Intervention de Patrick Bloche

Séance en hémicycle du 21 mars 2016 à 21h30
Création architecture et patrimoine — Article 10

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation :

Voilà un sujet, le legs du droit de suite, qui nous a bien occupés, et dont le calage s’est fait par étapes successives. Je remercie le Gouvernement d’avoir pris l’initiative de déposer l’excellent amendement no 397 .

En effet, madame la ministre, les modifications que vous nous proposez d’introduire me paraissent tout à fait opportunes. D’une part, vous permettez – et j’y suis sensible – l’affectation du droit de suite vacant au financement de la retraite complémentaire des artistes graphiques et plasticiens, comme je l’avais proposé en commission, ce que vous avez aimablement rappelé.

D’autre part, vous prévoyez qu’en l’absence d’héritiers ou de légataire particulier du droit de suite, je dis bien en l’absence, c’est le légataire universel, ou, à défaut, le détenteur du droit moral qui bénéficie de ce droit.

Associées à l’application aux successions ouvertes avant l’entrée en vigueur de la loi – rétroactivité qui conduit, en l’espèce, à ne léser personne, car elle ne s’exerce qu’en l’absence d’héritiers –, ces dispositions me paraissent à même de répondre aux préoccupations légitimes soulevées par le Sénat, puisque certaines fondations, qui sont légataires universels, ou exécuteurs testamentaires, ou possèdent ces deux qualités, pourront ainsi percevoir le droit de suite de l’auteur décédé, sans pour autant que cela conduise à revenir sur des situations acquises.

Par conséquent, je suis, à titre personnel, favorable à l’amendement no 397 , car la commission n’a pas eu le temps de l’examiner.

S’agissant des deux sous-amendements identiques, nos 398 de François de Mazières et 401 de Michel Piron, mon avis est, en revanche, défavorable. En effet, sur le fond, ce dispositif m’apparaît imprécis et, surtout, insuffisamment encadré.

Il conduirait inévitablement à un contentieux très important entre les héritiers ou les légataires de l’auteur et les détenteurs du droit moral qui souhaiteront une application rétroactive de la loi à leur profit, ou tenterons d’obtenir toujours plus des ayants-droit des auteurs.

Je n’évoque même pas les associations défendant les auteurs, qui pourraient, si ces sous-amendements venaient à être adoptés, porter les mêmes revendications. Je pense, pour conclure, qu’il faut dans ce domaine, respecter la liberté testamentaire de l’auteur, à qui l’on ouvre d’ailleurs toutes les possibilités.

S’il souhaite que son droit de suite profite, pendant soixante-dix ans après sa mort, au détenteur de son droit moral, rien n’y fait obstacle. En revanche, s’il a pris des dispositions contraires à l’égard d’un légataire non réservataire – comme peut l’être, par exemple, un concubin – le législateur doit respecter cette volonté.

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