Séance en hémicycle du 10 décembre 2015 à 9h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d’examen simplifiée, en application de l’article 103 du règlement, de sept projets de loi autorisant l’approbation de conventions et accords internationaux (nos 2330, 3301 ; 2603, 3249 ; 2672, 3251 ; 2671, 3302 ; 3153, 3299 ; 2925, 3310 ; 2924, 3300).

Ces textes n’ayant fait l’objet d’aucun amendement, je vais mettre directement aux voix, en application de l’article 106 du règlement, l’article unique de chacun d’entre eux.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

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L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la République française et l’Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais et aux prestations associées (nos 675, 3250).

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La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

Debut de section - Permalien
Harlem Désir, secrétaire d’état chargé des affaires européennes

Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission des affaires européennes, mesdames, messieurs les députés, j’ai l’honneur de soumettre aujourd’hui à votre autorisation l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la République française et l’Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais et aux prestations associées, qui a été signé à Paris le 18 décembre 2008.

Cet accord a pour objet de donner une traduction législative à une ambition française : créer les conditions d’une véritable politique spatiale européenne. Cela passe par la mise en place d’un cadre juridique pérenne permettant l’utilisation de la gamme complète des lanceurs européens nécessaires – lanceurs lourds, lanceurs moyens, petits lanceurs – pour répondre à nos besoins institutionnels et commerciaux. Ce cadre juridique amélioré confortera l’accès indépendant de la France et de l’Europe à l’espace, enjeu tout à fait essentiel dès lors que les acteurs publics comme privés se multiplient sur ce segment stratégique.

Cet accord se substitue à trois accords intergouvernementaux conclus précédemment, en 2002 et 2005. Le cadre juridique applicable au Centre spatial guyanais s’en trouvera donc simplifié, et ce, pour une durée plus longue que par le passé, l’accord courant jusqu’au 31 décembre 2020, alors que le précédent accord relatif au Centre spatial guyanais était reconduit depuis 1976 pour des périodes de trois à quatre ans maximum. Ce faisant, il tend donc à pérenniser l’engagement de l’Agence spatiale européenne pour le financement et l’utilisation du port spatial de l’Europe, Kourou, et à améliorer les relations entre les acteurs institutionnels de l’espace.

Par cet accord, le gouvernement français voit en effet sa responsabilité clarifiée. Il est désigné responsable des infrastructures de base du département de la Guyane nécessaires au bon fonctionnement des installations et moyens situés au Centre spatial guyanais, comme de la protection externe des terrains mis à la disposition de l’Agence spatiale européenne par le Centre national d’études spatiales, le CNES. Ce dernier se voit quant à lui désigné comme autorité chargée de l’exécution de l’accord pour les fonctions techniques et opérationnelles relevant de sa compétence, notamment la maîtrise des risques techniques liés à la préparation et à la réalisation des lancements.

L’accord prévoit également les conditions dans lesquelles l’Agence spatiale européenne, qui est le maître d’ouvrage des lanceurs européens, peut faire procéder à la construction des installations de lancement, qu’elle peut ensuite exploiter ou faire exploiter. J’ajoute qu’en contrepartie des responsabilités techniques et de sécurité assumées par l’État français et par le CNES, l’Agence spatiale européenne contribue aux coûts d’exploitation de la base à hauteur de 438 millions d’euros pour la période 2013-2017.

L’accord prévoit également les dispositions applicables en matière de responsabilité internationale pour les dommages causés lors d’un lancement, notamment les dommages causés à un tiers.

Enfin, cet accord pérennise les compétences du gouvernement français en matière d’immatriculation des lanceurs Ariane, Soyouz et Vega et de leurs divers éléments, qu’il conserve sous sa juridiction et son contrôle lorsqu’ils se trouvent dans l’espace extra-atmosphérique.

Mesdames, messieurs les députés, la coopération entre la France et l’Agence spatiale européenne pour une utilisation optimale, pérenne et sécurisée du port spatial de l’Europe, le Centre spatial de Guyane, est absolument vitale non seulement pour notre ambition spatiale, notre compétitivité et notre économie, mais aussi pour notre indépendance stratégique. Alors que les perspectives pour les prochaines années vont vers le renforcement de la dimension européenne des activités du Centre spatial guyanais, cet accord qui remet à plat les relations entre les différents acteurs de notre politique spatiale est un pas dans la bonne direction.

La politique spatiale européenne est un immense succès. Les événements très forts et très symboliques, comme la réussite de l’envoi du robot Philae, ont marqué les esprits. Cependant, c’est chaque semaine que la politique spatiale permet à la science de progresser, aux lanceurs européens et aux savoir-faire mis en oeuvre grâce au CNES de remporter des succès en matière de télécommunications, de recherche environnementale, de surveillance des océans, ainsi que de sécurité et de défense.

Cet accord est donc aussi la garantie que les engagements de la France auprès de ce port européen qu’est Kourou seront confortés, inscrits dans un cadre permettant d’en assurer le bon fonctionnement, la sécurité sur les plans financiers et juridiques, et le développement de partenariats sur une politique absolument essentielle pour l’avenir. Je vous demande donc, mesdames, messieurs les députés, de bien vouloir en autoriser l’approbation.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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La parole est à M. Pierre Lellouche, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui a mis le temps d’un septennat pour arriver dans cet hémicycle. Comme l’a dit voilà quelques instants M. le secrétaire d’État, il a été signé en décembre 2008 ; il vient pour ratification à l’Assemblée nationale en décembre 2015, et a été ratifié par le Sénat il y a près de trois ans. On peut s’interroger, madame la présidente, sur le mode de fonctionnement des procédures de ratification et souhaiter que les délais en soient raccourcis, à plus forte raison pour des textes déjà entrés en application ; j’y reviendrai dans quelques instants.

Ce texte est un accord signé entre la République française et l’Agence spatiale européenne ; il porte sur le Centre spatial guyanais. Comme vous le savez, ce centre spatial est une base de lancement d’objets spatiaux que notre pays met à disposition de l’Agence spatiale européenne depuis la création de cette dernière, en 1975.

Le programme spatial français a une belle et longue histoire. Le général de Gaulle en fut l’initiateur, la base de lancement fut transférée en 1968 du Sahara, en Algérie, vers la Guyane. Le programme français a été européanisé mais, comme vous le savez, la première fusée, Europa, était composée d’étages attribués à différents pays et n’a jamais fonctionné. Le programme spatial européen a donc en réalité été fondé sur les premières fusées militaires lancées par le général de Gaulle sous la Ve République.

Quant au centre lui-même, il est à la fois très proche de l’équateur, ce qui permet des lancements à très grande vitesse, et ouvert sur une très large façade maritime, ce qui permet d’éviter plus facilement le survol de zones habitées, et donc d’éventuels accidents. Les satellites peuvent ainsi être placés sur des orbites polaires aussi bien que sur des orbites géostationnaires. Ni la base de cap Canaveral, en Floride, ni celle de Baïkonour ne sont aussi favorablement situées.

Cet accès autonome de l’Europe à l’espace repose également sur la maîtrise des lanceurs, et donc sur le programme Ariane, qui a également été lancé sur l’initiative de la France au début des années soixante-dix, et qui a abouti à un premier lancement en 1979. Le lanceur Ariane 5 actuellement en exploitation est un lanceur lourd, qui permet d’envoyer des charges utiles d’environ dix tonnes – il s’agit généralement d’un objet lourd et d’un petit satellite – envoyés en orbite géostationnaire à 34 000 mètres d’altitude, ce qui est un record mondial.

La société Arianespace, leader mondial des services de lancement, exploite également deux autres lanceurs, et c’est l’originalité de ce qui se passe en ce moment à Kourou : le lanceur russe moyen Soyouz, à la suite d’un accord signé en 2003 et qui fonctionnait bien jusqu’à la crise ukrainienne, et le lanceur européen léger Vega, fruit d’un accord entre l’Agence spatiale européenne et l’industrie italienne. La gamme de lanceurs utilisés est donc large, du lanceur très lourd, Ariane 5, au lanceur léger Vega, en passant par le format intermédiaire, pour lequel il existe une coopération russe importante.

Le Centre spatial guyanais connaît aujourd’hui une activité soutenue, avec environ une dizaine de lancements par an, mais le climat de concurrence internationale – M. Désir y a fait allusion – évolue rapidement. Cela tient à deux faits. Tout d’abord, les États-Unis dépensent deux fois plus que l’ensemble de leurs concurrents dans la recherche spatiale. Ensuite, beaucoup d’acteurs émergents arrivent sur le marché, comme la Corée du Sud et le Brésil.

Pour rester compétitifs dans ce secteur, les Européens ont lancé en 2014 le programme Ariane 6, qui doit permettre de diversifier la gamme, de réduire le coût des lanceurs à l’horizon 2020. Actuellement, un lancement par Ariane coûte environ 200 millions de dollars, tandis qu’un lancement par la société américaine SpaceX coûte 60 millions de dollars. Vous avez pu constater qu’on évolue vers des lanceurs réutilisables, ce qui va profondément modifier la donne.

Il s’agit bien entendu pour nous tous d’un vrai enjeu de souveraineté. Aujourd’hui, l’Union européenne dépense environ 4 milliards d’euros par an, la Chine engage à peu près la même somme, tandis que la Russie y consacre 6 milliards d’euros.

L’accord sur lequel nous devons nous prononcer, qui a été conclu en 2008 entre la France est l’Agence spatiale européenne, définit les droits, obligations et responsabilités respectifs des parties pour la gestion et l’exploitation du Centre spatial guyanais. Il vise avant tout à unifier, à actualiser et à clarifier le cadre juridique existant. Celui-ci était jusqu’à présent constitué de trois accords différents : un accord relatif au Centre spatial guyanais signé en 2002, renouvelé environ tous les quatre ans depuis 1975 et qui déterminait les conditions de mise à disposition, par la France, de l’ensemble du soutien au lancement du Centre spatial guyanais pour les programmes de l’Agence spatiale européenne ; un accord relatif aux ensembles de lancements, signé en 2002, qui traitait de l’ensemble des installations du système Ariane au Centre spatial guyanais ; enfin, un accord relatif à l’ensemble de lancement Soyouz, conclu en 2005, qui précisait les modalités d’implantation du lanceur russe sur le site de Kourou.

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Ce cadre présentait le double inconvénient d’être éclaté entre plusieurs textes et de devoir être renouvelé tous les quatre ans, rendant plus difficile la planification à long terme. Par ailleurs, il ne prenait pas en compte l’exploitation du système de lancement Vega, ni les dispositions de la loi française relative aux opérations spatiales que nous avons votée en 2008.

Cet accord précise en conséquence les obligations respectives de la France et de l’Agence spatiale européenne. La France doit ainsi garantir à celle-ci les obligations suivantes : la mise à disposition des terrains du centre spatial, le développement et l’entretien des infrastructures de la base, l’entrée, le séjour et la sortie de territoire des personnels liés aux activités du centre spatial, la protection du site, la mise à disposition de l’ensemble de soutien au lancement pour les activités de l’agence.

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La mise en oeuvre de cet accord dans sa dimension technique et opérationnelle incombe pour l’essentiel au Centre national des études spatiales, organisme français, propriétaire des terrains du centre spatial à Kourou.

En contrepartie, l’Agence spatiale européenne doit s’acquitter d’une participation financière, M. Désir l’a rappelé, d’un montant de 438 millions d’euros pour la période 2013-2017, soit les deux tiers des coûts fixes du centre spatial. La France demeure cependant le premier financeur du centre spatial, loin devant ses partenaires européens, puisqu’elle prend en charge 80 % des coûts totaux.

Au bénéfice de ces observations, je vous propose donc d’approuver la ratification de cet accord, qui a été adopté en commission et qui est déjà en application dans les faits, puisqu’il doit prendre effet rétroactivement au 1er janvier 2009.

Si je puis me permettre un dernier mot, madame la présidente, j’ajouterai que l’importance du domaine spatial pour notre pays dépasse nos divergences politiques et que nous devons tous avoir les yeux rivés sur trois objets : le maintien de la coopération avec la Russie – c’est important pour l’avenir –, la compétition américaine, en particulier venant du secteur privé, et enfin le soutien d’une certaine énergie européenne, monsieur le secrétaire d’État, notamment de la part de nos partenaires allemands, pour le financement de ce projet ; à défaut, la totalité de l’exercice risquerait d’être compromise.

Permettez-moi enfin de m’exprimer au nom du groupe Les Républicains, dont aucun orateur ne prendra ensuite la parole, pour indiquer que nous approuverons ce texte.

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Nous en venons à la discussion générale. J’invite les orateurs à ne pas imiter M. le rapporteur et à respecter leur temps de parole.

La parole est à M. Gabriel Serville.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, « Ariane décolle, la Guyane reste au sol » : tel est l’adage, presque devenu proverbe populaire, qui décrit le rapport de la Guyane au Centre spatial guyanais. Celui-ci est devenu en quelques décennies le premier port spatial au monde en matière de lancement de satellites commerciaux, et son inauguration avait fait naître, il faut en convenir, bien des fantasmes d’embellie économique. Hélas, le nouvel eldorado que semblait promettre l’annonce en 1964 par le général de Gaulle de la création d’une porte d’entrée européenne vers l’espace sur ces terres d’Amazonie semble aujourd’hui bien éloigné !

En effet, si le CSG, fort de ses quelque 10 800 emplois directs et indirects, soit environ 30 % de la masse salariale privée locale, occupe une place prépondérante dans le paysage économique guyanais, force est de constater qu’il n’a pas eu tous les effets d’entraînement escomptés. L’activité spatiale représente à elle seule 40 % des recettes fiscales issues de l’octroi de mer. Cependant, l’économie guyanaise, loin d’avoir profité pleinement de cette locomotive, souffre toujours d’une cruelle absence de diversification.

Par ailleurs, comment oublier qu’autour de cette vitrine de l’excellence française, un chômage endémique atteignant 23 % de a population active de Guyane et que certains quartiers de Kourou, dont les nuits sont fréquemment illuminées par les tirs d’Ariane, Vega et Soyouz, peinent à retrouver leur quiétude ?

Que dire encore du défi que constitue l’usage de son téléphone cellulaire hors des centres urbains alors même que les lanceurs précités font bénéficier les utilisateurs des quatre coins du globe des dernières technologies en matière de communication ? Ne voyez surtout pas dans mes propos une quelconque négation des bénéfices de l’activité spatiale en Guyane, chers collègues, ni une remise en cause de la place du secteur spatial au sein des politiques française et européenne. Bien au contraire, je souhaite rappeler haut et fort l’impérieuse nécessité de nous repositionner pour donner un souffle véritablement nouveau au secteur spatial et inspirer une refonte en profondeur de notre politique en la matière. Il nous incombe de militer pour une politique spatiale certes compétitive, mais également audacieuse et résolument inscrite dans son environnement guyanais et européen.

Tel est bel et bien le coeur du défi : allier compétitivité, cohésion européenne et insertion réelle et efficace de l’activité dans son écosystème direct afin de faire de l’espace une véritable source de croissance et de valeur ajoutée pour la France, l’Europe mais aussi et résolument pour la Guyane. Nous allons dans le bon sens, j’en suis persuadé. L’avènement du projet Ariane 6, qui pérennise l’implantation de la base spatiale européenne à Kourou et représente surtout un investissement de 600 millions d’euros pour la seule phase de construction d’un nouveau pas de tir, en est le meilleur exemple. Je salue à cette occasion notre collègue Geneviève Fioraso qui a consacré toutes ses forces à faire aboutir ce projet lors du conseil européen des ministres consacré à l’espace tenu il y a exactement un an au Luxembourg.

Par ailleurs, je partage pleinement l’avis des sénateurs Catherine Procaccia et Bruno Sido dont le rapport publié en novembre 2012 dans le cadre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques plaide pour une refonte tant scientifique qu’économique de notre vision de l’espace. Cet avis a trouvé un écho dans un référé de la Cour des comptes publié en 2013 qui juge que notre politique spatiale est trop coûteuse et qu’elle profite exagérément aux autres pays. Encore une fois, il ne s’agit pas d’une remise en cause : les indicateurs de notre industrie spatiale sont au beau fixe. Reste que nous assumons seuls 60 % des coûts du programme Ariane et 80 % de ceux du CSG, et cela, certainement, mérite débat. Selon un rapport de l’OCDE, nous consacrons chaque année au secteur spatial 0,1 % de notre PIB et 10 % du budget recherche

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, les députés du groupe socialiste, républicain et citoyen voterons bien entendu, à l’issue de notre court débat, le projet de loi adopté par le Sénat autorisant l’approbation de l’accord entre la France et l’Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais. L’Assemblée nationale aurait pu approuver ce texte selon une procédure d’examen simplifié, comme l’a fait le Sénat. Il nous a semblé néanmoins, en particulier à notre collègue Chantal Berthelot, députée de Guyane, …

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…, malheureusement empêchée aujourd’hui, que l’importance stratégique de ce site pour la France comme pour les vingt pays participant à l’aventure spatiale européenne depuis 1975 méritait un débat en séance publique. Le centre spatial de Guyane représente un budget annuel d’environ 150 millions d’euros en coûts fixes. Véritable port spatial de l’Europe, il assure le bon fonctionnement de la plateforme de lancement de trois modèles de vecteurs : un lanceur lourd, Ariane, un lanceur moyen, Soyouz et un lanceur plus modeste, Vega ou Vecteur Européen de Génération Avancée. L’accord qui nous est présenté est un accord de rationalisation, de simplification et de précision juridiques prévoyant de fusionner et de consolider trois traités intergouvernementaux antérieurs.

Il consacre le rôle du CNES, notre Centre national d’études spatiales créé en 1961 dont je rappelle qu’il occupe 2 450 collaborateurs, dispose d’un budget de plus de deux milliards d’euros et assure la cohérence globale de notre politique spatiale. L’accord précise ses responsabilités juridiques en matière de fonctionnement. Il pérennise le cadre juridique des lancements de l’Agence spatiale européenne en en étendant la durée de 2009 à 2020. L’accord clarifie également les droits et obligations des parties au profit du bon fonctionnement du CSG et engage l’État français mais aussi l’Agence spatiale européenne et les autres parties prenantes au lancement. Il précise les responsabilités juridiques en matière de gestion et d’exploitation de la base de lancement de la France et de l’ASE et organise le partage des responsabilités financières. Enfin, il permet l’utilisation des installations par les programmes nationaux et organise les rapports financiers entre le CNES et Arianespace.

