recettes de l’État se sont élevées à 291,9 milliards d’euros, soit une diminution de 9,3 milliards d’euros par rapport à 2013 en raison d’une baisse des recettes fiscales, la première depuis 2009.
Quatrièmement, les dépenses sont stabilisées au moyen d’« opérations budgétaires contestables », selon la Cour des comptes qui dénonce des sous-budgétisations persistantes et des reports de charges sur 2015. Comme les deux années précédentes, le Premier Président de la Cour des comptes a certifié les comptes de l’État pour 2014 tout en critiquant avec force votre vision à court terme des finances publiques, monsieur le secrétaire d’État. C’est bien là ce que nous dénonçons depuis trois ans !
La Cour des comptes vous met en garde contre l’excès d’optimisme caractérisant vos prévisions en déplorant que l’exécution budgétaire 2014 ait été « compromise par des prévisions optimistes en recettes et des ajustements tardifs en dépenses ». C’est pourquoi nous nous opposons au projet de loi de règlement du budget.
Je suis très inquiète pour l’exécution 2015, car des dépenses nouvelles aussi nombreuses que considérables sont venues alourdir le budget, induites par la lutte contre le terrorisme, le financement du service civique et la mise en oeuvre du plan numérique. Quand redresserez-vous la barre, monsieur le secrétaire d’État ? Quand tiendrez-vous compte des avertissements de la Cour des comptes ? Quand cesserez-vous de faire porter aux générations futures une politique budgétaire irresponsable ? Enfin, quand engagerez-vous les réformes structurelles nécessaires au redressement de la France qu’ont entreprises nos voisins européens ?
La discussion générale est close.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
J’évoquerai tout d’abord les points techniques soulevés par vos légitimes interrogations, monsieur le président de la commission des finances. Le fameux tableau à double entrée auquel vous faites allusion, je l’ai vu en fin de semaine dernière ou même cette semaine et il me semble même avoir signé le courrier d’accompagnement vous le transmettant. Vous devriez donc le recevoir dans les jours à venir.
Quant au rapport sur ce que vous appelez l’exil, ou les départs et les retours, je comprends vos interrogations, chacun est libre d’en avoir ! J’observe tout de même que ce document a systématiquement montré au cours des dernières années l’absence de mouvements significatifs. Attendons celui qui vous parviendra mi-septembre, conformément à la loi. En effet, ce document fait partie des obligations du Gouvernement qui est tenu de vous le transmettre à la mi-septembre. Vous l’aurez donc autour du 20 septembre. Enfin, j’avoue ne pas me souvenir de votre relance à propos de la contribution exceptionnelle, mais je vérifierai ce point sitôt rentré au ministère.
Je remercie Mme Hobert et Mme Rabin pour leur soutien. Afin de rassurer Mme Hobert, j’évoquerai un sujet qui l’a été par plusieurs orateurs et auquel j’ai consacré plus de temps en première lecture : la soutenabilité de la dette. Je répète que la faiblesse des taux d’intérêt ne découle pas complètement d’une conjonction des astres qui serait uniforme et applicable à tous les pays, faute de quoi je ne vois pas pourquoi l’Italie et l’Espagne ne bénéficieraient pas de taux d’intérêt aussi faibles que ceux de la France, sans même parler de la Grèce !
Chacun a sans doute remarqué que le « spread » entre l’Allemagne et la France est stable depuis quelques mois, voire quelques années, et que les taux d’intérêt pris en compte dans nos trajectoires budgétaires sont très largement supérieurs au taux constaté actuellement – nous allons jusqu’à prévoir, d’ici à 2018, un taux supérieur à 3,5 %, soit quatre ou cinq voire six fois plus que les taux constatés cette année. Cela ne nous protège en rien d’un dérapage ponctuel des taux d’intérêt toujours susceptible de se produire, d’autant plus que les liquidités sont abondantes en ce moment, mais le fait que la France bénéficie de l’un des meilleurs taux d’intérêt en Europe, ce sur quoi s’appuient d’ailleurs d’autres pays comme la Grèce, constitue tout de même un signe de reconnaissance de la qualité de la signature de la France et de l’importance de nos marges de précaution.
Monsieur de Courson, vous avez notamment évoqué la question des effectifs. Je vous répondrai sur ce point parce que – c’est rare, je le reconnais – vous étiez absent lors de nos débats la dernière fois.
Soyons clairs, s’agissant de la révision générale des politiques publiques – RGPP – François Cornut-Gentille et moi-même, alors députés, avions commis un rapport dans lequel il avait clairement démontré que la quasi-totalité des économies réalisées avaient été re-dépensées sous forme de mesures catégorielles. Dans certains ministères, les économies réalisées étaient même inférieures au montant dépensé en mesures catégorielles.
Monsieur le président, je confirme ce que vous dîtes : cela a été le cas, notamment, au ministère de l’intérieur. La RGPP n’a donc produit que très peu d’économies budgétaires. À l’éducation nationale, par exemple, elle a provoqué une flambée d’heures supplémentaires, dont chacun reconnaît ici que le coût – particulièrement d’ailleurs à un moment où elles étaient défiscalisées – était plus élevé que celui des heures dispensées dans le cadre du service normal d’un professeur certifié ou agrégé.
Ce que vous dites concernant la RGPP est donc loin d’être avéré.
Pour poursuivre sur cette question des effectifs, le Gouvernement s’était engagé à créer des postes dans trois secteurs prioritaires : l’éducation, la sécurité et la justice. Vous contestez la nécessité de créer des postes dans le l’éducation nationale : c’est votre droit. J’observe cependant que la plupart des députés qui contestent ici les créations de postes sont les premiers à nous écrire lorsqu’il s’agit d’éviter une fermeture d’école dans leur circonscription. Mais c’est une autre histoire !
Nous avons créé ces postes, mais ils n’ont pas tous été pourvus. Nous avons déjà eu, la semaine dernière, un débat sur la question, mais nous pouvons le reprendre tranquillement.
Dans son rapport, Mme la rapporteure générale a pointé trois années d’exercice budgétaire. Elle n’est pas remonté au-delà, car il s’agissait déjà d’un travail compliqué. Or que démontre son rapport ? Que cela a toujours été le cas. Si nous étions remontés jusqu’en 2012, en 2011 ou en 2010, nous aurions obtenu le même résultat.
Cette différence de 50 000 postes s’explique parfois par des éléments techniques, parfois par l’absence de candidats d’un niveau suffisant pour pourvoir les postes : je pense notamment, pour prendre un exemple personnel, au CAPES ou à l’agrégation de mathématiques.
Sourires.
Indépendamment de ces éléments techniques, il existe une constante entre les schémas d’emplois et les effectifs. La variation a été relativement faible.
S’agissant de notre politique en matière d’emplois, nous avions adopté le principe de la création de 10 000 postes répartis entre l’éducation nationale, la justice et la sécurité. Personne ne conteste aujourd’hui la nécessité de créer des postes dans le domaine de la sécurité : la suppression de 13 000 postes par la RGPP à une certaine époque fait aujourd’hui cruellement sentir ses effets dans la police nationale.
Vous contestez les postes créés dans l’éducation nationale : c’est votre droit. Quant à la justice, chacun connaît la situation : là aussi, les recrutements prévus suscitent peu de contestation.
La nouveauté du budget 2016 réside dans la loi de programmation militaire et l’engagement du Président de la République visant à assurer la sécurité des opérations de maintien de la sécurité intérieure, dites « OPINT », par analogie avec les opérations extérieures, dites « OPEX ».
Vous avez d’ailleurs observé que le chef de l’État a beaucoup parlé, lors de son interview du 14 juillet, de la participation de nos armées au maintien de l’ordre et à la prévention des actes de terrorisme. Dans ce domaine, oui, il y a eu une inflexion ; oui, il y a eu un changement de pied : je l’assume !
Alors que la loi de programmation militaire prévoyait, entre 2015 et 2016, la suppression de 7 500 postes, quelque 2 200 postes seront créés sur la même période. Le nombre de postes augmentera donc de plus de 9 000.
En effet, le président de la République – et, bien sûr, l’ensemble du Gouvernement – a estimé, indépendamment des opérations extérieures – qui sont d’ailleurs nombreuses et devraient être prises en compte lors des comparaisons budgétaires entre pays européens –, que la participation de nos armée aux opérations de prévention du terrorisme et de surveillance du territoire, aux côtés des forces de police et de gendarmerie, était une nécessité. L’exemple d’hier l’a encore parfaitement démontré.
Cette nécessité nous a conduit, il est vrai, à ne plus conserver la stabilité globale des effectifs alors qu’auparavant les créations étaient compensées par des suppressions, à due concurrence, dans d’autres ministères non prioritaires. La loi de programmation militaire va confirmer cette inflexion en la matière.
Enfin, monsieur Mariton, vous stigmatisez ce que vous appelez les économies de constatation, dues à la faiblesse des taux d’intérêt notamment, en disant que le Gouvernement n’y serai pour rien. Mais j’imagine ce que vous diriez si ces taux augmentaient ! Ce serait la faute à ce Gouvernement qui n’aurait pas su inspirer la confiance des prêteurs. Alors que quand les taux sont bas, monsieur Mariton, vous parlez d’aubaine : le Gouvernement en bénéficie comme cela, par la grâce de je ne sais qui !
En tout état de cause, vous savez comme moi que, s’il existe des économies de constatation, comme vous dites, il existe aussi des dépenses de même nature.
Voulez-vous je vous en donne quelques exemples ? La situation sociale ne conduit-elle pas à voir augmenter un certain nombre de dépenses correspondant à des prestations sociales – que vous pouvez contester – comme les allocations logement, dont nous aurons l’occasion de reparler ? Vous les stigmatisez parfois, et c’est votre droit. Quoi qu’il en soit, ces prestations augmentent.
Autre exemple, pas suffisamment connu, que je vous livre sous forme de confidence : à mon arrivée au ministère, il y a à peu près dix-huit mois, lors de ma prise de contact avec les différents chefs de service qui venaient se présenter à moi, le directeur de la Sécurité sociale m’a informé de l’existence d’un nouveau médicament destiné à soigner l’hépatite C, qui est d’une autre importance qu’un rhume de cerveau, car il s’agit d’une maladie grave. Or le coût d’un tel traitement étant extrêmement élevé, nous nous trouvions devant l’alternative suivante : ou bien nous soignions tout le monde, pour un coût d’environ 1 milliard d’euros, ou nous opérions un tri entre les malades afin de savoir lesquels seraient soignés en priorité – les jeunes, les femmes ou les malades les plus gravement atteints – ce que personne ne peut l’imaginer.
Que faut-il faire dans ce type de situation ? Contenir la dépense ? Nous l’avons fait, d’ailleurs, grâce à une disposition législative que le Parlement a bien voulu adopter : il s’agit, si je me souviens bien, du « coefficient L », qui a permis de limiter la dépense à 650 millions d’euros in fine.
Voilà le type de dépenses de constatation que vous oubliez quand vous parlez des économies de même type. J’ai pris en exemple certaines prestations sans avoir la cruauté de vous rappeler les dépenses liées à des contentieux communautaires qui remontent à des années où vous faisiez partie du Gouvernement.
Pour conclure, vous revendiquez le fait d’être des lanceurs d’alerte : c’est votre droit. Aujourd’hui, la dépense publique augmente de 0,9 % : vous ne l’avez pas contesté puisque vous avez vous-même utilisé ce chiffre. Avec ou sans crédits d’impôt, Monsieur de Courson, j’ai bien suivi : vous les prenez en dépenses quand cela vous arrange, et quand ce n’est pas le cas, vous vous référez à des années au cours desquelles ils sont ou non comptabilisés. Nous pourrons régler cela sur le pré tout à l’heure !
Sourires.
Monsieur Mariton, pendant les dix années qui ont précédé l’arrivée de ce gouvernement, la dépense publique augmentait en moyenne de 3 % exactement par an.
Vous qui aujourd’hui êtes angoissés, vous auriez dû être terrorisés ! Vous auriez alors dû être non pas des lanceurs d’alerte, mais des hurleurs d’alerte !
Quand la dépense publique augmentait de 3 % par an, et que vous étiez membre de la majorité ou, pour ce qui vous concerne, monsieur Mariton, membre éphémère du Gouvernement, vous ne trouviez pas cela dangereux.
Quand la dette publique doublait, et que vous étiez dans la majorité, vous ne jouiez même pas ce rôle de lanceur d’alerte : vous restiez muets. Or, monsieur Mariton, vous auriez dû être glacés d’effroi et paralysés de terreur.
Et aujourd’hui, alors que la dépense publique n’augmente que de 0,9 %, en incluant les crédits d’impôt, c’est-à-dire trois fois moins que lorsque vous étiez dans la majorité – et cette augmentation de 3 % par an a duré dix ans –, vous vous posez en lanceurs d’alerte !
Enfin, vous avez, à chaque fois, le culot de dire que le déficit public augmente.
Mais non, madame Dalloz ! Savez-vous ce qu’est un nombre plus grand qu’un autre ? Si vous prenez le déficit public en pourcentage du PIB sur les quatre dernières années, vous verrez qu’il diminue.
Monsieur de Courson, vous pouvez trouver qu’il diminue trop peu, que vous êtes déçu, mais ne dites pas, comme madame Dalloz, qu’il augmente.
Je le dis et j’assume : si les efforts que nous avons demandés portent leurs fruits, c’est parce que ce déficit public diminue. Et vous vous baladez sur les tribunes en lanceurs d’alerte subite en disant que les déficits publics explosent : ce n’est ni juste ni honnête !
Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les députés, vous devez adopter ce projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Monsieur le secrétaire d’État, je n’ai jamais évoqué l’écart entre les effectifs ouverts en loi de finances et les effectifs réalisés : j’ai parlé de l’évolution des effectifs en vous félicitant d’avoir réduit de 17 500 ceux de l’État et des opérateurs en 2013.
De 2 500, rien qu’à Bercy !
Or vous avez ralenti votre effort puisque qu’en 2014 la baisse enregistrée n’a été que de 5 000 postes, toujours d’après les informations fournies par Mme la rapporteure générale.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous incite à reprendre et à accentuer la réduction des effectifs publics. Sinon, vous ne pourrez pas y arriver.
Je n’ai pas non plus parlé d’une augmentation du déficit public global : j’ai simplement mentionné une très légère baisse, de 0,1 point en 2014. Mais mon objectif était de vous responsabiliser en soulignant que l’État, lui, a augmenté son déficit de 0,2 % sur son périmètre qui inclut les opérateurs.
En raison des programmes d’investissements d’avenir !
Arrêtez : les PIA n’ont jamais fait partie des dépenses !
Monsieur le secrétaire d’État, lorsque nous avons lancé les PIA, je me trouvais dans la majorité et j’ai dit à l’époque qu’il n’était pas sérieux de gérer les affaires de cette façon. J’ai dénoncé cette dérive excessive.
Vous parlez sans cesse d’évolution en valeur, mais vous oubliez de la rapporter à l’évolution du PIB en valeur, monsieur le secrétaire d’État. Quand, comme cela a été le cas au cours des deux dernières années, l’inflation est nulle, et que le taux de croissance s’élève à 0,2 % en volume, cela augmente très vite, et beaucoup plus vite que le PIB. C’est pourquoi vous avez maintenant la médaille d’or.
J’en viens à l’article liminaire.
Monsieur de Courson, le temps qui vous était imparti sur cet article est écoulé. Vous aurez l’occasion de vous exprimer sur les autres articles.
L’article liminaire est adopté.
Monsieur le secrétaire d’État, il y a un écart croissant, je ne cesse de le dire depuis des années puisque cela fait cinq ans que cela dure, entre le déficit effectif et le déficit structurel, et j’ai été très intéressé par le rapport du Haut conseil des finances publiques, que vous avez certainement lu. Voici ce qu’il dit pour expliquer l’écart : « Les incertitudes sur l’écart de production se transmettent, par construction, à la mesure du solde structurel, qui dépend également de la sensibilité des recettes à la croissance. »
« Bien qu’incertaine, la mesure du solde structurel n’en est pas moins indispensable pour apprécier la situation des finances publiques et l’orientation de la politique budgétaire. Dans la situation actuelle, elle permet d’appréhender les efforts à accomplir pour redresser durablement les soldes publics. » Le Haut conseil continue en soulignant que les estimations de croissance potentielle et d’écart de production sont traditionnellement incertaines et d’ailleurs peu relayées dans le débat public.
Monsieur le secrétaire d’État, l’écart est croissant. Ce n’est pas possible. La raison, c’est que vous prenez des hypothèses de croissance potentielle excessives au regard de ce que l’on constate a posteriori, ce n’est pas plus compliqué que cela.
(L’article 1erest adopté.)
L’article 2 n’intéresse personne alors qu’il est fort intéressant.
De combien l’État français, hors opérateurs, dont la croissance de l’endettement a en principe été bloquée, devra-t-il s’endetter pour financer le remboursement de la dette et le déficit ? C’est très simple, de 172 milliards, ce qui représente à peu de chose près la totalité de l’épargne des ménages français. En économie fermée, cela voudrait dire qu’il faudrait prélever la totalité de l’épargne si l’on voulait protéger l’épargne des entreprises.
Monsieur le secrétaire d’État, peut-on soutenir une croissance de la dette publique de 73 ou 75 milliards supplémentaires chaque année ? Vous avez suffisamment dénoncé l’augmentation de la dette publique sous le précédent quinquennat, mais où en serons-nous au bout de cinq ans ? Il y aura grosso modo 400 milliards supplémentaires. Vous me direz que c’est moins mal que ce qu’ont fait vos prédécesseurs – 600 milliards –, mais eux ont dû faire face à la crise de 2008. Quel commentaire faites-vous donc de l’article 2 ?
L’article 2 est adopté.
Voilà encore un article qui n’intéresse personne alors qu’il est essentiel puisque, à la suite d’un grand débat en loi organique, nous avons maintenant une présentation en comptabilité privée qui distingue le fonctionnement de l’investissement.
Nous lisons à la page 21 du rapport que nous dépensons en dépenses de fonctionnement 355 milliards et que les recettes de fonctionnement sont de 277 milliards. Cela signifie que, si vous ne touchez pas aux charges financières nettes, et que vous reportez la mise en oeuvre de la règle d’or que je défends depuis quinze ans, il faut faire 77 milliards d’économies, c’est-à-dire que l’essentiel du déficit du budget de l’État est un déficit de fonctionnement et pas du tout d’investissement. Cela revient à réduire de 24 % la dépense nette hors charges financières, ou de 15 % la dépense brute.
Voyez, mes chers collègues, l’effort qu’il faut faire. Ce n’est pas impossible. Entre cinq et dix ans, l’on peut y arriver et c’est indispensable. Il en est de même pour la Sécurité sociale, mais elle n’est en déficit que de 10 milliards globalement, sur 440 milliards, et l’on doit y arriver beaucoup plus vite.
Telle est la dure réalité. Nous dépensons plus que nous gagnons uniquement pour financer le fonctionnement de nos services publics et pas du tout pour investir. Pour l’investissement, il reste 20 milliards. En considérant qu’il y a une dizaine de milliards pour les investissements militaires, il ne reste plus que 10 milliards d’investissements civils. Voyez où nous en sommes et les efforts qui sont devant nous !
Je ne répondrai pas sur le fond.
Tout le monde a le droit de s’exprimer, monsieur de Courson.
Vous appliquez le règlement, c’est tout à fait légitime.
