Nous aurons aujourd’hui, et dans un avenir très proche, à poursuivre ce débat. L’avis du Gouvernement est le même que celui du rapporteur.
Je tiens à insister, monsieur Estrosi, sur la question des fiches S. Ces fiches, le ministre de l’intérieur l’a plusieurs fois rappelé, sont un outil de recueil de renseignements en vue de faciliter le déroulement du contrôle d’identité et les contrôles aux frontières. Cet outil permet de recueillir des signalements, des soupçons et des informations qu’il convient de recouper et de vérifier. Vous le savez.
On ne saurait donc faire de ces fiches un critère de condamnation. Je comprends d’autant mieux le questionnement qui est le vôtre qu’il s’est invité dans le débat public, malheureusement avec quelle force ! Nos compatriotes nous interrogent sur le sujet : l’ignorer serait absurde. Je le répète devant l’Assemblée nationale : on ne saurait faire de ces fiches un critère de condamnation et d’emprisonnement.
Du reste, vouloir le faire, ce serait condamner cet outil à très court délai – le ministre de l’intérieur aura l’occasion de revenir sur le sujet, y compris en soulignant l’avis des policiers eux-mêmes –, ce qui affaiblirait du même coup l’efficacité du renseignement antiterroriste. Or nous ne voulons pas desserrer les mailles du filet, lesquelles dépendent non seulement des signaux forts – les fiches S – mais aussi des signaux faibles, recueillis par le travail de la DGSE et de la DGSI comme par l’action du renseignement territorial.
En revanche, s’agissant des personnes dangereuses, que le ministre de l’intérieur appelle le haut du spectre, l’inscription dans les fiches S peut être accompagnée de mesures coercitives. Toutefois, le critère n’est pas que ces personnes soient inscrites au fichier des personnes recherchées, c’est que l’autorité administrative dispose, pour agir, de données suffisamment précises et solides pour tenir devant un magistrat administratif. C’est tout l’enjeu de la demande d’avis au Conseil d’État que nous allons formuler pour des raisons constitutionnelles et conventionnelles. J’ai déjà eu l’occasion de le souligner : nous pourrons avancer ensemble sur ce sujet.
Même si je mesure l’urgence – le mot fait partie de l’intitulé du projet de loi –, je vous demande de prendre le temps nécessaire pour agir efficacement à la fois par rapport au but de la fiche S et aux objectifs que nous nous fixons à l’égard du haut du spectre, c’est-à-dire en termes de dangerosité vis-à-vis de nos compatriotes.