L’innovation est un objectif que nous partageons tous, mais elle ne passe pas par l’absence de régulation. La France a du reste une politique forte d’innovation, reconnue comme telle notamment par nos partenaires et par les industriels étrangers.
Permettez-moi de vous rappeler quelques mesures adoptées dans le domaine des produits de santé et des médicaments, mais aussi des dispositifs médicaux. Au-delà du crédit d’impôt recherche, élément constant et réaffirmé auquel nous consacrons d’importantes ressources et qui est identifié à l’étranger – M. Eckert aura certainement l’occasion de l’évoquer plus longuement –, j’ai annoncé voici quelques jours à peine la mise en place d’un nouveau fonds de soutien à l’innovation en santé, doté pour commencer de 100 millions d’euros – si nous devons aller plus loin, nous le ferons. Ce mécanisme est destiné à aider les projets de développement engagés par des industriels concevant des molécules ou des projets nouveaux.
De la même manière, la France est reconnue à l’échelle internationale pour son dispositif d’autorisation temporaire d’utilisation – ATU –, qui fait des envieux dans de nombreux pays et nous permet de « tester », d’utiliser des produits qui n’ont pas encore reçu l’autorisation de mise sur le marché et peuvent néanmoins bénéficier à des patients sans attendre cette procédure.
Nous pouvons également, sans attendre l’autorisation de mise sur le marché, accorder des prises en charge financières par le biais du forfait innovation, que vous aviez voté, mais jamais appliqué, et que j’ai mis en place voilà maintenant deux ans. Ce dispositif bénéficie non seulement à des industriels, mais aussi et surtout à des patients. La France dispose donc bien d’une politique forte et reconnue en faveur de l’innovation.
Le patron de Google X – entreprise américaine qui propose, non des médicaments, mais de dispositifs médicaux –, que je recevais voici quelques jours, déclarait que, si beaucoup d’argent est investi aux États-Unis, l’Europe bénéficie, notamment en France, d’une rapidité de mise en oeuvre des essais thérapeutiques et de la recherche translationnelle dont ne disposent pas les États-Unis. Il ajoutait que les industriels développaient aux États-Unis des produits qu’ils venaient essayer d’abord en Europe, où les conditions étaient plus favorables. On ne peut donc pas dire qu’il n’y aurait pas de politique en faveur de l’innovation.
L’innovation progresse et de nouvelles molécules se développent – hier pour lutter contre l’hépatite C, demain contre les cancers. Nous savons que, dans les prochains mois ou les prochaines années, de nouvelles molécules, coûteuses, vont arriver sur le marché et nous avons, en France, la volonté que l’ensemble des patients susceptibles d’en bénéficier le puissent. Cependant, l’arrivée de cette innovation thérapeutique ne signifie pas que nous devions être prêts à la payer à n’importe quel prix.
De retour de Berlin, où je participais voici une quinzaine de jours au G7 « santé », je puis témoigner que la préoccupation que j’exprime et qui se traduit par la régulation proposée depuis l’année dernière dans le PLFSS est partagée par l’ensemble des pays membres de ce groupe. La ministre américaine, avec qui j’ai eu un échange, m’a ainsi déclaré que son pays était confronté à un problème de prix en passe de devenir insoutenable, au point que certains Américains vont même acheter des produits dans d’autres pays et que, pour les nouvelles molécules, cet enjeu s’exprime en termes de soutenabilité du modèle social américain.
Les Britanniques, les Allemands et les autres membres du G7 – Japonais, Canadiens ou Italiens – ont tenu le même discours. La préoccupation que nous portons ici est donc portée par tous les pays. Au niveau européen, au-delà du G7, j’ai formulé au nom de la France des propositions visant à nous doter d’une position partagée sur la régulation du prix de l’innovation. Nous souhaitons évidemment que cette position européenne soit ensuite partagée par les États-Unis, compte tenu de l’importance de ce pays pour le marché du médicament.
Je trouve donc assez étonnant que, face à un défi majeur pour les industriels comme pour les patients, ainsi que pour la soutenabilité de nos modèles de protection sociale, votre seule réaction consiste, au fond, à défendre l’absence de régulation,