Intervention de Laurence Rossignol

Séance en hémicycle du 10 décembre 2015 à 9h30
Adaptation de la société au vieillissement — Présentation

Laurence Rossignol, secrétaire d’état chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie :

Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, des droits sociaux nouveaux, des réponses originales et adaptées à des besoins qui évoluent, une mobilisation de l’ensemble de la société, des orientations qui donnent une vision de l’avenir : voilà un texte porteur d’avancées plus que jamais attendues par nos concitoyens. En des temps où la défiance peut être de mise, il est, je crois, particulièrement important de rappeler que ce projet de loi répond à un engagement présidentiel, un engagement tenu, qui permettra aux Français confrontés à leur propre perte d’autonomie ou à celle d’un proche de mesurer concrètement les effets de cette réforme sur leur quotidien.

Le Gouvernement a donc mené, dès 2012, sous l’impulsion de Michèle Delaunay, à qui je veux encore rendre hommage ici, une large concertation qui a permis de construire et d’alimenter le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement avec l’ensemble des acteurs concernés. Ce projet de loi est également l’aboutissement d’un travail parlementaire soutenu qui a permis de l’enrichir et de le perfectionner au cours des dix-huit derniers mois. Je tiens évidemment à saluer ici le travail mené par chacun d’entre vous. Je souhaite tout particulièrement souligner l’investissement remarquable de Joëlle Huillier, rapporteure de ce texte au nom de la commission des affaires sociales, et avant elle, celui de Martine Pinville, que le Président de la République a appelée à d’autres fonctions, ainsi que celui de l’ensemble des députés de la commission des affaires sociales : je citerai en particulier sa présidente, toujours attentive à ce texte, ainsi que Christophe Sirugue, Bernadette Laclais ou encore Bérengère Poletti, avec lesquels nous avons toujours pu travailler, échanger et construire. Soulignons également le travail mené en première lecture par la commission des affaires économiques saisie pour avis ainsi que par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances.

Ce parcours parlementaire nous a permis de donner le jour à un texte fort, qui marquera l’histoire de la prise en charge collective de la perte d’autonomie, et qui restera le témoin d’un engagement politique soutenu en faveur du « bien vieillir » et de la protection des plus vulnérables. Cet engagement se traduit par un effort financier important : plus de sept cents millions d’euros viendront financer les mesures du présent projet de loi après leur montée en charge.

Je ne vous présenterai pas à nouveau l’ensemble des dispositions de ce texte, que vous connaissez désormais parfaitement. Je voudrais simplement souligner toute l’importance et la pertinence du travail parlementaire, dont témoignent les apports majeurs de l’Assemblée à ce texte. Ne pouvant les recenser de façon exhaustive, je n’en citerai que deux exemples.

En première lecture, vous avez institué des droits nouveaux en faveur des personnes âgées immigrées avec la création d’une procédure d’acquisition de la nationalité française par déclaration, sur la base du rapport d’information réalisé par MM. Alexis Bachelay et Denis Jacquat. Face aux difficultés que rencontrent ces personnes âgées, on ne peut rester ni indifférent, ni inactif. Denis Jacquat l’a rappelé à l’Assemblée, ceux qu’on appelle les chibanis sont venus pour construire la France rurale et industrielle. Après plusieurs décennies passées dans notre pays, certains ont demandé à plusieurs reprises la nationalité française, sans succès. Conscient de l’importance pour notre République de reconnaître ces personnes qui souhaitent devenir françaises, le Président de la République a annoncé cette mesure lors de l’inauguration du musée de l’histoire de l’immigration.

Sur le volet de l’aide à domicile, vous avez soutenu et nourri la refondation du secteur, qui, sous des aspects particulièrement techniques, renvoie à un sujet profondément humain : l’accompagnement des publics fragiles. Vous avez, pour cela, participé à la construction de la réforme des régimes juridiques des services d’aide et d’accompagnement à domicile intervenant comme prestataires auprès des publics fragiles. Grâce aux échanges et aux amendements déposés, le dispositif proposé par le Gouvernement a pu être enrichi de façon à assurer une souplesse et des garanties supplémentaires en termes de transparence et d’égalité de traitement pour le secteur, tout en positionnant clairement les départements en pilotes de la structuration de ces services médico-sociaux sur leur territoire, sans faire peser sur eux des charges supplémentaires. Il permet ainsi l’accès et la lisibilité de l’offre de services aux personnes âgées, où qu’elles se trouvent sur le territoire.

In fine, ce qui nous rassemble autour de ce texte, c’est la conviction que nous devons aujourd’hui moderniser et élargir nos protections collectives, au moment où notre société doit relever le défi du vieillissement. Ce consensus s’est directement illustré dans le texte soumis aux parlementaires des deux chambres dans le cadre de la commission mixte paritaire et déjà adopté conforme aux deux tiers.

Le travail des rapporteurs a été remarquable et mené en très bonne intelligence, dans une véritable démarche d’échanges qui a démontré toute sa valeur. Leur implication a permis d’aboutir, au fil des accords, à un texte équilibré au regard des choix respectifs des deux assemblées.

Je me félicite à cette occasion du choix de créer un Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, qui permettra une réflexion prospective intergénérationnelle, ainsi que de l’entrée en vigueur dès le 1er janvier 2016 du régime d’autorisation rénové, qui offrira davantage de lisibilité au secteur et aux départements.

Je m’en remets également à vos conclusions concernant l’affectation de cent millions d’euros par an à l’aide à l’investissement dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – les EHPAD. Ce soutien renouvelé à l’investissement permettra de réduire le reste à charge des résidents, dont nous mesurons les besoins actuels.

La question de l’affectation de la CASA aux différentes mesures de ce projet de loi a également trouvé une juste réponse. Les parlementaires que vous êtes, forts de leurs expériences locales, avaient souhaité sécuriser encore davantage la compensation assurée aux conseils départementaux au titre des réformes de l’État. Le Gouvernement avait déjà porté une vigilance particulière à ce sujet en affectant, dans le projet initial, une fraction de la CASA à la compensation de la réforme de l’ allocation personnalisée d’autonomie – l’APA –, incluant également le droit au répit.

Vous avez souhaité aller plus loin, en lien avec les sénateurs, en affectant une part du produit de la CASA à la prévention de la perte d’autonomie. Vous avez également concilié cette sécurisation avec d’autres exigences, notamment celle d’une souplesse de gestion pour les départements en supprimant, à l’article 38, la sous-répartition aux différents volets de la réforme de l’ APA.

Grâce au travail que vous avez mené, la loi pourra être, comme s’y sont engagés à plusieurs reprises le Premier ministre et le Président de la République, votée et promulguée avant la fin de cette année.

L’entrée en vigueur de certaines dispositions dépendent de textes d’application qui sont, pour les principaux, déjà élaborés et d’ores et déjà soumis aux consultations obligatoires. Elles entreront en vigueur, si ce n’est au 1er janvier, du moins au cours des premiers mois de l’année 2016, dès la publication des textes.

L’enjeu, tant pour le Gouvernement que pour les élus que vous êtes, sera ensuite de diffuser sur le terrain notre connaissance du texte et des dispositions qu’il contient, afin que chaque citoyen prenne connaissance des droits nouveaux auxquels il est désormais éligible – je pense ici tout particulièrement à la revalorisation de l’APA, au droit au répit ou encore à l’adaptation des logements –, et afin que chaque acteur puisse s’approprier les nouveaux dispositifs, qu’il s’agisse de la conférence des financeurs, de la réforme des régimes juridiques ou de la tarification des EHPAD.

Grâce au projet de loi, nous démontrons que la protection sociale et la solidarité continuent de progresser. Grâce à ce projet de loi, nous donnons les moyens aux personnes âgées d’anticiper la perte d’autonomie et d’y faire face lorsqu’elle survient. Grâce à ce proje de loi, nous reconnaissons le rôle de ces millions de proches aidants et contribuons à leur apporter un souffle nécessaire à leur bien-être. Grâce à ce projet de loi, nous construisons une société plus juste, animée par le souci de l’autre, dans le respect de son histoire, de ses droits et de ses aspirations. Grâce à ce projet de loi, nous portons un regard plus ouvert sur la vieillesse, la constituant comme une période de la vie rythmée par la participation citoyenne et la création de lien social. Grâce à ce projet de loi, nous mobilisons l’ensemble de la société pour qu’elle s’adapte, pour qu’elle intègre, pour qu’elle échange avec ses aînés.

Pour toutes ces raisons, ce texte constitue une véritable avancée pour la vie de nos concitoyens et l’avenir de notre société. C’est pourquoi je vous invite à adopter les conclusions de la commission mixte paritaire qui vous sont soumises aujourd’hui.

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