Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la santé environnementale doit être au coeur de notre stratégie de santé publique et de nos préoccupations sanitaires. Notre environnement est pollué par des milliers de substances toxiques, présentes partout, dans l’air, l’eau, la nourriture, les objets du quotidien ; c’est l’ensemble de notre environnement qui est pollué, nous exposant à un véritable cocktail de produits chimiques, dont les effets sanitaires sont potentiellement catastrophiques.
Je remercie donc vivement notre collègue Jean-Louis Roumégas de présenter la présente proposition de loi, qui vise à lutter globalement contre ce problème. Si des mesures spécifiques doivent être prises regardant l’usage de telle ou telle substance, comme le bisphénol, c’est une vision globale et non parcellaire qu’il faut avoir sur la pollution chimique. Nous ne sommes pas chimistes, nous sommes juristes ; notre rôle est de légiférer, non pas sur une particule en particulier, mais sur un problème de pollution. Cette proposition de loi est une réponse globale et elle est en cela novatrice ; son adoption est indispensable.
Les exemples de pollution chimique se multiplient : bisphénol, glyphosate, retardateurs de flammes bromés, formaldéhyde, la liste pourrait être infinie. Dernier exemple en date, que j’ai rappelé en commission : l’association Foodwatch s’est intéressée aux hydrocarbures aromatiques d’huile minérale présents dans les emballages de produits alimentaires, notamment dans l’encre utilisée sur ceux-ci. Selon l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA, ces substances « peuvent être à la fois mutagènes et cancérogènes ». Foodwatch a analysé plusieurs centaines de produits alimentaires et a découvert que la plupart étaient contaminés par ces substances, qui migrent de l’emballage vers l’aliment. Foodwatch a sonné l’alarme il y a plus de trois mois. Qu’a-t-on fait depuis ? Rien, alors que techniquement des solutions existent, qui ont été testées notamment en Allemagne. Les industriels et la grande distribution n’y sont pas opposés : cela ne coûterait pas plus cher, il faudrait simplement engager une réflexion sur le processus de fabrication. Si la présente proposition de loi était adoptée, elle permettrait entre autres choses d’identifier le problème signalé par l’association Foodwatch et fournirait des outils pour lutter contre la pollution chimique.
L’Organisation mondiale de la santé indique que 8 % des décès dans le monde sont liés aux substances toxiques : ce chiffre doit être connu de tous. Comme le rappelle la proposition de loi, 100 millions de substances chimiques sont répertoriées dans le monde et il en circule plus de 100 000 dans l’Union européenne. Si ces substances chimiques ne sont pas toutes toxiques – fort heureusement –, beaucoup le sont ; surtout, une grande partie n’a pas fait l’objet d’une évaluation sanitaire. Seules trente et une sont à ce jour interdites par le règlement européen REACH ; la Commission européenne a été récemment condamnée pour son inaction dans ce domaine. Il est donc nécessaire d’agir au plan national pour pallier les insuffisances européennes.
Le débat de fond, c’est l’orientation que l’on souhaite donner à notre système de santé, qui nous coûte de plus en plus cher sans que notre santé s’améliore, bien au contraire : l’espérance de vie en bonne santé a tendance à stagner dans les pays occidentaux, voire à baisser sous les coups de boutoir des pollutions chimique et environnementale. Il est indispensable de changer notre façon de concevoir la médecine et de cesser de privilégier le soin au détriment de la prévention.
Si cette proposition de loi coûtera – un peu – aux entreprises, elle entraînera de substantielles économies pour nos comptes sociaux. L’effet n’est pas direct, il est difficilement calculable, mais il est réel. Nous le savons, il vaut mieux prévenir que guérir et agir en amont coûtera toujours moins que faire supporter à notre système de santé des maladies environnementales que nous ne savons pas guérir. Je rappelle que le coût sanitaire annuel des seuls perturbateurs endocriniens s’élèverait à 157 milliards d’euros dans l’Union européenne ; en France, l’exposition aux particules fines coûte près de 30 milliards par an, un coût que doit supporter notre système de santé au bord de l’implosion. Lors des « Mardis de l’avenir » organisées à l’Assemblée nationale, la ministre Marisol Touraine a d’ailleurs reconnu le rôle majeur de l’environnement dans la dégradation de notre état de santé.
La présente proposition de loi est un premier pas important vers une lutte globale contre la pollution chimique. Elle introduit le principe de substitution, défini comme « le remplacement des substances dangereuses par des alternatives sans danger, quand de telles alternatives existent et à un coût économique raisonnable ». Le texte vise plus précisément à imposer aux entreprises un audit des substances toxiques utilisées, et à aider ces entreprises à remplacer ces substances toxiques par des substances sans danger. Soulignons que cet audit ne coûtera qu’environ 5 000 euros pour les entreprises de plus de 50 salariés,…