Je vous ferai tout de même gentiment observer que dire que tout le monde s’en fout à propos des articles est quelque peu méprisant pour ceux qui étaient là en première lecture.
Je vous l’ai fait observer tout à l’heure, c’est très rare mais vous n’étiez pas présent en première lecture, et vous avez certainement d’excellentes raisons.
Je sais que c’est exceptionnel, nous nous connaissons suffisamment et nous nous respectons suffisamment, mais venir faire la leçon en nouvelle lecture alors qu’un débat nourri a eu lieu en première lecture et affirmer que tout le monde s’en fout, sous-entendu à part moi, vos collègues apprécieront mais je trouve que c’est quelque peu méprisant.
Nous sommes tous concernés par ce sujet, monsieur de Courson.
Le point que vous venez d’évoquer est essentiel mais, avant de parler de 70 milliards d’économies, il faudrait se fixer comme objectif d’arriver à un excédent primaire.
L’excédent primaire, c’est l’écart entre les recettes et les dépenses en enlevant des dépenses les frais financiers. Si nous faisions table rase du passé, si nos prédécesseurs avaient totalement désendetté ou n’avaient jamais endetté le pays, il n’y aurait pas de frais financiers, il n’y aurait pas d’intérêts. Serions-nous pour autant capables d’équilibrer nos recettes et nos dépenses ? Malheureusement, nous ne le sommes pas, et c’est tout le problème.
Tout gouvernement devrait se fixer comme objectif d’arriver à cet excédent primaire à l’horizon d’un, de deux ou de trois ans. Je rappelle que nous sommes pratiquement les seuls en zone euro à être en déficit primaire. L’Italie, dont on parle souvent pour se rassurer, est en excédent primaire.
L’article 3 est adopté.
Les articles 4, 5, 6, 7 et 8 sont successivement adoptés.
Le projet de loi est adopté.
La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures vingt-cinq.
Ce matin, l’Assemblée a entendu les orateurs inscrits dans la discussion générale.
La parole est à Mme la ministre des outre-mer.
Mesdames, messieurs, la variété des sujets que vous avez abordés dans la discussion générale nous montre bien que ce projet de loi est l’occasion de réexaminer certains thèmes assez constants dans les outre-mer. Vous avez parlé de continuité territoriale, d’emploi des jeunes, de foncier. La discussion des amendements nous permettra d’approfondir chacun de ces sujets, et je me contenterai pour l’instant de préciser quelques points.
À l’orateur du groupe RRDP, je répondrai que la biodiversité dans les outre-mer représente une partie significative de la loi. Cela dit, son observation selon laquelle la biodiversité est très majoritairement dans les outre-mer est utile puisque cela nous permet de montrer l’intérêt en la matière de ces outre-mer pour l’Europe et la France. Nous souhaitons prendre une initiative à l’occasion de la COP21 et organiser des débats pour bien faire ressortir tout ce que l’outre-mer, dans toute sa diversité, peut apporter à notre pays.
Plusieurs d’entre vous ont parlé non seulement de la continuité territoriale, mais aussi de questions concernant les fonctionnaires. Je suggère là encore que nous en discutions à l’occasion des amendements sur l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité – LADOM.
Nous devons réfléchir d’une manière durable sur la question de la continuité territoriale. Nous avons procédé cette année à un certain nombre de modifications, dont il nous faudra tirer le bilan. J’ai l’impression que nous pourrons reprendre ces sujets plus sereinement l’année prochaine. Cela sera de fait plus facile, une fois que certaines échéances seront passées.
S’agissant des statistiques, M. Marie-Jeanne nous a fait part des difficultés qu’il éprouvait quant au remplacement de l’INSEE à la Martinique. Nous avons tous conscience qu’il nous faut des chiffres fiables pour les outre-mer et nous reprendrons cette discussion à l’occasion d’un amendement déposé par Victorin Lurel sur l’INSEE. Étant donné que nous voulons vérifier les prix et réussir à les comparer, pour voir s’ils sont égaux dans les différents outre-mer et en métropole, il est indispensable de disposer de chiffres fiables.
M. Polutélé a appelé notre attention sur les difficultés que le territoire de Wallis-et-Futuna pourrait rencontrer pour trouver la contribution destinée à régler le problème des fonctionnaires. Mais il y a eu un accord, des engagements ont été pris, et le territoire doit honorer sa signature. Nous allons voir avec les élus dans quelle mesure nous pouvons les aider, mais il faudra trouver le moyen de respecter cet engagement.
Sur l’aide au fret évoquée par M. Letchimy, un amendement a également été déposé. Cette aide avait été instaurée pour régler le handicap de la distance entre l’hexagone et les outre-mer. La problématique est tout à fait différente dans le cadre des départements d’outre-mer de la Caraïbe. Si vous souhaitez développer ou aider les transports dans la zone Caraïbe, il faudra le faire sur un autre fondement, en respectant les prescriptions de l’Union européenne et de l’OMC, et en accord avec les pays avoisinants.
S’agissant de ce que vous avez dit concernant la jeunesse, j’y reviendrai car c’est indiscutablement une question extrêmement importante dans la plupart des outre-mer. Là encore, nous en parlons et nous faisons beaucoup pour essayer de prendre ces problèmes à bras-le-corps. Nous avons maintenu beaucoup de crédits, mais nous ne sommes pas satisfaits du résultat auquel nous aboutissons aujourd’hui. Il nous faut réfléchir à une initiative spécifique et mener une concertation sur ce sujet, parce que nous ne faisons pas suffisamment pour régler cette question de l’insertion des jeunes dans les outre-mer qui, souvent, à des titres différents, sont en grande difficulté.
Mme Berthelot est revenue sur la question du foncier agricole en Guyane, qu’elle connaît parfaitement et qui lui tient à coeur. Nous en avons déjà parlé à plusieurs reprises et un rapport sur le foncier et l’agriculture en Guyane a été remis. Il est apparu qu’il serait difficile de créer une SAFER en Guyane en raison de l’absence d’institutionnels privés qui aident, ailleurs, à équilibrer le capital. Il faudrait donc une participation financière importante non seulement de l’État, mais aussi des collectivités.
Nous avons donc cherché une autre manière d’avancer sur cette question. Nous aurions pu créer une entité Antilles-Guyane, mais j’ai cru comprendre qu’un tel sujet n’était pas à l’ordre du jour. Nous avons donc plutôt essayé de mutualiser la gestion du foncier, pour tous les usages existants – logement, développement économique et agriculture –, au sein de l’établissement public d’aménagement de la Guyane, pour répondre à l’absence des SAFER qui existent ailleurs.
Nous expérimentons en Guyane des manières d’organisation particulières, puisque la collectivité unique qui verra le jour concentrera des responsabilités qui étaient jusque-là réparties. Nous pouvons développer en Guyane des principes d’intervention un peu originaux et, puisque nous pouvons travailler aujourd’hui en donnant à cet EPAG les moyens habituellement confiés aux SAFER, je pense que nous avons intérêt à avancer dans cette direction.
Par ailleurs, il va sans dire que le ministère des outre-mer a toujours été là pour appuyer l’intervention des élus et des collectivités auprès des autres ministères. Nous essaierons de reprendre la question avec Stéphane Le Foll, pour améliorer ce qui a été prévu dans la loi d’avenir pour l’agriculture. Agissons ainsi dans un premier temps et, si cela se révèle trop difficile, nous verrons comment faire autrement.
Par ailleurs, sur le foncier au sens large, j’ai saisi Christian Eckert, le secrétaire d’État au budget, pour améliorer ensemble les procédures de cession du foncier public. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le rapport du sénateur Thani Mohamed Soilihi, très bien fait et doté d’un titre de combat : « Domaines public et privé de l’État outre-mer : 30 propositions pour mettre fin à une gestion jalouse et stérile ». Cela nous montre bien qu’il y a chez les élus un certain mécontentement à ce sujet. Il nous faut chercher ensemble une manière d’avancer respectueuse non seulement des droits des élus, mais aussi de l’histoire de la Guyane et des moyens des uns et des autres.
Je reviendrai plus tard sur la question des emplois fonctionnels. Là encore, nous avons cherché une solution raisonnable qui respecte le droit des gens. Même si, demain, deux collectivités fusionnent, les personnels administratifs ne peuvent pas être remerciés du jour au lendemain, suite à une modification du statut. La solution que nous avons proposée est transitoire, mais elle permet de respecter les droits de ces personnels administratifs et la hiérarchie des postes – comme vous le savez, les DGS de région sont à un grade supérieur à celui des DGS de département.
Cette solution nous semblait conforme au droit administratif et, à ce jour, on ne nous en a pas proposé de meilleure. Toutefois, si l’on nous suggérait une autre formule respectueuse du droit des gens, j’y réfléchirais volontiers. Nous n’avons pas trouvé la martingale, mais, pour l’instant, la solution proposée nous semble la plus correcte pour les personnels employés dans les collectivités territoriales.
Enfin, s’agissant des armes en Nouvelle-Calédonie, nous aurons l’occasion d’en parler lors de la discussion des amendements.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 148 portant article additionnel après l’article 1er.
Cet amendement concernant les présidents des observatoires fait suite aux suggestions de certains députés. Sur le fond, nous sommes d’accord avec ce qui a été demandé concernant les observatoires des prix. Simplement, nous opérons une modification pour disposer du bon fondement juridique, car celui qui figurait dans l’amendement de Mme Bareigts et de M. Lurel avait trait au pouvoir du préfet, ce qui ne correspondait pas à ce qui était souhaité.
Cet amendement reprend la même idée, soit permettre aux présidents des observatoires de saisir le juge pour demander aux entreprises, sous astreinte, de déposer les comptes dans les délais réglementaires, mais nous visons les dispositions de l’article L. 611-2 du code de commerce qui sont plus appropriées que l’article 22 de la loi Lurel.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement no 148 .
Cet amendement vie à permettre aux présidents des observatoires de saisir les présidents des tribunaux de commerce aux fins d’obtenir communication des comptes annuels des entreprises. Il répond, comme l’a dit Mme la ministre, à l’amendement no 76 de Mme Bareigts et de M. Lurel, mais a le mérite de faire une référence à une disposition contraignante pour les entreprises. Avis favorable.
C’est un bon amendement que nous soutenons. J’aimerais ajouter que les grandes surfaces, notamment, ne fournissent pas les prix de leurs références. En Nouvelle-Calédonie, le gouvernement local a imposé cette obligation, grâce à laquelle on peut comparer les prix. Si l’on pouvait donner aux observatoires des prix, des marges et des revenus – OPMR – un tel pouvoir, à savoir communiquer les prix des références, on améliorerait la transparence et, partant, la concurrence, ce qui permettrait de faire baisser les prix. Nous voterons cet amendement.
Madame la ministre, je suis d’accord avec la base juridique que vous visez dans le code du commerce. Néanmoins, je pense qu’il serait bon d’ajouter un délai pour éviter que le président du tribunal de commerce mette du temps à exiger la communication des comptes des entreprises, voire qu’il ne l’exige pas du tout ! Je pense à un délai de deux semaines, sans quoi cette disposition risque de rester lettre morte.
L’amendement no 148 est adopté.
Cet amendement vise à donner aux associations de consommateurs représentatives sur le plan local un pouvoir d’action dont ne disposent actuellement que les associations ayant adhéré à une organisation représentative au niveau national et agréées au titre de l’article L. 411-1 du code de la consommation. Leur action ne s’exercera que sur leur territoire. Il n’y a donc pas de risque de dérive.
Si les associations de défense des consommateurs nationales ne sont pas toujours présentes en outre-mer, il existe des associations de défense de consommateurs locales, régulièrement agréées au titre de l’article L. 411-1 du code de la consommation. Il apparaîtrait nécessaire de permettre à ces associations locales de pouvoir agir sur le territoire devant la juridiction civile afin d’obtenir réparation des préjudices individuels subis par les consommateurs. Avis favorable.
L’amendement no 5 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Si cet amendement contrevient aux engagements de ne pas augmenter la pression fiscale, nous n’avons pas mauvaise grâce à dire que les paris et les jeux sont un marché florissant dans les outre-mer et que les chiffres d’affaires sont en augmentation constante. Le PDG du PMU vient de déclarer que son chiffre d’affaires a augmenté de 3 %. Je ne dis pas que son bénéfice a augmenté d’autant, mais toujours est-il qu’il y a une forme d’addiction aux jeux qui fait le bonheur de ces organismes.
Dans notre grande générosité, nous proposons d’augmenter de 2,5 % les prélèvements sur les paris hippiques et sportifs et de 0,5 % ceux sur les jeux de cercle en ligne pour reverser ces sommes aux conseils régionaux. Je rappelle que tout cela pourrait participer de l’attractivité de notre territoire, mais c’est un autre sujet que j’aborderai plus tard.
Votre proposition, sur un sujet qui vous tient à coeur, monsieur Lurel, aurait davantage sa place en loi de finances car elle tend à augmenter la pression fiscale sur les consommateurs de jeux de hasard, paris sportifs ou jeux en ligne, au profit des conseils régionaux. Par ailleurs, elle soulève un problème du point de vue de l’égalité devant l’impôt et de l’équité entre les joueurs, car le taux de retour net au joueur différerait pour un même jeu ou une même compétition en fonction de sa localisation. Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Les sommes assez considérables engagées dans les jeux de hasard, le PMU et autres jeux sont assez tentantes en effet. Il nous semble cependant que cette proposition mériterait d’être expertisée car, comme Mme la rapporteure l’a dit, il s’agit d’une disposition fiscale, et accroître les prélèvements pesant sur les joueurs des outre-mer et eux seuls serait difficile à mettre en oeuvre en l’état. Je vous propose par conséquent de retirer votre amendement. À défaut, l’avis serait défavorable. En tout état de cause, je suis prête à examiner, avec Christian Eckert, ce qu’il est possible de faire à ce sujet.
Sous le bénéfice des observations de Mme la ministre quant à la possibilité de reprendre cette proposition en loi de finances – et même si je désespère de la voir aboutir –, je retire cet amendement.
L’amendement no 87 est retiré.
La parole est à Mme Ericka Bareigts, pour soutenir l’amendement no 76 .
L’amendement no 76 est retiré.
Mon intervention vaudra présentation des quatre amendements que j’ai déposés sur l’article, monsieur le président.
Madame la ministre, je sais pertinemment que l’évolution statutaire que vous souhaitez pour LADOM – l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité – traduit un souci de bonne gestion et de transparence. Je tiens cependant à rappeler que le BUMIDOM, le bureau pour le développement des migrations dans les départements d’outre-mer, créé il y a plus de quarante ans, a expatrié des centaines de milliers de personnes vers la France métropolitaine, ses bureaux de poste, ses hôpitaux, portant gravement atteinte à la croissance démographique des îles de la Guadeloupe, de la Martinique et, dans une moindre mesure, de La Réunion. Cela a provoqué une vraie catastrophe : entre 2007 et 2014, notre population a diminué de 16 000 habitants et la fécondité a considérablement diminué. Du fait de cette chute démographique la Martinique ne comptera plus que 320 000 à330 000 habitants d’ici 2030.
Ce n’est pas une question à renvoyer à plus tard : il faut la traiter dès maintenant. Je demande donc au Gouvernement de s’en saisir et de faire des propositions.
Cette évolution démographique a de graves conséquences budgétaires et financières puisqu’une diminution aussi drastique de la population se traduira par moins 1,6 % de croissance du PIB et une perte financière et fiscale de 1,5 milliard d’euros.
Le défi auquel nous devons faire face est d’autant plus important que les deux tiers des jeunes qui partent ne reviennent pas, ce qui nous pénalise doublement, sur le plan démographique et en termes de dynamisme économique. C’est pourquoi la région Martinique a récemment mis en place le dispositif « Migration retour » et lancé un appel à projets, qui a suscité 176 candidatures alors que nous nous attendions à en recevoir soixante.
Je souhaite, madame la ministre, soit que vous vous saisissiez d’un de mes amendements pour enclencher le processus, soit que vous preniez l’engagement devant l’Assemblée d’élaborer un projet, ne serait-ce qu’à titre expérimental, avec la région Martinique.
Cet amendement vise tout d’abord à mettre en cohérence l’intitulé de l’Agence avec la terminologie en vigueur depuis plusieurs années pour désigner les territoires ultramarins. Cette nouvelle appellation s’est imposée partout et le ministère de la rue Oudinot lui-même a adopté le pluriel en devenant le ministère « des » outre-mer.
Il s’agit aussi de prendre en compte la diversité des situations, y compris en matière de mobilité. La migration réunionnaise présente des traits distincts de celle en provenance des Antilles, elle-même différente de celle originaire du Pacifique et les mesures que les unes et les autres exigent ne sont pas forcément uniformes.
Il est enfin nécessaire d’apporter une sécurité juridique en distinguant nettement les deux entités : celle issue de la loi du 30 avril 1946 et celle créée par le présent texte.
L’argument financier avancé en faveur du statu quo ne tient pas car ce changement d’appellation n’entraînera pas de manière automatique une modification de la signalétique et des outils de communication, le logo et le sigle restant inchangés.
Je comprends d’autant plus l’objectif symbolique de votre amendement, madame Bello, que j’ai moi-même proposé à la commission des lois de transformer le titre originel du projet de loi, qui porte dorénavanat sur le droit « des outre-mer » et non plus « de l’outre-mer ». Je ne peux pas néanmoins accepter cet amendement, en raison du coût non négligeable des modifications que son adoption entraînerait. Par ailleurs, le sigle LADOM est suffisamment générique pour justifier un refus de l’amendement que vous nous proposez.
Il est vrai, madame Bello, qu’on peut comprendre que LADOM soit l’Agence « des outre-mer » à partir du moment où le ministère lui-même est devenu celui « des outre-mer ». La difficulté est purement conjoncturelle : elle tient au coût budgétaire d’une telle modification. On devrait y arriver d’une manière ou d’une autre, mais cela demandera du temps. À l’heure actuelle, l’avis sera défavorable à une proposition qui accroît la dépense même si elle m’apparaît en soi assez logique.
Monsieur Letchimy, vous avez posé un problème de fond extrêmement important, qu’il s’agisse des Antilles, de La réunion ou de la Guyane, même si la situation démographique n’est pas la même dans ces différents territoires : que propose-t-on aux jeunes qu’on envoie se former en métropole ? Cette question n’a peut-être pas été suffisamment traitée et je remarque que plusieurs amendements, défendus sur divers bancs, soulèvent ce problème.
Je ne pense pas cependant qu’on puisse pour le moment confier à LADOM une mission similaire au dispositif « Migration retour ». Il me semble par ailleurs que l’Agence paye d’ores et déjà un billet retour aux jeunes qu’elle a envoyés se former en métropole. Ce qui manque, c’est une relation suivie entre le jeune et la collectivité locale, notamment la région, qui dispose de l’information concernant la commande publique et le développement économique. Il faut établir une relation entre les collectivités territoriales, Pôle emploi et LADOM, mais la mission de celle-ci se limite, dans un premier temps, à informer les collectivités concernées de qui revient et avec quelle formation, afin qu’on puisse déterminer ce qu’on peut lui proposer. J’ai constaté pour ma part que beaucoup de jeunes repartaient parce qu’on ne leur proposait pas grand-chose sur place.
Il faut que nous arrivions à structurer tout cela de façon méthodique. Je vois bien comment on peut avancer dans ce domaine. Pour ma part, je serais assez favorable à la mise en place d’un groupe de travail réunissant dès la fin du mois de septembre les élus des collectivités territoriales, les services de Pôle emploi et des représentants des entreprises – la fédération des entreprises d’outre-mer, par exemple –, qui sont en mesure de faire des propositions aux jeunes. Bizarrement une telle structure n’existe pas encore.
