Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il y a deux ans, la mise en oeuvre de la réforme des collectivités territoriales en général et la refonte de la carte intercommunale en particulier ont suscité l'inquiétude, voire la colère légitime d'une large majorité d'élus locaux. L'intérêt de la proposition de loi que nous examinons ce soir est de permettre une transition souple entre les modes de représentation communale actuellement pratiqués et les dispositions prévues par la loi du 16 décembre 2010, qui s'appliqueront à compter du prochain renouvellement, prévu en mars 2014.
Alors que le système actuel laisse une certaine liberté aux communes membres pour fixer le nombre et la répartition des délégués communautaires par un accord adopté à la majorité qualifiée, le nouveau dispositif est beaucoup plus restrictif. Il plafonne en effet le nombre de représentants des communes dans les conseils communautaires ainsi que l'effectif des bureaux communautaires, sur la seule base de la population totale des communes réunies.
Ces dispositions devraient entraîner une forte baisse du nombre de délégués communaux et de l'effectif des bureaux. Il en résulte une réduction très substantielle des droits de représentation des communes, applicable dès 2014, d'autant plus fortement ressentie que le mouvement général engagé dans les schémas départementaux est celui d'un regroupement de petites communautés comportant des communes nombreuses.
Le constat qui a guidé la rédaction de cette proposition de loi est juste : les nouvelles dispositions ne permettent pas de prévoir une représentation politique qui reflète le poids démographique des communes. Le cadre rigide imposé par la loi laisse peu de place à l'accord local. C'est pourquoi le texte propose utilement d'assouplir ces dispositions, en revenant sur les règles limitatives de représentation des communes au sein de l'organe délibérant des communautés de communes et d'agglomération ainsi que sur le plafonnement du nombre de vice-présidents.
Nous notons avec satisfaction que ces deux modifications se feront à coût constant et ne visent pas à augmenter les enveloppes indemnitaires des élus. Cependant, il ne s'agit pas, ici, de modifier véritablement la loi de 2010, mais de lever les blocages qui font obstacle à son application. La proposition de loi se contente en effet d'amoindrir quelque peu la contrainte du nouveau dispositif ; sa portée est donc très limitée. Si les députés du front de gauche s'étaient opposés à la diminution à marche forcée du nombre des élus au nom du dogmatisme budgétaire, ils demandent avec constance, madame la ministre, l'abrogation de l'ensemble de la réforme territoriale.
La réforme de l'intercommunalité, présentée en 2010 comme un facteur de simplification, de « rationalisation », consiste bien souvent à imposer une nouvelle organisation territoriale sans véritable débat démocratique. Rejetée par de nombreux élus, elle préfigure clairement l'affaiblissement du rôle de la commune, et donc de la démocratie de proximité. Enfin, elle implique une mise en concurrence des territoires, que nous refusons.
Une telle conception ne saurait évidemment être corrigée par des aménagements à la marge. C'est l'ensemble de la loi du 16 décembre 2010 qui devrait être repensé.
C'est pourquoi nous réaffirmons, à l'occasion de l'examen de ce texte, notre opposition à l'achèvement autoritaire de la carte de l'intercommunalité. Nous continuons d'exiger l'abrogation de la loi du 16 décembre 2010 afin d'initier une réforme de l'intercommunalité qui soit réellement démocratique, menée avec les acteurs publics et les populations.
Parce que nous sommes attachés de manière indéfectible au respect de la libre administration communale et de ses choix de coopération intercommunale, nous ne pouvons soutenir complètement des dispositions qui consistent simplement à corriger certains aspects de la réforme territoriale de 2010.
C'est la raison pour laquelle, vous l'aurez compris, les députés du front de gauche s'abstiendront.