Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, je veux tout d'abord reconnaître le travail effectué par notre collègue de la majorité, Nathalie Nieson, rapporteure de ce texte, qui a proposé en commission des lois, la semaine dernière, la réécriture quasi complète de cette proposition de loi qui nous vient du Sénat. Je ne ferai pas d'autres commentaires : il est toujours très délicat pour un député de juger un texte qui vient de la Haute assemblée. Mais enfin, contrairement à l'objectif affiché par la proposition de loi sénatoriale, à savoir introduire de la souplesse dans le volet intercommunal de la réforme territoriale de 2010, le dispositif proposé conduisait surtout à permettre l'augmentation des indemnités versées par les EPCI à leurs membres en même temps que l'augmentation du nombre de ces derniers. C'était assez fâcheux. Cette augmentation potentielle des indemnités des membres de nos EPCI aurait été, à juste titre, incompréhensible, pour ne pas dire insupportable, aux yeux de nos concitoyens, à l'heure où la pression fiscale imposée par le Gouvernement demande des sacrifices sans précédents aux Français.
Sur le fond, après les modifications substantielles effectuées par notre commission des lois, la proposition de loi prévoit des dispositions d'assouplissement du volet intercommunal plutôt utiles. En effet, non seulement ces dispositions sont susceptibles de faciliter la constitution de certains groupements, mais elles prennent également acte de la place et l'importance des communes, ces communes dans lesquelles réside, selon Tocqueville, la force des peuples libres. Ce texte pourrait donc, en définitive, permettre le développement de l'« interco », comme l'on dit aujourd'hui.
Pour entrer dans le détail des mesures proposées, on notera que les articles 1er et 2 sont les plus significatifs. En ce qui concerne les conseillers communautaires, il est prévu de donner la possibilité aux EPCI d'en augmenter le nombre, sous réserve d'un accord à la majorité des deux tiers et dans la limite d'un plafond strict de 25 % de l'effectif légalement prévu – contre 10 % dans la réforme territoriale de 2010 –, et ce en respectant le plafond global des indemnités prévu dans le CGCT.
S'agissant des vice-présidents, il est proposé de donner la possibilité d'en augmenter le nombre, dans la limite d'un plafond de 30 % et de quinze vice-présidents. Je rappelle que le dispositif de la loi de 2010 prévoyait un plafond de 20 % de l'effectif total de l'organe délibérant et quinze vice-présidents au maximum.
Quant à l'enveloppe budgétaire globale attribuée au président et aux vice-présidents, elle restera également plafonnée. Ainsi, l'augmentation éventuelle du nombre de vice-présidents viendrait « ponctionner » l'enveloppe indemnitaire globale des autres membres du bureau, si le plafond des indemnités distribuées était déjà atteint.
Restons néanmoins vigilants car, en combinant la faculté d'augmentation du nombre de délégués communautaires avec cette augmentation importante de la proportion de vice-présidents, on pourrait obtenir, en moyenne, un doublement du nombre maximal de postes de vice-présidents ! Dans l'hypothèse de l'adoption de cette proposition de loi, il faudra donc raison garder, même si notre collègue René Dosière – qui est une référence pour certains d'entre nous – a indiqué en commission qu'il n'y croyait pas, et nous ne sommes pas loin de partager sa pensée. Toutefois, compte tenu de la différence de vues entre l'Assemblée nationale et le Sénat, je doute que cette proposition de loi connaisse l'avenir prospère que certains espèrent pour elle. Nous pouvons donc être rassurés, d'une certaine façon.
Mais revenons-en au fond. Afin d'accorder plus de liberté et de flexibilité aux élus locaux pour répartir les indemnités, l'article 2 bis étend certaines procédures déjà existantes.
L'article 4, quant à lui, est, selon moi, ainsi que cela a déjà été souligné, un cavalier au sein de cette proposition de loi consacrée à la représentation intercommunale. Il est donc tout à fait opportun que la commission des lois de l'Assemblée ait vidé de sa substance cette disposition dont la rédaction rendait, par exemple, impossible le regroupement de plusieurs syndicats existants, ce qui est évidemment un non-sens. Je me félicite donc que l'article 4 ne soit plus qu'un article « cosmétique », voué de surcroît à disparaître, puisque nous allons probablement voter un amendement tendant à le supprimer purement et simplement.
