Le développement des modes de transport durables est devenu, me semble-t-il, une nécessité qu’il n’est plus possible de contester. Et si les technologies existent, nous devons davantage les encourager. Une telle démarche peut notamment passer par la mise en place de mesures incitatives concrètes et ambitieuses : je pense par exemple à un allégement des contraintes pour les entreprises qui développent ces nouveaux modes de transport ou à des incitations fiscales audacieuses pour faciliter l’achat par les collectivités ou les particuliers de véhicules propres.
Outre le fait qu’elle est dévastatrice pour notre santé, la pollution représente également un coût non négligeable pour le système de santé français. Ainsi, dans une étude publiée en avril 2015, le Commissariat général au développement durable évaluait le coût de la pollution de l’air entre 0,9 et 1,8 milliard d’euros par an. Ce chiffre correspond en grande partie aux coûts liés au traitement des pathologies respiratoires. En Europe, les quelque 600 000 décès prématurés et les pathologies engendrés par la pollution de l’air coûteraient chaque année plus de 1 400 milliards d’euros.
L’Union européenne, en avril dernier, n’a d’ailleurs pas hésité à adresser un nouvel avertissement à la France : elle lui reproche de ne pas prendre de mesures assez ambitieuses et efficaces pour limiter la pollution aux particules fines, notamment à Paris et à Lyon. Et ce n’est malheureusement pas le premier avertissement de ce type qu’on nous adresse... Pour un pays qui se veut aux avant-postes de la transition énergétique, ces rappels à l’ordre successifs donnent une image bien contradictoire.
Bien entendu, des initiatives ont été prises et je tiens, au nom du groupe UDI, à les saluer. Ainsi, depuis quelques mois, un bonus de 10 000 euros est offert pour l’achat d’un véhicule électrique remplaçant un véhicule diesel de plus de dix ans. C’est une avancée indéniable, car le bonus ne bénéficiait auparavant qu’aux propriétaires d’un véhicule de plus de quinze ans. Néanmoins, il me semble désormais urgent d’étendre ce bonus à un public encore plus large, afin de favoriser une conversion plus importante.
Par ailleurs, si la loi sur la transition énergétique a eu le mérite d’éveiller les consciences sur les sujets énergétiques et environnementaux, nous sommes encore loin du compte en matière de pollution atmosphérique. Seules quelques mesures ont été adoptées pour améliorer la qualité de l’air. Je pense notamment à la création de zones à circulation restreinte dans les agglomérations et les zones pour lesquelles un plan de protection de l’atmosphère a été adopté. Je pense aussi à la mise en place de l’indemnité kilométrique pour les salariés se déplaçant à vélo : belle idée, certes, mais sur laquelle le Gouvernement n’a cessé de reculer ! L’indemnité kilométrique est désormais facultative et plafonnée, monsieur le secrétaire d’État, à 200 euros par an…
Le groupe UDI, vous l’aurez compris, n’est pas opposé à faire évoluer les pratiques pour lutter contre la pollution atmosphérique. La dernière grande loi sur le sujet date déjà de 1996, et en vingt ans, force est de constater que les choses ont continué à se dégrader progressivement. Malheureusement, ce n’est pas la proposition de loi présentée aujourd’hui qui permettra d’améliorer la gestion des situations d’urgence provoquées par les pics de pollution.
Je tiens néanmoins à saluer votre travail, monsieur le rapporteur, car il portait sur un sujet délicat, qui préoccupe de plus en plus nos compatriotes. Cependant, ce travail n’a pu éviter cet écueil bien connu de notre assemblée : en voulant bien faire, on aboutit trop souvent à ajouter de nouvelles contraintes et à superposer les mesures. La loi de transition énergétique a déjà prévu la remise d’un rapport présentant des propositions de modification de la réglementation encadrant les mesures d’urgence. Pour le groupe UDI, il aurait été préférable d’attendre de connaître les conclusions de ce rapport avant de légiférer sur le sujet.
Ainsi, l’article 1er du présent texte définit de nouveaux délais, plus courts, pour enclencher la procédure d’alerte en cas d’épisode de pollution persistant. Si l’idée est intéressante, aucune étude d’impact n’a été réalisée à ce jour pour analyser les changements qu’elle pourrait provoquer dans les départements concernés.
L’article 2, quant à lui, me semble plutôt dangereux. Il prévoit en effet d’introduire dans le code de l’environnement les normes de qualité de l’air et les seuils déclenchant les mesures d’information et de recommandation, puis d’alerte. Comme je l’ai dit en commission du développement durable, il est plutôt risqué d’inscrire dans le code des normes et des seuils qui seront nécessairement amenés à être réévalués. En effet, il faut prendre en compte les résultats des nouvelles études médicales et épidémiologiques.
Par ailleurs, les normes sont définies en conformité avec celles arrêtées par l’Union européenne et l’OMS. Ne risque-t-on pas d’être en décalage avec le droit européen et les normes internationales ?
Enfin, l’article 4 contient certainement la disposition la plus problématique de ce texte, tant elle est déconnectée du contexte dans lequel se trouvent nos entreprises.
La loi relative à la transition énergétique a déjà obligé les entreprises employant au moins 100 salariés sur un site situé dans le périmètre d’un plan de déplacements urbains à élaborer un plan de mobilité pour leurs personnels. Lors de l’examen de ce texte, le groupe UDI avait fait part de ses réticences face à une mesure qu’il jugeait contraignante et qui risquait d’être perçue comme de l’écologie punitive. Certes, les entreprises doivent faire évoluer leurs pratiques, mais elles ont besoin d’être accompagnées plutôt que directement sanctionnées. Or l’article 4 renforce justement cette contrainte en ajoutant une prise en compte obligatoire, par ces plans de mobilité, des cas de déclenchement des mesures d’urgence pour cause de pic de pollution. Ainsi, les plans de mobilité devront prévoir des mesures spécifiques, comme le télétravail ou une flexibilité des horaires, pour les salariés sensibles à la pollution atmosphérique et les salariés volontaires.
Je regrette une nouvelle fois que l’idéologie prenne le pas sur le pragmatisme. Sur des sujets aussi importants et sensibles, il me semble préférable, monsieur le rapporteur, de privilégier le concret. Pour toutes ces raisons, le groupe UDI votera contre cette proposition de loi.