Nous disposons, avec le Centre spatial guyanais mis en service en 1968, d’un site stratégique permettant la réalisation d’un projet exceptionnel, celui de l’Europe de l’espace, qui rassemble vingt pays. Notre pays y joue un rôle majeur et occupe la première place en Europe. Il concentre 40 % de l’activité européenne, ce dont Ariane est la figure emblématique. Le secteur spatial compte 16 000 emplois dans notre pays et 40 000 en Europe. Ses perspectives demeurent bien orientées malgré les rigueurs budgétaires. Nous nous sommes interrogés en commission des affaires étrangères sur les délais d’adoption du texte, signé en 2008 et adopté par le Sénat il y a trois ans. Cette interrogation mérite réponse, monsieur le secrétaire d’État.

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Je confirme le vote des députés du groupe socialiste, républicain et citoyen en faveur de l’adoption de l’accord entre la France et l’Agence spatiale européenne relatif au centre spatial de Guyane.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants est bien évidemment favorable à un projet de loi qui ne fait qu’entériner un accord relatif au Centre spatial guyanais signé en décembre 2008 entre le Gouvernement français et l’Agence spatiale européenne. La France s’est toujours appuyée sur l’Europe pour développer une puissance spatiale compétitive et stratégique. Notre pays est d’ailleurs devenu la première puissance spatiale européenne. Cette réussite trouve son origine dans la politique menée par le général de Gaulle au début des années soixante.

Ce leadership, nous l’avons acquis en grande partie grâce à des investissements ambitieux mais aussi grâce à la création de l’Agence spatiale européenne en 1975. Le Centre spatial guyanais est alors devenu le lieu de lancement des programmes européens, ce qui a permis à l’Europe d’être totalement indépendante en matière spatiale. Cette indépendance me semble tout à fait primordiale dans l’actuel contexte international, si difficile. En effet, l’accès à l’espace représente un enjeu majeur de sécurité et de défense. Si l’Europe veut conserver son leadership face à une concurrence mondiale de plus en plus vive, elle devra se poser les bonnes questions. En effet, l’arrivée de lanceurs américains low cost soulève directement la question de la préférence communautaire. Alors que les États-Unis n’ont jamais lancé de satellites américains sur un lanceur européen, nous avons éprouvé de très grandes difficultés à imposer Ariane pour le lancement de satellites Galileo, projet pourtant européen !

Nous devons garder à l’esprit que la conquête spatiale est avant tout une réussite européenne. Face à cette concurrence, l’innovation et le renforcement de la coopération au sein de l’Union européenne représentent des enjeux primordiaux.

Mes chers collègues, monsieur le secrétaire d’État, l’objectif de cet accord est donc tout à fait louable puisqu’il vise à regrouper trois accords intergouvernementaux dans un souci de simplification évident. Pour notre groupe, il est impératif de disposer d’un cadre juridique clair et simplifié sur un sujet peu connu mais essentiel pour notre avenir.

Cet accord permet également de faciliter l’utilisation des trois lanceurs européens – Soyouz, Ariane et Vega –, mais aussi de sécuriser l’utilisation des installations du Centre spatial guyanais par l’Agence spatiale européenne, l’ASE, jusqu’en 2020.

Grâce à ce centre spatial, la France dispose d’un atout de compétitivité non négligeable, à la fois pour notre territoire mais aussi pour le territoire européen. Il est par conséquent primordial de faciliter l’utilisation de ce centre par l’ASE, dont les projets ambitieux feront rayonner l’Europe et la France dans ce domaine.

Une telle coopération se révèle particulièrement importante sur trois grands points.

Tout d’abord, Arianespace doit continuer à être leader sur le marché des lanceurs. En ce sens, le lancement au mois d’août dernier du projet Ariane 6, avec la signature des premiers contrats entre l’ASE, le Centre national des études spatiales et Airbus Safran Launchers représente une avancée indéniable.

Notre compétence en termes de transport spatial est telle qu’Arianespace a également décroché le plus gros contrat de son histoire : La fusée Soyouz et la future Ariane 6 ont été sélectionnées pour mettre sur orbite plus de 600 satellites de la constellation OneWeb.

Ce très bon projet, dont l’objectif est d’assurer la couverture Internet de l’ensemble du globe terrestre, est estimé entre 1 et 2 milliards de dollars. C’est, une nouvelle fois, grâce à notre savoir-faire européen que nous pouvons mener un projet d’une telle envergure.

Par ailleurs, l’enjeu spatial européen concerne directement notre propre autonomie dans le système de géolocalisation. Ainsi, le projet Galileo devrait nous permettre d’être indépendants vis-à-vis du GPS américain. La mission européenne Philae étudie depuis plus d’un an, quant à elle, les origines de notre création sur la comète Tchouri. À travers ces travaux, c’est la recherche européenne que l’on met à l’honneur.

Enfin, l’aspect économique joue un rôle primordial dans la « conquête spatiale ». En effet, l’économie spatiale génère 40 000 emplois en Europe et 16 000 en France ! Le centre spatial européen est d’ailleurs un vecteur de développement économique très important pour la Guyane. La base de Kourou emploie 1 685 personnes et 15 % du PIB de Guyane est réalisé par l’activité spatiale. Nous devons soutenir ce secteur d’activité plein d’avenir, innovateur et créateur d’emplois.

Mes chers collègues, le groupe UDI votera donc en faveur de ce projet de loi, même si nous regrettons que les enjeux spatiaux ne fassent pas l’objet d’une plus grande attention de la part du Gouvernement. Ce sujet reste malheureusement trop souvent absent du débat politique alors que les défis sont immenses.

Il serait donc utile que le Gouvernement prévoie une véritable feuille de route et communique davantage autour d’un secteur d’activité souvent peu connu du grand public. Nous devons être fiers des avancées françaises et européennes dans ce domaine où nous excellons. Pour une fois, il nous est possible de « décrocher la lune » ! À nous de saisir cette opportunité et de nous donner les moyens de nos ambitions.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, à la fois base de lancement française et européenne, le Centre spatial guyanais, basé à Kourou, englobe l’ensemble du site spatial, les installations et les moyens qui concourent à la réalisation des lancements d’Ariane, de Soyouz et de Vega, ainsi que les usines de production. Il regroupe des établissements de plusieurs acteurs du secteur spatial européen, en particulier ceux du Centre national d’études spatiales, de l’Agence spatiale européenne, d’Arianespace, d’Astrium Space Transportation, de Regulus et d’Europropulsion.

Ses missions s’inscrivent dans les objectifs poursuivis par l’Europe en matière de transport spatial. Ils consistent, en premier lieu, à garantir un accès indépendant à l’espace, afin de lui permettre de réaliser les missions qui relèvent de sa souveraineté. Pour répondre à cet objectif, la France et les autres pays membres de l’Agence spatiale européenne ont reconnu l’importance stratégique de disposer d’installations de lancement propres et ont décidé, dès 1973, de les construire au Centre spatial guyanais, qui était déjà à l’époque un établissement du Centre national d’études spatiales.

Il s’agit ensuite d’occuper une place de premier plan sur le marché mondial des services de lancement et d’entretenir la prospérité et la compétence de cette industrie. Pour atteindre cet objectif, il fut décidé en 1980 de créer la société Arianespace, opérateur commercial des lanceurs européens Ariane et responsable des services de lancement.

Depuis quatre décennies, l’activité du centre spatial guyanais s’est densifiée, atteignant chaque année une dizaine de lancements réussis et une mise en oeuvre de trois pas de tir. Cette activité soutenue devrait se pérenniser durant les prochaines années. Les trois lanceurs présentent des performances complémentaires, et permettent à l’Europe de lancer tout type de missions en toute indépendance. C’est le cas en particulier du programme Ariane.

Le centre spatial guyanais est jusqu’à présent régi principalement par trois accords intergouvernementaux. Il s’agit tout d’abord de l’accord relatif au Centre spatial guyanais et l’accord relatif aux ensembles de lancement et aux installations associées de l’agence au centre spatial guyanais, conclus tous deux en avril 2002. Vient ensuite l’accord relatif à l’ensemble de lancement Soyouz, conclu en mars 2005. Enfin, les négociations entre la France et l’Agence spatiale européenne se sont déroulées entre 2007 et 2008 et ont abouti à l’accord du 18 décembre 2008. Ce dernier vise à se substituer aux trois accords intergouvernementaux précités.

Quatre objectifs sont poursuivis. En premier lieu, faire en sorte que le Centre spatial guyanais ne soit plus régi que par un seul accord intergouvernemental. Les trois accords préexistants contenaient en effet des dispositions communes et donc redondantes. La fusion de ces accords en un accord unique permet de simplifier sur le plan formel le cadre juridique applicable au centre spatial guyanais.

Il convient ensuite d’assurer la continuité et la pérennité du cadre juridique existant. Parmi les trois accords préexistants, l’accord principal relatif au centre spatial guyanais d’avril 2002, n’était depuis l’origine, en 1976, conclu que pour de courtes périodes successives, d’environ quatre ans. Le présent accord, conclu jusqu’en 2020, assure une plus grande pérennité au cadre juridique applicable au Centre spatial guyanais

Il définit également les droits et obligations du Gouvernement français et de l’Agence spatiale européenne, notamment en matière de sauvegarde et de sûreté au Centre spatial guyanais, afin d’assurer la protection des personnes, des biens et de l’environnement. Il contient enfin des dispositions applicables en matière de responsabilité en cas de dommages causés à des tiers, en raison d’opérations menées depuis le centre.

Ce nouveau cadre juridique commun a des conséquences importantes, en termes de stratégie spatiale tout d’abord. Il conforte en effet l’accès indépendant de la France et de l’Europe à l’espace, en garantissant, jusqu’en 2020, la coopération entre la France et l’Agence spatiale européenne sur le Centre spatial guyanais.

Dans les deux cas, il est indispensable pour la France et l’Europe de maîtriser entièrement la filière lanceurs afin de véritablement garantir l’indépendance vis-à-vis de besoins sensibles et futurs, comme par exemple les satellites militaires ou Galiléo, de ne pas subir de conditions d’utilisation pour effectuer le lancement, d’éviter la dépendance à l’égard des États-Unis sur les services de lancement, de la Chine et de la Russie et de ne pas cantonner l’industrie spatiale européenne au seul domaine des satellites.

Cet accord emporte également des conséquences scientifiques, mais aussi financières puisque, jusqu’en 2020, sa durée permet au Centre national d’études spatiales de négocier, dans de meilleures conditions, les contrats industriels placés sous sa responsabilité. Ces contrats concernent en particulier l’ensemble des prestations nécessaires au fonctionnement du Centre spatial guyanais, couvrant les fournitures en énergie, en eau ou en télécommunications, l’entretien des voies et réseaux, les systèmes de sécurité et de protection et les clôtures de protection.

Cet accord, en se substituant à trois accords intergouvernementaux, met donc en place un cadre juridique simple et pérenne permettant d’utiliser la gamme complète des trois lanceurs européens, dans le but de conforter l’accès indépendant de la France et de l’Europe à l’espace. Par conséquent, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste soutiendra l’approbation de cet accord.

L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.

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L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat (nos 3262, 3295).

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La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire.

Debut de section - Permalien
Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, l’État est engagé aux côtés des élus consulaires dans une réforme d’envergure, qui vise à moderniser les réseaux des chambres de commerce et d’industrie – CCI – et des chambres de métiers et de l’artisanat – CMA –, au service de notre tissu économique local.

Comme tous les opérateurs de l’État, les réseaux consulaires doivent faire face à deux enjeux majeurs. Ils doivent participer d’une part à l’effort de maîtrise des dépenses publiques, et s’organiser en adéquation avec la nouvelle carte régionale d’autre part.

Nous devons faire preuve de courage pour mener cette réforme indispensable qui permettra à terme d’offrir des services modernisés à nos entreprises.

Les enjeux budgétaires et structurels représentent aussi une opportunité pour les réseaux consulaires, celle de mener à leur terme les mouvements de mutualisation engagés depuis 2010 et de mieux articuler leurs actions avec les services de l’État et des régions, mais surtout d’accompagner de manière plus lisible et efficace les entreprises.

S’ils démontrent leurs capacités à se moderniser, les réseaux consulaires sortiront renforcés de cette réforme. Notre objectif est donc d’aider les élus consulaires à saisir cette opportunité au plus vite. C’est tout le sens de ce projet de loi.

Le Gouvernement veut permettre aux réseaux de disposer d’un cadre clair pour mener les changements nécessaires avant les élections consulaires prévues pour fin 2016.

Nous espérons aller d’autant plus vite que les objectifs dont nous allons parler aujourd’hui étaient déjà intégrés dans la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques d’août 2015 et adoptés par le Parlement. Une partie a été censurée par le Conseil constitutionnel pour un motif de procédure, ce qui nous a amenés à engager un nouveau travail législatif intense qui nous permet de vous présenter ce texte aujourd’hui.

Je tiens à souligner qu’il est très attendu par les élus consulaires.

Concernant les chambres de commerces et d’industrie, le projet de loi poursuit trois objectifs principaux : mutualiser, rationaliser et améliorer la représentativité au sein des chambres.

Pour les atteindre, nous introduisons notamment deux schémas régionaux. Le premier sera un schéma directeur à caractère opposable, qui déterminera la carte consulaire de chaque circonscription régionale. Il sera adopté après concertation dans chaque CCI de région et permettra d’atteindre l’objectif de réduction du nombre d’établissements publics, tout en maintenant les missions de proximité.

Le deuxième portera sur la description des missions des CCI de région. Il permettra de préciser les fonctions qui leur reviennent spécifiquement et de renforcer les mutualisations engagées en 2010.

Le choix des schémas comme outils de la réforme n’est pas anodin. Nous voulons respecter l’autonomie des réseaux et permettre une réforme qui soit le fruit d’une véritable concertation, au plus près des territoires. C’est toute la philosophie de ces deux schémas. Grâce à eux, les réseaux de CCI définiront eux-mêmes leur organisation et la répartition de leurs missions.

En parallèle de ces deux schémas régionaux, le projet de loi vise à améliorer la représentativité de chaque CCI territoriale au sein de leur CCI de région. Nous proposons de mieux répartir le nombre d’élus régionaux en proportion du poids économique de chaque échelon infrarégional. Cette disposition participe aussi à l’effort de modernisation du réseau des CCI.

S’agissant des chambres de métiers et de l’artisanat, le projet de loi prévoit de modifier le code de l’artisanat pour permettre aux chambres départementales de se regrouper en chambres de métiers et de l’artisanat de niveau interdépartemental. À terme, le réseau des CMA se structurera progressivement autour de deux modèles cohérents. D’un côté, les chambres régionales de métiers et d’artisanat, les CMRA, qui disposeront de chambres de métiers et de l’artisanat départementales et de chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales. De l’autre, les chambres de métiers et de l’artisanat régionales, qui se composeront de délégations départementales.

Voilà donc l’essentiel des dispositions prévues par ce texte.

Ce projet de loi fixe un cadre clair et introduit de nouveaux outils de rationalisation efficaces. Par ailleurs, il respecte l’autonomie des réseaux consulaires dans la définition de leurs stratégies de réorganisation : ainsi, la mise en oeuvre de la réforme se fera au plus près des problématiques de chaque territoire.

Pour finir, je veux préciser que ce projet de loi a été précédé par une ordonnance prise en application de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – NOTRe – qui contient les mesures les plus urgentes pour permettre aux réseaux consulaires de s’adapter à la nouvelle carte régionale. Cette ordonnance permet donc aux CCIR et aux CCIT qui le souhaitent de fusionner dès le 1er janvier 2016, sans attendre les élections consulaires prévues pour la fin de l’année. Cette mesure permettra, par exemple, aux deux réseaux consulaires normands de fusionner en début d’année prochaine.

Concernant les CMA, l’ordonnance permettra aux élus consulaires de décider avant le 31 janvier 2016 de la forme juridique qu’ils souhaitent adopter pour leur nouvelle chambre régionale. Le Gouvernement a déposé un amendement pour ratifier cette ordonnance.

Mesdames et messieurs les députés, vous l’aurez compris, ce texte est attendu par les réseaux des CCI et des CMA. Ces acteurs essentiels à la vitalité de nos territoires sont prêts à se moderniser, mais ils ont besoin des outils adéquats. Je vous appelle donc à les doter de ces outils au plus vite, en adoptant ce projet de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à Mme Marie-Hélène Fabre, rapporteure de la commission des affaires économiques.

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Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat sont des organes essentiels de dialogue entre les acteurs du monde économique et les pouvoirs publics. Ce sont également des appuis cruciaux aux entreprises à toutes les étapes de leur développement.

La mondialisation des échanges rend nécessaire une forte coordination des décisions en matière économique. Or les réseaux des CCI et des CMA continuent d’être trop dispersés. Cette dispersion réduit l’efficacité du service rendu aux entreprises ; elle entraîne des coûts importants pour nos finances publiques. Surtout, elle rend difficile la coordination de l’action de ces réseaux avec les régions, qui sont l’échelon d’administration compétent en matière économique.

La dernière réforme d’envergure concernant ces deux réseaux avait déjà renforcé leur échelon régional. Avec la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce et à l’artisanat, un premier pas important a été franchi. Cette loi a facilité les regroupements entre établissements, favorisé les mutualisations de fonctions, renforcé les pouvoirs des chambres de région et créé un monopole de perception des ressources fiscales pour les chambres de niveau régional.

Le présent projet de loi s’inscrit dans la continuité de cette réforme. Il est le résultat d’une concertation poussée avec les réseaux concernés. Ses dispositions, en réalité, ont déjà été discutées dans cette assemblée, puisqu’il reprend certaines des dispositions adoptées dans le cadre de la discussion du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Celles-ci ne sont pas entrées en vigueur, car elles ont été censurées par le Conseil constitutionnel en tant que cavaliers législatifs.

Les autres dispositions, destinées à permettre l’adaptation de ces réseaux à la nouvelle carte régionale figurent dans une ordonnance prise sur le fondement de l’article 136 de la loi NOTRe.

S’agissant des CCI, ce projet de loi doit permettre de favoriser la rationalisation de ce réseau et de renforcer son échelon régional. Dans ce but, il rend opposables les schémas directeurs élaborés par les chambres de région et crée un nouveau schéma régional d’organisation des missions, également opposable. II étend aussi les possibilités de fusion entre chambres de commerce et d’industrie départementales.

