Intervention de Marcel Rogemont

Séance en hémicycle du 1er octobre 2015 à 21h30
Création architecture et patrimoine — Article 24

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarcel Rogemont :

Nous pouvons tout d’abord nous féliciter de la place qu’accorde ce projet de loi à la protection de notre patrimoine, notamment monumental. L’article 24 est riche, aussi n’aborderai-je que trois points.

S’agissant de la limitation du démembrement des monuments historiques, nous avons constaté que le cadre juridique actuel ne permettait pas de protéger efficacement les objets mobiliers attachés à de tels monuments, voire l’intégrité des monuments historiques eux-mêmes. Il n’est qu’à se souvenir de quelques châteaux complètement désossés il y a quelques années.

L’article 24 prévoit donc de soumettre à une autorisation administrative préalable le détachement des effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure à des immeubles protégés au titre des monuments historiques. C’est une bonne chose, d’autant plus que l’article 25 vient compléter cette disposition.

S’agissant de la réforme des régimes des abords des monuments historiques, le projet de loi fait oeuvre de simplification, ce qui réjouira ceux qui appelaient cette simplification de leurs voeux.

Ainsi, face aux nombreux problèmes soulevés par la notion de co-visibilité, l’article 24 propose un nouveau code de délimitation du périmètre protégé au titre des abords des monuments historiques. Dans le dispositif, le critère de co-visibilité conditionne la décision de l’ABF.

Or, on sait que nombre de recours contre les avis rendus par les ABF s’appuient sur la remise en cause de ce critère de co-visibilité. Ainsi, l’article 24 prévoit que le périmètre de protection propre à chaque monument historique sera arrêté par l’autorité administrative, sans qu’il soit fait appel à la co-visibilité.

J’en viens aux cités historiques : quel beau nom, qui apparaît dans sa rusticité comme le reflet des associations qui regroupent, entre autres, les petites cités de caractère ! Leur grand nombre marque la volonté des élus de mettre en valeur le patrimoine dont ils ont la responsabilité.

Mais le terme de « cité historique » renvoie à la notion de ville, et non à un secteur moins urbain. En cela, il peut prêter à confusion quant au périmètre réellement protégé et aux ambitions de cette loi.

La lecture du texte pose au premier abord la question du patrimoine non urbain. Le travail en commission a replacé ces questions dans la loi : il est important de « désurbaniser » le terme de « cité historique ».

Quoi qu’il en soit, des questions sont posées : Michel Herbillon en a abordé certaines. L’abandon des aires de valorisation de l’architecture et du patrimoine, les AVAP, au profit des PLU, qui seront de plus en plus élaborés à l’échelle intercommunale, ne va-t-il pas affaiblir la protection requise pour un secteur à sauvegarder ?

L’intercommunalité ne risque-t-elle pas aussi d’affaiblir la volonté de tel ou tel maire ? La responsabilité des élus devant le patrimoine ne doit pas faire oublier que bien souvent, notamment dans les communes de taille modeste, la responsabilité de l’État reste absolument nécessaire.

Bien sûr, nous retrouvons les architectes des Bâtiments de France, si souvent honnis, qui, pourtant, font un travail remarquable d’accompagnement des élus, notamment pour les communes modestes. Elles pourront bénéficier du dispositif « cité historique », plus simple, alors que les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, les ZPPAUP, ou les AVAP étaient compliqués pour elles. Il importe cependant que l’État soit attentif aux moyens mis à disposition, notamment, de ces communes modestes. Je ne parle pas des plus grandes communes, dans lesquelles les choses avancent beaucoup plus facilement. Mais qu’en sera-t-il des services de l’État dans les années à venir, madame la ministre, et même dès aujourd’hui ?

Telles sont donc les questions importantes soulevées par cet article. Je souhaiterais que vous exprimiez cette volonté d’associer les petites et moyennes communes à la protection de leur patrimoine. Mais il faut tout de même que l’État soit présent.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion