Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, après les événements dramatiques du printemps, la mission d’inspection qui a été diligentée a relevé de graves défaillances et pointé des dysfonctionnements majeurs dans la transmission des informations à l’administration par l’institution judiciaire : défaillances et dysfonctionnements qui, pour assurer impérativement la protection des mineurs, appellent la mise en place du dispositif qui nous est proposé aujourd’hui et que, pour notre part, nous approuvons.
Nous soutenons la définition d’un cadre juridique précis régissant les modalités de communication entre le ministère public et l’autorité administrative en cas de mises en cause, de poursuites ou de condamnations de personnes exerçant une activité soumise à l’autorité ou au contrôle des autorités publiques.
Ce dispositif permettra d’uniformiser les pratiques et de veiller à ce que les administrations de tutelle soient informées à temps, et avec la précision suffisante, pour prendre le cas échéant les mesures conservatoires nécessaires, et les sanctions qu’appellerait une éventuelle décision de justice.
L’enjeu essentiel consiste à trouver un juste équilibre : respecter la présomption d’innocence, le secret de l’enquête, de l’instruction et du délibéré tout en permettant à l’administration de prendre des mesures conservatoires.
La difficulté majeure du dispositif proposé réside dans la possibilité de transmission de l’information au moment de l’enquête. À ce stade, bien en amont de l’établissement formel de la culpabilité, donc du prononcé du jugement, il convient de prendre toutes les précautions nécessaires, les garanties précises doivent être prévues au regard des graves conséquences que peut engendrer cette transmission d’informations.
Sur ce point, nous relevons avec satisfaction que le projet de loi assortit la transmission d’informations de plusieurs garanties : la transmission de l’information sera soumise à l’appréciation de l’autorité judiciaire ; les infractions pouvant y donner lieu seront limitées ; la transmission devra se faire via un support écrit ; cette communication sera confidentielle ; la personne concernée sera informée de cette transmission ; l’autorité destinataire sera informée de l’issue définitive de la procédure ; l’information sera effacée lorsque la procédure s’est terminée par une décision de non-culpabilité.
Le dispositif proposé apparaît ainsi équilibré et sécurisé ; il met fin à l’incertitude des échanges entre la justice et l’éducation nationale.
S’agissant de la transmission de l’information, une fois le jugement rendu, les questions juridiques ne se posent pas dans les mêmes termes. En effet, la transmission d’une information relative à une condamnation pénale, même non définitive, ne porte pas atteinte à la présomption d’innocence ou au respect de la vie privée, dès lors que cette condamnation a été prononcée publiquement, comme l’a rappelé le Conseil d’État dans son avis du 19 novembre.
Dans cette hypothèse, et comme l’a souligné le rapport des deux inspections générales, des dysfonctionnements sont donc à la fois matériels et organisationnels : problèmes d’organisation, insuffisance des moyens informatiques, manque d’interlocuteurs clairement identifiés investis de responsabilités claires au sein des rectorats et absence de dispositif d’alerte structuré.
C’est pourquoi nous insistons pour que ce dispositif juridique soit accompagné d’un renforcement des moyens humains et matériels des services de l’institution judiciaire et de l’éducation nationale.
Pour toutes ces raisons, les députés du Front de gauche voteront ce projet de loi qui tout en établissant des règles claires et précises concilie l’impératif de protection des mineurs et l’indispensable respect du principe constitutionnel de présomption d’innocence.