Mais il crée également les conditions nécessaires à une juste représentation des ressortissants des CCI. Ainsi, il met fin à la règle voulant qu’aucune chambre territoriale, locale ou départementale ne puisse disposer de plus de 40 % des sièges d’une chambre de région. Il modifie le plafond de sièges des chambres territoriales et des chambres de région en les portant de 60 à 100 et de 100 à 120, respectivement.

S’agissant des CMA, ce projet de loi doit permettre d’améliorer l’intégration régionale de leur réseau. C’est pourquoi il autorise la création de chambres interdépartementales, résultant de la fusion de chambres départementales, et précise les modalités de regroupement des chambres de niveau infrarégional en chambres de région.

Au cours des débats sur le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, ces dispositions avaient recueilli, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, l’accord d’un très grand nombre de nos collègues. Les travaux de la commission des affaires économiques ont confirmé l’esprit de consensus qui entoure ce projet de loi. À l’exception de quelques amendements rédactionnels, la commission a approuvé le texte déposé par le Gouvernement. Je souhaite que la discussion du présent projet de loi puisse faire apparaître le même esprit de consensus.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.

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Dans la discussion générale, la parole est à M. Philippe Kemel.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, chers collègues, ce projet de loi est d’une simplicité et d’une efficacité telles qu’elles permettront aux CCI et aux CMA d’effectuer les mutations nécessaires. On sait le rôle que jouent les CCI et les CMA dans le développement économique des territoires. Représentant la société civile économique, leurs missions – accompagner et conforter les entreprises, aider leurs dirigeants, permettre les formations en appliquant notamment les politiques d’apprentissage menées dans les différentes régions – sont essentielles pour la structuration économique des territoires.

Nous connaissons les importantes évolutions économiques qui sont aujourd’hui à l’oeuvre : métropoles, concentrations économiques autour d’activités en mutation permanente, augmentation de la part du tertiaire. L’industrie, dont les procédés font de plus en plus appel à la technologie, se projette sur les marchés extérieurs et compose son processus de production dans une cohérence entre extérieur et production intérieure. Ces évolutions nécessitaient des adaptations.

Il convenait aussi de prendre en compte les suites de la loi NOTRe : l’évolution des territoires, leur recomposition rendait nécessaire de modifier les représentations de la société civile.

Ces adaptations doivent pouvoir se faire dans la cohérence et dans l’acceptation des modes d’évolution. Ce projet de loi, madame la secrétaire d’État, a une double fonction : une fonction régalienne, qui consiste à donner l’orientation du schéma directeur, et une fonction collaborative, pour que, sur chacun des territoires, on s’adapte en fonction des particularités locales et du poids économique des acteurs. C’est à la fois l’originalité de ce texte et la garantie de son efficacité.

Le groupe socialiste, républicain et citoyen votera cette loi de facilitation.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Je ne résiste pas au plaisir de vous saluer, madame la présidente, ainsi que madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques et madame la rapporteure ! Cela est suffisamment rare pour que vous compreniez, messieurs, le plaisir qui est le mien d’insister sur le sujet !

Sourires et applaudissements sur l’ensemble des bancs.

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Ce projet de loi est davantage une organisation matérielle de l’organisation des réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres des métiers et de l’artisanat qu’une réforme de fond. C’est, pour chacun d’entre nous, l’occasion de rappeler le rôle essentiel des CCI et des CMA, tant pour le soutien économique sur le territoire que pour le développement de la formation. On connaît bien sûr leur action auprès des écoles de commerce mais on oublie trop souvent leur rôle en matière d’apprentissage. Les CMA représentent 1,3 million d’artisans, qui portent le savoir-faire français, y compris au-delà de nos frontières.

Ces éléments ont été rappelés dans l’article 1er de la loi du 23 juillet 2010. Le texte que vous nous proposez, madame la secrétaire d’État, poursuit trois objectifs que je qualifierais de « mise à jour », tant il est important d’accompagner les évolutions.

Le premier objectif consiste à renforcer le mouvement de mutualisation des fonctions support au niveau régional. Le second est de faciliter la rationalisation du réseau en conférant un caractère opposable aux schémas directeurs adoptés par les CCIR, après concertation. J’insiste sur ce dernier point : pour avoir vécu de près la réforme de 2010, je sais que les CCIR inquiétaient et qu’il est nécessaire de promouvoir la concertation entre les acteurs de l’échelon départemental et ceux de l’échelon régional.

Le texte vise aussi à améliorer la représentativité de chaque CCI territoriale au sein de la CCIR de rattachement. Là encore, il est important que chacun sache qu’il pourra être représenté au niveau régional. Si le critère de poids économique paraît juste, il renforce les plus forts : soyons vigilants et n’oublions jamais les petits territoires, qui font face à des situations plus compliquées.

Par ailleurs, le projet de loi permet le regroupement des CMA dans des chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales. Là aussi, il convient de prendre en compte les bassins de vie économique.

Enfin, vous proposez une ordonnance relative à l’adaptation des réseaux à la loi NOTRe, avec notamment une possibilité de fusion dès janvier 2016, attendue par certains membres du réseau. Leur permettre d’avancer me paraît intéressant.

Nous savons tous que ces différents éléments figuraient dans les articles 300 à 314 de la loi Macron. Ils ont fait l’objet de discussions au fond et il n’y a pas lieu, pour notre groupe, de s’y opposer.

En revanche, madame la secrétaire d’État, je profite de cette occasion pour appeler votre attention sur deux éléments. Il s’agit d’abord du sentiment d’abandon de certains territoires, dont nous pouvons les uns et les autres légitimement nous préoccuper.

Dans notre pays, treize métropoles concentrent les meilleurs PIB, l’essor démographique, les laboratoires de recherche, les initiatives d’excellence – IDEX –, les laboratoires de l’institut des sciences de l’ingénierie et des systèmes – INSIS –, donnant l’impression d’être les territoires d’avenir. Qu’en est-il pour le reste du pays ? Cette question intéresse l’aménagement du territoire, mais il s’agit aussi d’un sujet économique majeur.

Votre majorité a souhaité constituer de très grandes régions. La mienne, l’Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine occupe 57 000 km carrés – une fois et demie la surface de la Belgique, mais avec deux fois moins d’habitants – et regroupe des territoires très hétérogènes. Qu’y a-t-il de commun entre l’eurométropole de Strasbourg et la Haute-Marne qui est, avec tout le respect que je lui dois, un département en souffrance, concentrant un certain nombre de difficultés. Ma question est simple : que faites-vous pour ces territoires, que répondons-nous aux TPE et aux PME, qui demandent une plus grande proximité et une meilleure capacité d’écoute ? Ce sont des questions auxquelles il est urgent de répondre !

Le deuxième élément est la situation financière des chambres. Un principe est à mes yeux indispensable : l’argent des entreprises doit rester au service des entreprises, qu’il s’agisse de formation, de développement ou d’équipement. Je regrette que ce texte n’ait pas été l’occasion de reprendre certaines propositions que Mme Monique Rabbin et moi-même avions faites dans notre rapport d’information de septembre dernier, notamment au sujet des coopérations entre le réseau et les collectivités. Il existe là des possibilités de mutualisation qui méritent d’être examinées. Nous savons tous que l’argent public est rare et qu’il faut mutualiser pour optimiser son emploi et pour aller plus loin ensemble. Je pense donc qu’il conviendrait de prendre ces sources en considération.

Vous avez mené une concertation sur un texte avant tout technique qui facilitera les rapprochements. Vous avez respecté le principe de l’autonomie des réseaux. Je conclurai donc en indiquant que cette autonomie sera d’autant plus forte que vous respecterez l’autonomie financière des chambres. Je vous donne acte de ne pas avoir proposé de prélèvement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016 ; pour autant, la baisse de 130 millions constitue une limite face à laquelle les 20 millions du fond annoncé pour l’ensemble du réseau ne représentent, vous me l’accorderez, qu’une goutte d’eau. Sous cette réserve, notre groupe votera le texte.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, face au chômage de masse qui frappe notre pays, tous les leviers économiques doivent être activés pour retrouver le chemin de la croissance et de l’emploi. Le groupe UDI a toujours considéré que, lorsque la dynamique nationale était en panne, il fallait se tourner vers les territoires pour impulser un nouveau mouvement.

Pour ce faire, nous disposons d’outils souvent méconnus du grand public, à savoir les chambres consulaires, dont la vocation première est de représenter les acteurs de l’agriculture, de l’artisanat, mais aussi du commerce et de l’industrie.

Le regroupement de ces acteurs économiques n’est pas nouveau, puisque la première chambre de commerce aurait vu le jour à Marseille à la fin du XVIe siècle. Plus généralement, les corporations de métiers ont longtemps été d’usage en France, avant d’être interdites sous la Révolution par la fameuse loi Le Chapelier du 14 juin 1791, puis de se transformer, pour la plupart, en ordres professionnels ou encore en syndicats.

Les chambres de métiers et de l’artisanat et les chambres de commerce et d’industrie ont toujours eu pour objectif d’encourager l’activité économique dans les territoires, mais aussi de représenter les intérêts des différents acteurs auprès des pouvoirs publics. En ce sens, la modernisation permanente de nos réseaux consulaires est primordiale pour la survie de ces chambres, qui participent directement au dynamisme de nos territoires.

La loi de juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services a justement permis de renforcer les missions des CCI, en précisant leur rôle dans le développement économique, l’attractivité et l’aménagement des territoires. Cette loi permettait d’ailleurs une régionalisation plus importante des CCI et des CMA.

Pour le groupe UDI, la région représente certainement le levier territorial le plus pertinent en matière économique. La loi NOTRe a d’ailleurs conforté cet échelon dans son rôle de chef de file en la matière.

Dans la lignée de la loi de 2010, la loi de décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises a également permis que les chambres de commerce et d’industrie territoriales puissent s’unir à leur chambre de commerce et d’industrie de région. Fortes d’une implantation territoriale développée, avec près de deux cent cinquante établissements et plus de 4 milliards d’euros de budget, les CCI et les CMA forment donc un maillage territorial dense et déterminant dans l’accompagnement économique des entreprises et des acteurs locaux de notre pays.

Au fond, le texte que nous étudions aujourd’hui s’inscrit dans le prolongement des dernières décisions prises au sujet des réseaux consulaires. Aussi le groupe UDI ne peut-il qu’être favorable à un projet qui se borne, finalement, à des ajustements techniques mais nécessaires.

En effet, la réforme territoriale a redessiné la carte de nos régions, dont les contours n’ont cessé de s’agrandir. Un tel changement doit être pris en compte dans le mode de fonctionnement de nos réseaux consulaires. Comment garantir en effet le même lien de proximité et de confiance entre les différents acteurs d’un territoire dans une région aussi grande que l’Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, par exemple ?

À l’occasion de la loi dite « Macron », le Gouvernement avait justement fait adopter des dispositions visant à anticiper cette nouvelle carte territoriale. Un nouveau document contraignant, le schéma régional d’organisation des missions, avait été introduit pour les chambres de commerce et d’industrie de région. Un assouplissement du périmètre des missions des chambres de région avait également été prévu, au bénéfice des chambres territoriales. De la même façon, le pouvoir des chambres de commerce et d’industrie de région avait été renforcé. Il avait notamment été précisé qu’une chambre de région pouvait décider de la réunion des chambres territoriales en une seule chambre territoriale, dans le cadre d’un schéma directeur. Dans le cas d’un regroupement de plusieurs régions, la loi Macron ouvrait la possibilité, pour une chambre de région, de devenir une chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale rattachée à la chambre régionale. Une telle mesure permettait d’anticiper la nouvelle carte territoriale en évitant la fermeture de chambres régionales.

Ces mesures ont été censurées par le Conseil constitutionnel, qui les a considérées comme des cavaliers législatifs. Pourtant, les objectifs de ces dispositions – qui n’avaient d’ailleurs provoqué d’opposition ni à l’Assemblée nationale ni au Sénat – étaient louables et allaient dans le sens d’une régionalisation des réseaux.

Une telle rationalisation des chambres nous semble être un gage d’efficacité d’autant plus important que nos régions vivent dans un espace de plus en plus mondialisé et concurrentiel. Or la réponse à cette concurrence internationale doit être à la hauteur des enjeux économiques et des aspirations des acteurs de nos régions.

En définitive, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui ne fait que reprendre ces mesures. Et si nous n’avons pas d’opposition de principe sur ce texte, son examen nous permet néanmoins de nous interroger de manière plus globale sur l’avenir des réseaux consulaires.

Tout d’abord, la nouvelle carte des régions représente une menace claire pour la proximité qui existe aujourd’hui, entre les institutions régionales et les citoyens. Le groupe UDI a toujours défendu une carte régionale à taille humaine, plutôt que des régions définies sur un coin de table, un soir, à l’Élysée.

Madame la secrétaire d’État, nous devrons désormais être vigilants et vérifier que les prises de décisions des futures chambres de commerce et d’industrie régionales et des chambres de métiers et de l’artisanat ne soient pas trop éloignées des besoins territoriaux. Chaque localité a des besoins spécifiques qui nécessitent une certaine connaissance du territoire. En aucun cas la mutualisation des moyens et l’éloignement du niveau de prise de décision ne doivent affecter le dynamisme économique.

À l’inverse, la dispersion des chambres consulaires rend souvent leurs actions illisibles et représente un coût non négligeable. Si la réduction du nombre de chambres est amorcée, elle semble encore timide face à l’enjeu qu’elle représente.

Par ailleurs, la question de l’articulation des CCI et des CMA avec les compétences des régions doit absolument être posée. Actuellement, le rôle des CCI et des CMA est-il suffisamment compris par les acteurs économiques des territoires ? L’articulation entre l’action des chambres et les politiques économiques menées par les régions est parfois mal comprise.

Notre groupe s’inquiète également des moyens budgétaires alloués aux réseaux consulaires. Cette préoccupation n’est pas nouvelle : nous avons très régulièrement tiré la sonnette d’alarme au sujet de la baisse drastique des moyens consacrés à ces chambres. Cette année encore, une coupe budgétaire de 130 millions d’euros dans le budget des CCI a été décrétée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016. En guise de compensation, le Gouvernement a proposé la mise en place d’un fonds de 20 millions d’euros censé aider les CCI en difficulté. Quelle est la logique de cette décision ? Aucune !

Le groupe UDI renouvelle sa demande de connaître le cap du Gouvernement sur ce sujet. Au sein de la CCI de Paris, ce sont 715 postes qui risquent d’être supprimés. Or, supprimer des postes dans des institutions qui sont censées en créer représente un message terrible pour notre pays, déjà trop lourdement frappé par le chômage.

Les attentes de nos concitoyens en termes de développement économique sont fortes. Nos réseaux consulaires doivent donc être au centre d’une stratégie globale et viable pour la croissance française. En effet, en soutenant la formation tout au long de la vie, l’aide aux entreprises ou encore l’appui au développement à l’international, les CCI et les CMA jouent un rôle prépondérant dans notre économie.

Pour le groupe UDI, il est également primordial de réfléchir à renforcer la complémentarité entre les chambres de notre réseau consulaire. En région Centre, par exemple, des forums « tri-consulaires » sont régulièrement organisés. À cette occasion, la CCI, la CMA et la chambre d’agriculture se réunissent avec les acteurs économiques de la région sur des thèmes comme la reprise et la création d’entreprises. Des entrepreneurs, des porteurs de projets, des étudiants, sont ainsi formés et mis en contact avec des banques ou des juristes afin de concrétiser leurs ambitions. En unissant leurs moyens, ces différentes chambres accentuent leur force de frappe et permettent de répondre de manière plus concrète aux besoins des entrepreneurs de demain. Au-delà de la rationalisation de notre réseau consulaire, c’est ce type d’initiative locale qu’il faut encourager.

Mes chers collègues, la structuration de notre réseau consulaire français est une force pour le redémarrage économique de notre pays. Nous voterons donc ce projet de loi, même si nous maintenons qu’une réflexion plus profonde doit absolument être engagée.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, après la loi de 2005 et la grande réforme de 2010, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner un projet de loi consacré à l’organisation des réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat.

Au-delà de la loi, les réseaux ont connu ces dernières années des évolutions substantielles pour accompagner les transformations de leurs ressortissants. Tout au long des débats, souvent houleux et polémiques, sur les changements subis ou effectués par les réseaux eux-mêmes, une unanimité s’est dégagée pour reconnaître l’utilité des chambres dans notre pays. Les CCI et les CMA jouent en effet un rôle important dans nos territoires. Ce sont les organes pertinents pour la concertation entre la sphère économique et les pouvoirs publics. Ces chambres participent au soutien aux entreprises dans leur quotidien et dans les différentes étapes de développement qu’elles traversent. Elles assurent aussi, évidemment, une part significative de la formation et de l’insertion de nos jeunes sur le marché du travail, par l’apprentissage notamment.

Parallèlement à la régionalisation, les chambres consulaires ont pris une part conséquente aux efforts de maîtrise des dépenses publiques et au redressement de nos finances publiques, moyennant des prélèvements opérés sur leurs fonds de roulement et la baisse de la taxe pour frais de chambre. Ces efforts ont accéléré les processus de mutualisation des fonctions, de recentrage sur les missions prioritaires et d’adaptation aux besoins essentiels de leurs ressortissants.

En dépit de ces modernisations, nombreuses sont les chambres qui regrettent de manière générale une concertation insuffisante, une lisibilité pluriannuelle perfectible, un manque de reconnaissance comme corps intermédiaire pivot et l’absence d’accompagnement de la part des pouvoirs publics pour encourager les évolutions. Aujourd’hui, toutes les chambres sont confrontées – à des niveaux et des degrés très divers, je le concède – à des problèmes de gouvernance, de représentativité et de financement.

Il existe aussi un mécontentement de la part des personnels de ces organismes, dont le statut mériterait d’être amélioré et qui doivent faire face à des vagues de licenciements dans une grande partie des chambres.

De plus, l’application des différentes dispositions législatives, notamment celles de la loi de 2010, pose différents problèmes dont le rapport des sénateurs Jean-Claude Lenoir et Claude Bérit-Débat fait état. Les incertitudes qui ont entouré la mise en place de la nouvelle taxe pour frais de chambre et l’absence de précision des textes réglementaires d’application ont largement retardé la mise en oeuvre d’une réforme parfois complexe et l’appropriation des changements par les acteurs.

Ensuite, en dépit de la nécessité d’une meilleure coordination des décisions économiques à chaque échelon pertinent, les réseaux consulaires connaissent une hétérogénéité et un éclatement préjudiciables en termes d’efficacité et, partant, de coût pour les entreprises comme pour les finances publiques.

