La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter la bienvenue à nos deux nouveaux collègues élus dimanche dernier, Mme Marine Brenier, élue députée de la cinquième circonscription des Alpes-Maritimes
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains
et M. Éric Elkouby, élu député de la première circonscription du Bas-Rhin.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Christian Jacob, président du groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, depuis de longues semaines, la France vit au rythme délétère des grèves, des blocages, des violences. Les Français sont lassés de ce spectacle lamentable, qui donne une image catastrophique de notre pays. L’espace public est occupé par des groupuscules, qui pensent que leur idéologie doit s’imposer aux lois de la République. Les policiers sont agressés par des casseurs et par des voyous d’extrême gauche. Un syndicat, qui a fait la campagne de François Hollande en 2012, prend en otage les Français, bloque les raffineries, empêche la parution des journaux.
Monsieur le Premier ministre, il est temps de dire que le vrai responsable de tout cela, c’est François Hollande, qui, par ses mensonges et ses faiblesses, a généré le blocage du pays
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains
et le pourrissement de cette situation. On a bien compris, monsieur le Premier ministre, que vous ne vouliez pas perdre la face, mais vous l’avez perdue ! Vous avez divisé votre camp et battu le record d’impopularité jusque-là détenu par Jean-Marc Ayrault.
La France a besoin d’une autorité sereine, monsieur le Premier ministre, pas de vos énervements à répétition. Les Français n’acceptent pas que vos anciens amis de la CGT paralysent notre économie et fassent de la France la risée du monde.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Les Français n’acceptent pas de compter les points dans un concours d’ego entre vous et le secrétaire général de la CGT. Dans ces conditions, monsieur le Premier ministre, quand allez-vous tirer les conséquences politiques de la défiance de votre majorité et du rejet que vous inspirez aux Français
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains
Monsieur le président Christian Jacob, bloquer le pays, empêcher les Français de se déplacer et de vivre normalement, abîmer l’image de la France, menacer la reprise économique qui, incontestablement, se dessine, c’est inacceptable.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
C’est pour cela que nous resterons fermes et lèverons les blocages partout où c’est nécessaire.
Nous ferons preuve de la plus grande intransigeance à l’égard de ceux qui font usage de la violence, s’en prennent à nos forces de l’ordre, attaquent des permanences d’élus, alors que tous les regards se tourneront vers la France lors du lancement de cette belle compétition de football qu’est l’Euro 2016.
Notre pays est une grande démocratie, où le débat est libre, où chacun a le droit d’exprimer ses convictions, ses opinions et ses oppositions.
Mais notre pays a aussi un impérieux besoin de réformes. Parce que nous sommes dans une économie ouverte, parce que nos entreprises doivent être plus compétitives, parce que le chômage de masse fait tant de ravages, ce gouvernement ne renoncera pas à agir, à réformer, à prendre les mesures qui s’imposent, alors que la confiance revient, que l’investissement est là, que la consommation des ménages est incontestable, que nous avons de bons chiffres dans le secteur de la construction et, surtout, que l’on compte 70 000 chômeurs de moins depuis le début de l’année.
Je vous invite donc, monsieur Jacob, à sortir de la caricature. Quand l’économie d’un pays va mieux et qu’il y a moins de chômeurs, vous devriez vous en réjouir !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Réformer, monsieur Jacob, est une démarche exigeante.
Il faut de l’écoute et du dialogue. Le Gouvernement, notamment la ministre du travail, Mme El Khomri, en a fait la démonstration. Mais il faut aussi avoir une vision claire : moderniser sans jamais casser notre modèle social. Par ailleurs, chacun doit faire attention aux mots : les caricatures, d’où qu’elles viennent, ne produisent jamais de solution. C’est pour cela que j’ai condamné ce matin les propos du président du MEDEF, qui ont attisé les tensions.
Le projet de loi Travail est indispensable. Nous ne reviendrons pas sur la philosophie de ce texte. Nous avons besoin de décentraliser le dialogue social, de faire confiance aux acteurs de terrain dans l’entreprise, les entrepreneurs et les salariés. Et nous devons aussi casser, monsieur Jacob, ces barrières qui empêchent d’embaucher et de recourir au CDI. Nous devons enfin donner plus de droits aux salariés. C’est l’ambition de ce projet de loi, comme l’a rappelé par exemple le secrétaire général de la CFDT.
