Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du 14 janvier 2016 à 9h30
Automaticité du déclenchement de mesures d'urgence en cas de pics de pollution — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, chers collègues, il y a tout juste vingt ans, le Parlement français adoptait le projet de loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie. Ce texte, porté à l’époque par Corinne Lepage, ministre de l’environnement, consacrait, noir sur blanc, le « droit reconnu à chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé ».

Deux décennies plus tard, il apparaît incontestable que ce texte a permis des avancées importantes telles que l’élaboration obligatoire de plans de déplacements urbains dans toutes les villes ou encore l’émergence d’un réseau solide et performant de mesure de la qualité de l’air sur tout le territoire français, sans doute d’ailleurs un des meilleurs réseaux d’Europe. Pour autant, la pollution de l’air reste pour la France un problème majeur. Si l’on a réussi à réduire quasiment à néant la pollution au dioxyde de soufre – comme quoi, c’est possible – l’on a malheureusement laissé prospérer les émissions de dioxyde d’azote et la formation d’ozone, et la pollution aux particules fines s’est aggravée du fait d’une hyper-diésélisation du parc automobile français.

Depuis vingt ans, les collectivités locales, villes et régions en tête, ont fait des efforts importants en termes de développement de l’offre en transports en commun et aussi parfois de réaménagement urbain en faveur des piétons et des cyclistes. Ces efforts sont aussi le fait des Français, très nombreux à avoir changé leurs habitudes de déplacement. Mais malheureusement, dans le même temps, l’explosion de la circulation routière périurbaine et du transport de marchandises par camion et l’augmentation de la part de marché des motorisations au diesel ont éclipsé ces efforts et annihilé un certain nombre de bons résultats, lesquels concernent du coup plutôt les centres-villes. Le bilan global en matière de pollution de l’air reste malheureusement négatif. Ainsi, on évalue encore en France le nombre de décès prématurés liés à la pollution de l’air à plus de 40 000 par an. Plusieurs milliers de décès et d’hospitalisation pourraient être évités si les normes de qualité de l’air françaises étaient conformes aux préconisations de l’Organisation mondiale de la santé – OMS. En France comme ailleurs, la pollution de l’air constitue le principal risque environnemental pour la santé, selon l’OMS, et l’arsenal législatif dont nous disposons en la matière se révèle insuffisant.

Par ailleurs, la dégradation de la qualité de l’air coûte très cher à notre pays. Selon les conclusions d’une récente commission sénatoriale conduite par Jean-François Husson, sénateur Les Républicains, et Leila Aïchi, sénatrice écologiste, le coût de la pollution atmosphérique s’élèverait à plus de 100 milliards d’euros par an pour la France. À l’évidence, cela contribue aussi au déficit de l’assurance maladie, au déséquilibre budgétaire de notre système de protection sociale. J’ajoute que cette dégradation menace également nos capacités productives, le rendement de notre agriculture et la durée de vie de nos bâtiments.

Enfin, notre pays est régulièrement pointé du doigt pour manquement aux directives européennes en matière de qualité de l’air. En l’absence de mesures « rapides et efficaces », selon les termes de la Commission européenne, celle-ci pourrait saisir la Cour européenne de justice, comme elle l’a rappelé en juin dernier.

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