Le présent projet de loi vise à répondre à ces enjeux pour renforcer la cohérence et la coordination de l’action des réseaux avec celle les régions, qui sont l’échelon compétent pour le développement économique.

La loi de 2010 de réforme des réseaux consulaires a constitué une étape majeure dans la rationalisation et l’organisation de chaque niveau d’action des chambres. Elle a réorganisé ces réseaux autour de pôles régionaux, en étendant les possibilités de regroupement de chambres et de mutualisation de fonctions, en renforçant les pouvoirs de gestion et d’animation des chambres de région et en créant un monopole de perception des ressources fiscales pour les chambres de niveau régional.

Ce projet de loi assez simple et court s’inscrit dans la continuité de cette réforme et vise à adapter les réseaux aux futures grandes régions. D’ailleurs, il reprend la plupart des dispositions adoptées pendant l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron » – articles 300 à 314 –, dispositions qui ont été ensuite censurées par le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 5 août 2015, en tant que cavaliers législatifs.

À ce sujet, nous avons depuis plusieurs années une expérience certaine des censures du Conseil constitutionnel. Il est par ailleurs frappant de constater que celle-ci n’est quasiment jamais évoquée dans l’exposé sommaire du projet de loi – et seule une ligne lui est consacrée dans l’étude d’impact.

Ces articles ont été censurés le 5 août dernier pour non-respect de la conformité des procédures d’adoption de la loi. Le Conseil constitutionnel, estimant que ces articles, qui avaient été introduits au Sénat sous forme d’amendements du Gouvernement en mars 2015, avaient été adoptés selon une procédure contraire à la Constitution, les a donc censurés.

Nous pouvons avoir des débats sur le fond à propos de l’éventuelle fragilité constitutionnelle de certaines dispositions ou rédactions législatives – d’ailleurs les meilleurs experts de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, y compris au sein du Conseil d’État, débattent aussi entre eux et s’opposent régulièrement sur la constitutionnalité de certaines mesures législatives – mais sur des questions de procédure, de « cavalerie », à l’heure où le temps parlementaire est précieux, nous ne pouvons plus nous permettre de multiplier ce type d’erreur.

Tous les gouvernements et tous les groupes parlementaires sont déjà tombés dans le piège. Il ne s’agit pas de jeter l’anathème sur tel ou tel, mais nous devrions en tirer des leçons sur notre façon de légiférer en urgence. S’agissant des censures pour cause de manquement à la procédure, il serait appréciable de donner désormais des consignes strictes aux services, dans les ministères comme dans les deux chambres parlementaires, pour qu’ils redoublent de vigilance face aux risques constitutionnels de forme.

Car ces censures nous contraignent à réexaminer aujourd’hui un projet de loi pour quelques articles qui ont déjà été adoptés il y a plusieurs mois.

Sur le fond, le projet de loi contient des dispositions destinées à apporter des précisions et des correctifs à la loi de 2010 afin de tenir compte des retours d’expérience et des enseignements tirés de cinq ans d’application de la réforme ainsi que de l’évolution du paysage institutionnel, notamment de la carte des régions.

Ces mesures vont dans le sens des propositions du rapport sénatorial d’application de la loi de 2010, dont une des recommandations principales consiste à demander des précisions législatives quant à la définition et à la mise en oeuvre de la stratégie régionale du réseau des CCI.

Concernant les CCI, le projet de loi rend ainsi opposables les schémas directeurs élaborés par les CCIR. Il crée un nouveau schéma régional d’organisation des missions, également opposable, et étend les possibilités de fusion entre chambres de commerce et d’industrie départementales.

Ces mesures, qui ont été demandées par de nombreuses chambres, notamment lors des auditions réalisées par la mission d’évaluation et de contrôle, permettront de favoriser la rationalisation du réseau et de renforcer son échelon régional, ce qui d’ailleurs n’est pas sans présenter certains risques, liés à la perte d’une connaissance fine du tissu économique local.

En effet, avec de grandes régions aux territoires parfois baroques, l’échelon départemental retrouve une forme de pertinence pour offrir des prestations plus adaptées à la réalité de l’économie locale.

Les députés du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, dont l’attachement au département n’est pas une nouveauté, craignent que l’éloignement inévitable de la CCI régionale entraîne une perte de connaissance des spécificités locales. Mon collègue Joël Giraud vous dirait qu’il n’est pas persuadé que les experts marseillais soient les meilleurs spécialistes de l’économie montagnarde locale du bassin de Briançon…

Sourires.

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Madame la secrétaire d’État, nous comptons sur vous pour accompagner cette phase de restructuration, notamment dans les petites chambres des départements ruraux et montagnards qui connaissent des difficultés financières considérables.

S’agissant des chambres de métiers et de l’artisanat, le projet de loi autorise la création de chambres interdépartementales, résultant de la fusion de chambres départementales, et précise les modalités de regroupement des chambres de niveau infra-régional en chambres de région, ceci afin de renforcer l’intégration régionale du réseau.

Au cours de l’examen du projet de loi Macron, ces dispositions avaient recueilli, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, l’assentiment d’une grande majorité de parlementaires de toutes les familles politiques.

Nous n’allons pas refaire aujourd’hui le débat budgétaire sur le financement des réseaux, et si nous sommes réservés sur l’équité des efforts que doivent réaliser les chambres, nous sommes globalement favorables à l’esprit de ce projet de loi qui, selon nous, participe à la rationalisation nécessaire de ces réseaux, sans oublier que la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, nous obligeait à adapter les circonscriptions régionales des CCI et des CMA.

Madame la secrétaire d’État, le groupe RRDP soutient ce projet de loi, à la fois simple et technique, destiné à procéder aux ajustements. Mais nous comptons sur votre vigilance pour soutenir les chambres des territoires ruraux, qui sont plus fragiles et exigent une attention toute particulière.

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Mesdames – madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure – mes chers collègues, le projet de loi dont nous entamons l’examen ce matin vise à mettre en oeuvre une nouvelle étape de la réforme des réseaux des chambres de commerce et d’industrie et de renforcer la régionalisation mise en place par la loi du 23 juillet 2010.

Il comprend en outre une série de dispositions destinées à permettre l’adaptation de ces réseaux à la nouvelle carte régionale, qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain suite au tsunami provoqué par les réformes territoriales.

Depuis 2010, les réseaux consulaires sont réorganisés autour de l’échelon régional. La loi a étendu les possibilités de regroupement de chambres et de mutualisation de fonctions en renforçant les pouvoirs de gestion et d’animation des chambres de région et en leur attribuant un monopole en matière de perception des ressources fiscales.

Le projet de loi que vous nous proposez s’inscrit dans la continuité de cette réforme et reprend certaines des dispositions adoptées dans le cadre de la discussion du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, puis censurées par le Conseil constitutionnel.

S’agissant des chambres de commerce et d’industrie, le texte rend opposables les schémas directeurs élaborés par les chambres de région, crée un nouveau schéma régional d’organisation des missions, également opposable, et étend les possibilités de fusion entre les CCI départementales.

Il prévoit également une nouvelle représentation des territoires au sein des chambres en mettant fin à la règle selon laquelle aucune chambre territoriale, locale ou départementale, ne peut disposer de plus de 40 % des sièges d’une chambre de région, et en modifiant le plafond de sièges des chambres territoriales et des chambres de région en les portant respectivement de soixante à cent et de cent à cent vingt.

Selon le Gouvernement, ce projet de loi devrait « favoriser la rationalisation de ce réseau » et « renforcer son échelon régional », tout en préservant la possibilité d’une juste représentation de ses ressortissants.

S’agissant des CMA, le projet de loi autorise la création de chambres interdépartementales, résultant de la fusion de chambres départementales, et précise les modalités de regroupement des chambres de niveau infra-régional en chambres de région. Ces mesures doivent permettre, selon leurs promoteurs, d’améliorer l’intégration régionale du réseau des CMA.

L’objet du présent texte est, d’une part, de favoriser la réduction du nombre d’établissements des deux réseaux CCI et CMA, au risque d’entraîner la dégradation du service de proximité nécessaire au soutien des entreprises, et, d’autre part, d’accélérer la mise en conformité territoriale des réseaux des CCI et CMA avec les nouvelles régions, en application de la fameuse loi NOTRe.

L’ordonnance qui l’accompagne permet aux CCI régionales qui le souhaitent, ainsi qu’aux CCI territoriales qui leur sont rattachées, de fusionner dès le 1er janvier 2016.

Nous avons exprimé en commission un certain nombre de réserves sur cette nouvelle étape de la réforme des réseaux des chambres consulaires.

Nous estimons en effet, en premier lieu, que le territoire des futures grandes régions est beaucoup trop étendu pour que cela n’ait pas de conséquences sur la qualité des prestations offertes aux petites et moyennes entreprises – imaginez le territoire que représente la région Auvergne-Rhône-Alpes, par exemple, pour ne citer qu’une région que je connais parfaitement.

On peut légitimement craindre qu’un éloignement accru nuise à la réactivité des chambres. C’est un fait que j’ai moi-même observé avec la disparition des CCI de proximité. Comme l’a fort justement souligné Mme la rapporteure, les chambres apportent des appuis cruciaux aux entreprises. Or j’ai personnellement constaté, depuis mon élection en 2002 en tant que député, que l’éloignement des chambres de commerce et d’industrie n’est pas de nature à améliorer les relations avec le milieu économique.

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Nous, élus, avions avec les chambres des réunions et des rencontres régulières très enrichissantes. Cela a disparu et le travail de terrain, indiscutablement, n’est plus le même. On peut habiller la réforme comme on veut, c’est une réalité !

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Cette réforme obéit-elle à un souci d’efficacité ou à un souci d’économie budgétaire ? En ce qui me concerne, j’ai tendance à penser que l’économie budgétaire l’emporte sur l’efficacité.

La réforme risque en outre de se solder par de nouvelles suppressions de postes. En effet, la décision de diminuer les moyens des réseaux des chambres consulaires s’est déjà traduite par des plans de suppression de postes. À titre d’exemple, en Île-de-France, les effectifs ont été réduits de 235 équivalents temps plein, et dans la région Nord-Pas-de-Calais les mutualisations ont entraîné la suppression de 130 postes.

La réforme des réseaux consulaires que vous nous proposez apparaît ainsi, comme l’ont souligné plusieurs de nos collègues en commission, comme la conséquence de la réduction des moyens de ces réseaux et de la réforme territoriale.

La crainte est d’autant plus fondée qu’un projet d’accord a été présenté aux organisations syndicales en commission paritaire nationale le 7 décembre dernier. Signé par la CFDT et rejeté par les autres organisations syndicales, cet accord vise à simplifier et à accélérer les procédures de licenciement pour suppression de poste. Cet accord fait craindre aux agents des CCI qu’un plan social d’envergure ne soit prochainement annoncé.

Cette réforme aura donc des répercussions, non seulement sur les agents au plan personnel, mais aussi, par voie de conséquence, sur la qualité des prestations offertes aux entreprises.

Les différents intervenants ont multiplié les formules laudatives. Un vrai concert de clairons, trompettes et hautbois – à l’exception, je le reconnais, de quelques notes plus nuancées ou discordantes venant du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, par la voix de Meyer Habib, et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste. Ce concert de louanges vante les mérites de cette réforme : nécessaire adaptation, indispensable modernisation, optimisation, amélioration de la représentativité, cohérence, concertation et consensus… N’en jetez plus, la coupe est pleine !

Rires.

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Un tel maquis d’arguments rendrait incongru un vote négatif… Le vilain petit canard pourra-t-il se frayer un chemin au milieu de ce maquis, même si deux intervenants ont ouvert un sentier ?

Malgré toutes ces formules laudatives et en cohérence avec notre hostilité au nouveau découpage des régions, qui aboutit à la pompe aspirante des métropoles, nous voterons, isolés mais déterminés, madame la secrétaire d’État, contre votre projet de loi. Je vous remercie pour votre écoute.

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La discussion générale est close.

La parole est à Mme la secrétaire d’État.

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Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

Je souhaite apporter quelques éléments de réponse aux différents intervenants.

Un certain nombre d’entre vous ont exprimé la crainte que la réorganisation du réseau consulaire ne réduise la proximité avec les entreprises. Non, il s’agit d’une réorganisation, ce qui ne remet pas en cause la proximité. Il ya différentes possibilités d’organisation. Celle-ci en est une et elle est cohérente. Avec la création de nouvelles régions, il était nécessaire d’adapter l’organisation des réseaux consulaires, celui des chambres de commerce comme celui des chambres de métiers, tout en maintenant la proximité, afin d’améliorer leur efficacité.

Vous avez évoqué également la réduction des ressources financières des chambres, notamment, madame Vautrin, celles des chambres de commerce. La loi de finances de 2013 a plafonné ces ressources fiscales, mais elles avaient bénéficié d’une forte dynamique du fait de la progression, entre 2002 et 2012, de 19 % du produit de la taxe affectée, ce qui est important. Et dans le projet de loi de finances pour 2016, le plafond des ressources des chambres consulaires a été relevé de 20 millions d’euros.

Des remarques nous sont parvenues, notamment de la part de certaines chambres, mais cette nécessaire réorganisation permettra d’apporter des réponses au réseau consulaire, et aux chambres d’anticiper leur budget et d’améliorer leur efficience.

M. Habib, entre autres, a évoqué les emplois du réseau. Je voudrais citer à cet égard quelques chiffres précis : sur les 1 660 personnes dont l’emploi a été remis en cause, 68 % ont quitté leur poste dans le cadre d’une cessation de la relation de travail d’un commun accord, les autres étant partis dans le cadre d’un congé de transition, destiné aux agents pouvant prétendre au bénéfice d’une pension de retraite dans les trente-six mois suivant la date de départ. On a donc privilégié les départs volontaires.

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J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.

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L’article 1er ne fait l’objet d’aucun amendement. Je le mets aux voix.

L’article 1 est adopté.

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La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour soutenir l’amendement no 1 .

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L’amendement est simple. Il vise à réintroduire l’avis des chambres départementales en vue de la fixation du siège de la chambre de métiers et de l’artisanat de région ou de la chambre régionale de métiers et de l’artisanat. Il est important, notamment dans les plus grandes régions, de reconnaître l’implication des établissements locaux qui constituent la base du réseau.

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Avis défavorable. Les chambres de métiers et de l’artisanat qui le souhaitent pourront toujours délibérer à leur propre initiative sur la question du siège de la chambre de niveau régional à laquelle elles sont rattachées. Les comptes rendus de leurs assemblées générales sont transmis de manière systématique à l’autorité de tutelle. Introduire un avis des chambres départementales sur cette question irait à l’encontre de l’effort de simplification des procédures administratives.

Debut de section - Permalien
Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

J’émets également un avis défavorable. La suppression de l’avis des chambres départementales rattachées sur la fixation de la chambre de niveau régional a été demandée par le réseau des CMA. Cet avis n’étant que consultatif, il a été considéré que sa suppression constitue une simplification du droit. C’est pourquoi le Gouvernement l’a introduite dans le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances. Il n’y a pas lieu de revenir sur cette décision.

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Vous imaginez bien que, si je formule cette proposition, c’est qu’elle est demandée par des membres du réseau, pas parce que j’y tiens à titre personnel.

Mme la rapporteure objecte que les chambres départementales pourront toujours donner leur avis. Qu’est-ce qui leur permettra de le faire ?

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Le compte rendu de leurs délibérations est systématiquement adressé à la chambre régionale.

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Compte tenu de ces explications, souhaitez-vous maintenir l’amendement, madame Vautrin ?

L’amendement no 1 est retiré.

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La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour soutenir l’amendement no 2 .

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L’amendement vise à faire examiner par les chambres de métiers et de l’artisanat de région ou les chambres régionales de métiers et de l’artisanat les budgets déterminant les ressources qui leur sont affectées.

Il s’agit également de normer et de sécuriser les procédures d’élaboration budgétaire en instaurant un dialogue entre les différents niveaux de chambres de métiers et de l’artisanat.

J’insiste sur ce point. Les budgets et les actions sont le nerf de la guerre. Nous devons avoir la certitude qu’il existera un véritable dialogue au sein duquel chaque chambre, quel que soit son niveau, sera entendue, pour qu’elle puisse défendre ses projets et discuter des besoins financiers liés à ceux-ci.

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Avis défavorable. La précision figurait dans l’amendement du Gouvernement introduisant ces dispositions dans le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

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Elle a été supprimée à l’Assemblée nationale, dont la position a été suivie par le Sénat, au motif que cette précision introduisait un risque d’atteinte à l’autonomie des chambres départementales. La suppression avait reçu un avis favorable du Gouvernement. La commission a jugé qu’il n’y avait pas lieu de revenir sur cette décision.

Debut de section - Permalien
Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

Même avis.

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Madame Vautrin, souhaitez-vous maintenir l’amendement ?

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Il y a des jours où j’anticipe ou je suis l’avis du Gouvernement, ce qui prouve que rien n’est impossible, mais, en l’occurrence, je maintiens l’amendement.

L’amendement no 2 n’est pas adopté.

L’article 2 est adopté.

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La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 11 .

Debut de section - Permalien
Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

L’amendement vise à ratifier l’ordonnance du 26 novembre 2015 relative aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat, prise sur le fondement de l’article 136 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Il s’inscrit dans un contexte marqué par l’urgence de prendre des dispositions permettant la bonne réorganisation des réseaux de CCI et de CMA.

L’article 136 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République autorise le Gouvernement, dans un délai de huit mois à compter de la promulgation de la loi, à modifier par voie d’ordonnance les dispositions législatives faisant référence à la région, notamment afin d’adapter le territoire d’intervention et les modalités d’organisation, de fonctionnement et de financement de tout établissement ou organisme institué par la loi, ayant un périmètre d’intervention régional.

L’ordonnance du 26 novembre 2015 permet également au réseau des chambres de métiers et de l’artisanat de s’adapter à la nouvelle carte territoriale avant le 31 mars 2016.

L’amendement no 11 , accepté par la commission, est adopté.

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La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour soutenir l’amendement no 3 .

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Dans un souci de cohérence, je propose de donner à l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat – APCMA – un rôle d’appui dans la mise en oeuvre de la réforme.

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Avis défavorable. La disposition relève plus de l’organisation interne du réseau des CMA que de la loi. De plus, l’article 5-8 du code de l’artisanat prévoit déjà que l’assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat gère le fonds de financement et d’accompagnement du réseau, destiné à fournir aux chambres une ressource collective, par la mise en oeuvre des mutualisations et des restructurations obligatoires ou décidées par son assemblée générale.