En revanche, s’agissant des jeunes qui ont déjà un emploi en métropole ou qui ne sont pas passés par LADOM, ce sera plus compliqué.
Le groupe de travail pourrait faire l’inventaire de tous les sujets à traiter et essayer de trouver des méthodes de travail adaptées. Ce peut être des choses très simples, comme réunir les jeunes diplômés, des représentants de la Région et de Pôle emploi.
L’amendement no 35 n’est pas adopté.
Votre réponse à mon intervention, madame la ministre, est exactement conforme à ce que je souhaitais : que vous enclenchiez le processus. Je suis favorable à la mise en place d’un groupe de travail en septembre afin qu’on puisse décliner une série de propositions pour les jeunes partis en formation par l’intermédiaire de LADOM, mais aussi ceux qui n’ont rien à voir avec l’Agence et inventer pour eux quelque chose de totalement nouveau. Une de mes propositions correspondait exactement à ce que vous souhaitiez, mais puisque le sujet d’aujourd’hui est celui de la réforme statutaire de LADOM, je retire l’amendement no 98 ainsi que les amendements nos 141 , 139 et 99 .
Cet amendement vise à assurer la participation de l’ensemble des Françaises et Français d’outre-mer à l’élaboration et à la mise en oeuvre d’une continuité territoriale efficace via l’action de LADOM. En effet, il y a un paradoxe : alors que les collectivités des outre-mer, les COM, sont largement concernées par les problématiques de continuité territoriale prises en charge par LADOM, elles ne sont pas représentées au sein de son conseil d’administration. Cette absence me paraît injustifiée.
Cet amendement prévoit que les collectivités d’outre-mer compteront des représentants au conseil d’administration de LADOM. Or ce conseil a vocation à diriger l’action de l’Agence. Celle-ci n’intervenant pas en dehors des départements et régions d’outre-mer, il n’y a pas lieu d’ introduire au sein de son conseil d’administration des représentants des collectivités d’outre-mer, de la Nouvelle-Calédonie ou de la Polynésie française. L’avis est donc défavorable.
Il est défavorable pour la même raison. LADOM agit principalement dans les départements d’outre-mer, dans des domaines qui relèvent principalement des services de l’État dans les collectivités d’outre-mer.
Cela dit, l’intérêt que portent à LADOM les collectivités de l’article 74 me paraît positif. On pourrait imaginer une rencontre, même informelle, autour de LADOM associant les élus des COM. En toute hypothèse, le travail de LADOM profite aussi, par exemple, à Wallis-et-Futuna. Il ne faudrait pas cependant alourdir à l’excès le fonctionnement de cette structure en multipliant les réunions obligatoires, au risque que ses membres y passent tout leur temps. Mais, encore une fois, l’idée d’informer et de consulter les élus des collectivités de l’article 74 au sujet des actions de LADOM qui les concernent est une idée à retenir.
L’amendement no 91 n’est pas adopté.
Il vise à insérer après l’alinéa 16 de l’article 2 les deux alinéas suivants : « Sur proposition du conseil d’administration, l’établissement peut être doté d’un conseil spécialisé permettant de renforcer l’efficacité et la qualité des mesures mises en oeuvre par l’établissement au niveau de la continuité territoriale et de la formation professionnelle par la mobilité.
« Ce conseil spécialisé, animé par le président du conseil d’administration, composé des pouvoirs publics, de représentants d’associations en outre-mer et des réseaux de formation, d’usagers et d’agents de l’établissement, contribue à l’amélioration de la performance de ce dernier et apporte des avis sur les mesures mises en oeuvre en son sein. Sa constitution, son fonctionnement et ses modalités d’organisation sont définis par décret en Conseil d’État. »
Il s’agit là d’une logique de démocratie participative.
La parole est à Mme Monique Orphé, pour soutenir l’amendement identique no 79 .
Il s’agit de créer au sein de cet établissement un conseil spécialisé dont le rôle sera consultatif. Dans le cadre de la modernisation de l’action de l’État, il apparaît opportun pour le bon fonctionnement de l’établissement d’intégrer dans ce conseil spécialisé des représentants des usagers, des associations ultramarines, des associations de consommateurs et des réseaux de formation. C’est un moyen de faire vivre la démocratie participative et surtout de rendre la structure plus transparente.
S’inscrivant dans le cadre de la modernisation de l’État, mais aussi dans une logique de démocratie participative, le conseil consultatif prévu par cet amendement doit permettre de renforcer l’efficacité et la qualité des actions mises en oeuvre par LADOM.
Je partage l’objectif que nos collègues souhaitent assigner à ce conseil spécialisé en prévoyant la représentation d’un certain nombre d’acteurs des territoires. Néanmoins, cette disposition est de nature réglementaire. Je demande donc à leurs auteurs de bien vouloir retirer ces amendements ; à défaut, je serai contrainte de donner un avis défavorable. Mais nous veillerons à ce que LADOM, qui doit aussi rester libre d’engager ses propres missions avec ses propres moyens, développe demain le type de relations que vous appelez de vos voeux.
Je comprends la demande d’échanges autour de LADOM et de participation à son travail qui s’exprime à travers ces amendements. Cela existait d’ailleurs autrefois, puisque l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer, l’ANT, comptait un conseil d’administration et un conseil d’orientation. Néanmoins cette disposition est d’ordre réglementaire. Nous avons compris le souhait que traduisent ces amendements, et nous verrons comment faire en sorte, par la voie réglementaire, de mieux associer les partenaires de LADOM à ses travaux. Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
L’amendement no 79 est retiré.
Mme Laurence Dumont remplace M. Denis Baupin au fauteuil de la présidence.
Il s’agit de ne pas priver l’établissement des compétences et des ressources de la fonction publique et de ne pas bloquer les perspectives de carrière des agents en place.
La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement identique no 62 .
Ces deux amendements nous semblent superfétatoires : le texte prévoit déjà que, hormis le directeur général et l’agent comptable, les agents de LADOM sont des contractuels de droit public. Cela signifie que le directeur général et l’agent comptable sont nécessairement des fonctionnaires. Par ailleurs, rien n’interdit de mettre des fonctionnaires à disposition de LADOM, ou d’en détacher auprès d’elle, conformément au statut général de la fonction publique. Avis défavorable.
Même avis. Dès lors qu’il s’agira d’un établissement public, il va de soi que les personnels en place pourront conserver leur statut de contractuels de droit public et nous avons bien dit que le directeur général et l’agent comptable seraient des fonctionnaires. L’expérience nous enseigne d’ailleurs qu’au cours des dix-huit dernières années, tous les directeurs de LADOM à part moi étaient des fonctionnaires. Le risque que les futurs directeurs de l’Agence ne le soient pas est donc mince.
L’alinéa 29 prévoit que « le représentant de l’État dans la collectivité territoriale d’outre-mer dans laquelle l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité possède une délégation territoriale en est le délégué territorial. » Cette rédaction se cantonne aux collectivités d’outre-mer. Or les actions de l’Agence, notamment en matière de formation professionnelle par la mobilité et d’insertion des publics ultramarins, se déroulent majoritairement dans l’Hexagone. Cela nécessite obligatoirement une coordination et une cohérence avec les services des préfectures de région et le représentant de l’État.
L’Agence développe également des coopérations avec les branches professionnelles et le monde économique afin de former la jeunesse ultramarine aux métiers en tension ou connaissant une pénurie de main d’oeuvre. L’Agence est donc un acteur incontournable en matière de lutte contre le chômage et favorise l’insertion dans l’emploi. La cohérence et la coordination doivent aussi être recherchées, tant dans l’Hexagone qu’en outre-mer. Cette articulation sera encore plus vitale pour la jeunesse ultramarine à compter de la création des treize grandes régions.
Cet amendement vise finalement à renforcer le rôle du préfet en faisant de celui-ci le délégué territorial de LADOM – ce qui est aujourd’hui prévu pour les seuls départements et régions d’outre-mer – au motif que les actions de LADOM se déroulent majoritairement dans l’Hexagone. Mais si dans les départements et régions d’outre-mer, le rôle du préfet est d’appuyer fortement les missions de LADOM sur les territoires ultramarins auprès des régions, LADOM n’a dans l’Hexagone qu’un rôle de prestataire de services, qui ne justifie pas la mobilisation des services préfectoraux au-delà des relations ponctuelles qu’ils entretiennent avec l’Agence. C’est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.
Cet argumentaire vaut également pour l’amendement suivant.
Même avis. Autant les préfets orientent l’action de LADOM dans les outre-mer, autant on ne peut pas dire qu’ils y attachent un intérêt particulier ni qu’ils assument une mission particulière en la matière en territoire métropolitain, en-dehors de leur compétence en matière de contrôle de la formation professionnelle. Cet amendement n’apporte donc pas grand chose. le délégué territorial de LADOM est souvent beaucoup plus motivé par le suivi et l’avenir de ces stagiaires qu’une personne extérieure. Là encore, je comprends l’idée mais cet amendement ne me semble pas apporter grand chose à l’action de LADOM.
L’amendement no 80 n’est pas adopté.
Il s’agit de prendre en considération à la fois la nouvelle organisation territoriale et la loi sur la formation professionnelle du 5 mars 2014, qui rendent encore plus nécessaire sur l’ensemble du territoire national l’articulation entre LADOM, chargée de la formation professionnelle par la mobilité et de l’insertion des publics ultramarins, et les services des préfectures de région et le représentant de l’État.
L’amendement no 41 , repoussé par la commission et par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 2 est adopté.
Cet amendement concerne la surcharge carburant.
Les billets d’avion coûtent bien trop cher en raison de la surcharge dite de carburant, que les compagnies aériennes appliquent systématiquement et qui apparaît sur les billets sous les codes YQ ou YR. Cette surcharge est censée compenser les variations à la hausse du prix du baril de pétrole. Mais alors que ce prix a chuté en dessous des cinquante dollars, les prix des billets n’enregistrent pas de baisse significative. Si l’on suivait les fluctuations à la baisse du prix du baril, ils devraient pourtant diminuer d’au moins 5 % par rapport à leur niveau de 2014. L’Association internationale du transport aérien, l’IATA, qui représente près de 84 % des compagnies aériennes dans le monde, estime que cette surcharge devrait disparaître à l’heure où les bénéfices des compagnies pourraient bondir de 26 %.
C’est pourquoi nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur ces surcharges, au plus tard six mois après la promulgation de la loi, afin de faire toute la transparence sur la formation des prix.
Avec la baisse du prix du pétrole, le poids des surcharges carburant apparaît en effet de plus en plus contestable. On peut d’ailleurs légitimement s’interroger sur ce qu’elles recouvrent. C’est un enjeu aussi bien pour les consommateurs que sur le plan de la concurrence. Ces surcharges carburant nuisent aujourd’hui à la transparence des prix des billets d’avion. Un rapport sur le sujet me paraît donc utile et la direction générale de l’aviation civile, la DGAC, me semble être la plus à même d’étudier cette question.
Eu égard à l’importance de l’enjeu, je me permets de contrevenir à un principe de la commission des lois en donnant un avis favorable à cette demande de rapport.
Nous ne sommes pas non plus friands de ces demandes de rapport, mais le sujet est particulièrement important pour les outre-mer, où l’on est par définition conduit à prendre souvent l’avion. On ne sait pas exactement comment ces surcharges carburant sont calculées ; ce ne sont pas vraiment des taxes, ni des redevances, mais des pratiques commerciales qui semblent subsister alors même que le prix du carburant diminue. Dans la mesure où ces surcharges sont assez illisibles, il peut être utile d’éclairer le consommateur. Le Gouvernement est donc favorable à un tel rapport.
Vous suggérez, madame la rapporteure que la DGAC soit chargée du soin de ce rapport. Sans vouloir être désobligeant envers la DGAC, je voudrais rappeler que ses deux rapports de 2013 n’ont pas permis de faire la lumière sur cette question. Je crois très sincèrement que si nous voulons connaître toute la vérité sur la formation des prix et ce que représente cette compensation dite surcharge carburant, au moins deux autres administrations pourraient se charger de ce rapport avec autant d’efficacité : la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, ou l’Autorité de la concurrence. Que l’on réfléchisse donc à deux fois au choix de l’administration qui élaborera ce rapport !
L’amendement no 88 est adopté.
La parole est à Mme Huguette Bello, pour soutenir l’amendement no 82 rectifié .
L’amendement no 82 rectifié , repoussé par la commission et par le Gouvernement, n’est pas adopté.
La création d’un comité technique et d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est rendue nécessaire par la spécificité des missions de LADOM et par son éclatement géographique entre plusieurs territoires.
La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement no 63 .
Du fait de la spécificité des missions de LADOM et de son éclatement géographique, avec dix-neuf implantations, dans l’hexagone et en outre-mer, il est nécessaire de doter l’Agence d’un comité technique et d’un comité d’hygiène et de sécurité. L’objectif est de garantir l’unicité du cadre d’action de l’Agence, notamment pour les agents contractuels de l’État.
Ces amendements visent à doter LADOM d’un comité technique et d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Ils me semblent satisfaits et je demanderai donc à leurs auteurs de bien vouloir les retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable. En effet l’article 16 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État impose la création de ces comités dans tout établissement public administratif. Comme LADOM devient un établissement public administratif, les amendements sont satisfaits.
L’amendement no 81 est retiré.
L’article 3 est adopté.
On voit se développer partout dans le monde l’organisation de « mariages touristiques » permettant de se marier à l’étranger. Or l’article 74 du code civil impose de se marier dans sa commune de résidence. Un Martiniquais, un Guadeloupéen ou un Polynésien résidant en métropole ne ne peut donc pas se marier au pays.
Je propose donc que l’on ouvre cette possibilité, et pas seulement au bénéfice des ultramarins. Il s’agit, dans le but de développer un tourisme lié à la célébration du mariage, de permettre à toute personne née dans l’hexagone d’emmener sa charmante fiancée ou son charmant fiancé en Martinique pour y convoler et y passer une semaine. Cela permettrait tout à la fois d’amplifier la dynamique touristique et de rétablir les liens sociaux des Antillais, Calédoniens ou Réunionnais souhaitant se marier dans leur propre pays.
Si je comprends bien, l’objectif de cet amendement est de relancer le tourisme en outre-mer mais ce que vous nous proposez, monsieur Letchimy, va plus loin.
Je crains qu’une telle disposition n’accroisse le risque de mariages de complaisance que la condition de résidence vise à éviter. En outre, l’amendement crée une rupture entre les citoyens français qui devront se conformer à la condition de résidence s’ils veulent se marier en métropole et ceux qui n’en auront pas l’obligation s’ils se marient en outre-mer. Je rends donc un avis défavorable, sachant que, pour étendre cette possibilité, il faut revoir le code civil.
Cet amendement renvoie à des pratiques bien installées : lorsque l’on se marie ici, dans l’hexagone, on s’arrange pour que les célébrations familiales aient lieu dans le pays d’origine. Cependant, il est difficile d’inscrire dans un texte de loi que les personnes originaires d’outre-mer pourront se marier dans le berceau familial et pas les autres.
Pour ce qui est des pratiques touristiques, se marier en Polynésie est un rêve – onéreux, certes – que tout un chacun peut caresser. Il serait intéressant de proposer au prochain comité spécifiquement consacré au tourisme outre-mer d’étudier la possibilité de célébrer des mariages dans les outre-mer. Pour les personnes concernées et pour le tourisme, cela pourrait être tout à fait sympathique.
En l’état cependant je ne peux pas donner un avis favorable à un amendement qui propose de modifier le code civil. Je suis en revanche favorable à l’étude de cette suggestion dans le cadre de notre comité.
La Polynésie ayant axé sa stratégie sur le tourisme des voyages de noces, une telle disposition est une de ses demandes récurrentes. Fait unique dans la République, en vertu d’une dérogation introduite par la LODEOM – la loi pour le développement économique des outre-mers – de 2009, des touristes peuvent d’ores et déjà venir se marier chez nous. Néanmoins, cette possibilité est limitée par l’obligation de publier des bans, qui oblige les futurs époux à arriver un mois plus tôt. On sait que le voyage en Polynésie coûte très cher et que, malheureusement, on n’y reste en moyenne que deux semaines, si bien que les effets de la mesure sont très limités.
Pour ma part, je soutiens cette démarche. La Polynésie a certainement ouvert la voie avec la dérogation de 2009, qui peut faire office de jurisprudence.
Vous avez, madame Pau-Langevin, demandé qu’un atelier soit spécifiquement consacré à l’outre-mer au sein du comité de réflexion sur le tourisme lancé par M. Fabius et cette mesure fait partie des recommandations de ce groupe, auquel je participe, en raison de son caractère très favorable au développement touristique : la Polynésie a calculé qu’elle lui permettrait d’accueillir 15 % de touristes supplémentaires. C’est pourquoi, avec le groupe de l’UDI, je soutiens cette demande, qui est également celle de la Nouvelle-Calédonie.
Sur le principe, madame la ministre et madame la rapporteure, j’observe que vous ne contestez pas l’opportunité économique de cette disposition. Ce que vous contestez, ce sont ses aspects juridiques. Il faudra alors me démontrer que cette assemblée ne peut pas modifier le code civil !
Vous soutenez également que l’amendement instaurera une discrimination entre les personnes mais je n’ai jamais demandé que la disposition soit réservée aux Antillais ! Deux personnes nées dans l’hexagone et qui habitent Nanterre pourront parfaitement décider d’aller se marier en Martinique ou en Guadeloupe.
Au surplus, ce n’est pas seulement une question touristique. Nier que l’on puisse modifier le droit, c’est ignorer l’article 73 de la Constitution, qui permet l’adaptation de la réglementation et de la législation dans les départements et les régions d’outre-mer. Vous ne pouvez pas m’opposer le droit alors que le droit m’autorise justement, en tant que législateur, à déroger à la loi existante ! Je le répète, démontrez-moi que l’on ne peut pas modifier le code civil dans cet hémicycle !
En attendant je maintiens mon amendement tout en me réjouissant de votre réponse, qui met cette proposition en perspective, madame la ministre. Il ne s’agit pas seulement de favoriser le tourisme, mais de rétablir des liens sociaux. Notre population est divisée : 300 000 Martiniquais vivent en métropole, 400 000 en Martinique ; 300 000 Guadeloupéens vivent en métropole, 400 000 en Guadeloupe. On ne pourra pas rétablir les liens simplement en venant à Paris pour faire du shopping ou pour travailler. Je considère que cette mesure rétablirait une solidarité dont nous avons grand besoin.
Dans la mesure où il s’agit d’une dérogation aux règles de célébration du mariage, il conviendrait au minimum que j’en saisisse la garde des sceaux, qui est plus à même de permettre cette modification. La seule chose à laquelle je puisse m’engager, c’est de la saisir pour demander une modification sur ce point du régime du mariage.
Je comprends les arguments de chacun mais finalement vous partagez la moitié du chemin. Puisque vous représentez ici l’ensemble du Gouvernement, madame la ministre, il est d’ores et déjà possible d’envoyer un signe, d’autant que la disposition n’est pas incompatible avec les réflexions du groupe de travail sur le tourisme. Si des difficultés apparaissaient, la commission mixte paritaire permettrait de rectifier le tir. En conséquence, je souhaite que mon groupe soutienne cet amendement.