Monsieur Jacob, le projet de loi Travail, qui a été adopté par le biais de la procédure de l’engagement de responsabilité, sera examiné en commission cette semaine au Sénat. Nous verrons bien, monsieur le président, au-delà des caricatures et de vos questions, qui depuis ces dernières semaines se ressemblent toutes, ce que vos collègues du groupe Les Républicains en feront au Sénat.
Nous verrons à ce moment-là, et c’est la vertu du débat démocratique, quelle est votre vision de la démocratie sociale, de l’entreprise et des droits des salariés.
Ce sera l’occasion pour chacun de présenter ses projets de réforme. Le programme des candidats à la primaire de votre groupe est intenable, et vous le savez. Il mettrait notre pays à genou, alimenterait les divisions et accentuerait les inégalités. Oui, monsieur Jacob, nous réformons et nous tiendrons bon sur cette réforme parce qu’il y va de l’intérêt du pays
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Luc Belot, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le Premier ministre, comme chacun dans cet hémicycle, mais aussi comme chaque Français, nous sommes particulièrement attentifs aux chiffres de l’économie, de la croissance et de l’emploi…
…qui nous permettent de disposer d’une analyse du pays d’autant plus fine qu’elle permet de dégager, à partir des périodes récentes, des tendances longues.
Et, je crois qu’on peut le dire : ça va mieux.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ça va mieux pour la croissance, tout d’abord. Le produit intérieur brut a progressé de 0,6 % au premier trimestre. Deux raisons particulières font que nous sommes au-dessus de la moyenne de la zone euro.
Mêmes mouvements.
La première est l’investissement, tant pour les ménages que pour les entreprises – avec, dans le cas de ces dernières, une augmentation de 2,4 % particulièrement rassurante. La seconde est l’accélération de la consommation des ménages, qui progresse de 1 % au premier trimestre de cette année et atteint des chiffres conséquents, notamment depuis le versement de la prime d’activité en février. Dans mon département, pas moins de 16 000 foyers, dont 3 000 jeunes, bénéficient de ce dispositif.
Ça va mieux aussi sur le front de l’emploi, vraiment mieux ! D’abord, le chômage s’est stabilisé sous le seuil fatidique des 10 %.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ensuite, l’emploi marchand est en hausse sur quatre trimestres consécutifs. Et nous avons enfin la réalité des embauches, qui ont bondi de 4,8 % au premier trimestre pour atteindre un niveau jamais atteint depuis 2011. Je dois souligner que cette hausse a largement profité aux TPE. Dans mon département, on compte déjà plus de 4 000 contrats « Embauche PME », et le bénéfice du dispositif s’étend à tout le territoire.
Monsieur le Premier ministre, sur quelles perspectives de croissance tablez-vous pour que les créations d’emploi absorbent l’augmentation de la population active et continuent de faire reculer le chômage, et comment…
« Allô ! Allô ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
J’ai répondu à la question du président Jacob, mesdames, messieurs les députés de l’opposition, alors permettez-moi de répondre maintenant à la question particulièrement pertinente et intelligente de Luc Belot
Exclamations et rires sur les bancs du groupe Les Républicains – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain
, question qui n’avait pas l’aspect caricatural de la précédente.
Le sujet est sérieux. Vous l’avez rappelé, monsieur le député,…
…la France a enregistré au premier trimestre une croissance de 0,6 % selon l’INSEE. Ce chiffre conforte la prévision établie par le Gouvernement et par Michel Sapin…
…à 1,5 % en 2016. En effet, les premiers signes de la reprise sont là, et ils sont encourageants. Cela se traduit très concrètement pour les ménages comme pour les entreprises, et vous le constatez tous sur le terrain. Ainsi, le nombre de demandeurs d’emploi en catégorie A, c’est-à-dire sans aucune activité, a reculé de 70 000 depuis le début de l’année 2016.
Il ne sert à rien de crier, monsieur le député. Je sais bien que pour vous, quand le chômage augmente, c’est la faute du Gouvernement, et que quand il baisse, le Gouvernement est encore en faute. Lorsque l’on est patriote et responsable, on devrait pourtant se réjouir chaque fois qu’un Français retrouve un emploi. C’est l’attitude que chacun devrait avoir !
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.– Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Les entreprises, de leur côté, sont plus solides. Le nombre de défaillances a fortement chuté au premier trimestre, ce qui porte la baisse à plus de 10 % en un an. Il s’agit de la plus forte baisse depuis 2009.