La commission a estimé que ces dispositions étaient suffisantes pour garantir que l’APCMA assure un bon accompagnement du réseau des CMA dans la mise en oeuvre de la réforme.

Debut de section - Permalien
Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

Je suggère à Mme Vautrin de retirer l’amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’APCMA peut parfaitement mener une action de coordination dans la mise en place des nouvelles chambres de niveau régional. La disposition n’est donc pas nécessaire.

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Madame la rapporteure, l’ensemble du texte relève beaucoup plus du niveau réglementaire que législatif. Je ne crois donc pas très opportun de nous aventurer sur ce terrain.

Par ailleurs, madame la secrétaire d’État, sans faire du donnant-donnant, il me semble utile, pour que je retire l’amendement, que vous rappeliez l’importance de la coordination qu’effectue l’APCMA. Il faut mettre en avant ce rôle de coordination et d’accompagnement, qui est absolument nécessaire à l’heure de la réforme.

Debut de section - Permalien
Martine Pinville, secrétaire d’état chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

Je connais bien, comme vous, le rôle de coordination de l’APCMA, qu’il n’est nullement question de lui retirer. Elle pourra continuer à le jouer sans qu’il soit nécessaire de voter l’amendement.

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La secrétaire d’État n’a pas répondu !

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Souhaitez-vous maintenir l’amendement, madame Vautrin ?

L’amendement no 3 n’est pas adopté.

Le projet de loi est adopté.

La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à onze heures trente.

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L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement (no 3294).

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La parole est à Mme Joëlle Huillier, rapporteure de la commission mixte paritaire.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, la commission mixte paritaire réunie le 2 décembre dernier pour examiner le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement a adopté un texte commun aux deux assemblées parlementaires. Nous parvenons ainsi au terme d’un long processus législatif, commencé en juillet 2014 à l’Assemblée nationale.

À l’issue de la deuxième lecture au Sénat, 68 articles avaient été adoptés conformes. Parmi les 35 articles encore en discussion, la plupart ont fait l’objet d’apports rédactionnels des sénateurs, une quinzaine ont nécessité de véritables échanges entre les rapporteurs et seulement dix articles ont donné lieu à de nouvelles rédactions en CMP. Ces chiffres traduisent la grande convergence de vues entre les assemblées.

Je tiens à saluer la qualité du travail parlementaire et les enrichissements apportés par chacune des chambres. Nous avons, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, travaillé à améliorer le texte de ce projet de loi, tout en veillant à respecter l’intérêt de l’ensemble des acteurs.

Sur le volet de la prévention, nos débats avaient permis de renouveler le cadre juridique des résidences pour personnes âgées faiblement dépendantes, en distinguant trois catégories : les résidences autonomie à l’article 11, les copropriétés avec services, définies à l’article 15 et les résidences-services, à l’article 15 bis A.

Un dernier point de divergence demeurait au sujet du versement du forfait autonomie, qui doit financer des actions de prévention dans les résidences autonomie : le Sénat souhaitait que son versement soit étendu aux résidences autonomie qui bénéficient déjà du forfait pour soins courants. Or celui-ci a une finalité différente, puisqu’il permet de fournir des médicaments courants et un temps très réduit de soins. Nous avons finalement choisi de ne pas priver de cette nouvelle ressource les quelque trois cents résidences qui perçoivent déjà le forfait pour soins courants, l’écart étant minime – de l’ordre de 0,1 équivalent temps plein.

Sur le volet des droits et libertés des personnes accueillies dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, la CMP est revenue, à l’article 22, au texte de l’Assemblée nationale, s’agissant de la désignation de la personne de confiance par un âgé faisant l’objet d’une mesure de protection judiciaire. En effet, la rédaction du Sénat était plus restrictive puisqu’elle soumettait cette désignation à l’autorisation du juge, y compris pour les personnes qui font l’objet d’une mesure de tutelle limitée aux biens. Par ailleurs, elle ne mentionnait aucune règle pour les personnes sous curatelle et sous mandat spécial. Enfin, il y avait redondance avec l’article 455 du code de procédure civile concernant la motivation des décisions de justice.

Un autre volet important concernait l’aide à domicile et la création d’un service unique d’autorisation des services. L’article 32 bis, inséré par le Sénat en première lecture, puis entièrement réécrit par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, à l’initiative du Gouvernement, paraissait équilibré. En effet, la mise en place du régime unique d’autorisation des services d’aide à domicile intervenant auprès des bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie – l’APA – et de la prestation de compensation du handicap – la PCH – ne s’accompagnaient pas d’une obligation de tarification administrée. Le Sénat avait cependant apporté trois changements, en prévoyant l’information annuelle de l’assemblée délibérante sur les décisions prises par le président du conseil départemental, en indiquant que le cahier des charges devrait comporter un tarif national de référence et en reportant au 1er juillet 2016 la date d’entrée en vigueur du nouveau régime.

La commission mixte paritaire a supprimé l’instauration du tarif national de référence, qui aurait été complexe à mettre en oeuvre, étant donné les différences, parfois très importantes, qui peuvent exister d’un département à l’autre. Elle a préféré insérer dans le rapport annexé des tarifs nationaux de référence non opposables, établis à partir de l’étude nationale des coûts et des prestations, étude dont nous attendons la publication, madame la secrétaire d’État.

S’agissant de la date d’entrée en vigueur du nouveau régime, fixée à l’article 59, le Sénat s’est rangé à l’avis des députés, qui considèrent qu’un report au 1erjuillet serait dangereux : les services de l’État risqueraient d’être assaillis, d’ici là, de demandes d’agrément pour de nouveaux services ou d’extensions territoriales pour les services existants. On observe déjà une augmentation du rythme de ces demandes de la part de structures qui entament des démarches parfois précipitées auprès des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi – les DIRECCTE –, craignant de ne pas se voir délivrer l’autorisation une fois l’article 32 bis entré en vigueur. De même, les conseils départementaux risqueraient d’être débordés et de ne plus maîtriser, pendant six mois, l’évolution du nombre de services sur leurs territoires, alors même qu’il s’agit de l’un des objectifs recherchés par l’article 32 bis. L’entrée en vigueur du nouveau régime dès la promulgation de la loi, début 2016, protégera donc les départements.

S’agissant du volet financier du projet de loi, le Sénat a marqué son attachement à ce que soient indiquées de façon claire et précise les modalités d’utilisation du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie – la CASA. Nous nous sommes accordés pour ne pas revenir, à l’article 4, sur l’affectation d’au moins 28 % du produit de cette contribution aux conférences des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie. Parallèlement, nous avons maintenu le fléchage proposé à l’article 38 concernant la réforme de l’APA : 55,9 % du produit de la CASA y sera consacré en 2016, puis 70,5 % au cours des exercices suivants. Ces garanties quant à la contribution de l’État aux départements étant apportées, nous avons supprimé la sous-répartition des enveloppes budgétaires, proposée par le Sénat, qui rigidifiait inutilement l’allocation des moyens.

La commission mixte paritaire a cependant validé, à l’article 45 ter, la création d’une section consacrée au financement de l’aide à l’investissement au sein du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie – la CNSA. Cette proposition initiale du Sénat vise à garantir un soutien pérenne à l’investissement dans le secteur médico-social. La nouvelle rédaction de l’article prévoit que cent millions d’euros seront consacrés chaque année à l’aide à l’investissement sur la période 2016-2018, ce qui correspond à une année supplémentaire par rapport à l’engagement initial du Gouvernement de mettre en place un plan d’aide à l’investissement. Pour les années suivantes, il conviendra de déterminer le niveau de la ressource allouée en loi de financement de la Sécurité sociale.

Le dernier point de discussion concernait la gouvernance. Au niveau local d’abord, avec les conférences des financeurs instituées par l’article 3. Pour garantir le maintien de la participation financière de tous les membres de cette conférence, il est désormais explicitement précisé que ne pourront en faire partie que les personnes physiques ou morales qui contribuent effectivement au financement des actions. Nous avons souhaité ajouter cette précision pour faire en sorte que les acteurs, en particulier privés, ne puissent pas se désinvestir du financement des projets de prévention de la perte d’autonomie.

Au niveau national, ensuite, nos échanges ont bien sûr abordé la question du Haut conseil institué à l’article 46. La commission mixte paritaire a finalement convenu de rétablir la rédaction de l’Assemblée nationale instituant un Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, composé d’une formation plénière et de trois formations spécialisées dans ses différents champs de compétence. Nous avons en effet voulu que cet organe soit intergénérationnel. La nouvelle rédaction dispose, conformément aux souhaits des sénateurs, que la formation spécialisée dans l’âge « mène une réflexion sur l’assurance et la prévoyance en matière de dépendance » et qu’elle se rapproche du Conseil national consultatif des personnes handicapées sur les aspects communs des politiques en faveur de l’autonomie, à l’image de ce que feront les conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie – les CDCA – au niveau local.

Tels sont les éléments sur lesquels les membres de la commission mixte paritaire se sont accordés et qui me permettent aujourd’hui de vous présenter une version commune et finale de ce projet de loi attendu par des millions de personnes âgées et leurs familles depuis tant d’années. Bien sûr, nous aurions aimé avoir plus d’argent. Bien sûr, nous aurions aimé pouvoir régler la question du reste à charge en établissement. Mais cela aurait nécessité quinze fois plus de moyens et il n’est personne, sur tous les bancs de cet hémicycle, qui ignore que nous n’en disposons pas actuellement.

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C’était aussi vrai sous le mandat précédent !

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Mais les ressources dont nous disposons déjà grâce à la CASA permettront de financer et de mieux coordonner les actions de prévention au niveau local, de la préparation au départ à la retraite jusqu’au repérage des situations de fragilité, en passant par la lutte contre l’isolement des personnes âgées. Il permettra aussi de financer davantage d’heures d’aide à domicile et de diminuer le reste à charge pour plus de 700 000 personnes. Il permettra, enfin, de soutenir les quatre millions et demi de personnes qui aident une personne âgée à domicile, ces proches aidants qui seront enfin reconnus par la loi et qui pourront bénéficier d’une aide au répit pouvant atteindre 500 euros, afin de financer une prise en charge temporaire de la personne aidée ou des heures d’aide à domicile supplémentaires, afin qu’ils puissent reprendre leur souffle.

Pour ces raisons, je vous invite, mes chers collègues, à adopter les conclusions de la commission mixte paritaire, non sans avoir remercié l’ensemble des personnes qui, depuis trois ans, participent à l’élaboration et à l’examen de ce projet de loi : d’abord notre collègue Michèle Delaunay, qui a mené la concertation et forgé le texte initial, ainsi que Martine Pinville, qui m’a précédé dans la fonction de rapporteur, mais aussi Laurence Rossignol et son cabinet, avec qui le dialogue a toujours été constant et productif – soyez-en à nouveau remerciés – ; mes collègues du Sénat, Georges Labazée et Gérard Roche, qui ont su faire preuve d’écoute et d’ouverture d’esprit, ainsi que tous les parlementaires et l’ensemble des associations et représentants professionnels qui ont apporté leur contribution, de même – il ne faut jamais les oublier – que les administrateurs de notre commission, toujours disponibles et efficaces.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.

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Laurence Rossignol, secrétaire d’état chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie

Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, des droits sociaux nouveaux, des réponses originales et adaptées à des besoins qui évoluent, une mobilisation de l’ensemble de la société, des orientations qui donnent une vision de l’avenir : voilà un texte porteur d’avancées plus que jamais attendues par nos concitoyens. En des temps où la défiance peut être de mise, il est, je crois, particulièrement important de rappeler que ce projet de loi répond à un engagement présidentiel, un engagement tenu, qui permettra aux Français confrontés à leur propre perte d’autonomie ou à celle d’un proche de mesurer concrètement les effets de cette réforme sur leur quotidien.

Le Gouvernement a donc mené, dès 2012, sous l’impulsion de Michèle Delaunay, à qui je veux encore rendre hommage ici, une large concertation qui a permis de construire et d’alimenter le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement avec l’ensemble des acteurs concernés. Ce projet de loi est également l’aboutissement d’un travail parlementaire soutenu qui a permis de l’enrichir et de le perfectionner au cours des dix-huit derniers mois. Je tiens évidemment à saluer ici le travail mené par chacun d’entre vous. Je souhaite tout particulièrement souligner l’investissement remarquable de Joëlle Huillier, rapporteure de ce texte au nom de la commission des affaires sociales, et avant elle, celui de Martine Pinville, que le Président de la République a appelée à d’autres fonctions, ainsi que celui de l’ensemble des députés de la commission des affaires sociales : je citerai en particulier sa présidente, toujours attentive à ce texte, ainsi que Christophe Sirugue, Bernadette Laclais ou encore Bérengère Poletti, avec lesquels nous avons toujours pu travailler, échanger et construire. Soulignons également le travail mené en première lecture par la commission des affaires économiques saisie pour avis ainsi que par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances.

Ce parcours parlementaire nous a permis de donner le jour à un texte fort, qui marquera l’histoire de la prise en charge collective de la perte d’autonomie, et qui restera le témoin d’un engagement politique soutenu en faveur du « bien vieillir » et de la protection des plus vulnérables. Cet engagement se traduit par un effort financier important : plus de sept cents millions d’euros viendront financer les mesures du présent projet de loi après leur montée en charge.

Je ne vous présenterai pas à nouveau l’ensemble des dispositions de ce texte, que vous connaissez désormais parfaitement. Je voudrais simplement souligner toute l’importance et la pertinence du travail parlementaire, dont témoignent les apports majeurs de l’Assemblée à ce texte. Ne pouvant les recenser de façon exhaustive, je n’en citerai que deux exemples.

En première lecture, vous avez institué des droits nouveaux en faveur des personnes âgées immigrées avec la création d’une procédure d’acquisition de la nationalité française par déclaration, sur la base du rapport d’information réalisé par MM. Alexis Bachelay et Denis Jacquat. Face aux difficultés que rencontrent ces personnes âgées, on ne peut rester ni indifférent, ni inactif. Denis Jacquat l’a rappelé à l’Assemblée, ceux qu’on appelle les chibanis sont venus pour construire la France rurale et industrielle. Après plusieurs décennies passées dans notre pays, certains ont demandé à plusieurs reprises la nationalité française, sans succès. Conscient de l’importance pour notre République de reconnaître ces personnes qui souhaitent devenir françaises, le Président de la République a annoncé cette mesure lors de l’inauguration du musée de l’histoire de l’immigration.

Sur le volet de l’aide à domicile, vous avez soutenu et nourri la refondation du secteur, qui, sous des aspects particulièrement techniques, renvoie à un sujet profondément humain : l’accompagnement des publics fragiles. Vous avez, pour cela, participé à la construction de la réforme des régimes juridiques des services d’aide et d’accompagnement à domicile intervenant comme prestataires auprès des publics fragiles. Grâce aux échanges et aux amendements déposés, le dispositif proposé par le Gouvernement a pu être enrichi de façon à assurer une souplesse et des garanties supplémentaires en termes de transparence et d’égalité de traitement pour le secteur, tout en positionnant clairement les départements en pilotes de la structuration de ces services médico-sociaux sur leur territoire, sans faire peser sur eux des charges supplémentaires. Il permet ainsi l’accès et la lisibilité de l’offre de services aux personnes âgées, où qu’elles se trouvent sur le territoire.

In fine, ce qui nous rassemble autour de ce texte, c’est la conviction que nous devons aujourd’hui moderniser et élargir nos protections collectives, au moment où notre société doit relever le défi du vieillissement. Ce consensus s’est directement illustré dans le texte soumis aux parlementaires des deux chambres dans le cadre de la commission mixte paritaire et déjà adopté conforme aux deux tiers.

Le travail des rapporteurs a été remarquable et mené en très bonne intelligence, dans une véritable démarche d’échanges qui a démontré toute sa valeur. Leur implication a permis d’aboutir, au fil des accords, à un texte équilibré au regard des choix respectifs des deux assemblées.

Je me félicite à cette occasion du choix de créer un Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, qui permettra une réflexion prospective intergénérationnelle, ainsi que de l’entrée en vigueur dès le 1er janvier 2016 du régime d’autorisation rénové, qui offrira davantage de lisibilité au secteur et aux départements.

Je m’en remets également à vos conclusions concernant l’affectation de cent millions d’euros par an à l’aide à l’investissement dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – les EHPAD. Ce soutien renouvelé à l’investissement permettra de réduire le reste à charge des résidents, dont nous mesurons les besoins actuels.

La question de l’affectation de la CASA aux différentes mesures de ce projet de loi a également trouvé une juste réponse. Les parlementaires que vous êtes, forts de leurs expériences locales, avaient souhaité sécuriser encore davantage la compensation assurée aux conseils départementaux au titre des réformes de l’État. Le Gouvernement avait déjà porté une vigilance particulière à ce sujet en affectant, dans le projet initial, une fraction de la CASA à la compensation de la réforme de l’ allocation personnalisée d’autonomie – l’APA –, incluant également le droit au répit.

Vous avez souhaité aller plus loin, en lien avec les sénateurs, en affectant une part du produit de la CASA à la prévention de la perte d’autonomie. Vous avez également concilié cette sécurisation avec d’autres exigences, notamment celle d’une souplesse de gestion pour les départements en supprimant, à l’article 38, la sous-répartition aux différents volets de la réforme de l’ APA.

Grâce au travail que vous avez mené, la loi pourra être, comme s’y sont engagés à plusieurs reprises le Premier ministre et le Président de la République, votée et promulguée avant la fin de cette année.

L’entrée en vigueur de certaines dispositions dépendent de textes d’application qui sont, pour les principaux, déjà élaborés et d’ores et déjà soumis aux consultations obligatoires. Elles entreront en vigueur, si ce n’est au 1er janvier, du moins au cours des premiers mois de l’année 2016, dès la publication des textes.

L’enjeu, tant pour le Gouvernement que pour les élus que vous êtes, sera ensuite de diffuser sur le terrain notre connaissance du texte et des dispositions qu’il contient, afin que chaque citoyen prenne connaissance des droits nouveaux auxquels il est désormais éligible – je pense ici tout particulièrement à la revalorisation de l’APA, au droit au répit ou encore à l’adaptation des logements –, et afin que chaque acteur puisse s’approprier les nouveaux dispositifs, qu’il s’agisse de la conférence des financeurs, de la réforme des régimes juridiques ou de la tarification des EHPAD.