Je ne conteste pas l’intérêt économique de la mesure. On doit également tenir compte de la dérogation dont la Polynésie bénéficie. Mais s’il faut, comme Mme Sage l’a rappelé, que les futurs époux soit présents un mois avant le mariage, c’est bien pour satisfaire à un critère de résidence.
J’envisage simplement la question du point de vue de la commission des lois, monsieur Letchimy. Nous ne voulons pas qu’il y ait rupture d’égalité entre les citoyens, certains pouvant aller se marier outre-mer quand les autres ne le pourraient pas. Un tel risque impose un travail un peu plus approfondi et c’est pourquoi je vous invite à suivre l’avis défavorable de la commission.
Il n’est pas question pour moi de mettre le Gouvernement en difficulté. Je prends acte de la proposition de la ministre de consulter la ministre de la justice. Je souhaite qu’une fois cette consultation faite, l’amendement revienne en discussion dans l’hémicycle avant la fin de l’année.
Sourires.
L’amendement no 102 est retiré.
Je vous donne de nouveau la parole pour soutenir l’amendement no 101 , mon cher collègue.
Je le retire, puisque la ministre a déjà pris un engagement à ce sujet.
L’amendement no 101 est retiré.
L’article 4 est adopté.
L’article L. 121-4 du code de commerce définit le statut de « conjoint collaborateur » qui permet de valoriser le travail effectué par le conjoint d’un chef d’entreprise et de lui donner accès aux droits et aux acquis sociaux. Nous proposons d’en étendre le bénéfice aux descendants ou ascendants du chef d’entreprise.
M. Letchimy propose d’élargir outre-mer le statut du conjoint collaborateur aux ascendants et descendants directs. Son amendement introduisant une forme de discrimination qui n’est pas objectivement justifiée entre les citoyens français résidant en métropole et ceux de l’outre-mer, je suis obligée d’émettre un avis défavorable.
Sourires.
Cet amendement vise ces situations que nous connaissons, où la famille travaille dans l’entreprise de façon informelle. Cependant, je ne suis pas sûre que cette disposition soit juste. Une personne de vingt-cinq ou trente ans qui travaille sans être payée, quand bien même ce serait chez ses parents, je ne trouve pas cela très juste !
La dérogation prévue pour le conjoint collaborateur vise certes à reconnaître à celui-ci des droits sociaux, mais c’est aussi une manière de légaliser un cas de figure pas forcément satisfaisant, celui où la femme travaille gratuitement pour son mari. Étendre cette possibilité aux enfants et aux parents me gêne profondément. Je veux bien qu’on tienne compte des difficultés des familles et de celles des entreprises, mais il ne faudrait pas en venir à légaliser une forme de « travail gris ». Je préférerais qu’on recoure aux nombreux dispositif d’aide à l’emploi que nous avons mis en place pour les jeunes et que la personne qui travaille dans l’entreprise familiale bénéficie d’un vrai statut.
Je ne suis pas du tout d’accord avec votre analyse, madame la ministre et madame la rapporteure. Je vais cependant retirer cet amendement dont je pense qu’il vous dépasse, vous et peut-être nous tous.
Nous savons l’importance du chômage dans nos pays – 19,4 % en Martinique, près de 30 % à La Réunion, 24 % en Guadeloupe – et le poids considérable du secteur informel, au point que Mme Michaux-Chevry avait proposé quand elle était députée qu’on régularise le travail informel.
Ce travail informel, effectué an ba kay, c’est-à-dire au sous-sol de la maison, par les conjoints ou les enfants des pêcheurs, des charpentiers, des maçons, des artisans est à l’origine d’une production importante. Ce travail est rémunéré, madame la ministre, mais de façon informelle.
Aujourd’hui, le système est incapable de créer suffisamment d’emplois pour faire décroître le chômage. Ce qui importe, c’est la mise en activité, ce que les dispositifs d’aide – emplois jeunes, emplois d’avenir – permettent déjà grâce à l’argent public. Les enfants du chef d’entreprise pourraient bénéficier de ce statut, car ils participent à la création de richesse par la production artisanale. Nous pourrions même réfléchir aux moyens d’assurer la transmission de l’activité du père.
Je ne suis donc pas du tout d’accord avec vous, madame la ministre. Se satisfaire de 22 % de chômeurs, – 19,4 % en Martinique – n’est pas la solution. Nous devons regarder comment structurer l’économie, sur la base de notre modèle. Là, on coupe les ponts.
Mais mon but est de tracer des perspectives, non de vous mettre en difficulté. Je retire mon amendement, pour des raisons de paix sociale.
L’amendement no 103 est retiré.
Cet amendement prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur l’adaptation du revenu de solidarité – RSO – et ses modalités.
Créé par la loi d’orientation pour l’outre-mer du 13 décembre 2000, modifié en 2010 pour relever l’âge d’éligibilité, le RSO a été créé spécifiquement pour les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, ainsi que pour les territoires de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le RSO, initialement considéré comme un dispositif de pré-retraite, avec un montant majoré par rapport au RSA, était justifié par la situation particulière de l’emploi en outre-mer et par les faibles perspectives d’insertion professionnelle du public visé par cette prestation.
Aujourd’hui, force est de constater que le dispositif est devenu moins attractif : le nombre d’allocataires ne cesse de diminuer, passant de 13 000 bénéficiaires environ en 2010 à 9 800 en décembre 2014. Cette diminution de l’attractivité est sans doute liée aux modalités du dispositif : retirés du marché du travail, ses bénéficiaires ne valident aucun trimestre pendant la perception du RSO et, de surcroît, n’ont pas accès aux dispositifs de suivi et d’accompagnement. Le caractère stigmatisant du RSO, seul dispositif à prévoir un engagement de ses bénéficiaires à ne pas travailler, est également mis en cause.
Dans ces conditions, il paraît opportun d’évaluer le dispositif et d’y apporter les adaptations nécessaires.
Bien que la commission des lois ne soit pas adepte des rapports, je ferai une deuxième entorse à ce principe. En effet, le RSO, créé en 2000, a de moins en moins de succès et il serait opportun de disposer d’une expertise précise des raisons de cet échec. L’avis est donc favorable.
J’estime comme vous, monsieur Letchimy, que nous devons tout faire pour lutter contre le chômage dans les outre-mer : c’est un impératif catégorique. Mais je crois aussi que l’une des manières d’y parvenir est d’aider les gens à sortir de l’informel. Nous menons, notamment avec l’Association pour le droit à l’initiative économique, l’ADIE, des actions pour aider à créer de l’emploi via les toutes petites entreprises. Nous devons y travailler ensemble, mais en faisant en sorte que ceux qui « se débrouillent » grâce au travail informel puissent être considérés comme ayant des droits.
Il est vrai, madame Orphé, que le RSO a beaucoup perdu de son attractivité. En l’absence du président de la commission des lois, nous allons faire une nouvelle entorse au principe en émettant un avis favorable à cette demande d’un rapport qui nous permettra de voir plus clair sur la manière de faire évoluer ce dispositif.
L’amendement no 6 est adopté.
L’article 4 bis est adopté.
Article 4
Cet article pose la question de l’applicabilité des lois à Mayotte, dont la départementalisation est progressive et adaptée.
En introduisant ces dispositions, le Sénat souhaitait rendre applicable la loi sur l’économie sociale et solidaire à Mayotte. Ce faisant, il laissait entendre que la loi n’était pas applicable à Mayotte du seul fait que l’ordonnance prévue par son article 96 n’avait pas vu le jour. Il laissait supposer également que les dispositions de l’article 4 ter permettaient d’assurer l’application pleine et entière de la loi, ce qui est inexact et de nature à semer la confusion, au détriment du principe de l’application des lois et des décrets dans ce jeune département.
La loi sur l’économie sociale et solidaire est applicable à Mayotte a priori. L’habilitation prévue à son article 96 n’est qu’une faculté d’adaptation dont le Gouvernement peut user pour Mayotte, au même titre que pour toutes les autres collectivités de l’article 73 de la Constitution. C’est d’ailleurs ce que prévoit expressément l’article d’habilitation.
Mais la loi sur l’économie sociale et solidaire n’est pas effectivement applicable à Mayotte, du fait d’autres dispositions relevant d’autres codes, qui, eux, ne sont pas applicables à Mayotte.
Il convient donc de supprimer cet article et de revenir à une démarche constructive afin d’obtenir ce que tous réclament : l’applicabilité effective de toutes les dispositions de cette loi à Mayotte.
Je soutiendrai donc l’amendement de suppression du Gouvernement, tout en rappelant que cette situation n’est pas propre à cette loi. La commission des lois devra, à un moment ou à un autre, se pencher sur la question générale de l’applicabilité des textes à Mayotte.
Nous en venons à un amendement de suppression, no 122. La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.
Afin d’assurer l’application de la loi sur l’économie sociale et solidaire à Mayotte, nous avions soutenu cet article, qui introduit dans le présent texte un certain nombre des dispositions de la loi. Mais à la réflexion, nous nous sommes aperçus qu’il ne tenait pas la route : certaines dispositions étaient incomplètes, des références manquaient et il fallait impérativement apporter un certain nombre de modifications.
Il nous semble préférable de revenir sur l’accord que nous avions donné et d’adapter la loi par ordonnance plutôt que de l’appliquer telle quelle même si elle n’est pas adaptée à la situation particulière. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de supprimer cet article et que nous vous demanderons une nouvelle habilitation afin de prévoir par ordonnance l’ensemble des adaptations nécessaires pour que les dispositions de la loi relative à l’économie sociale et solidaire s’appliquent le plus rapidement possible à Mayotte.
Madame la ministre a rappelé le chemin suivi par de cet article, introduit au Sénat, soutenu par la commission des lois, et qu’il nous est proposé aujourd’hui de supprimer en raison de certaines lacunes liées à une insuffisante adaptation du code du travail à Mayotte.
Le Gouvernement semble être sur le bon chemin pour parvenir, dans un bref délai, à procéder à ces adaptations. Je m’étonne néanmoins qu’il ne l’ait pas fait par voie d’amendement à l’article 4 ter. Vous nous avez proposé, madame la la ministre, de renvoyer cela à une ordonnance. Je souhaite que celle-ci soit prise dans les plus brefs délais – si possible dans les six mois. J’émettrai un avis favorable, sous réserve d’un engagement de votre part sur ce point.
Il faut bien considérer que lorsque nous prenons des ordonnances, plusieurs ministères sont concernés. Cependant, compte tenu de l’importance du sujet, nous essaierons de respecter ce délai de six mois.
L’amendement no 122 est adopté et l’article 4 ter est supprimé.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 123 rectifié .
Il s’agit d’améliorer la rédaction de l’article 4 quater A.
Cet amendement procède à des adaptations supplémentaires et améliore la codification de ces dispositions dans le cadre du code du travail. Avis favorable.
Cet amendement améliore la rédaction de dispositions adoptées à mon initiative par la commission des lois. Les services à la personne constituant un gisement d’emplois, il était urgent d’étendre à Mayotte l’application des dispositions en vigueur dans l’hexagone en la matière. Je me réjouis que le Gouvernement se soit attaché à rendre la rédaction de cet article beaucoup plus fiable, ce qui permettra une application plus rapide de ces dispositions.
L’amendement no 123 rectifié est adopté et l’article est ainsi rédigé.
Je suis saisie de trois amendements portant article additionnel après l’article 4 quater A, nos 151, deuxième rectification, 150 rectifié et 4, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour soutenir l’amendement no 151 , deuxième rectification.
Ces amendements portent sur les frais d’itinérance téléphonique, ou roaming. L’amendement no 150 , déposé par le Gouvernement, vise à repousser la date d’application des nouvelles règles qui permettront de faire baisser très significativement les prix. L’amendement no 151 , deuxième rectification, permet de faire la synthèse entre l’amendement du Gouvernement et mon amendement no 4 , que je retirerai.
Les frais d’itinérance téléphonique portent sur l’internet, les services de data, les communications vocales et les SMS. Il s’agit d’assurer l’application immédiate outre-mer des nouvelles règles prévues par le règlement européen et de supprimer les frais d’itinérance portant sur les communications vocales et les SMS. S’agissant de l’internet et des services de data, cet amendement reprend la position du Gouvernement.
Je rappelle que, par la loi de régulation économique de 2012, nous avions déjà appliqué un règlement communautaire par anticipation. C’est donc un compromis raisonnable et susceptible d’être adopté par tous.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 150 rectifié .
Cet amendement porte sur les surcoûts qui sont appliqués outre-mer aux communications vocales, SMS et internet. D’ores et déjà, ces surcoûts sont réduits de façon significative ; le règlement européen à venir abaissera encore les frais portant sur les communications vocales et les SMS.
S’agissant d’acquisitions de données sur Internet, certaines restrictions d’usage seront maintenues jusqu’en 2017. Je comprends bien la volonté d’accélérer le mouvement mais nous avions plutôt envie de respecter strictement le calendrier prévu par les instances européennes afin d’éviter le risque de se retrouver en porte-à-faux vis-à-vis d’elles.
Cela étant, puisque les parlementaires veulent anticiper sur ce règlement futur et les réductions tarifaires qui s’ensuivront, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
Je me demande cependant si le jeu en vaut la chandelle, sachant que dans très peu de temps, on pourra aboutir au même résultat sans prendre de risque.
L’amendement no 4 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements n os 151 , deuxième rectification, et 150 rectifié ?
La commission n’a pas examiné l’amendement de M. Lurel mais j’émettrai un avis défavorable à titre personnel, en reprenant les arguments de Mme la ministre, notamment quant aux conséquences juridiques et financières d’une anticipation au 1er janvier 2016 alors qu’un règlement fixe pour l’Union européenne l’échéance de juin 2017.
L’amendement du Gouvernement, au contraire, vise à anticiper dès aujourd’hui l’extension de l’application de ce règlement modifié à l’outre-mer pour que les consommateurs ultramarins et métropolitains soient traités de la même manière et sans retard par rapport à la métropole. Il n’y a pas de risque, dans ce cadre, à ce que les ultramarins soient moins bien traités. Je suis par conséquent favorable à cet amendement.
Est-ce bien un avis de sagesse que vous avez émis sur l’amendement no 151 deuxième rectification, madame la ministre ?
Notre amendement propose une démarche efficace pour appliquer sans délai le règlement européen aux outre-mer, dès qu’il sera publié. Nous en avons déjà étudié les modalités avec M. Macron et Mme Lemaire. Notre démarche nous semble la plus sûre, mais si les parlementaires veulent anticiper, nous ne nous y opposerons pas.
Je ne vois pas de motif de conflit avec la Commission européenne. Nous avions, en 2012, refusé de demander la suppression pure et simple de l’itinérance ultramarine pour tenir compte du fait que la décision de suppression, réclamée par les députés européens, n’avait pas encore été votée.
Cet obstacle est désormais levé. Le vote de juin 2015 prévoit la fin des surcoûts de l’itinérance européenne en 2017. Nous pourrons donc, dans moins de deux ans, utiliser librement nos téléphones dans tout l’espace européen sans payer de supplément.
Il n’y a donc plus aujourd’hui de raison politique de différer la suppression de l’itinérance au sein du territoire national. Il n’y a pas davantage de raison économique justifiant d’attendre deux ans de plus. En effet, compte tenu de la taille réduite des marchés ultramarins, les enjeux financiers pour les opérateurs téléphoniques sont négligeables.
Le sujet est toutefois plus sensible s’agissant de l’accès à l’internet par les smartphones car le règlement européen ne prévoit la gratuité que pour une utilisation raisonnable, ce qu’on appelle le fair use en jargon européen. Ces restrictions d’usage doivent prévenir les abus comme, par exemple, le téléchargement des vidéos sur le réseau mobile 3G. C’est en effet très coûteux pour l’opérateur, alors que la connexion wi-fi est déjà gratuite.
Pour cette raison, le Gouvernement propose de caler entièrement l’itinérance ultramarine sur le règlement européen, aussi bien en contenu qu’en calendrier. C’est une position que l’on peut comprendre mais qui, à mon avis, va trop loin, pour la voix et pour les SMS. Je vous propose de le faire dès que le règlement de juin 2012 sera modifié. J’apprécie la position de sagesse du Gouvernement et je demande à mes collègues de voter mon amendement pour assurer l’application la plus rapide possible, sans attendre deux ans. Il n’y aura pas de conflit avec la Commission.
L’amendement no 151 deuxième rectification est adopté et l’amendement no 150 rectifié tombe.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 48 .
L’amendement no 48 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 49 .
L’amendement no 49 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 4 quater B, amendé, est adopté.
En Nouvelle-Calédonie comme dans l’ensemble des outre-mer, et plus particulièrement dans la région Pacifique, les frais bancaires sont un fléau puisqu’ils sont de deux à dix fois supérieurs à ceux pratiqués en métropole pour des opérations identiques.
Un amendement avait été déposé au projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer, avec le soutien du ministre de l’époque, passant outre les réticences de certaines administrations, tendant à ce que les frais bancaires, notamment ceux des seize services bancaires de base, puissent être plafonnés par arrêté du Haut-commissaire, au cas où aucun accord n’aurait été trouvé. Ce dispositif est en cours d’application. Pour la deuxième année consécutive, un accord de modération des tarifs a été signé avec les établissements bancaires de la place. Un rapport préconise qu’en Nouvelle-Calédonie comme en Polynésie française, les tarifs ne puissent pas dépasser de plus de 50 % ceux pratiqués en métropole à échéance de 2017, l’objectif étant de parvenir à des tarifs équivalents à ceux de la métropole pour les services bancaires de base.
C’est dans ce contexte que mon amendement trouve toute sa pertinence. En effet, et comme il fallait s’y attendre, certaines banques ont utilisé d’autres voies pour récupérer ce qu’elles étaient en train de perdre sur certaines opérations, en particulier sur les frais de conservation d’avoirs sur des comptes inactifs depuis plus de trois mois. En France métropolitaine et dans les DOM, la situation a été corrigée grâce à une loi d’initiative parlementaire. D’une part, un compte ne peut pas être considéré inactif avant douze mois d’inactivité et d’autre part, le Gouvernement peut intervenir par décret pour plafonner le montant annuel des frais et commissions susceptibles d’être prélevés sur les comptes inactifs.
Cet amendement vise à étendre ce dispositif à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.
Il est vrai que, contrairement à celles applicables aux frais d’intervention, les dispositions de la loi Eckert du 13 juin 2014 relatives à la définition et au plafonnement des frais de la tenue de comptes inactifs ou en déshérence n’ont pas été étendues à la Nouvelle-Calédonie. Cette extension me semble être la bienvenue, même si je m’interroge sur la raison pour laquelle vous excluez l’extension de l’article L.312-20 du même code.
J’émettrai un avis favorable, tout en demandant au Gouvernement s’il envisage de procéder aux adaptations nécessaires dans des délais suffisamment brefs pour que l’extension soit cohérente.
Les parlementaires ont raison de vouloir étendre à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna les dispositions de la loi Eckert qui sont plus favorables au consommateur. Le délai pour qu’un compte soit inactif est, en effet, de douze mois dans l’Hexagone contre trois mois là-bas, ce qui semble plutôt court.
Nous y sommes favorables et nous étudierons les adaptations éventuelles.
L’amendement no 7 est adopté.
L’article 4 quater, amendé, est adopté.
Nous avons fait de nombreuses tentatives pour résoudre le problème des délais de paiement. Nous avions même réussi à faire voter par la commission un amendement pour qu’une entreprise, qui détenait une créance contre une collectivité publique, se voie délivrer un certificat qui lui permette de répondre aux appels d’offres et de ne pas être éliminée dès la première enveloppe. Cependant cette tentative est restée sans suite.