Le secteur du logement, qui avait été sinistré, montre lui aussi des signes très concrets d’amélioration. Les mises en chantier de logements neufs connaissent une hausse de 3,8 % sur l’année et la délivrance de permis de construire a progressé de 7,7 %. Grâce aux mesures que nous avons engagées avec Sylvia Pinel et dont nous poursuivrons la mise en oeuvre avec Emmanuelle Cosse, le logement sera cette année un facteur de soutien à l’économie française.
Je le dis très simplement : ces résultats sont aussi le fruit des réformes, du pacte de responsabilité, du CICE – crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi –, tous dispositifs que le Gouvernement et sa majorité ont engagés au cours de ce quinquennat. Malgré les critiques, nous sommes en train d’obtenir les résultats que les Français attendent.
Quant aux entreprises, elles font aujourd’hui confiance à cette reprise et se remettent à investir. Le mouvement est très significatif s’agissant des biens manufacturés, puisque la progression cumulée au cours des deux derniers trimestres dépasse les 7 %. Aucun observateur, il est vrai, n’avait anticipé un tel dynamisme. La mesure de suramortissement ciblée sur les bien manufacturés, qui vient d’être prolongée d’un an, a évidemment joué un rôle clé dans ce dynamisme partout sur les territoires.
Et puis les entreprises se remettent à embaucher, avec une progression de 107 000 emplois dans le secteur marchand. La tendance est particulièrement stimulée par le dispositif « Embauche PME », qui offre une prime de 4 000 euros pendant deux ans pour l’emploi des moins qualifiés. Depuis sa mise en oeuvre en février, 350 000 demandes ont été reçues.
Monsieur le député, il est indéniable que ces chiffres indiquent une tendance, avec le soutien de la BPI – Banque publique d’investissement –, avec l’engagement des collectivités territoriales, avec la poursuite des réformes et de l’innovation. C’est un encouragement à garder le cap, à être cohérent et à compter sur votre confiance comme sur celle des Français.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Ces dernières semaines, les libertés républicaines les plus élémentaires ont été bafouées. Des casseurs professionnels qui s’agrègent à certaines manifestations aux bloqueurs de raffineries, la France vit au rythme de groupes activistes déterminés qui entravent les libertés de l’immense majorité de nos concitoyens : liberté de travailler, liberté de circuler, liberté de la presse, liberté, tout simplement, de vivre en sécurité dans son pays. Ces libertés sont devenues autant de paillassons sur lesquels un certain nombre de groupuscules et de syndicats s’essuient ostensiblement les pieds.
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, vous avez su défendre les valeurs républicaines à certains moments graves de notre histoire récente. Ces valeurs républicaines nous rassemblent sur tous les bancs. Les faire vivre par le verbe dans l’hémicycle est une chose importante ; faire en sorte qu’elles soient respectées dans notre société est une autre chose, tout aussi importante. Or, si nous considérons que la première de ces deux responsabilités a été exercée, nous considérons dans le même temps que la seconde ne l’est toujours pas en l’état actuel des choses.
Enfin, certains développements récents nous laissent entrevoir que le respect des libertés républicaines pourrait faire l’objet d’un troc dans le cadre de conflits sociaux actuels ou à venir. Si tel était le cas, cela affaiblirait encore plus l’État de droit et les valeurs de la République.
Monsieur le Premier ministre, que comptez-vous faire pour rétablir les libertés républicaines essentielles qui fondent notre démocratie ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et sur quelques bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le député, l’ordre républicain et la garantie des libertés fondamentales nous préoccupent tous, bien sûr, sur tous les bancs de cette assemblée. Nous sommes dans un moment difficile. Alors que nous faisons face à la menace terroriste, alors que l’état d’urgence reste en vigueur puisque vous l’avez prolongé, nous assistons à des manifestations et à des contestations. D’une certaine manière, c’est l’honneur de notre pays…
…que l’on puisse, malgré cette menace et malgré l’état d’urgence, manifester et exprimer son opinion comme dans toute démocratie.
Une nouvelle fois, j’en appelle d’abord au respect du droit et des libertés fondamentales.
Les forces de l’ordre, policiers et gendarmes, assurent ce respect dans des conditions très difficiles. Elles ont procédé à 1 600 interpellations. Je rends hommage tant à l’action déterminée du ministre de l’intérieur qu’à celle des forces de police et de gendarmerie qui font face à cette violence.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Il est inacceptable, et cela doit être condamné, que l’on puisse s’en prendre à des permanences d’élus.
Mêmes mouvements.
Il est inacceptable qu’à Nantes, à Rennes, à Paris ou dans d’autres villes, on puisse s’attaquer aux biens publics, et je salue les maires et les élus qui font face à ces violences. Il est inacceptable dans notre pays que l’on s’en prenne aux policiers et aux gendarmes et, comme on l’a vu, que l’on veuille « se payer » un policier et le tuer. La justice doit passer. Il y a eu, je l’ai dit, 1 600 interpellations et cela se poursuivra, car on ne peut laisser le moindre espace à la violence.
La démocratie, totalement ! La violence, qui est son contraire, jamais !
Il est inacceptable que l’on empêche la publication des journaux dans ce pays parce que l’on voudrait imposer son point de vue, sa tribune ou son éditorial.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, ainsi que sur quelques bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants et du groupe Les Républicains.
Il est inacceptable, alors que l’on peut débattre et dialoguer avec le Gouvernement, de chercher à bloquer le pays.
J’en appelle donc à l’apaisement et à la responsabilité de chacun. Le Gouvernement maintient le dialogue avec tous. Je respecte toutes les organisations patronales et syndicales. Je crois que les organisations syndicales ont un rôle essentiel à jouer dans la démocratie sociale.
Mais pour chacune d’entre elles, y compris celles qui contestent le projet de loi, j’en appelle à la responsabilité. On ne peut pas bloquer le pays,…
…on ne peut pas mettre en danger le déroulement de l’Euro de football, on ne peut pas abîmer l’image de notre pays.
Pour faire respecter les libertés, monsieur le député, la meilleure réponse est la détermination du Gouvernement à avancer et à réformer. C’est le cas pour le projet de loi ; c’est le cas pour les réformes, et c’est ainsi que l’on fait vivre l’État de droit. Il n’y a aucun troc, aucun mélange des genres. Il y a un texte de loi et il y a ensuite des dossiers qu’il est d’autant plus nécessaire de traiter que beaucoup de gouvernements, à droite notamment, ne l’ont pas fait. C’est pour cela que nous continuerons à agir et à réformer.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Pascal Terrasse, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, la semaine dernière, l’annonce des chiffres du chômage n’a pas eu l’écho qu’elle a habituellement. Il faut le rappeler : ces chiffres sont bons.
Malheureusement, en raison des événements actuels, la presse ne les a pas commentés.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Pour le deuxième mois consécutif depuis le début de l’année, le chômage baisse dans notre pays. Le Premier ministre l’a rappelé à l’instant : le nombre d’inscrits à Pôle emploi en catégorie A a baissé de 70 000.
C’est un chiffre très important, au vu de ce qui s’est passé ces sept ou huit dernières années. Cette baisse profite à toutes les classes d’âge, mais d’abord et avant tout aux jeunes de moins de 25 ans.
Notre pays s’est engagé dans la réforme. Les employeurs peuvent bénéficier du CICE. Nos engagements ont permis la mise en oeuvre d’une série de mesures, dans le cadre du pacte de compétitivité, comme le Premier ministre vient de le rappeler. Nous avons ainsi redonné confiance aux employeurs et aux entreprises. Aujourd’hui, le climat est favorable à l’embauche.
Les bons chiffres ne doivent pas pour autant nous faire oublier les quelques difficultés que rencontrent notamment les zones rurales désindustrialisées. Je pense aussi aux nouveaux modes d’action dans le cadre de l’économie numérique.
Madame la ministre, quel est l’engagement du Gouvernement pour améliorer les chiffres du chômage, cette année et dans les années à venir ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à Mme la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Monsieur le député, vous avez raison de parler de nouvel élan.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
En effet, au mois d’avril, le nombre de demandeurs d’emploi a diminué de 19 000.
Cela faisait cinq ans que notre pays n’avait pas connu deux mois consécutifs de baisse du nombre de demandeurs d’emploi.
Il est particulièrement intéressant d’observer la tendance : depuis le 1er janvier, la France compte 70 000 demandeurs d’emploi de moins.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Vous l’avez dit, monsieur le député : cette baisse touche toutes les classes d’âge.
Elle concerne également les chômeurs de longue durée. Cela faisait bien longtemps que notre pays n’avait pas connu de baisse du chômage de longue durée !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Cela montre bien que nous devons continuer notre action, non seulement dans le cadre des outils que vous avez cités – le pacte de responsabilité, le CICE –, mais également en améliorant la qualification des demandeurs d’emploi. Il ne s’agit pas de former pour former, mais de former utile.
C’est le travail que nous menons, avec Clotilde Valter…
…et avec la quasi-totalité des régions. Nous avons signé quatorze conventions régionales, qui portent à la fois sur les métiers en tension et sur les secteurs d’avenir – l’économie numérique, la transition énergétique –, et qui permettent non seulement de préparer la reconversion professionnelle des demandeurs d’emploi, mais également d’investir humainement, pour améliorer les choses.
L’aide à l’embauche pour les PME est essentielle. Depuis le début de l’année, 350 000 demandes ont été déposées, et il est intéressant de constater qu’un grand nombre de TPE et de PME sont en train d’utiliser cette mesure.
Enfin, nous observons une baisse très importante du chômage dans certains départements. Je pense par exemple aux Ardennes, qui connaissent la baisse la plus importante sur le territoire national.
Nous devons donc poursuivre notre action, en prenant non seulement des mesures conjoncturelles, mais aussi des mesures structurelles comme celles que contient le projet de loi travail.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre et porte sur la situation du logement social en outre-mer. J’y associe mes collègues cosignataires du courrier envoyé par le président Jean-Claude Fruteau le 25 mai dernier.
Monsieur le Premier ministre, la politique de votre gouvernement dans ce domaine est bonne. Les moyens financiers sont sanctuarisés et mobilisés. Le plan logement lancé en 2015 par la ministre des outre-mer est ambitieux : il vise la construction de 10 000 logements par an pendant dix ans. Les initiatives spécifiques prises en particulier à Mayotte et en Guyane sur la gestion foncière permettent d’enclencher une dynamique vertueuse en faveur de la construction et de la réhabilitation de logements.
Pourtant, malgré ce volontarisme, nombre d’opérateurs et d’entreprises du BTP se heurtent aujourd’hui à un mur : celui des tracasseries administratives empêchant d’avaliser en temps et en heure le financement des programmes de construction de logements sociaux en outre-mer. Conjugué aux graves retards de paiement infligés depuis plusieurs mois par certaines collectivités, ce ralentissement de l’attribution des agréments en 2015 fragilise encore un peu plus, dans nos territoires, le secteur du BTP, qui est le premier vecteur de croissance et d’emplois.
Il faut en finir avec ces procédures administratives complexes d’agréments fiscaux, qui freinent l’activité de l’ensemble du secteur de la construction. C’est la raison pour laquelle je proposerai, lors de l’examen du projet de loi Sapin 2 porté par le ministre des finances, avec l’appui de mes collègues ultramarins, un amendement de simplification radicale voire de suppression des procédures devenues ubuesques.
Monsieur le Premier ministre, l’action du ministère des outre-mer et la politique de cette majorité ne peuvent être gâchées par de simples pesanteurs administratives. Nous demandons donc un choc vital de suppression totale de ces procédures.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Mesdames et messieurs les députés, le Premier ministre s’intéresse aux outre-mer, qui sont enfin, depuis 2012, une priorité du Gouvernement !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur Lurel, j’ai bien pris connaissance du courrier que vous m’avez adressé, avec dix de vos collègues ultramarins.
Il pointe en effet un certain nombre de blocages et d’inquiétudes.
Vous le savez : mon gouvernement a fait du logement en outre-mer une priorité. Les mesures les plus efficaces seront mises en place avec pragmatisme.
Pour vous répondre très clairement, il faut aller plus loin dans la simplification en faveur de l’investissement dans des logements sociaux en outre-mer, où les besoins sont criants, comme vous l’avez rappelé. En dépit de la création du crédit d’impôt, dans laquelle vous avez joué un rôle majeur en 2014, nous devons agir pour soutenir encore plus directement les bailleurs sociaux.
Oui, les délais d’instruction sont encore trop longs et pénalisent sérieusement l’activité économique dans nos outre-mer. C’est pourquoi nous avons décidé de mettre en oeuvre une réforme majeure en supprimant l’agrément fiscal préalable pour les opérations de logement social conduites par les bailleurs sociaux. Avec Michel Sapin et Christian Eckert, nous souhaitons que cette réforme soit mise en place le plus rapidement possible, dès cet été. Un amendement allant dans ce sens sera donc déposé la semaine prochaine, dans le cadre de la discussion du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique porté par Michel Sapin. Cette mesure permettra de débloquer de nombreux dossiers et de contribuer au succès du plan logement lancé par la ministre des outre-mer.
Je m’adresse particulièrement à vous, mesdames et messieurs les députés de nos outre-mer. Nous porterons aussi cette ambition pour nos territoires ultramarins dans le cadre du projet de loi sur l’égalité réelle en faveur des outre-mer, qui sera défendu par George Pau-Langevin et Ericka Bareigts. Je ne doute pas qu’il sera soutenu sur l’ensemble de vos bancs – en tout cas, c’est ainsi que j’ai compris un certain nombre de déclarations. Cette loi permettra de déployer des outils puissants en faveur du développement économique et social des outre-mer, en tenant compte de la réalité et de la spécificité de ces territoires. Elle sera à la hauteur des attentes légitimes de nos concitoyens ultramarins. Voilà la volonté du Gouvernement !
Il y a des discours, il y a des projets de loi annoncés, mais il y a surtout des actes. Je viens de le démontrer.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Ary Chalus, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le Premier ministre, la sécurité demeure une compétence régalienne et les collectivités locales ne parviendront jamais à obtenir de résultats satisfaisants sans le concours effectif de l’État.
Dans les territoires ultramarins, et singulièrement en Guadeloupe, nous assistons depuis des mois à une explosion de faits de violence en lien avec le trafic de drogue international et la prolifération d’un marché illicite d’armes à feu, notamment des armes de guerre. Un comble, au moment même où le territoire national est placé en état d’urgence !
La situation nécessite une réponse audible et ferme. La protection des biens et des personnes appelle à la même attention, à la même vigilance, en outre-mer comme en métropole !
Ce constat, aussi inquiétant soit-il, est majoritairement lié au manque d’effectif au sein de la police nationale. Il faut, si l’on souhaite lutter plus efficacement contre la récidive, renforcer les effectifs des surveillants pénitentiaires.
L’ensemble des forces de sécurité est unanime : il faut que des dispositions permanentes soient envisagées pour assurer la pérennité d’un dispositif sécuritaire efficient, en outre-mer et plus précisément en Guadeloupe.
C’est en ce sens que je proposais de favoriser le retour au pays des fonctionnaires ultramarins, policiers et surveillants pénitentiaires en attente de mutation pour renforcer les effectifs sur place. Ce choix me semble judicieux car ces fonctionnaires constituent un atout considérable par leur expérience déjà acquise.
De même, lors de l’examen du projet de loi de lutte contre le crime organisé, j’ai proposé une expérimentation en Guadeloupe afin d’élargir les compétences des policiers municipaux pour soutenir leurs collègues de la police nationale en sous-effectif flagrant, mais cette proposition a été refusée par Mme la rapporteure du texte.
Aujourd’hui, j’ai formulé une résolution afin de demander la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur le trafic d’armes dans les territoires ultramarins.
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous prendre des dispositions durables pour répondre à l’attente de nos populations et garantir ainsi une sécurité optimale en outre-mer ? Nous déplorons quarante-cinq victimes en 2015 et nous risquons cette année de dépasser ce record.
Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le député, en réalité, vous me posez trois questions. La première concerne la volonté du Gouvernement de rehausser le niveau des effectifs dans les départements et territoires d’outre-mer pour faire en sorte que l’insécurité qui s’y est installée depuis de très nombreuses années, près de quinze ans, puisse reculer. Et en Guadeloupe, malgré les phénomènes que vous évoquez concernant le trafic d’armes, il y a de premiers résultats positifs sur les atteintes aux biens et aux personnes.
Il faut pour cela des effectifs supplémentaires, vous avez raison de l’indiquer. Je veux rappeler que depuis 2012, ce sont trente-huit policiers et gendarmes supplémentaires – soit des créations nettes d’emploi – qui ont été affectés à la Guadeloupe. Je veux vous annoncer que d’ici au mois de septembre prochain, seize effectifs viendront compléter ces trente-huit postes.
La deuxième question que vous posez est de savoir si nous sommes prêts à favoriser le retour vers leurs départements des ressortissants français originaires de ces départements, qui appartiennent à la police et à la gendarmerie. La réponse est oui. Nous prenons en compte ce que l’on appelle les centres d’intérêts matériels et moraux. Nous avons pris de nouvelles dispositions par circulaire. Elles ont été adoptées par le comité technique ministériel en juin dernier et sont mises en oeuvre depuis le mois de décembre. Elles permettent aux fonctionnaires qui demandent des mutations régulièrement de revenir beaucoup plus rapidement vers leur département d’origine, et les seize emplois créés bénéficieront de ce dispositif nouveau.
Enfin, pour ce qui concerne le trafic d’armes, il y a dans la révision de la directive de 1991, en cours de discussion devant la Commission européenne, des dispositions très fortes qui concernent les départements et territoires d’outre-mer.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Mes chers collègues, dimanche, les électeurs de la cinquième circonscription des Alpes-Maritimes m’ont désignée pour faire entendre leur voix au sein de l’Assemblée nationale à vos côtés.
(« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
Je me suis engagée auprès d’eux à me battre pour leur sécurité, première des libertés.
Monsieur le Premier ministre, vous l’avez exprimé à de nombreuses reprises dans cet hémicycle, notre pays est en guerre. Lorsque vous avez décrété l’état d’urgence nous, l’opposition, vous avons soutenu car la sécurité des Français peut passer par la restriction de certaines de nos libertés.
Ces mesures étaient nécessaires, mais insuffisantes. Nous devons aller plus loin. Vous le savez, la France accueille l’Euro 2016 avec ses fameuses fans zones. À Nice, avec Christian Estrosi
« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.– Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains
…nous avons développé un système de reconnaissance faciale opérationnel dès maintenant. Pourquoi n’autorisez-vous pas son utilisation ? Il suffit de connecter à ce système les fichiers des personnes menaçant la sûreté de l’État pour permettre aux forces de sécurité de détecter les individus dangereux en quelques secondes au milieu d’une foule !
« Très bien » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je déposerai dans les jours à venir une proposition de loi dans ce sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Il est de notre devoir de nous rassembler, au-delà de toute forme d’idéologie, pour la sécurité des Français. On ne peut d’un côté dire que la France est en guerre et de l’autre, refuser l’utilisation de ces technologies. Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt enfin à autoriser la reconnaissance faciale et à donner à nos forces de l’ordre les pouvoirs suffisants pour assurer la sécurité de nos concitoyens ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Madame la députée, permettez-moi tout d’abord de vous adresser mes sincères félicitations pour votre brillante élection de dimanche dernier.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je ne le dis pas pour me faire applaudir par l’opposition, même si c’est peut-être la seule manière d’y parvenir.
Sourires.
Je le fais très sincèrement parce que j’ai suivi le scrutin et j’ai vu l’importance de votre score.
Madame la députée, vous me posez une question tout à fait sérieuse sur laquelle Christian Estrosi a déjà appelé mon attention, celle du dispositif de la reconnaissance faciale que celui-ci se propose de mettre en oeuvre dans la fan zone de Nice.
Ce dispositif pose deux problèmes, même s’il revêt un réel intérêt sur le plan opérationnel
« Ah ! » sur les bancs du groupe Les Républicains
, deux problèmes qui ne peuvent être surmontés que dans le cadre de l’adaptation de notre législation et de notre réglementation.
Premier problème : alors que le gouvernement de François Fillon avait à juste titre essayé, en 2012, de mettre en place un dispositif de sécurisation des titres, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du mois de mars 2012, avait été extrêmement restrictif quant aux conditions de mise en oeuvre de fichiers, y compris de fichiers mettant en oeuvre les technologies que vous proposez. Cette décision du Conseil constitutionnel nous contraint donc considérablement en droit.
Mais il y a un deuxième problème. C’est que la reconnaissance faciale telle qu’elle est pratiquée à Nice, c’est-à-dire l’introduction d’un logiciel dans un dispositif de vidéo surveillance, n’a d’efficacité que si l’on connecte le dispositif de reconnaissance faciale au fichier de police.
Certes, mais il y a un petit sujet qui a sans doute échappé à votre sagacité pourtant légendaire, monsieur Jacob
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain
le FPR – fichier des personnes recherchées – et l’ensemble des fichiers de police, notamment le FNAEG – fichier national automatisé des empreintes génétiques – ont des règlements qui datent, pour ce qui concerne le FPR, de novembre 2010 et qui interdisent l’utilisation de ces fichiers à des fins de reconnaissance faciale.
Il faut donc, là aussi, procéder à cette modification. C’est la raison pour laquelle, madame la députée, nous avons engagé ces travaux pour atteindre l’objectif que prétendait atteindre…
La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Madame la ministre de l’éducation nationale, vous venez d’annoncer une importante revalorisation des salaires des enseignants, et c’est justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.) En effet, nous demandons beaucoup à l’école et à ses enseignants.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
La refondation de l’école de la République, qui est au coeur de la réussite de tous les élèves, se fait au jour le jour grâce à l’implication des enseignants. Ce sont les enseignants qui se mobilisent à chaque instant, souvent au-delà de leurs obligations de service. Lors des événements tragiques que notre pays a connus avec les attentats, c’est vers l’école et ses enseignants que les Français se sont tournés pour inculquer les valeurs de la République aux plus jeunes.