Grâce au projet de loi, nous démontrons que la protection sociale et la solidarité continuent de progresser. Grâce à ce projet de loi, nous donnons les moyens aux personnes âgées d’anticiper la perte d’autonomie et d’y faire face lorsqu’elle survient. Grâce à ce proje de loi, nous reconnaissons le rôle de ces millions de proches aidants et contribuons à leur apporter un souffle nécessaire à leur bien-être. Grâce à ce projet de loi, nous construisons une société plus juste, animée par le souci de l’autre, dans le respect de son histoire, de ses droits et de ses aspirations. Grâce à ce projet de loi, nous portons un regard plus ouvert sur la vieillesse, la constituant comme une période de la vie rythmée par la participation citoyenne et la création de lien social. Grâce à ce projet de loi, nous mobilisons l’ensemble de la société pour qu’elle s’adapte, pour qu’elle intègre, pour qu’elle échange avec ses aînés.

Pour toutes ces raisons, ce texte constitue une véritable avancée pour la vie de nos concitoyens et l’avenir de notre société. C’est pourquoi je vous invite à adopter les conclusions de la commission mixte paritaire qui vous sont soumises aujourd’hui.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Dans la discussion générale, la parole est à M. Christophe Sirugue.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, je ne peux m’empêcher en entamant ce propos, de me réjouir, comme tout à l’heure notre collègue Catherine Vautrin, de l’importance de la représentation féminine, puisque nous avons la chance d’avoir des présidentes, une secrétaire d’État, une rapporteure. C’est un indicateur intéressant…

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Cette dominance féminine n’est pas forcément un bon signe !

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…même si en ma qualité de vice-président de la délégation aux droits des femmes, je pense qu’il y a encore beaucoup à faire au sein de cette assemblée.

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M’exprimant le 29 octobre dernier devant notre assemblée, dans le cadre de la deuxième lecture de ce texte, j’évoquais l’impatience d’un certain nombre d’entre nous, qui souhaitaient une entrée en vigueur rapide des mesures qu’il contient.

De ce point de vue, le constat d’une CMP conclusive, malgré l’abstention des seuls députés Les Républicains puisque la majorité du Sénat a apporté son soutien aux conclusions de cette CMP, est un excellent signe. C’est un signe attendu par nos concitoyens, un signe qui montre aussi combien il est important d’avoir en tête ce qu’est le quotidien des personnes auxquelles ces dispositifs sont destinés.

Ainsi, les conclusions qui viennent de nous être présentées par notre rapporteure Joëlle Huillier, dont je veux à mon tour, après les rapporteurs du Sénat, saluer l’investissement, les compétences et la volonté d’aboutir, sont porteuses de messages forts.

Ainsi la revalorisation de l’APA constitue un message de compréhension et de soutien face à la charge que représente la dépendance. C’est un effort significatif – environ sept cents millions d’euros – qui permettra de réduire un reste à charge dont le poids entraîne parfois le renoncement à l’accompagnement – comme chacun de nous a pu le constater dans sa permanence.

C’est également un message de reconnaissance avec, pour la première fois, des mesures spécifiques en direction des aidants. Chacun sait la part qu’ils prennent dans le quotidien de nos aînés et combien l’épuisement les menace.

Ce texte est un message de transparence, notamment en matière de tarification des établissements, où la régulation est indispensable. C’est un message d’encouragement pour les associations oeuvrant de ce secteur, dont on sait qu’elles interviennent beaucoup à domicile. Leur professionnalisation et leur accompagnement sont un enjeu essentiel et de ce point de vue ce projet de loi apporte des réponses indispensables.

Ce texte est un message de responsabilité en faveur des politiques de prévention. Elles sont essentielles pour relever le défi que le développement de l’accès aux technologies nouvelles contribue à améliorer l’accompagnement et la sécurisation. Elles sont essentielles face à ce fléau qu’est l’isolement des personnes âgées. Elles sont essentielles aussi pour lutter contre ce drame que constitue le suicide de nos aînés.

Enfin ce texte contient un message de dignité, en reconnaissant et en renforçant les droits des personnes âgées, à domicile comme en établissement. En la matière des clarifications étaient indispensables.

Je terminerai mon propos par deux remarques, la première à destination de celles et ceux qui ne soutiendraient pas ce texte au prétexte qu’il n’irait pas assez loin : chaque avancée est importante et ce texte en compte un certain nombre – personne ne le nie. Mais si nous souhaitons assurer une plus grande justice face à la charge de la dépendance et au problème des tarifs élevés de nos établissements, il faudra plus que des améliorations ou des ajustements. Nous devrons un jour assumer le fait que la solidarité nationale est la seule réponse possible. Cela ne nous empêche pas de reconnaître qu’il y a dans ce texte les avancées significatives et les messages que je viens d’évoquer.

Ma seconde remarque, madame la secrétaire d’État, est relative au choix qui a été fait de prélever cinquante millions d’euros sur les ressources de la CNSA pour aider les départements en difficulté. Je ne nie pas la réalité de ces difficultés – je la nie d’autant moins que M. le Premier ministre m’a chargé d’une mission sur les minima sociaux – mais je regrette la méthode. Je crois que nous avons besoin de tous nos moyens pour soutenir l’investissement et l’amélioration des pratiques dans le domaine du grand âge.

Néanmoins je n’oublie pas les différents messages que j’ai évoqués au début de mon propos, qui m’amèneront sans hésitation, comme d’ailleurs l’ensemble de mes collègues du groupe SRC, à voter en faveur des conclusions de cette CMP.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous voici aujourd’hui au bout d’un parcours parlementaire particulièrement long : je rappelle que la rapporteure pour ce texte – Mme Pinville à l’époque, – a été nommée en avril 2014 par la commission des affaires sociales. Cette dernière version du projet de loi a fait l’objet d’un accord de la commission mixte paritaire la semaine dernière.

Bâti sur trois grands principes – anticiper, adapter, accompagner –, ce projet de loi est un texte de compromis, qui comporte des mesures intéressantes sur la gouvernance, la revalorisation des plans d’aide à domicile, le logement. La question des aidants est aussi abordée, ce que nous saluons.

Une enveloppe de quatre-vingt millions d’euros a été prévue pour financer une semaine de prise en charge d’une personne dépendante, afin que ses proches puissent souffler. Cela correspond à environ 160 000 aidants soutenus. C’est un bon début, mais ce chiffre est à comparer aux 4,3 millions d’aidants familiaux qui répondent, le plus souvent seuls, aux besoins de leurs proches.

Deux aidants sur dix, soit environ 690 000 personnes, ressentent aujourd’hui une charge importante, synonyme de fatigue morale ou physique. Parmi eux, 56 % déclarent que le fait d’aider affecte leur santé. Ils sont également 18 % à déclarer avoir renoncé, au cours des douze derniers mois, à des soins alors qu’ils en ressentaient le besoin. Près d’un aidant sur deux est atteint de dépression au bout de deux à trois ans, et des études ont montré que 30 % des proches qui accompagnent une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer décèdent avant elle. Le chemin à parcourir reste encore important sur le sujet, et les aidants sont un des défis de notre politique publique du vieillissement.

Le financement de ces mesures est assuré par la CASA, payée par les retraités imposables depuis 2013. Elle rapporte aujourd’hui plus de sept cents millions d’euros. C’est une ressource dynamique car les retraités sont de plus en plus nombreux. Il est impossible cependant de ne pas mentionner le détournement de plus de 1 milliard d’euros du produit de cette taxe. Il est temps que ces ressources servent à ce pour quoi cette taxe a été créée, c’est-à-dire l’accompagnement du vieillissement.

L’accompagnement du vieillissement de notre population doit être au centre de nos politiques publiques. Les chiffres sont éloquents : selon l’INSEE, en France, 22,3 millions de personnes seront âgées de soixante ans ou plus en 2050, contre 12,6 millions en 2005, soit une hausse de 80 % en quarante-cinq ans. Quant aux plus de quatre-vingt-dix ans, qui sont 500 000 à l’heure actuelle, ils devraient être sept fois plus nombreux en 2050.

Si aucune mesure d’envergure n’est prise pour nous préparer à cette mutation démographique, elle pourrait s’accompagner d’importants risques économiques et sociaux, comme la forte augmentation des dépenses sociales, des conflits générationnels et une augmentation de la pauvreté chez les plus âgés. Pourtant l’accompagnement du vieillissement est à notre portée, à condition de modifier nos modes de vie, d’habitat, de conditions d’emploi et de santé. C’est aussi une réforme culturelle.

C’est ce que propose en partie ce texte, même si nous regrettons qu’il fasse l’impasse sur plusieurs sujets, notamment sur le financement. Tous les acteurs de la politique publique du vieillissement sont unanimes : nous sommes encore loin des besoins réels.

Ce projet de loi n’apporte aucune réponse au problème pourtant majeur du reste à charge supporté par les familles pour leurs proches accueillis en établissement. Le sujet est à venir et les financements avec. Je rappelle qu’une personne âgée résidant en EHPAD doit sortir de sa poche entre 2 000 et 3 000 euros par mois, parfois plus, notamment en région parisienne, alors que la retraite moyenne des femmes – qui sont les plus concernées par ce sujet – est de 1 000 euros.

Vous avez décidé de privilégier le maintien à domicile, ce qui est compréhensible puisque les Français souhaitent rester chez eux le plus longtemps possible. Malheureusement, cela n’est pas toujours envisageable : la maladie d’Alzheimer et d’une manière générale les maladies de dégénérescence cérébrale nous contraignent souvent, lorsque l’état du malade se dégrade, à envisager l’admission en EHPAD.

La prise en charge de ces malades est incomplète, notamment dans le cadre du quatrième Plan Alzheimer, présenté le 18 novembre 2014. Intitulé « Plan maladies neurodégénératives 2014-2019 », il déçoit aujourd’hui les associations concernées par sa mise en oeuvre. Son application est repoussé en 2016, et ce retard entraîne un décalage entre ses objectifs et la réalité sur le terrain. En outre l’enveloppe consacrée au nouveau Plan Alzheimer est limitée à 470 millions d’euros, alors que 650 millions d’euros ont été effectivement utilisés pour mettre en oeuvre le plan précédent.

Ce budget doit par ailleurs couvrir les besoins d’un plus grand nombre de malades dont l’accompagnement diffère dans la pratiqu,.

Ce texte ne prévoit donc pas un financement global et cohérent de la prise en charge de la dépendance, pourtant capital, alors même que la charge supportée par les départements s’accroîtra.

Deuxièmement, rappelons que le montant total de l’effort public consacré à la dépendance est estimé à plus de 22 milliards, soit 1,1 % du PIB. Principalement supporté par les organismes de Sécurité sociale, les départements et l’État, on estime que ce coût pourrait s’élever à 30 milliards à l’horizon 2025, soit une hausse de près de 40 % en dix ans, sans même que les droits des personnes soient renforcés.

Le financement de la dépendance, notamment de l’aide à domicile, est très fragile et nécessitera d’actionner de nouveaux leviers financiers pour faire face à l’augmentation de la population, d’autant plus que ce texte augmente les droits des plus dépendants, relevant des groupe iso-ressources, ou GIR,1 et 2, pour un montant de 375 millions d’euros annuels, et institue un soutien aux aidants par la création du droit au répit.

Pour toutes ces raisons, le financement proposé se révélera très vite insuffisant, d’autant plus que les compensations par l’État des charges transférées aux départements sont déjà très en deçà des besoins.

Vous savez, madame la secrétaire d’État, combien les départements sont sollicités. Déjà en souffrance budgétaire, victime d’un redoutable effet de ciseaux et principaux contributeurs de l’APA, ils auront désormais la charge des procédures d’autorisation. Confrontés à des mesures inflationnistes, ils auront besoin d’une ingénierie et d’un personnel plus importants pour instruire les demandes, délivrer les autorisations mettre en place des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, ou CPOM, et pour recalculer les plans d’APA en cours. Dans mon département, ce sont 6 400 plans qui devront être rapidement recalculés et revalorisés.

Ces nouvelles charges inquiètent les services du conseil départemental des Ardennes : selon ses calculs, 500 000 euros supplémentaires seront nécessaires pour financer la nouvelle aide aux aidants et 4,5 millions supplémentaires pour la réévaluation des GIR en année pleine. Actuellement, le département des Ardennes dépense 28,740 millions pour l’aide à domicile des personnes âgées dépendantes, la compensation n’étant que de 9,290 millions. L’application de ce texte entraînera donc un surcoût de 5 millions en année pleine.

En revanche, le niveau de la compensation complémentaire qui sera financée par la CASA pour leur permettre de faire face à ces nouvelles dépenses est inconnue à ce jour, de même que son mode de calcul. Le conseil départemental ignore également ce que lui coûtera le volet prévention alors que cette information lui serait utile.

Vous le voyez, madame la secrétaire d’État, ces modifications entraînent des charges très lourdes pour les départements. Quand pourrez-vous leur dire à combien s’élèveront les compensations proposées ? Que prévoyez-vous de faire pour soutenir l’ingénierie de départements, eux qui sont dans le même temps, incités par l’État lui-même à réduire les frais de personnel ? Si je vous demande ces précisions, c’est pour éclairer des acteurs locaux qui liront le compte rendu de nos débats et devront appliquer concrètement, sur le terrain, ce projet de loi.

Entre contraintes économiques et exigences sociales – vous avez raison, monsieur Sirugue – la voie est étroite pour qui veut trouver une solution pour des départements déjà soumis à une réduction de leur dotation budgétaire et à une compensation très dégradée de leurs dépenses sociales.

Avant de conclure, je veux à mont tour saluer le travail constructif réalisé par vous et par votre cabinet, madame la secrétaire d’État, ainsi que par les deux rapporteures , Mme Pinville et Mme Huillier. Néanmoins, parce que ce texte ne tient pas compte de la « révolution de l’âge », le groupe Les Républicains s’abstiendra.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, chers collègues, nous voici réunis aujourd’hui afin d’étudier le texte sur l’adaptation de la société au vieillissement issu des travaux de la commission mixte paritaire, qui a abouti le 2 décembre dernier.

Enfin ! pourrais-je m’exclamer, car l’examen de ce projet de loi, traduction d’un engagement de François Hollande avait déjà pris près d’un an de retard alors qu’il s’agit de « réformer la dépendance pour mieux accompagner l’autonomie ».

Les articles qui restaient en discussion ont donc fait l’objet d’un consensus lors de la CMP. Pour une vingtaine d’entre eux, le texte qui nous est soumis reprend la rédaction votée au Sénat et, pour une dizaine, celle retenue en CMP.

La navette parlementaire étant ce qu’elle est, le groupe Radical, Républicain, Démocrate et Progressiste déplore qu’on ait dû attendre plus d’un an avant de pouvoir enfin aboutir à un vote définitif sur ce projet de loi si important. Dès lors, madame la secrétaire d’État, nous comptons sur vous pour publier rapidement les décrets d’application nécessaires à la mise en oeuvre de ces politiques publiques tant attendues. Cela fait en effet des années que les personnes âgées, leurs familles et l’ensemble des professionnels du secteur attendent ce texte majeur qui nous concerne toutes et tous, directement ou indirectement.

Rappelons qu’au début du siècle passé, seuls quatre Français sur dix atteignaient l’âge de soixante-cinq ans. Cent quinze ans plus tard, notre pays compte 1,4 million de personnes âgées de quatre-vingt-cinq ans et plus et devrait en compter 5 millions en 2060.

En outre, ce sont environ 4,3 millions de personnes qui aident un proche dépendant, prise en charge intensive qui peut parfois se solder par la nécessité de réduire son temps de travail ce qui – je tiens à le rappeler – implique une baisse des revenus.

Un rapport d’information de la délégation aux droits des femmes datant de juillet 2014 met en avant la nécessité de prendre en compte le fait que les femmes sont les premières concernées, pour deux raisons évidentes : vivant plus longtemps que les hommes, elles sont de ce fait plus touchées par la perte d’autonomie ; elles se mobilisent davantage pour aider leurs parents ou leur conjoint. Cela est encore plus vrai pour les métiers de l’autonomie, qui sont presque exclusivement exercés par des femmes.

Au-delà des chiffres, c’est de la condition humaine qu’il s’agit et de la capacité de notre organisation sociale d’ offrir à chacun la possibilité de vivre dignement l’avancée en âge, quel que soit son état physique ou mental.

Je me permets de rappeler les propos tenus par le Premier ministre lors de l’ouverture de la concertation sur ce projet de loi, le 29 novembre 2013 : « C’est un des grands chantiers du quinquennat que nous lançons aujourd’hui. Non seulement parce qu’il concerne chaque Français, non seulement parce qu’il nous touche dans notre vie familiale mais parce qu’il est au coeur du modèle de société que nous voulons construire. Un modèle de société plus fraternel, plus solidaire ».

Pour que vieillir ne soit pas synonyme de solitude et d’abandon, il faut être ambitieux et se donner les moyens de mener des politiques publiques résolument solidaires afin d’accompagner nos seniors le mieux possible, dans le respect de leur choix de vie. Dès lors, le véritable enjeu n’est pas de vieillir le plus longtemps possible mais de vieillir de façon autonome le mieux possible, quel que soit l’endroit dans lequel on se trouve.

On a trop souvent eu tendance à réduire la problématique du vieillissement à celle de la dépendance, qui oblige à recourir à des tiers pour assumer les actes de la vie quotidienne. Je précise que l’état dit de « dépendance » concerne 8 % des personnes de plus de soixante ans.

J’ajoute que, le plus souvent, la personne âgée est obligée de s’adapter à un environnement défavorable qui contribue à accroître sa perte d’autonomie.

Nous avons rappelé tout cela lors des précédentes lectures mais ce texte n’en demeure pas moins un pas important dans la prise en compte des difficultés liées au vieillissement. Le titre du projet de loi est à ce titre tout un symbole puisque ce texte adopte une approche inversée qui ambitionne d’embrasser l’ensemble des politiques publiques relatives à la dépendance.

C’est donc à la société dans son ensemble de s’adapter pour garantir au fur et à mesure de l’avancée en âge des conditions de vie, de logement et de déplacement qui permettent à une personne âgée confrontée aux effets de la dépendance de rester autonome le plus longtemps possible. Donner de l’autonomie à une personne, c’est lui donner les moyens d’assumer ses choix seule, malgré son handicap ou sa dépendance.

Avec ce projet de loi, la politique de l’âge embrasse toutes les dimensions de l’avancée en âge en confortant le choix d’un financement solidaire de l’accompagnement de la perte d’autonomie fondé sur une ressource dédiée, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie – CASA.

