Intervention de Claudine Schmid

Séance en hémicycle du 31 mai 2016 à 15h00
Rénovation des modalités d'inscription sur les listes électorales — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaudine Schmid :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame et monsieur les rapporteurs, chers collègues, mon intervention portera sur les mesures de ces propositions de loi organiques et ordinaire visant à rénover les modalités d’inscription sur les listes électorales qui sont spécifiques aux Français de l’étranger.

Le Conseil constitutionnel avait émis le souhait d’ouvrir une réflexion sur les difficultés rencontrées par certains électeurs inscrits sur la liste consulaire et sur celle d’une commune à leur retour en France. Ces électeurs ne sauraient pas – à moins qu’ils feignent de ne pas le savoir –, sur quelle liste électorale ils sont inscrits.

Or, s’ils sont inscrits sur deux listes, c’est pour s’exprimer lors d’élections différentes : on n’est en aucun cas inscrit deux fois pour la même élection. L’inscription sur les listes consulaires permet de voter aux élections nationales, celle sur les listes communales aux élections locales. Les électeurs le savent. Ils savent où ils votent puisqu’ils ont fait eux-mêmes une demande d’inscription et la renouvellent tous les cinq ans lors du renouvellement de leur inscription au registre des Français établis hors de France. Chaque électeur a donc fait le choix consciemment. Il ne peut l’ignorer. En cas de doute, il peut à tout moment consulter sa situation électorale sur le site monconsulat.fr. Quant aux électeurs qui rentrent en France, ils doivent signaler leur départ au consulat. Un certificat de radiation de la liste électorale leur est alors délivré. La difficulté mentionnée par le Conseil constitutionnel n’a donc pas une origine législative.

En conséquence, même si la disposition prévue aux articles 1er de la loi organique et 12 de la loi ordinaire est adoptée, les difficultés persisteront. En effet, un électeur qui n’aura pas signalé son départ restera inscrit à l’étranger et ne pourra pas voter à son retour. Allons-nous priver de leur droit de vote partiel plus de 35 % des Français de l’étranger – soit, à la fin de décembre 2015, 434 563 personnes –, pour essayer de remédier à l’ignorance de quelques-uns ? La difficulté ne sera aucunement résolue.

Les textes en discussion répondent à la demande du Conseil constitutionnel par deux mesures. La première est la création du répertoire électoral permanent et unique. Cependant ce répertoire tenu par l’INSEE ne sera fiable que si les erreurs de saisie sont réduites au minimum et l’encodage des caractères spéciaux, tels que le « ñ » des noms espagnols ou les trémas des noms allemands –, revu. L’administration consulaire doit donc être dotée d’outils informatiques performants. La seconde est l’inscription « au fil de l’eau », qui permettra de modifier son inscription jusqu’à trente jours avant la date de l’élection.

En revanche, la suppression de l’article L. 330-3 du code électoral ouvre d’autres difficultés. Les propositions de loi en débat confient au maire la compétence de l’inscription et de la radiation des listes électorales. Le maire pourra donc radier une personne qui, selon lui, n’a pas ou n’a plus de liens avec la commune. Rien n’est prévu dans les propositions de loi pour protéger ceux qui résident hors de France.

Autre conséquence non négligeable d’une telle mesure, cette réforme fera de facto décroître le nombre d’électeurs qui voteront depuis l’étranger. Elle mettra ainsi en difficulté l’ouverture de bureaux de vote que l’administration veut au plus près de l’électeur. De plus, la diminution du nombre d’électeurs à l’étranger sera néfaste à la confidentialité du vote. Les listes consulaires de 2013 mentionnaient, pour quatre-vingt-seize d’entre elles, un nombre d’électeurs inférieur à mille ; soixante-neuf listes comptaient moins de cinq cents électeurs et trente-neuf moins de deux cents électeurs. De surcroît, le vote en lignet venant s’ajouter au vote à l’urne pour les élections législatives, la confidentialité du vote sera d’autant plus mise en cause. Je ne parle même pas du surcroît de travail et des difficultés que l’administration va connaître du fait des va-et-vient incessants des électeurs entre les deux listes.

Je terminerai par une difficulté – triste mais réelle – que les textes que vous présentez créent en matière d’inhumation. Les caveaux de famille se font rares ; où nos compatriotes trouveront-ils leur dernière demeure s’ils ne sont plus inscrits sur la liste électorale d’une commune française ?

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