Sur le fond, nous n'avons donc pas d'opposition majeure à formuler, considérant que ce texte s'inscrit d'une certaine façon dans le prolongement des propositions Pélissard. En revanche – et cela vous paraîtra peut-être curieux –, j'insisterai davantage sur la forme.
En effet, celle-ci nous choque : nous ne comprenons pas l'examen de cette proposition de loi, ici et maintenant. Il n'était pas nécessaire, à notre sens, de l'inscrire à l'ordre du jour, alors qu'un nombre conséquent de textes doit nous être présenté dans les semaines à venir – et je ne fais que traduire, ici, l'embarras exprimé par nos collègues Dosière, Da Silva, Tourret ou Zimmermann, toutes sensibilités confondues, au sein de la commission des lois. Cette proposition aurait fort bien pu être intégrée, soit par voie d'amendement, soit dans le texte initial du projet de loi sur les élections cantonales et communautaires que Manuel Valls a déposé le 28 novembre dernier sur le bureau du Sénat, qui devrait l'examiner dès le mois de janvier, avant que nous en soyons saisis dans la foulée.
La majorité aurait également pu choisir, comme véhicule législatif, le projet de loi de Mme Lebranchu, promis pour le printemps 2013 et encore intitulé « Acte iii de la décentralisation » quand bien même le texte semble progressivement se vider de sa substance. Mais foin de polémiques, nous en reparlerons.
Quoi qu'il en soit, nous faire siéger à la veille de Noël pour débattre de ce texte, même si souffle sur notre assemblée l'esprit de sérénité, ne me paraît pas utile. Surtout, ce petit bout de texte nous prive d'un vrai débat et d'une réflexion d'ensemble sur l'intercommunalité, alors qu'elle est aujourd'hui à la croisée des chemins. L'intercommunalité répond à la nécessité de développer des territoires organisés autour d'un bassin de vie ; c'est pourquoi nous en sommes de fervents défenseurs. Encore une fois, notre opposition porte davantage sur la forme que sur le fond.
Je le répète cette proposition de loi nous paraît malvenue, comme a pu l'être la proposition de loi relative à l'abrogation du conseiller territorial, que l'on nous a fait examiner, en nous emberlificotant quelque peu, à l'occasion du congrès des maires, sans le transmettre ensuite au Sénat, pour finir par l'intégrer, précisément, au projet de loi de Manuel Valls que j'évoquais tout à l'heure.
Enfin, je voudrais, pour terminer, rappeler ce qui a été fait – ou pas – depuis six mois pour les collectivités. Certes, des états généraux de la démocratie locale ont été organisés, suivis de deux grandes annonces : le report des élections cantonales et régionales à 2015 et la création d'un nouveau « machin » – j'emprunte le terme à un grand homme –, le Haut Conseil des territoires. Cela peut prêter à sourire lorsque l'on sait que, pas plus tard qu'hier, le Premier ministre a crié haro sur les comités Théodule…
Quant au budget 2013 des collectivités, il a été l'occasion pour le ministre de l'intérieur de confirmer la suppression à venir de sous-préfectures, suppression contre laquelle je suis d'ailleurs monté au créneau. Mme Lebranchu a, pour sa part, annoncé le gel des dotations en 2013, puis une baisse de 750 millions d'euros en 2014 et à nouveau en 2015, en contradiction avec la proposition n° 54 du candidat Hollande.
Vous comprenez notre embarras à voir le Président de la République ne pas tenir ses engagements. (Sourires.)
Plus récemment, je l'ai déjà évoqué, Manuel Valls a déposé deux projets de loi.
En fait de simplification du fonctionnement des collectivités territoriales, on est plutôt en train, me semble-t-il, de le compliquer. Je rappelle au passage que nous sera sans doute présentée, d'ici à quelque temps, une espèce d'usine à gaz : le scrutin binominal. Voilà qui va être assez compliqué à gérer, même si, me permettant un clin d'oeil, je me réjouis de voir que la parité, l'altérité même, dirai-je, est désormais reconnue dans un scrutin.