Nous nous étions rendu compte que pendant plusieurs années consécutives le produit de cette taxe avait été réaffecté au Fonds de solidarité vieillesse, le FSV. Face à la protestation des acteurs, 130 millions de crédits prélevés sur les taxes instituées en faveur de la CNSA ont finalement, et heureusement, été réaffectés en faveur des personnes âgées dépendantes.

Le Gouvernement s’est engagé à affecter la totalité du produit de la CASA à la mise en oeuvre du présent projet de loi dès son entrée en vigueur. Cependant, le produit de la CASA devrait rapporter 650 millions – ou devrais-je dire qu’il ne devrait rapporter « que » 650 millions ?

Toutefois, même si cette ressource est dynamique, reconnaissons-le, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques – la fameuse DREES – a estimé à 35 milliards la prise en charge publique de la perte d’autonomie à l’horizon 2060 alors qu’en 2011 le coût total de la prise en charge de la perte d’autonomie était de 21 milliards pour les pouvoirs publics et de 7,2 milliards pour les ménages, soit 1,41 % du PIB – la moyenne des pays de l’OCDE se situe quant à elle à 1,6 %, toujours d’après le même rapport de la DREES de février 2014. Cela représente donc un peu plus du double d’ici à 45 ans. Dès lors, ce texte est un premier pas dans la prise en compte du vieillissement.

Cet écart de financement, bien connu, ne soulève-t-il pas inévitablement la question de la nécessité de prendre en compte un cinquième risque, en ayant présent à l’esprit que celui-ci n’implique pas uniquement d’inventer un nouveau mode de financement mais de nouvelles façons de vivre en collectivité ?

Madame la secrétaire d’État, la majorité de notre groupe estime que ce texte est un pas dans la bonne direction. Si nous jugeons sa portée modeste dans le contexte économique actuel, il a l’avantage de conforter les dispositifs existant tout en ouvrant les portes d’une appréhension réelle des problèmes qui se poseront dans les années à venir.

Le groupe des radicaux de gauche et apparentés votera donc en faveur du texte issu de la CMP.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission – chère Catherine –, madame la rapporteure, mes chers collègues, garantir une prise en charge de qualité, simplifier le parcours de prise en charge auquel les personnes dépendantes sont confrontées, mieux accompagner les familles ainsi que les aidants sont autant d’enjeux auxquels nous étions amenés à répondre dans ce projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement.

« Peu de gens savent être vieux », disait La Rochefoucauld. C’est notre rôle à nous, représentants de la nation, législateurs, que d’accompagner nos aînés.

D’ici 2060, mes chers collègues, la population des personnes âgées de plus de 85 ans devrait être multipliée par quatre. La qualité de notre modèle de solidarité se mesurera indéniablement à l’aune de sa capacité à garantir la dignité des personnes âgées dépendantes.

Le texte qui nous est présenté aujourd’hui est loin d’être idéal et ne répond pas à l’immense défi que représentent le grand âge et la perte d’autonomie. Vous ne m’en voudrez pas, madame la secrétaire d’État de dire que ce n’est pas la grande loi sur la dépendance que nous attendions.

Le travail commun de nos assemblées auquel j’ai participé lors de la réunion de la commission mixte paritaire a permis, certes, d’améliorer certains aspects du texte mais, dans ce domaine comme dans d’autres, il est difficile de se satisfaire d’un accord aussi a minima.

Tout d’abord, la prise en charge des personnes âgées aurait exigé des moyens d’une toute autre ampleur que ceux prévus ici.Le vieillissement de notre population engendrera des dépenses supplémentaires de l’ordre de 1,5 % du PIB d’ici 2025. Déjà, en 2011, les dépenses publiques de prise en charge de la perte d’autonomie ont atteint plus de 21 milliards. A l’horizon de 2060, ces dépenses devraient être de 35 milliards.

Chacun, dans cet hémicycle, peut s’accorder sur le fait que ce texte ne traite pas suffisamment de la question du financement de la perte d’autonomie, c’est peu de le dire.

Je tiens tout de même à saluer la rédaction de l’article 45 ter retenue par la CMP, grâce au travail de notre rapporteure et de ses homologues du Sénat. En effet cet article crée au sein de la CNSA une section permanente consacrée au soutien à l’investissement dans le secteur médico-social. Cent millions d’euros par an lui seront consacrés jusqu’en 2018.

J’espère, mes chers collègues, que cette mesure permettra de diminuer le reste-à-charge pour les personnes résidant en EHPAD. J’ai bien noté que nous devrons déterminer en PLFSS la ressource qui sera allouée définitivement au soutien à l’investissement, mais il s’agit d’un premier pas qui va plutôt dans la bonne direction.

Malgré cette mesure bienvenue, la question du financement et du reste à charge reste entière. Les ménages acquittent au moins 7 milliards d’euros par an, en complément des ressources fournies par la solidarité nationale, pour la couverture des frais liés à la dépendance. L’adoption de ce projet de loi, mes chers collègues, laissera malheureusement sans réponse les défis liés au pouvoir d’achat.

Je souhaiterais, madame la secrétaire d’État, évoquer l’article 32 bis, sur lequel se sont cristallisés nos débats de la seconde lecture. La procédure de l’agrément disparaîtra au profit d’une autorisation, délivrée par les conseils départementaux, et ce dès la promulgation de la loi. Lors de la nouvelle lecture, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants avait déposé un amendement visant à supprimer cet article et à maintenir l’agrément, considérant qu’il est le levier essentiel pour permettre l’essor du secteur des services à la personne, auquel notre groupe est très attaché. J’espère que le dispositif retenu par cette majorité ne freinera pas le développement de ce secteur, qui crée de très nombreux emplois dans notre pays.

J’appelle aussi d’ores et déjà votre attention sur le risque de perdre le contrôle sur la qualité de services. Les personnes dont on parle sont, pour la plupart, des personnes fragiles et vulnérables. Il ne faudrait pas que l’extinction de l’agrément permette à n’importe qui de se prétendre compétent dans ce domaine. Loin de moi l’idée d’être alarmiste, mais vous n’êtes pas sans savoir combien les risques de maltraitance sont réelles, dans notre pays comme ailleurs.

Mes chers collègues, nous avons eu l’occasion de le répéter à de multiples reprises, ce texte n’est nullement à la hauteur des enjeux. Pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants, ce projet de loi devait poser les jalons d’une réforme structurelle de la prise en charge de la perte d’autonomie, articulée autour de trois piliers.

Il convenait d’abord, selon nous, d’adopter une approche solidaire et éthique de la question de la prise en charge des personnes dépendantes, incluant les personnes handicapées, et de mener une réflexion globale sur les notions de perte d’autonomie et de dépendance. Sur ce point, nous aurions souhaité que les compensations pour la perte d’autonomie ne soient pas soumises à des barrières d’âge. Nous proposions d’harmoniser l’évaluation des situations de dépendance à travers la mise en place d’un référentiel d’éligibilité unique, qui aurait permis d’intégrer les situations des handicapés, en fonction du degré de dépendance de la personne. Une telle mesure aurait par ailleurs permis de réduire les inégalités sociales et territoriales, alors même que de fortes disparités demeurent en matière de gestion des aides au niveau départemental.

Je le répète : un projet de loi sur le vieillissement ne peut faire l’impasse sur la question du financement. Face aux difficultés que connaissent de nombreux conseils départementaux, notamment du fait de la montée en charge de l’APA, nous souhaitions affecter une fraction de la CSG aux départements et créer une taxe exceptionnelle, assise sur le produit brut des jeux. Depuis sa création, le coût de l’APA n’a cessé d’augmenter. Il représente aujourd’hui 5,5 milliards d’euros et il devrait encore doubler dans les trente prochaines années, pour atteindre 11,2 milliards à l’horizon 2040.

Enfin, nous avions imaginé un système assurantiel universel et obligatoire, qui aurait permis de couvrir réellement le risque lié à la perte d’autonomie. Il aurait concilié solidarité, à travers la mutualisation des risques, et saine gestion des finances publiques, grâce à un dispositif de financement innovant. Cette mesure aurait été accompagnée de l’instauration d’un droit à une rente mensuelle garantie en cas d’entrée en dépendance, quelle que soit la durée de cotisation effective. Malheureusement, mes chers collègues, ces propositions de bon sens, qui auraient donné un cap à la problématique de la perte d’autonomie, n’ont pas été suivies.

Avant de conclure, j’aimerais ajouter quelques mots sur le statut des aidants. Les mesures en faveur des 4,3 millions d’aidants ne peuvent constituer qu’un premier pas vers la reconnaissance pleine et entière du rôle de l’aidant à travers la création d’un véritable statut de l’aidant. Nous avions proposé d’exonérer d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux le dédommagement perçu par l’aidant, mais cette proposition a également été repoussée. Je ne doute pas que nous devrons revenir prochainement sur ce sujet.

Ce texte, mes chers collègues, marque une première étape, mais il ne répond pas à l’immense défi, tant humain que financier, que constitue la prise en charge de la perte d’autonomie. Aussi, et même s’il salue le travail important réalisé par nos deux assemblées depuis le printemps 2014 et malgré la qualité de nos échanges avec Mme la secrétaire d’État, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants ne peut soutenir ce projet de loi.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, chers collègues, après un débat parlementaire riche et constructif, nous abordons aujourd’hui la lecture définitive du projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement.

Les discussions ont permis à chacun de mesurer les défis auxquels notre société va devoir faire face dans les prochaines années en raison du vieillissement de la population. Les chiffres sont éloquents : plus de 18,9 millions de personnes auront soixante ans ou plus en 2025, et plus d’une personne sur trois en 2060. Quant au nombre de personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans, il va quadrupler d’ici 2050. Il devient donc urgent d’adapter notre société à cette évolution de la démographie, pour assurer une vie digne à l’ensemble de nos concitoyens âgés.

Alors que notre pays a pris du retard dans l’aide apportée aux personnes âgées, ce texte a le mérite de poser le problème et d’apporter de premières réponses.

Nous nous félicitons tout d’abord de l’affirmation dans la loi des droits des personnes âgées, et notamment celui de définir leur projet de vie, en ayant la possibilité de choisir elles-mêmes leur lieu de vie et le type d’aide dont elles souhaitent bénéficier. Les dispositions favorisant le maintien à domicile, comme la revalorisation de l’allocation personnalisée d’autonomie, ou l’objectif d’adapter 80 000 logements privés pour les rendre accessibles aux personnes âgées, ce qui leur permettra de rester chez elles le plus longtemps possible, sont des mesures indispensables. Nous savons en effet que c’est le souhait du plus grand nombre, mais nous savons aussi qu’un logement mal adapté peut être à l’origine de graves difficultés, et même porter atteinte à la santé de ces personnes.

Les mesures relatives à la prévention sont également intéressantes. Elles ont néanmoins le défaut d’omettre l’un des facteurs d’inégalité les plus importants face au vieillissement, celui de la pénibilité du travail. S’il est une injustice particulièrement intolérable, c’est bien l’inégalité de l’espérance de vie. Pourtant, aujourd’hui encore, les cadres vivent en moyenne plus de six ans de plus que les ouvriers, et dans un état de santé beaucoup moins dégradé.

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Ce ne sont malheureusement pas les dernières réformes des retraites qui vont permettre de réduire cet important écart. En effet, les dispositions que vous avez prises en 2014, qui portent la durée de cotisation de 41,5 à 43 ans pour disposer d’une retraite à temps plein, ne manqueront pas de renforcer cette inégalité.

Ce texte pose par ailleurs les premiers jalons d’une reconnaissance du droit des aidants. C’est là un point très positif, et qui était très attendu, compte tenu de la lourdeur que représente, pour les proches, la prise en charge de leurs parents. À cet égard, nous saluons l’instauration d’un droit au répit. Il permettra aux aidants qui accompagnent des personnes en grande perte d’autonomie de prendre un peu de temps pour se reposer en finançant l’accueil de la personne aidée dans une structure adaptée à ses besoins.

Je note également que les dernières modifications apportées par le Sénat, et sur lesquelles les deux chambres se sont accordées, ont permis d’améliorer, jusqu’à la fin du processus législatif, la rédaction du projet de loi. Je pense ici à la possibilité offerte aux préfets de proposer prioritairement des logements du contingent préfectoral à des personnes en perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap. Je pense aussi à la transformation du congé de soutien familial en congé de proche aidant, pouvant être pris, dans certains cas, sans que le salarié ait à en avertir son employeur plus de quarante-huit heures à l’avance.

Le conseil départemental sera systématiquement informé des manquements constatés par les agents de la répression des fraudes dans les établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes qui pratiqueraient des tarifs abusifs. Tout cela est très positif.

De plus je note avec satisfaction le rétablissement, contrairement au souhait initial des sénateurs, du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge. Cette instance permettra, je l’espère, d’engager des réflexions qui iront au-delà de la problématique des personnes âgées, pour traiter plus globalement de la question de la dépendance.

Un seul point, toujours le même, vient assombrir le contenu de ce texte, celui des moyens financiers mobilisés pour sa mise en oeuvre, dont l’insuffisance risque d’en limiter fortement la portée. Alors que votre ministère évalue la dépense pour la prise en charge de la perte d’autonomie à 1,5 milliard d’euros, vous prévoyez une enveloppe globale de sept cents millions d’euros, issus de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, soit moins de la moitié de ce qu’il faudrait pour mener à bien la réforme de l’autonomie tant attendue par nos concitoyens.

C’est également le cas de l’aide financière pour le répit des aidants, qui ne s’élèvera qu’à 78 millions d’euros, ou encore de l’enveloppe consacrée à la prévention de la perte d’autonomie, qui n’est que de 178 millions d’euros alors que celle-ci concerne un nombre croissant de personnes. Quant aux dispositions en faveur du renforcement du secteur de l’aide à domicile, dont nous saluons le bien-fondé, elles ne pourront se concrétiser que si elles s’accompagnent de financements suffisants à destination des associations qui oeuvrent auprès des personnes âgées et dont nous savons tous combien elles sont dépendantes des subventions publiques, qui ne cessent de diminuer.

Au-delà de ces questions financières, le principal reproche que nous formulons à rencontre de ce projet de loi porte moins sur son contenu, que sur ce qu’il ne contient pas. Comme je l’ai déjà dit lors des précédentes lectures, il ne traite pas d’un problème essentiel pour les personnes concernées et leurs familles, celui du reste à charge. Il s’agit bien entendu, encore une fois, d’un manque de financement. C’est particulièrement dommageable, à l’heure où les revenus des personnes âgées – leur pension de retraite, mais aussi les aides dont ils peuvent bénéficier – sont souvent loin de couvrir leurs frais d’hébergement dans un établissement spécialisé. Ce sont donc leurs enfants, voire leurs petits-enfants, qui sont sollicités pour acquitter le reste à charge, dont le montant s’élève, en moyenne, à 1 500 euros par mois.

Si l’on prend en compte le fait que les tarifs d’hébergement dans les EHPAD ne cessent d’augmenter – le coût moyen d’un tel hébergement est aujourd’hui de 2 892 euros par mois – alors que dans le même temps, de réforme en réforme, le montant des pensions de retraite ne cesse de diminuer, on mesure l’importance de ce point, qui n’est pourtant pas traité dans ce texte. Il faut encore ajouter à cela le fait que plus de 800 000 retraités vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté dans notre pays, et que plus de 10 % d’entre eux, dont une majorité de femmes seules, perçoivent une pension inférieure à 600 euros par mois.

C’est d’autant plus dommageable, que le projet de poursuivre cette réforme en proposant un second texte relatif aux établissements pour les personnes âgées, qui fut un temps envisagé, ne serait plus aujourd’hui d’actualité. Peut-être pourrez-vous nous éclairer sur ce point, madame la secrétaire d’État ?

Pour conclure, si nous regrettons que ce projet de loi ne soit pas plus ambitieux au regard des défis auxquels notre société est et sera de plus en plus confrontée, nous le voterons en considérant qu’il s’agit d’une première étape, qui invite à aller plus loin dans la réponse à apporter aux enjeux du vieillissement et, plus largement, aux problématiques de dépendance. Un texte complémentaire est-il envisagé pour combler ces lacunes ?

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, le parcours du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement a commencé il y a un peu plus d’un an : nous aboutissons aujourd’hui à un accord en commission mixte paritaire sur un texte qui a été enrichi par les deux chambres à chacune des lectures auxquelles elles ont procédé.

Le vieillissement et son corollaire, le risque de dépendance, ainsi que l’exigence éthique de chacun d’entre nous de porter l’autonomie le plus loin possible et de prendre en charge nos aînés lorsque la dépendance survient nous placent face à un défi national inédit. On estime que, d’ici à 2060, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans fera plus que tripler. Il y a donc urgence à agir pour adapter la société à cette évolution : il s’agit bien d’un véritable bouleversement démographique qui nous amène à repenser l’ensemble de nos politiques pour l’autonomie. Et c’est bien là l’objet de ce texte.

Je ne rappellerai pas toutes les avancées qu’il comporte, puisque notre excellente rapporteure l’a fait. Je voudrais vous remercier, madame la secrétaire d’État, de votre détermination et de votre regard, à la fois pragmatique et humain, tout au long de l’examen du texte. Permettez-moi aussi de saluer votre prédécesseur, Michèle Delaunay, et de rendre hommage à celle qui a porté l’acte I de l’APA, Paulette Guinchard-Kunstler, qui préside aujourd’hui le conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Une des avancées majeures de ce texte concerne justement la revalorisation de l’APA et prévoit une augmentation du nombre d’heures d’aide à domicile pour les personnes qui en ont le plus besoin et les plus fragiles sur le plan économique.

Je me réjouis que, dans le même temps, notre assemblée ait adopté dans le projet de loi de finances rectificative une baisse de deux euros des cotisations sociales pour les particuliers employeurs. Ce sera non seulement un coup de pouce à la création d’emplois mais aussi une aide non négligeable pour tous ceux qui ont besoin d’être accompagnés dans des tâches domestiques qu’ils ont du mal à remplir. Grâce à cette baisse du coût du travail, ils pourront, sans doute dans de meilleures conditions, rester plus longtemps chez eux : c’est leur première demande.

Une autre mesure importante est la création d’un droit au répit pour les aidants. C’est une mesure forte. Plusieurs l’ont rappelé aujourd’hui : plus de quatre millions de personnes assistent régulièrement un proche âgé de plus de soixante ans ou plus à domicile. Plus de 650 millions d’euros sont mobilisés pour mettre en oeuvre les mesures figurant dans le texte. Dans le contexte que nous connaissons, cela mérite d’être salué.