Cet amendement tend à confier à l’institut d’émission des départements d’outre-mer, l’IEDOM, la charge d’analyser annuellement les situations, d’élaborer des rapports et surtout des stratégies. Aujourd’hui, le seul recours aux fonds financiers bancaires publics renchérit le coût de l’activité de l’entreprise et pose de vrais problèmes. Nous connaissons les difficultés de trésorerie de ces collectivités, communes, départements, régions, EPCI et la fragilité de leur tissu économique. C’est pourquoi je propose que nous allions le plus loin possible avec l’IEDOM de sorte que la BPI joue pleinement son rôle, tout comme les relais financiers. Il faut également que l’accompagnement des entreprises soit plus dynamique, surtout quand une collectivité ou l’État est en retard dans ses paiements.
Jean-Marc Ayrault avait lui-même insisté sur la nécessité de trouver des solutions car il n’est pas normal que l’État empêche par un défaut de paiement une entreprise de poursuivre son activité. En effet, quand vous n’êtes pas à jour des dettes fiscales et sociales, vous ne pouvez pas répondre aux appels d’offres, ni bénéficier des aides susceptibles de stabiliser l’activité.
Nous avons vu en commission combien la question des délais de paiement des organismes publics auprès des entreprises ultramarines était cruciale. Il est donc utile de confier à l’institut d’émission des départements d’outre mer un rôle de suivi et de proposition en la matière, en lui imposant de consacrer tous les six mois un rapport à ce sujet, rapport qui sera transmis au Parlement et au ministre de l’économie.
Il est également important qu’il fasse des propositions visant à ce que ses préconisations soient déclinées au niveau de l’offre par les acteurs locaux du crédit et du financement des entreprises, d’outils d’ingénierie financière adaptés aux problématiques de délais de paiement rencontrées localement.
C’est donc un avis favorable.
C’est effectivement un sujet important, les entreprises d’outre-mer étant souvent confrontées aux délais de paiement excessifs des donneurs d’ordre publics. L’IEDOM apparaît comme l’organisme adapté pour étudier cette question. L’avis est donc favorable.
L’amendement no 108 est adopté.
Cet amendement s’attaque au déficit des données statistiques relatives aux outre-mer. Aujourd’hui, les données de l’INSEE sont vieilles de plusieurs années et nous ne disposons, en tout et pour tout, pour piloter les politiques économiques outre-mer, que des études de conjecture de l’IEDOM et de quelques analyses, assez bien faites, je le reconnais, mais sous un prisme monétaire.
On peut donc parler d’une béance statistique dans les outre-mer. J’avais obtenu de Mme Christine Lagarde, quand elle était ministre de l’économie et des finances, que la publication des statistiques du chômage tienne compte aussi de celles de l’outre-mer. Il me semble que ce sont des territoires français ! On le fait aujourd’hui mais toujours avec des biais, voire des oublis. Même si les résultats peuvent être gênants, il faut tenir compte de nos réalités.
Le problème est que l’INSEE ne veut pas engager de fonds. J’avais rencontré à l’époque le directeur général de l’INSEE, que je suis appelé à rencontrer de nouveau dans le cadre de la mission relative à l’égalité réelle entre l’outre-mer et la métropole, qui m’a été confiée. On nous demande de payer ! Serge Letchimy a dû créer en Martinique une sorte d’agence statistique, précisément pour combler ce déficit d’informations statistiques et économétriques.
Il fut une époque où nous disposions au moins de ce qui s’appelait les tableaux d’échanges inter-industriels, ou les tableaux d’entrées-sorties, mais depuis qu’ils n’existent plus, nous n’avons plus aucun moyen de savoir ce qu’un euro investi dans le bâtiment, par exemple, produira une fois prise en compte la dynamique intersectorielle.
Cet amendement est donc simple et de bon sens : toute étude nationale doit comporter des données chiffrées relatives à l’outre-mer.
Je suis d’accord : cet amendement de bon sens permettra à chacun d’affiner sa vision des politiques publiques conduites outre-mer et d’en comparer les résultats à ceux obtenus dans d’autres régions et départements.
Il reprend d’ailleurs l’une des préconisations formulées par la Cour des comptes dans son rapport sur la fiscalité en outre-mer de novembre 2013, ainsi que dans le rapport pour 2013 et 2014 de la commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer, que préside notre collègue Chantal Berthelot. L’avis de la commission est donc favorable.
Même avis : il nous manque des données concernant l’outre-mer.
Si j’ai signé l’amendement de notre collègue Lurel, c’est que la commission que je préside a besoin de données chiffrées pour évaluer les politiques de l’État outre-mer. Malheureusement celles dont nous disposons sont anciennes. À chaque fois que nous demandons des études, par exemple sur le RSO ou d’autres dispositifs d’État, les services locaux et centraux ne sont pas en mesure de nous fournir des données fiables.
Dans ces conditions, il est indispensable que cet outil soit installé le plus vite possible dans les outre-mer, de telle sorte que nous puissions exercer correctement notre mission.
Je remercie M. Lurel d’avoir pris l’initiative de cet amendement que j’ai signé. Nous naviguons à vue, faute pour l’État de disposer au bon moment d’éléments fiables lui permettant d’orienter ses politiques dans ces régions et ces départements. Il est inutile d’invoquer la responsabilité et les développement dès lors que l’on ne peut pas réorienter les politiques publiques. C’est pourtant vital ! C’est la raison pour laquelle je soutiens sans réserve l’amendement de M. Lurel.
L’amendement no 2 est adopté.
L’article 4 quinquies est adopté.
Je sais qu’il ne convient pas de multiplier les rapports mais celui-ci se justifie par l’importance du sujet.
L’aide au fret a été instaurée pour satisfaire aux exigences des articles 349 et 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et diminuer les coûts de production en finançant les intrants. Ainsi, un territoire souhaitant développer une filière de transformation industrielle en important par exemple de la pulpe de goyave – ce qui n’est pas le cas de la Martinique, dont 100 % des besoins dans ce secteur sont satisfaits par sa propre production – bénéficie d’un financement visant à réduire le coût de la production, les intrants nécessaires n’existant pas sur place. Cette mesure vaut pour toute une série de secteurs.
Le drame, madame la ministre, tient à ce que cette aide au fret ne concerne que les intrants achetés en France métropolitaine. Autrement dit, que vous vous trouviez en Guadeloupe, en Martinique, à la Réunion ou en Guyane, les intrants en question ne peuvent provenir que de Paris. Je ne sais comment qualifier un dispositif aussi invraisemblable ! Et encore je n’ai pas le temps de développer l’exemple des véhicules hors d’usage !
Dans un amendement qui a été déclaré irrecevable, je souhaitais que l’aide au fret puisse jouer pour des intrants provenant de territoires voisins, tel l’Afrique du Sud pour la Réunion ou le Brésil pour la Martinique.
Pire, il est impossible de bénéficier de l’aide au fret au titre de flux entre la Guadeloupe et la Martinique et, de ce fait, réduire le coût des échanges industriels entre ces deux territoires. Il en va de même entre Mayotte et La Réunion, ce qui est encore plus invraisemblable ! C’est une véritable stupidité – pardonnez-moi ce terme – sur le plan économique que de favoriser la seule importation en provenance de Paris.
Je proposais donc par mon premier amendement d’ouvrir ces échanges sur l’extérieur, à l’échelle inter-régionale, ou tout au moins entre DOM.
Cet amendement ayant été déclaré irrecevable au titre de l’article 40, je propose par l’amendement no 107 que le Gouvernement se saisisse de cette question et qu’il nous remette un rapport où il nous proposerait des voies d’amélioration.
J’avais déjà fait une telle proposition dans le cadre de la mission que m’avait confiée Jean-Marc Ayrault et Victorin Lurel quand il était ministre. On m’objectera la législation européenne. C’est faux : une grande partie de ces règles sont d’origine strictement nationale.
Je sais que je ne vais pas vous faire plaisir, monsieur Letchimy, car je n’ignore pas l’importance que revêt à vos yeux cette question de l’extension de l’aide au fret aux importations de pays tiers avec lesquels l’Union européenne a conclu un accord de libre-échange.
Cependant l’Assemblée a déjà voté en faveur de deux rapports supplémentaires depuis que nous avons commencé l’examen de ce projet de loi et voilà que vous en demandez un troisième.
En outre, les règles de l’Organisation mondiale du commerce, l’OMC, qui encadrent les aides d’État sont d’ores et déjà bien connues et il est peu probable qu’un rapport supplémentaire du Gouvernement aboutisse à une conclusion différente.
Le problème que vous soulevez nécessite certes des réponses différentes, mais ce n’est pas forcément un rapport qui permettra de les trouver. L’avis de la commission est donc défavorable.
Même avis. L’aide au fret est adossée à la mise en oeuvre de l’allocation spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques, prévue au titre du Fonds européen de développement régional, le FEDER. Par conséquent, il n’est guère envisageable d’élargir ces aides au transport à destination de pays tiers à l’Union européenne, même en se limitant aux territoires qui sont partie prenante à des accords de libre-échange avec l’Union européenne. Il nous semble qu’une telle position ne respecterait pas les règles instituées par l’OMC.
D’autres programmes, notamment les fonds européens – concernant la Caraïbe, par exemple – seraient peut-être susceptibles d’être mobilisés à cette fin. En l’état, cependant, nous ne voyons pas comment il serait possible d’élargir l’aide visée. Dans ces conditions, la rédaction d’un rapport supplémentaire ne semble pas utile.
Par principe, je maintiendrai cet amendement.
Vous me permettrez d’illustrer mon propos par un exemple précis, celui des véhicules hors d’usage, les VHU. Comme vous le savez, une épave de voiture contient environ cinq mille produits, qu’il s’agisse des pneus, des plastiques ou encore du métal. Or la Guadeloupe a pris l’excellente initiative, comme M. Lurel pourra le confirmer, de transformer les pneus en confettis pour les exporter en France. Madame la ministre, comment la Martinique pourra-t-elle envoyer ses pneus en Guadeloupe ? En Guyane, où je me suis rendu dans le cadre d’une mission que m’a confiée Mme Ségolène Royal, j’ai vu des montagnes de pneus. Et pour cause : il n’y a dans ce territoire aucune filière structurée dans ce domaine ! La Guyane ne bénéficierait d’aucune aide pour envoyer ses pneus en Guadeloupe.
Juridiquement il n’y a pas de problème : c’est nationalement qu’il y a un problème. Je ne demande pas une mesure d’application immédiate ; je demande un rapport sur la possibilité d’étendre ce dispositif.
Je sais, monsieur le président de la commission, que vous n’aimez guère les rapports ; vous les détestez même. Permettez-moi néanmoins de vous informer que l’Assemblée vient, en votre absence, de voter la publication de deux nouveaux rapports !
Sourires
L’insertion de nos collectivités dans leur environnement régional est un objectif réitéré à toute occasion. M. Letchimy vient d’évoquer la situation des Caraïbes, mais le même débat existe depuis longtemps au sein des acteurs économiques de l’Océan indien. J’avais même missionné l’Agence française de développement dans le cadre de mes précédentes fonctions afin qu’elle recherche quelles solutions pratiques apporter à notre zone géographique.
Il est temps d’aller au-delà des déclarations de principe sur la nécessité d’insérer nos collectivités dans leur environnement régional et d’accroître les échanges interrégionaux, quitte à bousculer un certain nombre de choses. Pourvu que l’on nous assure que l’on ne se heurtera pas à la réglementation européenne, nous serions plutôt d’avis d’avancer dans ce domaine. À un moment donné, il faut mettre les actes en accord avec les paroles !
L’amendement no 107 est adopté.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 53 .
L’amendement no 53 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 4 sexies, amendé, est adopté.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour soutenir l’amendement no 3 rectifié .
Il s’agit d’un énième rapport – mais je crois pouvoir le qualifier d’important. Il porterait cette fois sur le différentiel non coté qu’appliquent les compagnies pétrolières – il s’agit, pour parler clairement, de la SARA dans les Antilles, et peut-être aussi la SRPP à La Réunion.
Lorsque les compagnies pétrolières importent du pétrole brut de la mer du Nord, elles prélèvent des suppléments non cotés en sus de la cotation de référence. Ces suppléments comprennent plusieurs éléments, en particulier des frais de trading. Ces frais étaient libres avant que la la loi de régulation économique outre-mer de novembre 2012 ne les plafonne à 4,70 dollars par baril.
Nous voulons tous savoir si cette mesure est appliquée. Sans doute nos collègues l’ignorent-ils, mais la facturation – en clair, le paiement – de ces suppléments est domiciliée aux Bermudes et au Honduras. Il est arrivé une année qu’un montant de 32 millions de dollars – un prélèvement préciputaire, en quelque sorte, effectué avant même que le brut n’arrive en Martinique pour y être raffiné – soit domicilié dans des paradis fiscaux, alors que l’article 24 de la loi précitée interdit cette pratique.
Deuxièmement, il s’agit de savoir pourquoi le plafond de 4,70 dollars est appliqué, alors que le supplément devait faire l’objet de pièces justificatives et être réglé en valeur réelle, en fonction des documents présentés. Il semble que ce ne soit pas le cas.
Enfin, la SARA importe des produits finis et semi-finis, qui proviennent notamment de la zone. Les fournisseurs peuvent appliquer tous les suppléments non cotés qu’ils souhaitent et sont parfois hébergés dans des paradis de l’optimisation fiscale : nul ne le sait vraiment.
Ce rapport permettra peut-être à votre ministère de résister à la pression de ministères comme celui des finances, ou face à la DGCCRF, car l’un et l’autre devraient être mis au courant de cette situation vers laquelle l’Autorité de la concurrence pourrait elle aussi donner un coup de projecteur, ne serait-ce que pour une raison quasiment morale : les textes de la République doivent être appliqués et respectés !
Je vais comme sur l’amendement précédent prendre le risque de ne pas être suivie. Vous demandez, monsieur le député, un rapport au Gouvernement concernant les démarches engagées afin de faire respecter l’article 3 du décret dit « carburant » du 27 décembre 2013, relatif aux suppléments, et l’article 24 de la loi de régulation économique outre-mer sur la facturation de services par l’intermédiaire d’une filiale domiciliée dans un territoire à fiscalité privilégiée.
Les services de l’État engagent toutes les démarches qu’il convient pour faire respecter les lois et les décrets, mais si tel n’était pas le cas il appartiendrait aux parlementaires de le vérifier par eux-mêmes. C’est d’ailleurs l’objet de la mission de contrôle de la mise en application de la loi relative à la régulation économique, créée le 18 février dernier et présidée par Ericka Bareigts et Daniel Fasquelle. Cette mission effectuera ce travail, ce qui sera beaucoup plus efficace qu’une demande de rapport au Gouvernement. Avis défavorable.
Je demanderai à M. Lurel de bien vouloir retirer son amendement. Je partage ses préoccupations, mais ce qu’il propose ne me semble pas être la solution.
Vous le savez, le Gouvernement est tout à fait déterminé à faire respecter les termes de la réforme du calcul du prix des carburants, qui a été adoptée à la fin de l’année 2013, ainsi que les principes de transparence des marges, de justification des coûts et de protection des consommateurs qui la sous-tendent.
Ce texte prévoit notamment la prise en compte, sur le fondement des justifications adéquates, des honoraires, primes non cotées et frais de trading sur les importations de produits pétroliers évoquées par votre amendement. Je puis vous assurer de la volonté de l’État et des services déconcentrés d’en vérifier la bonne application.
L’article 24 de la loi relative à la régulation économique, que vous avez adoptée en 2012, pose le principe d’une prohibition des facturations par le biais de filiales situées dans les paradis fiscaux. Cela semble assez raisonnable.
L’État n’a pas encore été conduit à faire usage de cette faculté concernant des approvisionnements pétroliers dans les DOM, dans la mesure où elle s’applique à des distributeurs distincts des importateurs de produits pétroliers.
S’il existe un doute sur ce point, je m’engage à ce qu’une étude juridique soit menée afin de le lever.
Cela dit, je partage l’avis de Mme la rapporteure. Il me semble en effet que vérifier l’application de ce dispositif revient à la mission de contrôle parlementaire de la mise en application de la loi relative à la régulation économique. Pour ces raisons, je demande à M. Lurel de retirer cet amendement, faute de quoi j’émets un avis défavorable.
Je suis un peu gêné, madame la ministre, mais je ne vais pas retirer cet amendement. En effet, d’après les informations en notre possession, les mauvaises pratiques continuent, notamment la domiciliation de filiales dans les paradis fiscaux. Au-delà des travaux de notre collègue Ericka Bareigts, qui n’a pas encore remis son rapport, je rappelle qu’un rapport récent de l’Inspection générale des finances indique clairement que 4,7 dollars par baril de brut sont payés intégralement et au forfait, et non sur les dépenses réellement engagées. J’ajoute que cette somme est intégralement facturée au consommateur.
Un tel rapport apporterait de la transparence, pour le plus grand bénéfice du consommateur.
On sait aujourd’hui que l’administration ne contrôle pas la réalité des coûts, notamment des coûts de trading. Je considère qu’il est moralement condamnable de le savoir mais de ne rien faire. Et je ne suis pas sûr que les parlementaires, en particulier Ericka Bareigts, disposent de tous les éléments transmis par l’entreprise et par l’administration.
Je vous demande, chers collègues, de comprendre que ce dispositif s’applique partout, y compris dans l’Océan Indien, et je crois pouvoir dire que la Nouvelle-Calédonie connaît elle aussi des problèmes de transparence et de profits, pour ne pas dire de sur-profits, qu’il faudrait au moins, à mon sens, connaître et contrôler.
J’aimerais aussi savoir pourquoi les produits finis et semi-finis ne sont pas concernés. Ils ne figurent pas dans la loi et donc, Ericka Bareigts ne pourra pas faire de vérifications.
Un rapport du Gouvernement permettrait de faire la lumière sur tout cela et éventuellement d’apporter des corrections à la loi relative à la régulation économique outre-mer.
En effet, je n’ai pas rendu mon rapport. J’y ai travaillé et nous avons procédé à un certain nombre d’auditions. Cela dit, je suis très sensible au poids que vous voulez bien lui prêtez.
Je soutiens l’amendement de Victorin Lurel car force est de constater, dans le cadre du travail que nous avons effectué et des nombreuses auditions que nous avons menées, qu’il reste beaucoup de zones d’ombre. Il nous appartient de travailler à plus de transparence, chacun à sa place, la mienne consistant à produire un rapport pour évaluer la mise en application de la loi. Un rapport supplémentaire ne serait pas de trop dans un domaine aussi complexe.
C’est important, d’abord pour assurer la transparence et ensuite parce que nous avons ici même voté une loi relative à la régulation économique outre-mer. Si nous voulons lui conserver son poids, sa légitimité et sa force, il est absolument nécessaire que nous continuions à travailler avec acharnement pour garantir la transparence dans tous les domaines, en particulier dans celui-là.
Je voudrais appuyer les propos de Mme la rapporteure et rappeler mon hostilité ferme et définitive au principe même de l’inscription dans la loi de l’obligation faite au Gouvernement de remettre des rapports au Parlement.
