Garantir qu’il n’y aura plus d’attentat si on met sous bracelet électronique ou si on expulse les fichés S est donc une illusion.
Deuxième élément très important : les fiches S sont des outils de mise en attention et de renseignement qui ont permis d’éviter des attentats, les services de police ayant procédé, sur la foi de cette mise en attention, à des investigations et des enquêtes qui ont abouti à la neutralisation très discrète des acteurs. Au titre de la même filière qui a conduit aux attentats de la semaine dernière, nous avons, au cours des quatre derniers mois, empêché six attentats qui auraient pu nous frapper aussi durement, grâce à la mise en attention et au travail des services de police.
On parle des attentats qui n’ont pas été évités, dans un contexte où le risque zéro n’existe pas ; on ne parle pas de l’utilité de ces fiches pour permettre aux services de renseignement d’éviter des attentats.
Je ne voudrais donc pas que l’on prive les services de police et de renseignement de la possibilité d’utiliser intelligemment cet outil pour prévenir des attentats.
Si l’on va dans le sens de certaines des propositions qui sont faites, la mise en attention des terroristes sur ce que nous faisons les conduirait à dissimuler davantage les actions qu’ils conduisent et à laisser dans la nature des acteurs qui utilisent déjà la cryptologie sur internet en vue de commettre des attentats. Faisons attention à ne pas priver les services de renseignement de la possibilité de se servir des outils dont ils ont besoin pour déjouer des attentats de façon efficace et dans la longue durée.
Le troisième argument est déterminant. La vraie question qui nous est aujourd’hui posée – les événements récents en témoignent – est la possibilité de travailler avec d’autres services de renseignement européens, en faisant en sorte qu’ils partagent les informations dont ils disposent en alimentant le FPR par l’intermédiaire du système d’information Schengen – le SIS. Force est de constater que, sur ce point, les choses ne sont pas actuellement à la hauteur du risque auquel nous sommes confrontés. Si j’ai demandé la réunion, demain, à Bruxelles, d’un conseil Justice et affaires intérieures, c’est précisément pour évoquer cette question.
Or si nous commençons par envoyer le signal qu’à chaque fois qu’une fiche de mise en attention est transmise, il y a risque immédiat de procès pour les services en cas d’attentat, les services qui, aujourd’hui, n’alimentent pas correctement le SIS ne le feront pas davantage et nous aurons une perte en ligne considérable de l’efficacité des services de renseignement.
Les idées les plus simples apparaissent parfois comme les plus pertinentes. Faisons attention toutefois à ce qu’elles n’aboutissent pas à de vraies difficultés.