Ce texte envisage la problématique du vieillissement dans sa double dimension : celle de l’anticipation de la prévention pour bien vieillir et celle de la protection des plus vulnérables. Il est donc guidé par une philosophie de la vie en société et par une conception de la dignité de la personne jusqu’à la fin de sa vie. Celle-ci doit être respectée dans ses choix et accompagnée selon ses besoins. Chaque personne âgée doit être respectée dans sa singularité. De même, les familles ont besoin d’être entendues, soutenues et accompagnées lorsque les proches ne sont plus comme elles les ont connus et qu’il faut accepter l’inéluctable évolution.

Ce texte était attendu et annoncé depuis longtemps mais rien n’avait abouti sous le précédent quinquennat.

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Pourquoi cette caricature ? Nous avons fait d’autres choses.

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François Hollande s’y était engagé lors de la campagne présidentielle : je me réjouis que sa promesse soit tenue. D’autres étapes restent à franchir, nous le savons, mais ce texte est une incontestable avancée. Sachons l’apprécier à sa juste valeur et nous en saisir sur le terrain. On dit chez moi que qui veut gravir une montagne commence par le bas et le fait pas à pas.

Enfin, lorsqu’on évoque le vieillissement, on ne parle souvent que de problèmes financiers et de dépendance. Je souhaite terminer en disant aux personnes âgées que le vieillissement, ce n’est pas que cela : il est aussi une somme de compétences, de sagesse, de disponibilité et d’engagement pour les petits et les grands, il est un soutien pour le monde associatif. Pour tout cela, un grand merci à nos aînés : nous savons tout ce qu’ils ont apporté à notre société quand ils étaient dans la vie active et tout ce qu’ils apportent encore aujourd’hui à notre vie collective.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous arrivons à la fin du parcours législatif du projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, un texte dont nous avons commencé l’examen en commission des affaires sociales le 16 juillet 2014 et qui a, depuis, subi de nombreuses évolutions.

Il faut bien le reconnaître, les navettes entre l’Assemblée nationale et le Sénat ont permis d’engager une concertation sur plusieurs chantiers que nous avions sans doute insuffisamment approfondis en première lecture. Je pense à la refondation du secteur de l’aide à domicile. Malgré les craintes que j’ai pu exprimer à l’occasion d’une motion de renvoi préalable à la deuxième lecture, je crois pouvoir dire que nous sommes parvenus à un équilibre qui ne déstabilise pas les services agréés ni les départements tout en respectant le travail des prestataires privés. Je ne sous-estime pas cependant l’inquiétude qui persiste chez ceux-ci. Nous aurons, dans le cadre de l’application de la loi, à rester très vigilants et je souhaite, madame la ministre, que le contrôle parlementaire puisse s’exercer de façon optimale.

Nous avons également avancé sur les différentes formes d’habitats avec service, sur la transformation des anciens foyers logements en résidence autonomie et sur la sécurisation des copropriétés avec service. Enfin, le travail des aidants et leur investissement auprès de leurs proches sont reconnus au travers de la création d’un droit au répit.

Nous considérons qu’il s’agit d’une réelle avancée, même si elle demeure de mon point de vue difficile à mettre en place, notamment en raison du nombre insuffisant de lits d’accueil temporaires, principalement dans les secteurs géographiques les plus demandeurs de places d’hébergements pour personnes âgées dépendantes. Je pense notamment aux secteurs littoraux, comme ma circonscription de Saint-Malo, où les personnes âgées aiment prendre leur retraite et sont en conséquence potentiellement plus demandeuses de places en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Je pourrais aborder bien d’autres points, comme celui de la tarification qui a fait l’objet de nombreuses discussions mais le temps qui m’est imparti ne me le permet pas. Je veux souligner que nos débats, les évolutions de ce texte ainsi que le travail effectué par la rapporteure, Mme Huillier, dont je salue la façon avec laquelle elle s’en est emparée, a permis d’aboutir à un accord en commission mixte paritaire le jeudi 3 décembre 2015.

Alors que près d’un quart de la population française a plus de soixante ans et que le nombre des plus de soixante-quinze ans a progressé de 45 % en vingt ans, la promulgation de cette loi est très attendue par les personnes âgées, par leurs familles ainsi que par l’ensemble des professionnels de ce secteur, à qui je veux rendre hommage. Notre devoir est de répondre à leurs attentes. Mme la présidente de la commission des affaires sociales nous l’a dit dès la première lecture de ce texte par notre commission,première lecture : « Il s’agit d’une première étape puisqu’un deuxième projet de loi relatif à l’accompagnement des résidents de maisons de retraite viendra le compléter ». Je vous prie de m’excuser, madame la secrétaire d’État, de vous avoir attribué ces propos de la présidente de la commission des affaires sociales.

Force est de constater effectivement que ce projet de loi n’apporte pas de réponse satisfaisante et durable à deux problèmes pourtant majeurs : le reste à charge, parfois hors de portée, qui est supporté par les familles en raison de la faiblesse des ressources de leurs proches dépendants accueillis en établissement, et le financement de la prise en charge de la dépendance par les conseils départementaux, dont les dépenses sociales ne cessent de croître alors que les dotations qui leur sont attribuées par l’État diminuent de façon drastique et continuelle. Nous connaissons tous la situation financière dans lequel se trouve un très grand nombre de départements en cette fin d’année.

Notre devoir est de continuer de travailler sur ces points et de nous appuyer sur le Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, créé par ce texte de loi, pour trouver les meilleures solutions nous permettant de faire face au défi du vieillissement de la population.

Enfin, madame la secrétaire d’État, je veux profiter de cette intervention pour vous remercier de l’attention que vous avez portée à ma demande visant à ce que des congrégations puissent accueillir des laïcs. L’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé a également permis la prise en compte ce problème en introduisant après son article 51 une disposition leur permettant d’obtenir le statut d’établissement hospitalier pour personnes âgées dépendantes sans passer par la procédure d’appel à projet.

Nous reconnaissons les avancées contenues dans ce texte : il est le premier projet qui s’attache à apporter des réponses à cette question essentielle du vieillissement de la population. Toutefois, en dépit de ces avancées intéressantes, il ne répond que très partiellement aux besoins présents et à venir en matière de vieillissement de la population : c’est pourquoi j’adopterai une position d’abstention d’encouragement à poursuivre le travail.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous arrivons aujourd’hui au terme du long parcours d’un projet de loi déposé il y a plus d’un an et demi. Notre assemblée a déjà abondamment débattu de ce texte, que ce soit en commission ou dans cet hémicycle, tout comme l’a fait le Sénat, jusqu’à ce que nous arrivions à un accord la semaine dernière, lors de la réunion de la commission mixte paritaire. Nous avons dorénavant un texte qui a largement été enrichi au fil des discussions et qui a su répondre aux préoccupations des professionnels du secteur, des familles et des associations.

Aujourd’hui, nous avons hâte que les dispositions qu’il contient puissent enfin entrer en application, car le vieillissement est une réalité forte : les attentes de nos concitoyens sont considérables en la matière. Aujourd’hui, grâce aux progrès techniques, à la médecine et à notre système de protection sociale, l’espérance de vie des Français augmente. Certes, elle est inégale – cela a été souligné ce matin : celle d’un cadre est différente de celle d’un ouvrier. L’INSEE projette toutefois un allongement continu de l’espérance de vie d’ici à 2060. Elle devrait être, à cette date, de 86 ans pour les hommes et de 91 ans pour les femmes.

Les personnes âgées de soixante ans et plus sont au nombre de quinze millions aujourd’hui. Elles seront près de vingt-quatre millions en 2060. Cet allongement de l’espérance de vie est à la fois un signe de progrès considérable pour notre société et un défi à relever – un défi social, humain et économique. C’est un défi, non seulement parce que toute notre société doit s’adapter et se préparer dans plusieurs de ses composantes, mais surtout parce que les enjeux liés au vieillissement sont universels et destinés à concerner chacun d’entre nous. Il convient dès lors d’assurer à tous l’égalité, notamment face au risque de perte d’autonomie. Ce projet de loi a pour ambition de ne pas se concentrer uniquement sur les personnes âgées et sur les professionnels qui les accompagnent. Il cherche au contraire à inclure chaque citoyen dans la prise en compte du vieillissement et de mobiliser toute la société afin qu’elle s’adapte à ces contraintes grandissantes.

Certes, la réflexion n’est pas complètement nouvelle : elle s’inscrit dans les politiques publiques mises en place ces quinze dernières années en faveur des personnes âgées. C’est la démarche qui, aujourd’hui, est nouvelle. Pour la première fois, un texte de programmation et d’orientation aborde la question du vieillissement d’une manière globale, positive et novatrice. Il introduit des avancées majeures – cela a été souligné – et dessine de nouvelles perspectives pour l’avenir. Véritable projet de justice sociale, porteur d’un changement de regard sur la vieillesse, ce texte, loin de se contenter de réagir à des problèmes déjà trop ancrés, se place davantage dans l’anticipation à des évolutions de la société.

Trois mots d’ordre ont présidé à ce texte : prévenir, adapter et accompagner. Prévenir et repérer les facteurs de risque est essentiel afin de garantir au mieux le niveau et la qualité de vie de nos concitoyens âgés en permettant de se préparer et de faciliter le recours à des aides en cas de besoin et de retarder ainsi la perte d’autonomie. L’âge n’est en rien une fatalité, car si l’avancée en âge est inexorable, elle est prévisible.

Prévoir les effets de l’allongement de la durée de vie est aussi une manière de nous y adapter. Ce texte permet de préciser la place et le rôle de nos aînés dans la société en adaptant nos politiques publiques. Par exemple, l’adaptation des logements représente un véritable atout pour parer à la perte d’autonomie. De même, l’adaptation de certains emplois peut être bénéfique pour notre économie.

Enfin, ce texte propose d’accompagner les Françaises et les Français en permettant à ceux qui le souhaitent de vivre à domicile dans de bonnes conditions.

Comme d’autres intervenants, je souhaite souligner le soutien et la considération apportés aux aidants, principalement des femmes, qui sont des piliers, souvent isolés, de la solidarité envers nos aînés. Je souhaite également saluer l’introduction du droit au répit et la réforme de l’APA, qui trouve aujourd’hui certaines limites, mais qui a prouvé en quinze ans son utilité et sa pertinence pour accompagner les plus dépendants et préserver l’autonomie de ceux qui le sont moins. Voilà autant de mesures qui doivent se concrétiser rapidement pour répondre aux besoins grandissants de notre société.

Madame la secrétaire d’État, nous ne pouvons qu’espérer que ce texte, une fois voté par le Parlement, sera mis en oeuvre rapidement. Il en va de notre préparation, à tous, aux enjeux qui nous attendent.

Je conclus en saluant le travail de tous ceux qui ont contribué à ce texte, en particulier de notre rapporteure, Joëlle Huillier.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La discussion générale est close.

La parole est à Mme la rapporteure.

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Je souhaite répondre très rapidement à deux ou trois observations formulées lors de cette discussion générale.

Madame Poletti, vous avez évoqué un accroissement de la charge de travail des conseils départementaux. Vous avez raison. Mais s’agissant de la révision des plans d’APA, permettez-moi de rappeler que, si les équipes médico-sociales ont fait leur travail correctement, elles ont déjà élaboré le plan d’aide idéal pour la personne âgée. Il y a ensuite le plan d’aide financé par l’APA, qui ne peut évidemment qu’être partiel. Bien souvent, pour aller plus vite et à cause du nombre important de personnes âgées auxquelles il fallait rendre visite, les équipes médico-sociales sont directement passées au plan d’aide susceptible d’être financé par l’APA. C’est un peu dommage : si elles avaient élaboré leur propre plan d’aide idéal, nous aurions pu gagner du temps maintenant.

M. Richard, qui n’est plus là, a exprimé sa crainte de voir enrayé l’essor du secteur des aides à domicile. Je ne le crois pas. Le développement que l’on observe aujourd’hui concerne surtout le secteur des services à but lucratif, lesquels sont agréés, et non autorisés. Or les statistiques montrent que l’activité des services autorisés diminue aujourd’hui, alors que celle des services agréés augmente. Il va donc falloir trouver un équilibre : ce sera le rôle des conseils départementaux.

M. Richard a également évoqué un doublement du coût de l’APA au cours des prochaines années. Cette prévision fait fi des effets positifs du renforcement de la prévention qui sera mise en place.

Madame Fraysse, vous avez dit que les 178 millions d’euros consacrés à la prévention risquaient d’être insuffisants. Je rappelle qu’il s’agit d’un surcroît de financement, qui vient s’ajouter à l’existant. Outre les conseils départementaux, qui agissent déjà en la matière, tous les régimes de retraite, les mutuelles, les régimes de prévoyance et les centres communaux d’action sociale « mettent le paquet » en matière de prévention. Je le répète : ces 178 millions d’euros seront un plus. Ils auront des effets très bénéfiques et éviteront à certaines personnes âgées de tomber dans la dépendance aussi rapidement qu’elles y tombent aujourd’hui.

Madame Fraysse, vous avez également parlé de l’inégalité entre les ouvriers et les cadres en termes d’espérance de vie. Cette inégalité est réelle, mais je suis un peu gênée lorsque vous dites qu’elle est aggravée par la réforme des retraites que nous avons conduite. Il ne faut pas oublier la mise en place du compte pénibilité,…

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…qui permettra justement aux ouvriers qui font des travaux pénibles de partir à la retraite plus tôt. Une chose peut donc en compenser une autre.

Merci à vous tous pour votre soutien. Ces remerciements s’adressent aussi à vous, chers collègues de l’opposition, avec qui nous avons toujours eu des discussions extrêmement constructives et, je crois, sereines.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

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Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, je veux rappeler l’historique et les actions menées sous la précédente législature, afin d’essayer d’éclairer les raisons de l’abstention de l’opposition, que je respecte – c’est le droit de chacun,…

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…mais tout de même !

Le 9 juin 2007, le président de la République Nicolas Sarkozy affirmait : « Je créerai une cinquième branche de la Sécurité sociale pour consacrer suffisamment de moyens à la perte d’autonomie. » À la fin de l’année 2007, M. Xavier Bertrand promettait une loi issue des réflexions d’une mission d’information sur l’APA menée par l’Assemblée nationale « avant l’été 2008 ». En février 2008, le président de la République lui-même annonçait un report de la loi, mais le projet de loi était toujours attendu au début de l’année 2009.

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Nous n’avons pas voulu faire une petite loi ! Vous, vous avez fait le choix d’une petite loi !

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Certes, l’année 2008 a marqué le début de la crise financière. Je vous en donne acte. Néanmoins, lors de ses voeux du 31 décembre 2009 pour l’année 2010, le président de la République Nicolas Sarkozy promettait de nouveau un texte pour 2011. En 2011, Mme Létard évoquait à nouveau le sujet, annonçant une loi en 2012. Notre ex-collègue Rosso-Debord, qui avait réalisé un gros travail sur ce sujet, affirmait qu’elle avait des pistes de financement. Nous pouvions ne pas être d’accord, mais en tout cas, on nous disait qu’un texte allait arriver. Or il n’arrivait pas…

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Je le dis sans passion. C’est comme ça !

Aujourd’hui, nous sommes en train de mettre en place un squelette législatif. Certes, on peut regretter que certains financements, par-ci, par-là, sont peut-être insuffisants. Je peux tout entendre, mais quand même !

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Vous avez voté contre la loi sur le handicap en 2005, alors ne nous donnez pas de leçons !

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Aujourd’hui que nous mettons en place un cadre législatif, vous venez nous dire que vous vous abstenez parce que ce n’est pas suffisant. Honnêtement, je ne le comprends pas.

Quant aux propos que selon vous, monsieur Lurton, j’aurais tenu en commission, très honnêtement je ne vois pas à quoi vous faites allusion. Peut-être s’agit-il d’une erreur de retranscription de nos débats en commission.

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Cela pourrait être le cas, compte tenu du brouhaha général dans cette commission – je plains ceux qui sont chargés d’en faire le compte rendu !

Nous sommes en train de rechercher ces propos, qui dateraient de 2014. J’ai sans doute dit qu’un projet de loi pouvait arriver – je pensais au projet de loi de modernisation de notre système de santé –, et qu’il traiterait du parcours de santé jusqu’aux EHPAD. J’assume la responsabilité des propos que je tiens : je vais donc les rechercher…

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Certes, monsieur Lurton, mais je ne me rappelle pas les avoir tenus. J’aimerais savoir dans quelles conditions je m’étais exprimée. Je ne pense tout de même pas avoir annoncé des futurs projets de loi au nom du Gouvernement si ce dernier ne s’était pas avancé sur le sujet. Je reste à ma place : je suis parlementaire, je ne suis pas membre du Gouvernement !

Monsieur Lurton, je m’engage à rechercher mes propos…

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.

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J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.

Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d’abord appeler l’Assemblée à statuer sur l’amendement dont je suis saisie.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’état chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie

Cet amendement vise à opérer une coordination avec la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile qui a prévu, afin d’améliorer la célérité des procédures, une dérogation à la procédure d’appel à projets visée à l’article L. 313-1-1 du code de l’action sociale et des familles. Dès lors que le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement prévoit d’autres dérogations à cette procédure, il est nécessaire d’ajouter, à l’article 45, une dérogation spécifique pour les centres d’accueil pour demandeurs d’asile. Ainsi, les deux lois votées à six mois d’intervalle ne seront pas seulement cohérentes, mais identiques.

Cet amendement fait suite à une réaction un peu tardive : j’en suis désolée.

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Bien évidemment, cet amendement n’a pas été examiné par la commission. À titre personnel, je le trouve extrêmement utile et je lui donne un avis favorable.

L’amendement no 1 est adopté.

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Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement adopté par l’Assemblée.

L’ensemble du projet de loi est adopté.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’état chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie

Je tiens à remercier de nouveau l’Assemblée pour ce vote. Le travail mené par l’Assemblée nationale, dans un dialogue constant avec le Sénat, a permis à la CMP d’aboutir. Conformément à notre engagement, la loi pourra donc être adoptée avant la fin de l’année 2015 et entrer en vigueur au début de l’année 2016.

Bien entendu, comme cela a été dit lors de la discussion générale, bien d’autres débats vont se poursuivre autour de l’adaptation de la société au vieillissement et de la réduction du reste à charge. Nous travaillons aussi à prendre en compte ce poids à la charge des familles et à définir les mesures, plutôt réglementaires, qui permettront de contenir l’augmentation des tarifs dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances pour 2016.

La séance est levée.

La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly