Intervention de Gilda Hobert

Séance en hémicycle du 1er octobre 2015 à 15h00
Surveillance des communications électroniques internationales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilda Hobert :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, chers collègues, en juin dernier, le Parlement votait une loi importante sur le renseignement, une loi dont je pense sincèrement qu’elle constitue une avancée majeure pour l’État de droit, d’une part parce qu’elle définit des moyens d’action légaux en donnant aux services de renseignement les moyens à la hauteur des défis auxquels notre pays est confronté et, d’autre part, parce qu’elle offre plus de garanties, pour les agents, qui évoluaient jusqu’à présent dans un cadre juridique incertain, et pour les libertés publiques.

Au total, cela représente donc plus de sécurité pour les Français, car notre pays doit faire face à plusieurs menaces.

Il y a en premier lieu la menace terroriste. Protéiforme, cette dernière émane aussi bien de groupes évoluant à l’étranger que de personnes présentes sur le territoire national. En France, 1 900 individus sont aujourd’hui recensés dans les filières terroristes et djihadistes, dont 1 450 pour la Syrie et l’Irak. À cela, s’ajoute environ un millier de profils menaçants, qui propagent sur internet des messages ou des vidéos de haine et de soutien au terrorisme. Les attentats perpétrés en janvier dernier sur notre territoire ont souligné l’importance et l’urgence de cette réponse.

En plus de cette menace terroriste, la France doit aussi se protéger contre l’espionnage, le pillage industriel, la criminalité organisée, et la prolifération des armes de destruction massive.

Cette loi renforce par ailleurs les moyens d’action des services spécialisés de renseignement car garantir la sécurité des Français et la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la nation exige un travail d’analyse et de détection des menaces qui pèsent sur le pays. Cette mission, qui incombe aux services de renseignement, nécessite de les doter de moyens adaptés aux menaces.

En juillet dernier, le Conseil constitutionnel a jugé conformes à la Constitution les principales dispositions de la loi, à savoir les finalités pour lesquelles les services spécialisés de renseignement peuvent recourir aux techniques définies par la loi, la délivrance d’autorisations par le Premier ministre, les durées de conservation en fonction des caractéristiques des renseignements collectés ou encore l’ensemble des dispositions de justice administrative qui régissent le contentieux de la mise en oeuvre des techniques de renseignement.

Il a en revanche censuré l’article du code de la sécurité intérieure relatif aux mesures de surveillance internationale au motif que « le législateur n’a pas déterminé les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. » En effet, n’ont été définies dans la loi ni les conditions d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés en application de cet article, ni celles du contrôle par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement de la légalité des autorisations délivrées en application de cet article et leurs conditions de mise en oeuvre.

Ces dispositions ont été censurées pour incompétence négative du législateur, le Conseil constitutionnel ayant estimé que le législateur n’avait pas épuisé sa compétence en renvoyant au pouvoir réglementaire l’édiction de certaines règles encadrant cette technique de renseignement.

Contrairement à ce que la loi avait prévu pour les mesures de surveillance nationale, l’article renvoyait en effet à un décret en Conseil d’État les conditions d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés, ainsi que les conditions de traçabilité et de contrôle par la CNCTR.

Le dispositif reprend l’essentiel de celui relatif aux mesures de surveillance internationale adopté en juin dernier, en le complétant avec précision pour répondre aux motifs de la censure du Conseil constitutionnel. Est donc créé un cadre juridique spécifique pour les interceptions de communications électroniques émises ou reçues à l’étranger.

Il prend en considération les activités que mène la DGSE, sans y ajouter de capacités nouvelles. Il permettra ainsi de protéger les agents lorsqu’ils ont recours à une technique de renseignement visant un objectif étranger depuis le territoire national.

Par ailleurs, les conditions de recours à ces techniques seront les mêmes que celles prévues sur le territoire national, à savoir la protection des intérêts publics énumérés par le nouvel article du code de la sécurité intérieure.

La procédure d’autorisation prévue reprend celle du texte initial, qui a été validée par le Conseil constitutionnel : l’autorisation sera délivrée par le Premier ministre, sans avis préalable de la CNCTR, contrairement aux mesures de surveillance nationale. La nature des missions confiées aux services le justifie, puisqu’elle touche à un aspect régalien de l’action de l’État à l’étranger.

La proposition de loi précise désormais les conditions d’exploitation des renseignements collectés. Deux niveaux sont prévus et répondent au souhait du Conseil constitutionnel : après une autorisation initiale du Premier ministre d’intercepter un système de communication, un premier niveau permettra d’autoriser l’exploitation non individualisée des données de connexion interceptées pour une durée d’un an ; un second niveau permettra d’exploiter les correspondances et données de connexion d’une zone géographique déterminée, d’organisations, personnes ou groupes de personnes, pour une durée de quatre mois.

Concernant les conditions d’exploitation et de destruction des renseignements collectés, l’interception et l’exploitation des communications feront l’objet de dispositifs de traçabilité définis par le Premier ministre et, comme pour les communications nationales, les renseignements collectés feront l’objet d’une centralisation.

De plus, les durées de conservation sont augmentées par rapport à celles applicables à la surveillance des communications nationales. Cette différence se justifie au regard des caractéristiques propres des communications internationales, essentiellement en langues étrangères. Par ailleurs, dans de nombreux cas, la surveillance des communications électroniques internationales est le seul moyen d’obtenir ou de confirmer des informations alors que, sur le territoire national, des moyens complémentaires d’investigation peuvent être mis en oeuvre.

Enfin, les données recueillies permettent de remonter a posteriori les parcours individuels, après un attentat par exemple, et, pour cela, un temps long est nécessaire.

Par conséquent, le groupe Radical républicain, démocrate et progressiste soutient cette proposition de loi. Elle définit un cadre juridique strict des mesures de surveillance internationale et permettra ainsi à nos services de renseignement d’assurer une surveillance optimale des communications internationales afin de contrecarrer les nombreux risques qui naissent à l’étranger et menacent de se matérialiser sur notre territoire.

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