Je distingue totalement le véhicule et le sujet. Le sujet, personne n’en conteste ici la pertinence. Mais inscrire dans la loi que le Gouvernement va faire son travail, au mieux c’est inutile, au pire cela relève de la tautologie. Car si le Parlement a des compétences, il les exerce, par la voie et les moyens qu’il choisit. Et s’il ne veut pas le faire dans le cadre d’une mission d’information, il peut créer des commissions d’enquête pour poser des questions et contrôler, sur place et sur pièce, comme peuvent le faire les rapporteurs budgétaires.
En votant ce genre d’amendement, nous construisons l’idée selon laquelle le Parlement est impuissant et que sa seule source d’information est celle que le Gouvernement consent à lui donner.
Parce que je suis un militant de la souveraineté parlementaire, de la compétence parlementaire, du pouvoir parlementaire, j’espère que nous n’allons pas nous infantiliser en demandant que le Gouvernement veuille bien nous remettre un rapport.
De 2007 à 2012, cette assemblée nationale a voté cent vingt-sept demandes de rapport au Gouvernement ! Je ne commettrai pas l’infamie de rappeler combien de rapports ont été effectivement adressés au Parlement sous le gouvernement de François Fillon parce le dire serait montrer du doigt les parlementaires que nous étions et qui n’ont pas demandé au Gouvernement de leur remettre effectivement ces rapports.
Nous manifestons notre pouvoir en votant un amendement pour demander un rapport au Gouvernement, mais ensuite tout le monde ignore si ce rapport existe ou n’existe pas. Et lorsqu’il n’existe pas, personne ne le réclame ! C’est donc inutile et contre-productif.
Je voudrais dire au ministre Victorin Lurel que son amendement n’est pas seul en cause – en effet, j’ai appris que tout à l’heure, en mon absence, vous aviez voté deux demandes de rapport ! Mais je serai présent lors de la réunion de la commission mixte paritaire et je demanderai la suppression de ces amendements, par principe et au nom des pouvoirs du Parlement.
Quand la commission des lois s’intéresse à un sujet, elle crée une mission et veille à ce que tous les éléments relevés dans le cadre de cette mission deviennent effectifs. Je ne suis pas un quémandeur de rapports au Gouvernement parce que je crois que le Parlement a les pouvoirs d’obtenir les informations qu’il souhaite.
Le président de la commission a parfaitement raison. Malheureusement son rappel tombe mal car c’est à propos de l’article qui a trait au prix des carburants dans nos contrées.
Je rappelle la mobilisation massive de la totalité des parlementaires de l’outre-mer lorsqu’il s’est agi, il y a deux ans, de faire plier les compagnies pétrolières pour que le prix du carburant dans les outre-mer soit en rapport avec ce qu’il doit être.
Nous étions alors tous mobilisés derrière le Gouvernement dans un combat contre la vie chère, et dans ce combat la question du prix des carburants a pris une dimension emblématique qui nous oblige à ne pas reculer. Nous voudrions d’ailleurs étendre cette dimension à tous les domaines, notamment celui de la téléphonie dont nous parlions tout à l’heure.
L’intervention de notre président, qui est fondée sur le principe, arrive sur un sujet sensible auquel nous tenons beaucoup. Et compte tenu de ce que fut la mobilisation des populations d’outre-mer, nous ne souhaitons pas lever le pied et abaisser notre vigilance sur cette question.
Je voudrais redire la détermination du Gouvernement à lutter contre la vie chère, notamment en matière de carburants. À ce titre, nous rejoignons tout à fait la lutte engagée en son temps par Victorin Lurel contre la vie chère, notamment s’il s’agit de faire la lumière sur la fixation des prix des carburants. Je n’ai pas le sentiment que, depuis un an, nous ayons baissé la garde. La lutte que nous avons menée nous a permis d’atteindre des résultats tout à fait corrects en matière de lutte contre la vie chère et nous n’avons pas cédé aux intimidations des pétroliers qui nous incitaient à revenir sur ce qui avait été voté.
Le Gouvernement considère qu’il est normal de transmettre à la mission d’information un certain nombre des documents qui lui ont été remis – je pense au rapport sur la fixation des prix que nous avons demandé à M. Baert – afin qu’elle puisse, si certains éléments lui semblent suspects ou peu clairs, rebondir et éventuellement créer une commission d’enquête. Mais si nous avons fait établir un rapport, c’est pour nous aider à avancer et pour respecter l’objectif qui nous avait été assigné : faire en sorte que le consommateur soit préservé et que la raffinerie puisse continuer à fonctionner. Il me semble qu’ainsi nous sommes dans l’action.
Notre travail consiste à nous battre pour que la loi contre la vie chère soit respectée. Mais si d’aucuns pensent que nous n’avons pas fait notre travail correctement et qu’il faut un rapport pour apprécier la manière dont nous travaillons, je pense effectivement que ce rôle appartient à la mission d’information parlementaire.
Je voudrais que mes collègues et Mme la ministre comprennent qu’il ne s’agit pas de faire un procès au Gouvernement pour inertie ou absence de défense. J’aurais pu – mais je ne l’ai pas fait, préférant laisser le soin au Gouvernement de nous éclairer – déposer un amendement précisant que depuis le rapport de l’IGF, nous savons que les produits finis et semi-finis font, comme le brut, l’objet d’un surcoût, ce qui ne figure pas dans la loi NRE. Je ne l’ai pas fait car je savais qu’un tel amendement allait gêner le Gouvernement, mais je demande un rapport pour que vous-même, madame la ministre, en tiriez les conclusions.
Le président de la commission des lois évoque la souveraineté du Parlement. Je suis parlementaire et je le comprends, mais je vous parle, moi, de la souveraineté des consommateurs qui ne savent pas comment sont formés les prix. Je suis confronté à des mouvements de grève et je vois des gens pleurer misère, alors que certaines stations-service et les compagnies pétrolières prospèrent.
La loi a encore une béance. Nous voulons simplement qu’un rapport nous soit remis par le Gouvernement car il contiendra des éléments qu’Ericka Bareigts n’obtiendra jamais. Un premier pas a été fait par l’IGF. Demain peut-être déposerons-nous un amendement plus complet mais nous avons opté pour un compromis en demandant un rapport afin, chers collègues, que vous soyez totalement éclairés sur les pratiques, les failles de la loi et sur ce qui se fait de mieux.
Nous ne retirons donc pas cet amendement, que nous demandons à nos collègues de voter.
L’amendement no 3 rectifié est adopté.
Madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, rassurez-vous : il ne s’agit pas seulement d’exiger la remise d’un nouveau rapport. Mais le sujet est suffisamment important pour essayer de trouver une méthode qui rassure tout le monde et lancer un processus de négociation.
Les articles 349 et 107 du traité de Lisbonne fournissent un cadre juridique pour toutes les aides d’État, notamment celles accordées aux régions ultrapériphériques. Il s’agit d’un cadre extrêmement important, qui, depuis trente ans, permet à ces régions, conformément aux termes du traité, de répondre aux handicaps structurels permanents qu’elles connaissent : éloignement, etc. Or le renouvellement du régime de l’octroi de mer, réduit de dix à cinq ans, vient de placer ce dernier sous l’égide d’un règlement de droit commun, le règlement général d’exemption par catégorie ou « RGEC » ; à mon avis, l’objectif était de permettre d’assurer la continuité du régime – ce que j’admets bien volontiers, madame la ministre, car vous n’aviez certainement pas d’autre solution que celle proposée par la commissaire Vestager.
L’inconvénient, c’est que le RGEC fixe un plafond d’aides, et si l’on additionne l’octroi de mer, les défiscalisations, la TVA non perçue récupérable et les exonérations, on risque de dépasser celui-ci. Certes, vous avez reçu une « lettre de confort » qui permettra de relever le plafond d’environ 30 %, mais nous considérons que les compensations prévues dans le cadre de l’octroi de mer devraient couvrir 100 %. D’où nos inquiétudes.
C’est pourquoi je souhaiterais que vous répondiez à plusieurs questions.
Premièrement, quid de la période 2014-2015, durant laquelle nous ne disposions pas de lettre de confort mais où l’octroi de mer se situait au-dessus du plafond du RGEC ? Ne faudrait-il pas tenir compte de cette période d’instabilité ?
Deuxièmement, quels sont les éléments qui pourraient expliquer que le changement des lignes directrices des aides d’État à finalité régionale ne permettrait plus à l’octroi de mer de rester sous l’égide de l’article 349 du traité de Lisbonne ?
Troisièmement, vous inscrivez-vous dans un processus de négociation qui, si vous choisissiez définitivement le rattachement au RGEC, nous permettrait de sécuriser le dispositif de telle sorte que les entreprises n’aient pas à rembourser les sommes perçues au-delà du plafond fixé par Bruxelles ?
Enfin, quel est le calendrier des négociations, et à quel niveau doivent-elles être conduites ? Je me rappelle ainsi que pour le traité de Maastricht, mes aînés – Camille Darsières, Aimé Césaire, Rodolphe Désiré – avaient fait appel à François Mitterrand pour que soit engagée une négociation au plus haut niveau. Nous savons en effet pertinemment – je l’ai moi-même vérifié lors de la préparation de mon rapport sur l’application de l’article 349 du traité européen – que l’Europe n’est pas favorable à une application stricte de l’article 349 ; bien au contraire, elle fait tout ce qu’elle peut pour que les régions ultrapériphériques reviennent dans le droit commun.
Tel est donc le sens de mon amendement. Pourriez-vous, madame la ministre, rassurer les entreprises et le secteur économique ? Je sais bien que M. Urvoas n’aime pas les rapports, ce en quoi on peut considérer qu’il n’a pas tout à fait tort, mais une mobilisation des parlementaires autour du Gouvernement permettrait de parler d’une même voix à Bruxelles en vue d’obtenir la garantie des financements européens.
Je pense que notre collègue a voulu déposer un amendement d’appel pour engager une discussion avec le Gouvernement. S’agissant de la demande de remise d’un rapport, j’émets un avis défavorable.
Serge Letchimy le sait parfaitement : le Gouvernement se mobilise depuis plus d’un an, voire deux ans, pour que l’on prenne en considération la situation particulière des départements et collectivités d’outre-mer dans un cadre européen qui n’avait pas été bâti pour eux. Il est vrai que le fait que le règlement général d’exemption par catégorie s’applique aux outre-mer ne nous facilite pas la vie ! J’avais d’ailleurs eu l’occasion d’évoquer le sujet en répondant à la question au Gouvernement de M. Marie-Jeanne, le 1er juillet dernier : quand on a négocié le règlement général d’exemption par catégorie, personne ne s’est demandé comment cela allait se passer pour les outre-mer. Nous avons donc dû faire face à la situation. On nous a informés que nous ne pourrions plus utiliser les notifications d’aides et que si nous passions outre, nous le ferions à nos risques et périls, sachant que nous aurions quatre-vingt-dix chances sur cent d’essuyer un refus ; il faut en effet justifier chaque aide, et l’on sait bien que, vu les caractéristiques du tissu d’entreprises dans les outre-mer, cela est impossible. Par conséquent, on nous a conseillé d’adosser les aides au règlement général d’exemption par catégorie, qui donne plus de latitude aux États pour agir. C’est pourquoi nous avons engagé cette démarche.
Il est vrai que, par la suite, nous nous sommes aperçus que ce règlement n’avait pas été conçu pour les outre-mer et qu’il n’abordait pas des sujets très importants pour eux, comme l’énergie et les transports. Dès lors, que faire ? Notre objectif, au Gouvernement, n’est pas de faire des rapports ; il est de régler les problèmes. Nous avons donc fait en sorte que la décision relative à l’octroi de mer soit rendue dans les délais, que la situation de nos entreprises soit sécurisée et que la commissaire européenne rédige ce que l’on appelle une « lettre de confort », précisant que nous l’avions informée de ce que nous ne pourrions pas, pour ce qui est des outre-mer, respecter certaines prescriptions du RGEC et qu’elle en avait pris connaissance. On nous a rétorqué que cela n’aurait aucune valeur juridique. Nous avons donc écrit de nouveau à la commissaire, qui nous a répondu qu’elle avait pris bonne note de la chose. Cela signifie que si demain, le concurrent d’une de nos entreprises déposait un recours et exigeait le remboursement d’une aide, nous pourrions mettre en avant le fait que la commissaire avait déclaré être au courant et que, par conséquent, nous étions de bonne foi et fondés à penser que nous pouvions attribuer une telle aide.
D’autre part, quand nous avons rencontré la commissaire, en juin, nous lui avons fait acter que, compte tenu de la situation particulière des outre-mer, le taux maximal admis pour d’autres pays, comme l’Espagne ou le Portugal, ne suffirait pas. Tout cela a été mis par écrit.
Cela fait six mois que l’on nous dit qu’il faut réviser le règlement général d’exemption par catégorie. Je vous réponds que nous avons sécurisé la situation provisoire. Alors, allons-y ! Au lieu de commander un nouveau rapport, essayons d’obtenir ensemble que l’on tienne mieux compte de la situation des outre-mer dans le RGEC. La façon dont je conçois mon rôle, ce n’est pas de commenter ou d’analyser a posteriori une décision, mais, dès lors que la situation provisoire a été sécurisée, d’aller de l’avant. Adressons-nous, tous ensemble, à Bruxelles ; et si nous avons besoin de l’appui du Président de la République et des plus hautes autorités, sollicitons-les ; mais surtout, essayons de faire des choses concrètes et d’obtenir ensemble la renégociation du règlement général.
Cela étant, vous le savez aussi bien que moi : vu qu’il a fallu un an et demi pour obtenir le renouvellement de l’octroi de mer, qui concernait exclusivement les outre-mer, avant de renégocier un règlement qui concerne vingt-sept pays, il importait de protéger nos arrières, car même si nous voulons le faire rapidement, il est bien évident que cela prendra beaucoup de temps.
Sur le fond, nous sommes donc d’accord : allons tous ensemble à Bruxelles demander la renégociation du RGEC afin que soit prise en compte la situation spécifique des outre-mer. Sur ce point, il n’y a pas d’opposition entre nous.
Et donc, quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement no 109 , madame la ministre ?
Eh bien, le Gouvernement n’y est pas favorable, puisqu’il pense qu’au lieu de faire des rapports, il vaudrait mieux travailler ensemble auprès de Bruxelles.
Nous sommes sur la même ligne que le Gouvernement sur cette question. C’est un sujet qui touche énormément les acteurs économiques ultramarins, dont les inquiétudes ont parfois été instrumentalisées. Nous souhaitons par conséquent agir dans la plus grande solidarité avec le Gouvernement afin de sécuriser la situation, conformément à l’engagement du Président de la République de donner de la visibilité aux instruments de développement économique dans les outre-mer.
Notre collègue Serge Letchimy a eu raison de relayer dans cette enceinte une inquiétude que nous partageons tous, mais nous souhaitons en la matière faire front avec le Gouvernement et nous engager dans une démarche utile et efficace.
La ministre a dit exactement ce que je souhaitais entendre. Je voudrais simplement ajouter une chose : l’enjeu pour nous n’est pas, comme l’a souligné Victorin Lurel, de mettre en doute la volonté du Gouvernement. Le Gouvernement a certainement fait son possible pour essayer de maintenir sous l’égide de l’article 349 l’octroi de mer, mais ce dernier a été rattaché au RGEC, ce qui change considérablement les choses.
Mon intervention visait donc à appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité de sécuriser juridiquement la situation, car le jour où des entreprises se verront demander le remboursement de surplus d’aides, il faudra que le Gouvernement puisse mettre en cause Bruxelles, qui a rédigé une lettre de confort insuffisante. Je rappelle qu’avec 2 milliards d’euros d’aides au total, nous dépassons largement le plafond fixé par le RGEC ; il nous faut impérativement sécuriser cela.
D’autre part, nous considérons que, vu les réticences de Bruxelles, la négociation demandera une très forte mobilisation.
Puisque j’ai eu les réponses que je souhaitais, je retire mon amendement. Je suis à votre disposition, madame la ministre, pour vous accompagner dans le traitement de ce dossier.
L’amendement no 109 est retiré.
Madame la ministre, je vous remercie pour vos réponses. Je veux néanmoins préciser deux choses : d’abord, je ne suis pas « obsédée » par la création d’une SAFER en Guyane, je le suis par la perte de terrains agricoles sur ce territoire et par la mauvaise gestion du foncier.
L’EPAG, créé il y a vingt ans, peut certes accorder des concessions agricoles ; malheureusement l’État ne paye pas, et c’est là que le bât blesse. Vous dites que si l’on créait une SAFER, il faudrait que l’État paye ; mais même aujourd’hui, il ne paye pas, et il demande à l’EPAG de faire le travail en son nom.
L’objet de mon intervention est donc, madame la ministre, de vous rappeler comme à chaque fois que le territoire de la Guyane a besoin d’un développement agricole serein, assis sur un foncier géré correctement. Que ce soit par l’intermédiaire d’une SAFER ou de l’EPAG, l’État a une responsabilité en la matière, parce qu’étant propriétaire du foncier, il doit se donner les moyens de le gérer afin de le mettre à la disposition des agriculteurs.
Je vous remercie donc de transmettre ma requête au ministre de l’agriculture et au Premier ministre : que l’on se dote de vrais outils pour gérer ce beau territoire qu’est la Guyane, dont l’État est propriétaire à 95 %.
L’article 5 est adopté.
Article 5
La commission a supprimé l’article 5bis.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement no 114 rectifié .
Cet amendement vise à exonérer les forêts des collectivités territoriales de Guyane des frais de garderie et d’administration normalement versés à l’Office national des forêts – ONF.
En effet, les projets de forêts communales en Guyane sont obérés par le dispositif national des frais de garderie censés compenser pour l’ONF les charges dues à l’application sous son autorité du régime forestier. Les finances des communes guyanaises subissent un effet de ciseaux, avec de faibles rentrées fiscales et de lourdes charges dues aux besoins en équipements collectifs d’une population en forte croissance. Elles ne peuvent donc assumer des frais s’élevant à deux euros par hectare.
C’est pourquoi le rapport de la délégation sénatoriale à l’outre-mer sur le domaine de l’État en outre-mer, rendu public le 18 juin 2015, proposait de stimuler la création de forêts communales en les exonérant de frais de garderie, ce qui permettrait de générer des ressources pour les communes tout en rendant celles-ci pilotes de l’exploitation du bois sur leur territoire. En outre, une telle exonération au bénéfice des communes serait une juste contrepartie pour l’absence de versement de taxe sur le foncier non bâti par l’ONF, au mépris des dispositions du code général des impôts.
Vous l’aurez compris : cet amendement vise à rétablir l’article 5 bis qui avait été adopté au Sénat grâce à un large consensus des élus ultramarins.
Je rappellerai que les raisons qui ont conduit à la suppression de l’article 5 bis en commission militent contre l’amendement que nous propose notre collègue Serville. Il n’y a en effet pas de forêt guyanaise communale sous régime forestier et, par ailleurs, la situation financière de l’ONF est très préoccupante. S’il faut aider les communes guyanaises à valoriser la forêt amazonienne, ce n’est pas en plaçant à la charge de l’ONF des prestations non financées que l’on y parviendra. Je rappelais hier lors de la discussion générale, en présentant le rapport, que, sans méconnaître les enjeux qui s’attachent au développement des forêts communales en Guyane, la commission a considéré qu’il n’était pas souhaitable d’organiser des prestations à la charge d’opérateurs publics tout en en supprimant leur financement. L’avis est donc défavorable.
