Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi aborde des sujets complexes qui ont trait à l’essence même de notre pacte républicain, lequel veut que la puissance publique dispose du monopole de la riposte légitime. En effet, il est toujours difficile pour une société comme la nôtre, soucieuse de réglementer strictement le port et le transport des armes, de légiférer sur l’usage légal de la force armée.
Avant tout, au lendemain des attentats de novembre, nous tenons à rendre hommage aux policiers, qui exercent leur métier avec dévouement, courage et professionnalisme. Ceux qui sont quotidiennement confrontés au danger sont en droit d’attendre de la République qu’elle leur donne tous les moyens nécessaires pour se prémunir contre les risques auxquels ils s’exposent lors d’interventions opérationnelles. Il leur faut donc un cadre protecteur digne de ce nom, tout en respectant un difficile équilibre entre protection des forces de l’ordre et sécurité collective.
Aujourd’hui, il existe de fait une inégalité entre policiers et gendarmes, les policiers étant soumis au régime de droit commun alors qu’ils sont eux aussi confrontés à des situations exceptionnelles. Contrairement aux gendarmes et aux douaniers, qui peuvent le faire après des sommations verbales et dans des conditions limitatives, les policiers ne sont autorisés à faire usage de leur arme à feu qu’en réponse à une agression de même nature, c’est-à-dire dans le cas strict de la légitime défense. C’est donc le droit commun de la responsabilité pénale qui s’applique à eux.
Le texte vise à instaurer un régime de responsabilité pénale commun à l’ensemble des forces de l’ordre, encadrant plus précisément les conséquences du recours à la force armée.
Nous sommes favorables à la réforme générale proposée par l’article 1er, qui énonce les circonstances dans lesquelles les forces de l’ordre, qui y sont autorisées, pourront faire usage de leurs armes sans être considérées comme pénalement responsables.
Une autre disposition du texte vise à permettre aux fonctionnaires, agents publics et personnels en charge d’une mission de gardiennage autorisés à être armés de conserver leur arme individuelle en dehors de l’exercice de leurs fonctions. Elle étend également cette possibilité aux militaires de la gendarmerie nationale.
Je rappelle que, dans le cadre de l’état d’urgence, le ministère de l’intérieur a adressé aux services de la police nationale une instruction qui établit un régime dérogatoire autorisant le port d’armes en dehors des heures de service, pour la seule durée de l’état d’urgence et au seul profit de la police nationale.
Permettre aux policiers et aux gendarmes, hors état d’urgence, de porter leur arme en dehors du service semble être une mesure de bon sens lorsque, pour répondre aux situations de crise, on demande aux élus locaux de déployer le maximum d’effectifs policiers armés dans l’espace public. Cela permettrait une réaction rapide et efficace, conduite par des professionnels de la sécurité, afin de mieux protéger nos concitoyens.
Enfin, dans le contexte actuel de lutte contre le terrorisme, nous approuvons également les mesures visant à étendre les possibilités de contrôle d’identité, ainsi qu’à assouplir les règles relatives aux fouilles de véhicules et de bagages.
En matière de contrôles d’identité, nos collègues auteurs de ce texte proposent de remplacer les dispositions actuelles par une formulation plus simple et plus claire, selon laquelle « les autorités de police et les gendarmes peuvent contrôler l’identité des personnes se trouvant sur le territoire national ». Cet élargissement nous semble nécessaire.
En outre, les règles permettant aux forces de l’ordre de procéder à des fouilles de véhicules sont aujourd’hui très restreintes, par comparaison avec les prérogatives des agents des douanes, qui disposent d’un droit de visite général. La réforme de la présente proposition de loi permettrait de ne pas subordonner l’exercice de ce pouvoir à l’existence préalable d’indices concrets d’infraction. Seraient visés tous les types de véhicules, ainsi que les parties condamnées qu’ils renferment, telles que le coffre ou le capot d’une voiture.
S’agissant de la fouille des bagages, les policiers et les gendarmes ne peuvent y procéder sans l’accord de la personne concernée qu’en cas de crime ou de flagrant délit, ou sur commission rogatoire d’un juge d’instruction.
La proposition de loi du groupe socialiste sur la sécurité dans les transports, en cours de discussion au Parlement, n’apporterait qu’une amélioration marginale en permettant des fouilles de bagages uniquement dans les gares, trains et métros.
Le présent texte permettrait d’aller plus loin en attribuant aux gendarmes et aux policiers les mêmes prérogatives qu’aux agents des douanes. Cette proposition de loi comporte donc des dispositions utiles et nécessaires, particulièrement dans le contexte que nous connaissons aujourd’hui.
Mes chers collègues, en commission, tous les articles ont été rejetés, à l’initiative de la majorité, au prétexte que le projet de loi de lutte contre le crime organisé répondrait à ces différents enjeux. Il s’agit d’une manoeuvre à laquelle nous sommes malheureusement habitués. Puisque chacun semble convenir de la nécessité de légiférer en ce sens, nous devrions agir en responsabilité et adopter ce texte.