Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, le débat parlementaire sur le projet de loi relatif à la retenue et visant à l'abrogation du délit de solidarité arrive à son terme. La commission mixte paritaire qui s'est réunie le 13 décembre est parvenue, sans difficulté je crois, au texte commun soumis aujourd'hui à votre vote.
Le ministre de l'intérieur est actuellement en déplacement avec le Président de la République et vous prie de bien vouloir l'excuser pour son absence. Je tiens en premier lieu à remercier, en son nom et en celui du Gouvernement dans son ensemble, M. le président de la commission des lois pour la qualité du travail fourni par la commission. Des remerciements appuyés vont également au rapporteur Yann Galut, et à Jean-Yves Le Bouillonnec qui le supplée aujourd'hui.
Le projet de loi qui vous est présenté a été amélioré de manière sensible par le Sénat, puis par l'Assemblée nationale. Je n'entrerai pas dans le détail des modifications substantielles apportées au texte initial du Gouvernement, puisque le rapporteur vient d'en faire le bilan.
En second lieu, il est utile de mettre en exergue les deux points fondamentaux de la politique menée en matière migratoire par Manuel Valls au nom du Gouvernement
L'efficacité tout d'abord. Comme le ministre de l'intérieur a déjà eu l'occasion de le rappeler, les effets d'annonce comme la politique du chiffre ont été abandonnés par le Gouvernement.
Comme j'ai pu le constater en maintes occasions, les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires. Le Gouvernement en est parfaitement conscient, le Premier ministre ayant lui-même déploré, lors de son discours de politique générale, « ces lois bâclées qui ne sont jamais appliquées ». On ne combat pas l'inertie par l'agitation, tout particulièrement en matière législative !
L'action du Gouvernement se veut intransigeante : intransigeante sur l'efficacité, intransigeante sur les principes.
Le présent projet de loi vient répondre à la situation laissée par le gouvernement précédent, qui ne pouvait perdurer.
En effet, la majorité précédente aurait dû, sans délai, tirer toutes les conséquences des arrêts rendus par la Cour de justice européenne en 2011 et interdisant de punir d'une peine d'emprisonnement le séjour irrégulier. Ce qu'elle n'a pas fait.
L'arrêt de la Cour de cassation du 5 juillet 2012 fut sans surprise et sans appel. Dès lors, un étranger ne pouvait plus être mis en garde à vue du seul fait de son séjour irrégulier sur le territoire.
Le cadre d'intervention des services de police et de gendarmerie ainsi que des préfectures a été fragilisé, ce qui menace la mise en oeuvre des lois votées par le Parlement en la matière.
En prévoyant une durée maximale de retenue de seize heures, le projet de loi répond à la fois aux besoins opérationnels et aux objectifs gouvernementaux de contrôle de l'immigration irrégulière, tout en respectant les impératifs constitutionnels de proportionnalité et de dignité dans le traitement de ces situations. C'était là notre intention. Nous sommes restés à l'écoute des souhaits et des propositions d'amélioration de votre chambre et du Sénat.
Votre assemblée a ainsi permis la présence de l'avocat pendant toute la durée de la retenue, avancée notable en faveur des droits des personnes concernées. Cet ajout au texte initial aura des conséquences concrètes et positives pour les étrangers placés en retenue. De même, des garanties supplémentaires ont été apportées, en commission et en séance, pour renforcer leurs droits : accès au médecin et à un interprète, ou encore droit de communication avec un membre de leur famille ou toute personne de leur choix.
Enfin, l'abrogation du délit de solidarité a également fait l'objet d'échanges très intéressants. Elle permet d'éviter que ne pèse la crainte d'une sanction pénale sur les personnes et les citoyens engagés qui viennent au secours des étrangers de manière désintéressée, sans pour autant affaiblir la capacité des forces de l'ordre à lutter contre les filières d'immigration irrégulière.
Le présent projet, qui aura force de loi dans quelques jours si votre vote le permet, vient compléter utilement l'action du Gouvernement. Notre politique en la matière consiste à concilier l'indispensable fermeté dans la lutte contre l'immigration irrégulière avec la protection des droits des étrangers. Rappelons à cet effet la circulaire relative aux critères objectifs et transparents de régularisation publiée récemment, celle relative aux étudiants étrangers, qui abroge la circulaire dite « Guéant » du 31 mai 2011, ou encore la circulaire du 6 juillet 2012 qui fait de l'assignation à résidence une alternative véritable à la rétention des familles avec enfants dans le cadre d'une procédure d'éloignement.