Il faut reconnaître aux élus guyanais le mérite de la constance dans la défense de leurs positions, notamment dans l’opposition à ce qu’ils estiment constituer des privilèges de l’État. Il est vrai que la Guyane abrite une forêt très importante. Un travail d’entretien est effectué par l’ONF, qui se trouve dans une situation financière peu florissante. Si l’on veut que ce travail d’entretien continue à être réalisé, il me semble normal que les frais de garderie et d’administration soient versés à l’ONF.
Cela étant, une mission interministérielle sur le coût du régime forestier est en cours, qui est notamment chargée d’étudier cette question. Ses recommandations serviront de base aux négociations qui devront être conduites dans le cadre de la révision du contrat d’objectifs de l’ONF pour la période 2016-2020. C’est la raison pour laquelle je souhaite que vous retiriez cet amendement. Je vous donne rendez-vous pour en reparler une fois que nous disposerons des résultats de la mission interministérielle.
Madame la ministre, vous aurez compris que, lorsque j’ai demandé à réintroduire cet article, c’était en réalité un signal d’alerte que j’entendais lancer. Mme la rapporteure me rappelle la situation financière de l’ONF : j’en prends acte, mais je ne suis pas là pour défendre l’ONF en Guyane ; je suis là pour défendre la situation financière des communes. Je suis aussi maire d’une commune, et je sais ce que cela nous coûte. C’est la raison pour laquelle j’ai fait le pari de poser à nouveau cette question, sachant que nous sommes souvent assis sur des richesses que nous ne parvenons pas à exploiter au bénéfice de nos populations. Je pense notamment à l’or, qui est saisi en Guyane mais qui ne lui profite pas, car il est rapatrié vers la France hexagonale. On a souvent parlé de la taxe carbone : la Guyane abrite huit millions d’hectares de forêts mais ne perçoit pas un centime. Nous connaissons des situations récurrentes qui, à terme, finissent par créer un sentiment de frustration, un véritable malaise, qui est ressenti à la fois par les élus de Guyane mais aussi par la population. En effet, nous n’arrivons pas toujours à faire face aux demandes qu’elle exprime.
Cela étant dit, madame la ministre, je prends acte des travaux de cette mission interministérielle, qui va certainement se rapprocher de nous. Nous allons lui faire part de nos inquiétudes quant aux modalités d’exploitation des forêts communales : vous savez que 20 % des bénéfices tirés de l’exploitation du bois en Guyane sont destinés à assurer le fonctionnement de l’ONF, tandis que 80 % sont reversés à l’État. Les communes ne perçoivent rien. C’est une situation qui devient intolérable. Toutefois, je prends acte du rendez-vous que vous m’avez donné. Encore une fois, comme je le dis très souvent dans cet hémicycle, je ne manquerai pas de vous le rappeler le moment opportun. Pour cette raison, j’accepte de retirer cet amendement.
L’amendement no 114 rectifié est retiré.
Article 5
Je voudrais relayer un courrier que le maire de Rémire-Montjoly a fait parvenir aux parlementaires il y a quelques jours à propos de l’amendement du Sénat ayant créé cet article. S’il exprime son accord sur le fond de l’amendement, il déplore plusieurs problèmes de forme. Madame la ministre, les Guyanais sont solidaires de cette démarche. Encore une fois, le foncier est un sujet très sensible en Guyane : il vous faut en prendre la mesure. Comme je vous l’ai déjà dit – je souhaite me tromper –, si un problème survient un jour en Guyane, l’étincelle viendra du foncier.
Certes, l’État a été à l’origine de l’amendement visant à rétrocéder du terrain au grand port maritime de la Guyane, mais ce dernier est situé sur la commune de Rémire-Montjoly, qui a un plan local d’urbanisme et des projets. Or, la commune n’a pas été consultée.
Tout cela n’est pas très logique. Les communes disposent d’outils sur le plan foncier ; elles ont demandé la rétrocession de parcelles à l’État et travaillent d’ailleurs très bien avec le grand port maritime. Si la mise en oeuvre des investissements nécessaires pour le grand port maritime, avec l’appui du préfet, n’est contestée par personne sur le fond, il n’en va pas de même de la forme : il faut respecter les outils existants. De fait, la commune de Rémire-Montjoly s’étend sur 47 kilomètres carrés, ce qui en fait l’une des plus petites communes de Guyane. Tout à l’heure, j’évoquais l’établissement public d’aménagement de la Guyane – l’EPAG. Or, vous savez que l’État lui a gracieusement accordé 42 kilomètres carrés. Je trouve que vous donnez facilement aux établissements publics et moins facilement aux collectivités : il faut prêter attention à cela.
Je le répète : je relaie et partage la préoccupation du maire de Rémire-Montjoly. Les outils sont là, essayez de les respecter. Quant au fond, je suis favorable au fait d’accorder au grand port maritime les moyens nécessaires à ses investissements, mais veillez à respecter aussi les collectivités territoriales, et les élus en particulier.
L’article 5 ter est adopté.
Les articles 6 et 7 sont successivement adoptés.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 134 rectifié .
Cet amendement a été travaillé avec, notamment, Serge Letchimy, qui est très investi dans la lutte contre l’habitat indigne. Il est vrai qu’aujourd’hui encore, un trop grand nombre de nos concitoyens ultramarins vivent dans des habitats dégradés ou insalubres. Nombre d’opérations de résorption de l’habitat insalubre sont menées dans les outre-mer, mais ces situations perdurent, et il y a encore beaucoup de travail pour faire en sorte que les ultramarins vivent dans des conditions dignes.
Cet amendement vise à rendre obligatoire l’élaboration dans les départements d’outre-mer et à Saint-Martin de plans communaux ou intercommunaux de lutte contre l’habitat indigne et, surtout, de faire de ces plans une composante essentielle des plans locaux de l’habitat. Ces plans existent déjà et peuvent être subventionnés par l’État. Le fait de les rendre obligatoires permettra d’améliorer la prise en compte par les collectivités de ce phénomène.
Pour répondre à l’observation de Chantal Berthelot, il existe un certain nombre de projets d’intérêt général. Je suis persuadée que l’intérêt de la Guyane réside dans le fait que ce grand port puisse exister et se développer. Sans doute faut-il renforcer autant que possible la concertation avec les élus locaux pour que chacun soit bien informé, mais, quand bien même la commune n’est pas très grande, on ne peut pas, en tout état de cause, déplacer le port. Des considérations d’intérêt général s’imposent et nous obligent à faire les choses comme elles ont été faites en l’espèce.
L’amendement no 134 rectifié est adopté.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 23 .
L’amendement no 23 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 7 bis, amendé, est adopté.
Article 7
Je suis saisie de deux amendements, nos 25 rectifié et 28 , qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour les soutenir.
Les amendements nos 25 rectifié et 28 , acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.
L’article 7 ter, amendé, est adopté.
Article 7
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 29 .
L’amendement no 29 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 7 quater, amendé, est adopté.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 135 rectifié .
À Mayotte, il est prioritaire de valoriser les terrains agricoles. L’absence de société d’aménagement foncier et d’établissement rural – SAFER – est supposée être palliée par le fait que la loi confie les missions de préemption et d’aménagement foncier agricole à l’Agence de services et de paiement – l’ASP. Mais, en pratique, l’ASP n’est que peu mobilisée sur cette mission, qui n’est pas rattachable à son métier, à savoir le versement des aides financières. Par ailleurs, il s’agit d’une disposition transitoire, qui prend fin au 1er juillet 2017. C’est pourquoi, compte tenu de la nécessité de favoriser, sur ce territoire, les synergies entre missions complémentaires, il est proposé de confier les missions de développement du foncier agricole et, en particulier, de préemption, à l’établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte, dont la création est prévue par l’article 5 du présent projet de loi. Mayotte pourra ainsi disposer d’un outil intégré d’aménagement foncier.
Il s’agit de la reprise d’une idée que M. Aboubacar avait formulée en commission des lois ; son amendement en ce sens avait ensuite été déclaré irrecevable. Il s’agit, par cet amendement, de confier les missions de gestion et d’aménagement du foncier agricole au nouvel établissement public créé par l’article 5, dès lors qu’il a vocation à devenir l’acteur unique en matière de politique foncière et d’aménagement sur Mayotte. J’émets donc un avis favorable.
Comme l’a dit Mme la rapporteure, mon amendement avait été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. L’établissement public va être créé. L’ASP a travaillé pendant un certain temps en cette matière, mais elle estime qu’elle ne peut pas continuer à exécuter ces deux missions. La meilleure solution est donc de les confier à cet établissement public foncier pour plus d’efficacité et pour accélérer les choses.
L’amendement no 135 rectifié est adopté.
Cet amendement a pour objet de corriger les erreurs matérielles dans la rédaction des alinéas qui organisent le transfert de la zone des cinquante pas géométriques à la région Guadeloupe et à la collectivité territoriale de Martinique. La rédaction des deux alinéas relatifs, respectivement, à la Guadeloupe et à la Martinique, a vocation à être strictement identique. Or, on avait mentionné une précision pour un territoire et non pour l’autre. Cet amendement a pour objet de rectifier cette erreur. Par ailleurs, la compétence en matière d’aménagement est d’ores et déjà dévolue aux collectivités territoriales et n’avait donc pas à être transférée. En revanche, il fallait faire référence à la faculté conférée aux agences s’agissant des cinquante pas en matière de travaux de voies d’accès, de réseaux d’eau potable et d’assainissement.
Avis favorable, puisque l’amendement du Gouvernement a pour objet d’harmoniser les différentes rédactions.
L’amendement no 153 est adopté.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 26 .
L’amendement no 26 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 8, amendé, est adopté.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement no 115 .
J’ai pris acte de la farouche hostilité du président de la commission des lois à solliciter des rapports de la part du Gouvernement. Il a pris le temps d’expliquer les fondements de sa position, que j’ai parfaitement entendue. Par ailleurs, l’amendement no 134 rectifié du Gouvernement, qui a pour objet de créer dans chaque commune de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, de la Réunion, de Mayotte et de Saint-Martin un plan local de lutte contre l’habitat indigne, va tout à fait dans le bon sens. Fort de ces deux éléments, je retire mon amendement.
L’amendement no 115 est retiré.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 33 .
L’amendement no 33 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 8 bis A, amendé, est adopté.
La commission a maintenu la suppression par le Sénat des articles 8 bis et 8 ter.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 34 .
Il s’agit de corriger une petite erreur matérielle : « à l’alinéa 2, après la première occurrence du mot : "général,", insérer les mots : "et bénéficier". »
L’amendement no 34 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 8 quater, amendé, est adopté.
La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures vingt.
Je suis saisie de deux amendements portant article additionnel avant l’article 9.
La parole est à Mme Ericka Bareigts, pour soutenir l’amendement no 136 .
Il s’agit d’une question extrêmement importante, qui concerne beaucoup de nos concitoyens et leurs familles, celle des centres d’intérêt moraux et matériels des fonctionnaires qui demandent une mutation. Vous le savez : au cours des années quatre-vingt-dix, beaucoup de fonctionnaires ont fait le voyage vers l’hexagone pour y occuper des postes dans la fonction publique d’État. Cependant, les règles qui s’appliquent à la suite cette mutation ont changé, en particulier au cours de la dernière législature. Aujourd’hui, elles défavorisent nombre de nos concitoyens ultramarins, qui ne peuvent pas retourner exercer outre-mer et beaucoup de familles sont ainsi en lambeaux.
Dans son rapport sur la régionalisation de l’emploi en outre-mer, notre collègue Patrick Lebreton proposait de prendre en compte les centres d’intérêt moraux et matériels. Et, pour sa part, le Président de la République a pris un engagement fort sur cette question lors de son déplacement à la Réunion, au mois d’août dernier.
Par cet amendement, nous proposons aujourd’hui d’inscrire ces centres d’intérêt moraux et matériels dans la loi, et ce pour trois raisons. Tout d’abord, nous ne comprenons pas pourquoi ils ne pourraient figurer dans la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, dans la mesure où cette loi définit en son article 60 les critères retenus pour les mutations. Ensuite, par un récent arrêt, le Conseil d’État a annulé une instruction du ministre des finances sur les mutations ultramarines, car il considère que les règles de mutation sont de nature statutaire et qu’aucun critère ne saurait être retenu s’il n’était inscrit dans la loi. Enfin, nous souhaitons traduire avec force l’engagement pris par le Président de la République lors de son déplacement à l’île de la Réunion pour éviter toute remise en cause ultérieure.
Inscrire les centres d’intérêt moraux et matériels dans la loi, madame la ministre, ce n’est pas dire à tous les Ultramarins qu’ils auront la possibilité de revenir travailler outre-mer. Il s’agit simplement d’affirmer un critère juste qui permette à nos territoires de retrouver une partie de ces forces vives parties en masse vers l’hexagone, qui sont dans l’impossibilité de rentrer à La Réunion, aux Antilles ou ailleurs. Sur des territoires fragiles tels que les nôtres, nous avons besoin de ces forces vives qui ont une valeur d’exemplarité, qui permet aux uns et aux autres, surtout aux plus jeunes, de disposer d’une référence pour se construire.
Je propose à notre collègue Ericka Bareigts de retirer cet amendement. Si je partage l’idée selon laquelle le critère des centres d’intérêt moraux et matériels devrait être inscrit dans la loi, j’apprécie aussi – comme, me semble-t-il, chacun des législateurs ici présents – que la loi soit lisible et intelligible, qu’elle puisse être comprise de celui qui la reçoit. Or comment les fonctionnaires d’outre-mer recevront-ils le message si, demain, le principe en question est inscrit dans la loi ?
Je suis d’accord sur le critère, mais je souhaite qu’il soit clairement défini. Or la difficulté est que vous ne nous en proposez aujourd’hui aucune définition, chère collègue. Il faut y travailler, c’est, à mon sens, une priorité. C’est d’ailleurs ce que fait en ce moment la direction générale de l’administration et de la fonction publique et cela peut aussi entrer dans le champ de la mission pour l’égalité réelle de M. Lurel. Il me paraît difficile, à ce stade, de créer un droit opposable et, à tout le moins, de prendre en compte ce critère avant même celui de l’éloignement familial.
Je me permettrai aussi d’évoquer un certain nombre de questions, qui montrent la nécessité d’un travail précis de définition. Qu’est-ce qu’un fonctionnaire issu d’une collectivité d’outre-mer ? Doit-il y être né ou bien y avoir encore sa famille ? Comment ce critère s’articulera-t-il avec les autres critères inscrits dans les dispositions législatives portant statut des fonctionnaires ? Comment s’assurer que le dispositif proposé ne risque pas d’entraîner, demain, une saturation des postes ouverts en outre-mer et de supprimer toute possibilité de rotation des effectifs ? Ce sont des questions que la commission des lois se pose au moment où vous défendez cet amendement, chère collègue.
Je vous invite donc à le retirer.
La notion de centres d’intérêts moraux et matériels est extrêmement connue dans les outre-mer et fonde la vie de beaucoup de fonctionnaires ultramarins, mais c’est, il faut bien le reconnaître, une notion jurisprudentielle, qui n’a jamais été définie par la loi.
Si nous voulons que le critère des centres d’intérêts matériels et moraux prime pour obtenir une mutation dans les outre-mer, il mérite d’être encore mieux défini. Certes, la jurisprudence ressemble retient un certain nombre de faits, comme une naissance dans les outre-mer, le fait d’y avoir sa maison, d’y être inscrit sur les listes électorales, qui permettent de déterminer si l’on a ses intérêts moraux et matériels outre-mer, mais je crois qu’il serait intéressant de poursuivre le travail que nous menons sur cette question avec la DGAFP. Vérifions ce qu’il faut entre par « centre des intérêts moraux et matériels ». Il ne s’agit pas tout à fait d’être originaire des outre-mer : vous pouvez très bien être né en métropole et avoir vos intérêts matériels et moraux dans les outre-mer, par exemple parce que vous y avez une maison, que vous y êtes lié en raison de votre mariage, etc.
Je crois que nous aurions donc intérêt à travailler dans deux directions.
D’une part, il s’agirait de bien considérer ce qui doit être inscrit dans la loi comme relevant des intérêts matériels et moraux. En ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie, nous sommes parvenus à un accord qui, à mon avis, a simplifié les choses, parce que nous avons trouvé un critère qui convenait à tout le monde pour les intérêts matériels et moraux en Nouvelle-Calédonie, mais, en l’occurrence, il s’agit de parvenir à une solution qui s’applique à des territoires qui ne relèvent pas du même article de la Constitution. Faisons donc ce travail pour déterminer quels sont les critères pertinents à la détermination du centre des intérêts moraux et matériels.
D’autre part, il s’agit de trouver comment concilier le désir légitime des fonctionnaires ultramarins de travailler au plus près de leur famille et de leurs amis et le principe d’égalité. Cette question est vraiment au coeur de la mission confiée à Victorin Lurel. Comment concilier ces deux notions difficilement conciliables ? D’ailleurs, vous le savez bien, si le travail que nous faisons avec le ministère de la fonction publique et Mme Lebranchu a tendance à patiner, c’est notamment parce que diverses conceptions de l’égalité s’affrontent. Comme la décision n’incombe pas, finalement, du ministère des outre-mer, je pense que nous aurions intérêt à programmer une réunion avec le ministère de Mme Lebranchu à la rentrée de septembre pour voir quels sont les obstacles, et un dialogue avec un certain nombre de syndicats nationaux permettra notamment des progrès. Par ailleurs, la question entre totalement dans le champ de la mission qui a été confiée à Victorin Lurel.
Vous avez évoqué, madame la députée, un arrêt, qui estime que la question ne peut pas être tranchée par le pouvoir réglementaire, qu’elle relève de la loi. Ce qui nous embête, c’est que c’est en quelque sorte un renversement. Jusqu’à présent, nous avions toujours considéré que la notion d’intérêts moraux et matériels relevait non pas de la loi mais du règlement et de la jurisprudence, et des circulaires et un certain nombre d’instructions avaient permis, dans de nombreuses administrations, d’aboutir à des solutions intéressantes pour résoudre les problèmes individuels – il s’agissait, par exemple, d’accorder des points supplémentaires à des agents originaires des outre-mer. L’arrêt que vous avez évoqué remet en cause la manière dont la question était traitée jusqu’à présent.
Je maintiens ma position. La question que vous abordez est importante pour beaucoup de fonctionnaires ultramarins ; je propose d’y travailler avec Mme Lebranchu. Les parlementaires ont montré qu’ils veulent donner un coup d’accélérateur à la résolution de ce problème. Je crois que la meilleure formule serait d’organiser une rencontre avec des organisations syndicales, de manière à essayer d’avancer. Cette question serait également incluse au programme de la mission confiée à Victorin Lurel.
C’est vraiment une question d’égalité. Pour qu’il y ait une égalité réelle, les fonctionnaires ultramarins ne devraient-ils pas avoir un petit de coup de pouce, pour les aider à rentrer chez eux plus facilement ? Nous sommes en plein dans le sujet sur lequel nous serons amenés à travailler au cours du semestre prochain, et sur lequel vous êtes totalement investis, avec Victorin Lurel. Je demande donc le retrait de cet amendement.
L’arrêt du Conseil d’État auquel j’ai fait référence montre tout simplement qu’il y a une instabilité dans ce dispositif, depuis toujours. Trente ans après, pour certains cas, nous n’avons toujours pas beaucoup avancé sur la question de la mutation des fonctionnaires vers nos territoires.
