Intervention de Guy Geoffroy

Séance en hémicycle du 28 octobre 2015 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2016 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Geoffroy :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, je forme le voeu, monsieur le secrétaire d’État, que l’examen en séance publique nous permette d’obtenir quelques réponses à des questions que nous avons, les uns et les autres, déjà posées en commission.

Malheureusement, nous avons dû nous contenter soit de généralités foisonnantes, comme notre garde des Sceaux nous en délivre habituellement, soit, tout simplement, d’absences de réponse.

Le rapporteur du groupe majoritaire s’est félicité que nous ayons, avec ce budget, franchi la barre des 8 milliards d’euros. Certes. Mais comparons ce qui doit véritablement être comparé, c’est-à-dire les crédits utiles au fonctionnement de l’institution judiciaire tels que le projet de loi de finances les prévoit pour l’année 2015, pour l’année 2016, puis, par projection, pour l’année 2017.

Si l’on excepte les pensions, ces mêmes crédits s’élèvent à 6,361 milliards en 2015 et à 6,373 milliards en 2016, soit une augmentation de 12 millions ou de 0,2 %, et non pas de 1,7 % comme vous vous plaisez à le souligner. Cela n’est donc pas conforme à la réalité.

S’agissant de l’an prochain, devons-nous nous inquiéter du chiffre qui est d’ores et déjà annoncé – 6,339 milliards – et qui représente, si je calcule bien, une baisse de 32 millions par rapport aux crédits inscrits cette année ?

Ces questions ont été posées, mais aucune réponse n’y a été apportée. Monsieur le secrétaire d’État, il serait utile, à l’occasion de l’examen en séance publique des crédits de la mission « Justice », qu’elles puissent recevoir une réponse.

D’autres questions se posent, en particulier celle que le rapporteur spécial évoquait dans son propos en commission élargie : le décalage très net – et pour lequel aucune véritable explication ne nous est donnée – entre d’un côté les créations de postes, et de l’autre les crédits qui leur sont affectés, et qui sont visiblement et manifestement inférieurs aux besoins.

D’autres questions se posent également : certaines sont soulevées par l’actualité, d’autres totalement éludées alors qu’elles méritent une réponse. La première est celle de l’aide juridictionnelle : on se félicite de l’augmentation des crédits, mais on semble oublier que cette même aide est toujours en crise.

On semble oublier que les avocats – qui, semble-t-il, auraient obtenu satisfaction – poursuivent leur mouvement et ne paraissent pas dire, eux, qu’ils sont satisfaits. Qu’en est-il ? Le recul du Gouvernement est-il complet, partiel ou assorti de nouvelles dispositions ? Nous aimerions le savoir.

Il est également important de rompre avec le début d’euphorie de la majorité sur deux sujets : le premier d’entre eux est la contrainte pénale. Je l’ai évoqué en commission élargie, sans obtenir aucune réponse de la garde des Sceaux. Dans l’étude d’impact, on nous annonçait de 8 000 à 20 000 contraintes par an.

Or, depuis treize mois, c’est-à-dire depuis le 1er octobre 2014, seules 950 mesures ont été prononcées. Je le rappelle, trente-sept tribunaux – parmi lesquels se trouvent des juridictions importantes comme celles de Perpignan et de Lyon – n’en ont prononcé aucune. Six contraintes pénales seulement ont été prononcées par le tribunal de grande instance de Paris.

Des explications s’imposent donc : cette réalité, comme j’ai eu l’audace de le suggérer en commission élargie, traduirait-elle le fait qu’il s’agit d’une mauvaise mesure, comme Mme Taubira le disait des peines plancher ? Elle disait en effet à leur propos : si les magistrats ne les utilisent pas, c’est qu’il s’agit d’une mauvaise mesure. N’y a-t-il pas là un parallélisme des formes qui mériterait une explication ?

Le second et dernier sujet que je souhaite aborder intéresse les maires, à qui l’on demande tout alors qu’on les prive de tout. Or, dans le projet de loi relatif à la justice du XXIème siècle, une disposition ne manquera pas d’entraîner – en tous cas je l’espère – une réponse de la part du Gouvernement : l’enregistrement des pactes civils de solidarité par les officiers d’état-civil.

L’étude d’impact prétend que cette disposition n’entraînera pas de coût supplémentaire pour les communes : il ne s’agit que de 220 000 actes supplémentaires. Bien évidemment, il y a là matière à réflexion. Dans le même temps, il est dit qu’il ne s’agit pas d’un transfert de charges mais d’une augmentation de la charge des services des communes qui remplissent une mission de l’État.

Monsieur le secrétaire d’État, vous me permettrez de dire que la réponse est un peu courte : les maires, qui n’ont pas besoin de cela à l’heure actuelle, se plaignent – à juste titre – de l’ensemble de ces dispositions.

C’est l’une des raisons, parmi beaucoup d’autres, pour laquelle, comme cela a été dit en commission élargie, le groupe Les Républicains ne votera pas les crédits de la mission « Justice ».

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