Intervention de Marie-Louise Fort

Séance en hémicycle du 3 février 2016 à 15h00
Renforcement de la lutte contre le système prostitutionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Louise Fort :

Ensuite, s’agissant du rôle des associations, à l’article 3, la commission spéciale s’est rangée à la position de la Haute assemblée en prévoyant que toutes les associations qui aident et accompagnent les personnes en difficulté, et pas seulement celles spécialisées dans l’accompagnement des personnes prostituées, pourront participer à l’élaboration et à la mise en oeuvre d’un parcours de sortie de la prostitution. Néanmoins, je m’interroge sur la pertinence de laisser toutes les associations, sans distinction, s’occuper de ce problème très particulier.

D’autre part, la commission spéciale a heureusement rétabli la condition de cessation de l’activité de prostitution pour que puisse être délivrée une autorisation provisoire de séjour à la personne anciennement prostituée, disposition qui fait l’objet de l’article 6.

Aux articles 16 et 17, la commission spéciale a enfin rétabli la pénalisation du client, qui consiste en une contravention de cinquième classe et, en cas de récidive, en un délit puni de 3 750 euros d’amende maximum. Ainsi que la création d’une peine complémentaire de stage de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’actes sexuels.

Au final, on le voit bien, à moins d’un revirement du Sénat, l’amère perspective d’un dernier mot de notre assemblée se profile, et je le regrette. Les positions des uns et des autres sont désormais largement connues. À titre personnel, je reste farouchement opposée au principe de substitution, à la pénalisation des prostituées, de celle du client.

Le risque n’est pas totalement exclu, de mon point de vue, que cette pénalisation ait pour corollaire la clandestinité, poussant les personnes prostituées à se réfugier dans des lieux difficiles à localiser où l’emprise du réseau mafieux sur la personne prostituée se fera plus forte encore. Plusieurs associations féministes et de hautes autorités intellectuelles se sont exprimées dans le même sens : Élisabeth Badinter comme l’ancien garde des sceaux et sénateur Robert Badinter.

En outre, on peut regretter que plusieurs sujets aient été évacués : quid du renforcement proprement dit de la lutte contre les proxénètes ? Quid de la prévention de la prostitution volontaire ?

Cela m’interpelle que l’on fasse parfois mine de nier le caractère complexe et hétérogène de la prostitution, en tout cas de son vécu. Ainsi, l’Inspection générale des affaires sociales a constaté, dans le cadre d’une enquête menée en 2012 sur les enjeux sanitaires de la prostitution, que « l’examen de la diversité des situations de prostitution fait apparaître des degrés très variables dans la contrainte ou au contraire dans la liberté ».

Bref, je regrette que les deux maîtres-mots à suivre pour bien légiférer que sont le pragmatisme et le réalisme n’aient pas toujours été au rendez-vous de la démarche initiale entreprise, des intentions et de nos débats, même si je partage le sentiment d’horreur par rapport à la marchandisation des corps.

En conclusion, dans les rangs du groupe Les Républicains, différents avis se sont exprimés…

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