L’objet de ma démarche est de fixer des principes fondamentaux stables. L’un des éléments fondamentaux, à cet égard, c’est la notion de CIMM – centre des intérêts moraux et matériels. Madame la ministre, si j’ai bien compris, vous nous proposez d’organiser une réunion en septembre pour que nous, députés, puissions travailler avec Mme Lebranchu. Les engagements politiques doivent être respectés : or le Président de la République a pris un engagement fort à ce sujet. Nous tenons à ce que cet engagement soit tenu, vis-à-vis de nos familles et de ces fonctionnaires.
Pour cela, il faut que les règles soient claires et stables ; ainsi, à l’avenir, nous pourrons avancer sereinement. Au bénéfice de cet engagement, je retire cet amendement. J’insiste sur le fait qu’il est important d’avancer rapidement sur ce sujet.
L’amendement no 136 est retiré.
La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement no 64 .
Je ne viens pas au secours de Mme Bareigts, mais elle a raison de rappeler que le Président de la République en personne a prononcé un discours – c’est bien sur l’île de La Réunion que cela s’est passé – dans lequel il reconnaissait des distorsions inadmissibles. Je le prends au mot : c’est pourquoi j’ai déposé cet amendement.
Si mes souvenirs sont exacts, comme je l’ai dit dans mon intervention, ce discours a été prononcé le 21 août 2014. Bien que cet engagement ait été pris par le Président de la République lui-même, il n’a pas eu de suite : d’où l’intérêt de l’amendement de Mme Bareigts et de celui que je présente.
Je ne veux pas exagérer, mais on oublie généralement un autre aspect du problème. Pour prendre un exemple, il y a en Martinique des enseignants qui exercent depuis de nombreuses années en étant simplement détenteurs d’une licence ou d’un master, mais pas du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, le CAPES. Lorsque ces enseignants obtiennent le CAPES, ils doivent accomplir une année de stage : or même quand ils demandent à rester en Martinique proprement dite, là où il y a des postes vacants, pour effectuer ce stage, on les expatrie. Mais c’est inimaginable ! C’est contre cela que le Président de la République a pris cet engagement.
Je vous comprends, madame la ministre, mais comprenez-nous aussi ! Je l’ai déjà dit publiquement ici, plus d’une fois, c’est une deuxième injustice qui est faite. Je n’exagère pas ! Il faut ici qu’on le comprenne une fois pour toutes ! Je suis l’élu du peuple martiniquais, et je ne suis pas un opposant systématique : quand je fais une critique, j’essaie de faire une critique positive, en tenant compte de la réalité. Je ne comprends donc pas votre réponse.
Je m’adresse à tout le monde : comment peut-on expliquer cela concrètement ? Ce n’est pas possible ! Tous les jours, tous les parlementaires, sans exception, sont harcelés par ces problèmes. Que devons-nous faire ? Rester les bras croisés ? Voilà ce que je tenais à dire. Pour toutes ces raisons, je maintiens ma position.
Les interrogations que j’ai formulées à propos de l’amendement précédent valent aussi pour celui-ci ; l’avis est donc défavorable.
Il s’agit du même problème que nous avons abordé précédemment ; les arguments pour et contre sont les mêmes. Je comprends, monsieur Marie-Jeanne, le problème que rencontrent ces personnes qui, pendant longtemps, ont été auxiliaires et qui, pour devenir fonctionnaires, doivent s’en aller. Souvent, lorsque l’on veut évoluer dans sa carrière, le même problème se pose : il faut à nouveau repartir.
Aujourd’hui, toutefois, on arrive à régler la grande majorité des cas pour les professeurs qui deviennent titulaires. À la Martinique, en tout cas, on arrive déjà à régler la grande majorité des problèmes, en trouvant des postes sur place. Pour ce qui concerne la police, le Président de la République a en effet pris un engagement ; c’est cet engagement que Bernard Cazeneuve est en train de traduire, dans les faits, par une circulaire. Je crois que les organisations de policiers, lorsqu’elles ont été entendues, ont reconnu que des progrès significatifs ont été réalisés, puisqu’on était revenu au principe de l’ancienneté de la demande.
Le problème que soulève Mme Bareigts est un peu différent. Nous avons avancé grâce à cette circulaire concernant les mutations dans la police. La question posée par Mme Bareigts est peu ou prou la suivante : « une circulaire suffit-elle, compte tenu des interrogations du Conseil d’État ? »
Je vous ferai, monsieur le député, la même proposition qu’à vos collègues. Nous savons à quel point ce sujet est sensible pour les personnes originaires d’outre-mer, mais nous ne pouvons pas le régler entre personnes originaires d’outre-mer. Nous devons au contraire le régler en combinant ce qui concerne l’égalité dans le droit au travail des fonctionnaires ultramarins, et l’intérêt général des fonctionnaires, représentés par les organisations syndicales. Nous sommes vraiment au coeur de la question de l’égalité : c’est pourquoi je vous propose de lancer un dialogue, à la rentrée, avec Mme Lebranchu et les organisations syndicales ; je vous propose aussi que cette question soit intégrée à la mission confiée à Victorin Lurel.
Au bénéfice de cette proposition, je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi le Gouvernement y est défavorable.
Je m’associe à ces demandes. Il ne faut pas oublier, dans ce débat, les collectivités d’outre-mer : il y a aussi, dans les COM, des fonctionnaires d’État, qui exercent des compétences d’État, et qui rencontrent les mêmes problèmes.
Parfois, on a l’impression qu’il faut s’excuser d’être né outre-mer. On ne comprend pas toujours, dans l’Hexagone, notre volonté de revenir dans nos territoires, mais il faut se mettre à notre place ! Nous vivons très loin de l’Hexagone : lorsqu’on est muté à 20 000 kilomètres de son territoire d’origine, de sa famille, c’est très difficile. Je terminerai là-dessus : sachez que les trois quarts des demandes de particuliers que je reçois concernent ces questions. Il ne s’agit pas de quelques cas dans l’éducation nationale : beaucoup de personnes sont concernées, dans beaucoup de domaines, comme les greffiers, les policiers, les gendarmes… Vous voyez que cela touche tous les corps d’État.
Je suis donc d’accord avec cette proposition d’un traitement global. Il importe de bien définir les critères, et surtout de comprendre que la règle que vous souhaitez mettre en place – on parle de ce fameux turn-over en outre-mer – doit être relativisée. Nous ne voulons pas aller en outre-mer simplement parce que c’est l’outre-mer, mais parce que c’est notre territoire d’origine. Ce n’est pas un bonus que nous demandons : nous voulons simplement être proches de nos familles. Ce n’est pas du luxe !
C’est une vraie question. Je vous ai déjà interpellée, madame la ministre, à ce sujet, par courrier, en début d’année. Je sais que le Gouvernement y travaille, et je souhaiterais que vous y associiez également les COM, les collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, ainsi que la Nouvelle-Calédonie.
Je serai très bref. Je suis très solidaire de ces deux amendements. Comme Ericka Bareigts, je fais partie de la majorité : nous faisons donc confiance au Gouvernement. Alfred Marie-Jeanne connaît bien, comme moi-même, ce problème tel qu’il se présente en Martinique : il s’agit à la fois de ceux qui sont en ici et qui veulent revenir en Martinique ou en Guadeloupe, car c’est là que se trouve le centre de leurs intérêts, mais aussi de ceux qui quittent ces territoires.
Sur ce dernier point, nous avons vécu quelque chose de très injuste. L’éducation nationale voulait faire partir pas moins de quarante-sept personnes, enseignants et autres. Après avoir travaillé pendant près de trois mois, avec tous les députés et tous les élus concernés, pour expliquer au Gouvernement, à l’administration, que telle ou telle personne a un enfant, qu’il y a un poste libre ici ou là, etc., nous avons réussi à conserver vingt-sept des personnes concernées. Cela veut dire que le choix des personnes qui partent est vraiment aléatoire ! Il faut donc vraiment légiférer sur ce point, madame la ministre. Il faut définir clairement des règles de base qui ne soient pas contestables.
Une deuxième question se pose : la reconnaissance des syndicats locaux s’est retrouvée confrontée à une armada de syndicats dits nationaux. Je voudrais que l’on prenne cela en compte, que l’on prenne une décision très politique. Il faut être capable de dire : « Non, c’est comme ça ! » L’application de cette mesure suscite en effet des réticences au niveau national : il faut en tenir compte.
Monsieur Marie-Jeanne, maintenez-vous cet amendement, ou le retirez-vous ?
L’amendement no 64 n’est pas adopté.
Les articles 9 et 10 sont successivement adoptés.
Cet article concerne la prorogation de la procédure d’intégration des agents communaux en Polynésie française. Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, je souhaite, madame la ministre, que vous confirmiez bien, ce soir, le fait que vous consulterez les partis concernés en Polynésie à propos du décret d’application qui précisera la nature du réexamen périodique de la situation des agents qui n’intégreraient pas la fonction publique. Cela a fait l’objet de discussions préalables, de longues négociations entre les syndicats et les communes. Cet accord repose essentiellement sur ce décret.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, 80 % de ces agents n’ont pas encore intégré la fonction publique et souhaitent le faire. Ce décret est fondamental non seulement pour concrétiser cette volonté d’intégration, mais aussi pour maintenir des droits en faveur de ceux qui choisiraient de ne pas le faire. Vous m’avez déjà transmis, au mois de mai, un courrier qui allait dans ce sens. Il me semble néanmoins important que vous le confirmiez officiellement ce soir au moment d’adopter cet article.
L’article 11 est adopté.
L’article 12, amendé, est adopté.
Article 12
L’article 12 bis est adopté.
Je serais bref afin de ne pas risquer une volée de bois vert de M. le président de la commission des lois !
Sourires.
L’amendement demande la remise d’un rapport et a surtout pour objectif que Mme la ministre confirme ce qu’elle nous a indiqué en commission, car ses propos auront probablement plus de poids sous les ors de l’hémicycle. Il s’agit de réfléchir aux moyens de rendre plus équitable en matière de santé le dispositif de l’indemnité temporaire de retraite dont bénéficient les fonctionnaires d’État domiciliés outre-mer. Actuellement, leur ITR est suspendue s’ils sont obligés de se rendre en métropole ou ailleurs pour des raisons de santé, sauf s’ils font l’objet d’une évacuation sanitaire. En somme, il faut être à l’article de la mort pour que l’ITR ne soit pas suspendue. Il existe probablement d’autres modalités plus justes et plus équitables susceptibles d’être mises en oeuvre. Telle est la réflexion que je propose au Gouvernement de mener et de présenter à notre assemblée une fois qu’elle sera aboutie.
Il vise à inclure dans l’amendement les absences pour raisons professionnelles. Certes, il s’agit d’un amendement d’appel et le sujet de l’ITR est sensible, mais il faut tout de même l’évoquer car certains cas ne sont pas traités par le décret actuellement en vigueur. La loi est très restrictive et ne prend en compte que les absences en cas d’EVA-SAN, comme on appelle chez nous les évacuations sanitaires. Un cas très concret m’a été signalé en urgence et il me semble mériter notre attention. Si on applique la loi aujourd’hui en vigueur, toute autre absence n’est pas justifiée.
Les personnels navigants du transport aérien quittent régulièrement le territoire en raison de leur métier. Le Trésorier-Payeur-Général de Polynésie, respectant la loi à la lettre, refuse de considérer cette raison comme valable, ce qui pourrait les contraindre à un remboursement de l’ITR alors qu’ils résident en Polynésie et sortent temporairement du territoire pour exercer leur métier. Même si on cherche à éviter les rapports, j’aimerais que vous soyez sensibilisée sur ce point, madame la ministre. La loi relative à l’ITR prévoyait un rapport. Je ne sais pas s’il a été produit, les recherches que j’ai menées me donnent l’impression que tel n’est pas le cas. Ce sujet mérite d’être débattu et j’aimerais qu’il le soit avant la discussion de la loi de finances afin que le problème soit définitivement réglé.
Comme l’ont rappelé Mme Sage et M. Gomes, nous avons déjà eu ce débat en commission et je vous ai invité à retirer cet amendement d’appel, cher collègue Gomes. Il vise à avoir cette discussion avec le Gouvernement, je laisse donc la parole à Mme la ministre et demande à nouveau son retrait.
Nous devrions pouvoir progresser sur ce sujet, comme sur d’autres, sans recourir à un rapport. Les situations que vous avez évoquées, madame Sage, sont humainement difficiles à accepter, surtout s’il s’agit de maladie. Néanmoins, les services de Bercy sont parfois très pointilleux et une indemnité destinée à lutter contre la vie chère est attachée au territoire dans lequel elle s’applique. Afin d’avancer sur ce sujet, je suis prête à solliciter l’avis de Mme Touraine et de Bercy. Il me semble qu’un rapport sur ce sujet a été publié en 2010.
Quoi qu’il en soit, il ne faut pas oublier qu’en voulant améliorer une situation on risque parfois de mettre l’accent sur un avantage qui n’existe pas dans tous les outre-mer. L’indemnité de retraite supplémentaire est en fait assez rare. Je comprends bien la difficulté à laquelle sont confrontés les gens qui la perçoivent et doivent partir en métropole mais j’ai le sentiment que l’amendement met l’accent sur une situation qui demeure un peu exceptionnelle. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée mais il me semble que ce sujet peut se passer du détour par un rapport pour évoluer.
Je ne voudrais pas que l’amendement subisse les foudres de la CMP. Par conséquent, je le retire. Ni mon amendement ni le sous-amendement de Maina Sage ne visent à remettre en cause la réforme menée en 2008 ni l’adaptation et le réajustement du dispositif en vue de son application actuelle. Il s’agit simplement de signaler une modalité particulière de son application qui nous semble inéquitable et sur laquelle nous souhaitons obtenir l’éclairage du Gouvernement.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 71 .
L’amendement no 71 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il s’agit à nouveau d’un rapport, mais il n’est pas demandé à l’Assemblée ! Dans les EPCI de Nouvelle-Calédonie, les obligations applicables en matière de débat d’orientation budgétaire doivent être identiques à celles prévues en métropole, en particulier la présentation d’un rapport sur les orientations budgétaires et les engagements pluriannuels envisagés. Il en va de la saine administration des collectivités.
Conformément à l’article L. 163-10 du code des communes de Nouvelle-Calédonie, les dispositions législatives relatives au contrôle administratif et financier des communes s’appliquent également aux EPCI. Dès lors, les dispositions introduites par l’article 13 du projet de loi relatives à la transparence des procédures budgétaires des communes néo-calédoniennes s’appliqueront dans les mêmes termes aux EPCI, sauf dispositions contraires. Le présent amendement proposé par le Gouvernement ne revient pas sur ce principe mais introduit deux précisions utiles. Il limite aux EPCI de 10 000 habitants comprenant une commune d’au moins 3 500 habitants l’obligation de produire un rapport détaillé en vue du débat d’orientation budgétaire et prévoit expressément que ce rapport soit transmis aux communes de l’EPCI. L’avis est donc favorable.
L’amendement no 133 est adopté.
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 70 .
L’amendement no 70 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 13, amendé, est adopté.
La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour soutenir l’amendement no 119 rectifié .
Il est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Je comprends l’objectif de l’amendement. Il arrive de plus en plus souvent que le président de la commission des finances soit membre de l’opposition, comme c’est le cas ici à l’Assemblée. L’idée semble donc intéressante en matière de démocratie. Le problème, c’est qu’elle est contradictoire avec la libre administration des collectivités. Nous ne pouvons pas imposer au président de la collectivité ni à la collectivité elle-même le profil de la personne appelée à présider la commission des finances. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement no 119 rectifié n’est pas adopté.
L’article 14 est adopté.
Article 14
La parole est à Mme Paola Zanetti, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 74 .
L’article 14 bis a été introduit en commission des lois sur proposition de notre collègue René Dosière afin d’aligner sur le droit commun, soit dix-huit ans, la condition de durée d’exercice des fonctions municipales permettant de prétendre en Nouvelle-Calédonie à l’honorariat des maires et adjoints au maire. Toutefois, une petite discordance demeure au sujet de la condition géographique attachée à l’honorariat car le régime applicable en Nouvelle-Calédonie impose toujours aux élus locaux désireux de se voir conférer l’honorariat l’exercice de leurs fonctions électives dans une même commune alors que cette obligation a été supprimée par l’article 190 de la loi du 13 août 2004. Je propose donc de corriger cette discordance par le présent amendement.
L’amendement no 74 est adopté et l’article 14 bis est ainsi rédigé.
Je suis saisi d’un amendement, no 8 , portant article additionnel après l’article 14 bis.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour le soutenir.
Il s’agit d’un problème juridique. L’article 132 de la loi organique statutaire applicable en Nouvelle-Calédonie dispose que le Gouvernement peut nommer les personnalités de son choix au sein des sociétés dans lesquelles la collectivité est représentée. Par ailleurs, la loi du 19 mars 1999 prévoit l’extension à la Nouvelle-Calédonie d’un article du code général des collectivités territoriales selon lequel toute collectivité participant à une société doit obligatoirement y avoir au moins un représentant élu. Actuellement, les services juridiques néo-calédoniens, en liaison avec ceux de l’État, se trouvent confrontés à cette difficulté d’analyse de la situation juridique.
D’après les indications qui m’ont été données, telle n’est pas l’opinion qui prévaut au ministère où l’on considère que l’article 132 prime par définition sur les autres. Dès lors, l’application de ces dispositions en partie contradictoires n’est susceptible de soulever aucune difficulté juridique. J’aimerais obtenir du Gouvernement la confirmation de cette analyse selon laquelle l’article 132 est bien applicable sans difficulté particulière nonobstant les dispositions du code général des collectivités territoriales qui nous ont été étendues.
L’avis est défavorable pour les raisons évoquées en commission. Nous avons rejeté l’amendement proposé par notre collègue Gomes en raison d’un argument que je maintiens selon lequel l’amendement va à l’encontre des évolutions récentes prévues par le projet de loi NOTRe étendant l’obligation de choisir des délégués au sein des conseils ou par désignation au sein des syndicats de communes ou des syndicats mixtes. L’amendement me semble donc satisfait par les dispositions nouvelles voire aller à leur encontre.
Nous considérons que l’amendement peut être retiré car il est satisfait. L’article 8 de la loi du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie rend applicable certaines dispositions du CGCT aux sociétés d’économie mixte auxquelles participent la Nouvelle-Calédonie, les provinces, leurs établissements publics et les communes. Plus particulièrement, l’article L. 1524-5 du CGCT prévoyant que toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales actionnaire a droit à au moins un représentant au conseil d’administration ou au conseil de surveillance désigné en son sein par l’assemblée délibérante concernée est rendu applicable.
Toutefois, l’extension de ces dispositions ne saurait avoir lieu sans préjudice des dispositions de valeur supérieure au rang desquelles les dispositions de nature organique. Ainsi, les dispositions de l’article 132 de la loi organique du 19 mars 1999 prévoyant notamment que le Gouvernement nomme les représentants de la Nouvelle-Calédonie auprès des sociétés prévalent sur celles de l’article L. 1524-5 du CGCT. L’amendement se borne donc à rappeler les dispositions applicables. Il est donc satisfait et nous en demandons donc le retrait. Je ne sais pas si la loi NOTRe modifie ce qui existe mais le raisonnement selon lequel la loi organique prévaut devrait demeurer inchangé.
Je remercie Mme la ministre de cette explication juridique très claire et retire donc l’amendement.
L’amendement no 8 est retiré.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’actualisation de la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 ;
Suite de la discussion du projet de loi relatif à l’actualisation du droit des outre-mer.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly