Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui est un nouvel ajustement de la réforme des collectivités territoriales de décembre 2010.
Après l'abrogation nécessaire du conseiller territorial le mois dernier, il nous est demandé d'assouplir les règles relatives à la représentation des communes au sein de l'organe délibérant des communautés de communes et d'agglomération et de revenir sur le plafonnement du nombre de vice-présidents. Il est inutile de vous rappeler que la réforme territoriale de 2010, réalisée dans un esprit de recentralisation, était néfaste et largement décriée. Les élus locaux s'y sont d'ailleurs fortement opposés, comme en a témoigné la position du Sénat.
Je comprends qu'il soit urgent d'apporter plus de souplesse à la loi du 16 décembre 2010 afin de favoriser la conclusion par les élus locaux d'accords permettant, par la négociation, d'achever la carte intercommunale. Les règles de composition doivent en effet être stabilisées rapidement, certaines communes devant se prononcer sur la répartition des sièges au sein des assemblées communautaires au plus tard le 30 juin 2013.
La loi du 16 décembre 2010 prévoit un cadre rigide qui laisse peu de place à l'accord local ; elle est contraire à l'esprit même de l'intercommunalité. L'application de ses dispositions ne permet pas toujours de prévoir une représentation politique qui reflète le poids démographique des communes, ce que regrettent aujourd'hui les élus locaux, qui demandent qu'il soit fait confiance à « l'intelligence territoriale ». L'objectif de cette proposition de loi est donc de permettre une transition souple entre les dispositions antérieures à la loi de 2010, plus permissives, et celles qui entreront en vigueur lors du prochain renouvellement communal, prévu en 2014.
Les règles régissant le nombre de représentants dont dispose chaque commune au sein de l'organe délibérant et le nombre de délégués communautaires au sein des bureaux ont été alignées sur celles applicables aux communautés urbaines et aux métropoles. C'était faire peu de cas des petits EPCI, où la taille des communes et le nombre d'habitants peuvent être très faibles. Le passage de 10 % à 25 % du nombre de délégués dans le cadre d'un accord local obtenu à la majorité qualifiée prévu par l'article 1er du présent texte permettra ainsi d'assurer une représentation plus conforme à la réalité communale.
La faculté, incluse dans l'article 2, de fixer le nombre de vice-présidents à 30 % de l'effectif de l'organe délibérant, dans la limite de quinze vice-présidents, au lieu des 20 % prévus par la loi de 2010, est également une avancée. En effet, cette dernière disposition aurait eu pour conséquence de réduire de manière importante les bureaux des EPCI à compter de leur renouvellement. Il est fort à parier que le sacrifice des postes de vice-présidents se serait fait au détriment des représentants des petites communes, petites communes toujours soucieuses de leur indépendance – voire sourcilleuses sur ce point. De même, lors des fusions des EPCI, le plafonnement du nombre de délégués communautaires et de vice-présidents a conduit fréquemment à la cessation anticipée des mandats des représentants des communes, notamment les plus petites.
Il s'agit donc d'une avancée en termes de capacité de négociation des communes. Les élus locaux sont, dans leur grande majorité, responsables et, surtout, dignes de notre confiance : la loi n'a pas besoin d'encadrer outre mesure leur mode d'organisation. Toutefois, cet encadrement peut être nécessaire pour éviter l'inflation des indemnités.
C'est précisément une autre avancée par rapport au texte de 2010, puisque la commission a adopté un amendement de notre rapporteure qui vise à renforcer juridiquement le gel de l'enveloppe budgétaire destinée au versement des indemnités de fonction des vice-présidents. Une plus grande marge de manoeuvre est ainsi donnée aux collectivités pour fixer le nombre de leurs vice-présidents, sans que des menaces supplémentaires viennent peser sur les finances locales.
En ce qui concerne l'article 4, qui vise à assouplir les orientations fixées au schéma départemental de coopération communale, nous comprenons la volonté de préserver l'efficacité de l'exercice de certaines compétences de proximité assumées par les syndicats intercommunaux. En effet, la suppression d'un syndicat de communes ou d'un syndicat mixte n'est pas subordonnée aujourd'hui à la reprise de ses compétences par un EPCI à fiscalité propre. L'article 4 rend obligatoire la reprise de ces compétences. Toutefois, cet article laisse penser que les schémas départementaux de coopération intercommunale devraient prendre la responsabilité de définir les compétences des EPCI, alors qu'il revient à chacun d'entre eux de fixer ses compétences. Cela représenterait une grave dérogation au principe de libre administration des collectivités locales. Surtout, cette disposition est éloignée de l'objet de la présente proposition de loi. Ces deux raisons nous amèneront à voter pour l'amendement de suppression déposé par le groupe SRC.
Ce texte introduit opportunément un assouplissement de l'encadrement des collectivités territoriales sans faire peser de charges supplémentaires sur les finances locales. Nous voterons donc cette proposition de consensus. Toutefois, cela ne doit pas nous dédouaner de mener une réflexion plus poussée sur le sujet lors de l'examen prochain du projet de loi sur l'acte III de la décentralisation. La rationalisation de la carte intercommunale, initiée par la loi du 16 décembre 2010, soulève en effet la question du sort des compétences exercées aujourd'hui par les syndicats intercommunaux.
D'autres questions ayant trait à l'intercommunalité devront être traitées lors de l'examen des deux projets de loi sur la décentralisation et sur les modes de scrutins aux élections locales. S'agissant de l'élection des délégués communautaires, il semble, au vu des débats en commission des lois du Sénat ce matin, que l'on s'achemine vers un système de fléchage. Il s'agit d'une avancée, mais il conviendrait aussi d'entamer une réflexion sur la nécessité d'introduire, à plus ou moins court terme, au moins une part de suffrage universel direct dans l'élection des représentants des EPCI. Rappelons que ceux-ci exercent des responsabilités de plus en plus importantes au fil des ans et qu'ils prélèvent plus de 20 milliards d'impôts locaux. Le respect de la parité ne devrait pas poser problème aux communes de plus de 1 500 habitants. Espérons que les autres seront également soucieuses de présenter des listes paritaires.
En somme, c'est un large débat sur le rôle de l'intercommunalité que nous demandons. Pour nous, les intercommunalités doivent devenir un échelon territorial en soi, basé sur le bassin de vie, afin de mieux prendre en compte les préoccupations locales. Reconnues et renforcées comme collectivités territoriales de plein exercice, elles se devront d'être, avec les régions, le moteur du nouveau pacte territorial français. Il convient en effet de mettre en concordance les territoires vécus et les institutions. Ainsi, le fait de faire fusionner les pays et les EPCI sur un même territoire présenterait l'avantage d'allier la partie prospective, qui échoit aux pays, et la partie gestion, caractéristique des EPCI.
Pour terminer, je veux rendre hommage à Michel Guégan, créateur et toujours président de la première intercommunalité de France, la communauté de communes du Val d'Oust et de Lanvaux. Créée dans ma circonscription en 1992 (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC),…