L’exigence d’une vraie formation enfin retrouvée – elle avait été sacrifiée par la majorité précédente – impose le recrutement au niveau master, ce qui exige des enseignants des études plus longues.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Comment, alors, oser dire, comme certains commencent à le faire, que cette revalorisation serait un « cadeau », alors que les enseignants français sont parmi les moins payés d’Europe et qu’il convient d’attirer, pour notre école et ses élèves, les meilleurs des étudiants ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Il est temps qu’enfin cette reconnaissance se concrétise.
C’est aujourd’hui possible grâce aux meilleurs résultats économiques, fruits de l’effort des Français et de la politique économique courageuse que vous avez rappelée tout à l’heure, monsieur le Premier ministre.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Madame la ministre, quels sont les modalités et le calendrier de cette revalorisation tout à fait légitime en faveur de nos enseignants ?
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le député, merci pour votre question. Nous avons clairement en partage un attachement viscéral à l’école de la République, car nous savons, vous et moi, que c’est sans doute le bien le plus précieux pour nos enfants, pour les enfants de ce pays. C’est la raison pour laquelle, depuis 2012, nous menons toutes les réformes éducatives que nous menons, qui sont ambitieuses et visent à garantir la réussite des élèves.
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Mais, sans enseignants, sans personnels d’orientation, sans personnels d’éducation, il n’y aurait pas d’école, ni de refondation de l’école. C’est conscients de cela que, depuis 2012 aussi, nous avons d’abord veillé à réparer les injustices et les aberrations, à commencer par cette absurdité qui avait conduit la majorité précédente à supprimer la formation des enseignants.,
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
mais aussi cette injustice, que je rappelais encore récemment, qui faisait que, depuis plusieurs décennies, nos enseignants du primaire étaient moins reconnus et moins valorisés financièrement que les enseignants du secondaire. Nous l’avons réparée récemment, comme le Premier ministre l’a annoncé.
Avec ce protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations – PPCR –, qui touche, il faut le rappeler, l’ensemble de la fonction publique, nous allons plus loin pour revaloriser l’ensemble des enseignants à chaque échelon et à chaque étape de leur carrière, mais aussi pour moderniser le parcours de carrière et faire en sorte que l’évaluation des enseignants soit repensée, avec en particulier quatre rendez-vous de carrière qui sont désormais transparents et clairs, au cours desquels nous permettrons aux enseignants, notamment aux plus engagés dans des fonctions difficiles, par exemple en éducation prioritaire ou dans des missions de directeur d’école, d’être mieux reconnus et mieux valorisés.
Au final, vous l’avez dit, il s’agit d’une revalorisation financière importante – un milliard d’euros d’ici 2020, dont 500 millions d’euros dès 2017 –, qui permettra par exemple à un professeur certifié de toucher, sur l’ensemble de sa carrière, 23 000 euros de plus que ce qu’il touche aujourd’hui. C’est une excellente nouvelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, notre pays est aujourd’hui l’une des principales cibles du terrorisme. Notre responsabilité collective est à la fois de ne rien céder à la terreur et de prendre toutes les mesures nécessaires à la protection de nos compatriotes.
Nous nous apprêtons à accueillir dans quelques jours l’une des plus belles compétitions sportives : l’Euro de football. Il y aura ensuite le Tour de France. Ce sont des rassemblements populaires., mais ce seront aussi des défis sur le plan de la sécurité, surtout avec la décision que vous avez prise de maintenir des « fans zones », qui seront des cibles au coeur de nos villes.
Ce n’est pas sérieux !
Tous les moyens doivent donc être mis en place pour garantir la sécurité de nos concitoyens et aucune piste ne peut être écartée. Les services de renseignement identifient chaque jour des individus proches des réseaux intégristes et qui sont des menaces potentielles. Nous vous avions déjà alerté, avec notre groupe, sur le danger représenté par les « fichier S ». Nos demandes sont donc très concrètes et nous attendons des réponses précises.
Premièrement, pour l’accès aux stades de l’Euro, le dispositif de sécurité, qui a montré de terribles lacunes lors de la finale de la Coupe de France, permettra-t-il d’interdire l’entrée aux individus fichés « S » ?
Deuxièmement, pouvez-vous garantir aux Français que chaque fans zone sera sécurisée de la même manière, afin qu’aucun « fichier S » suivi pour intégrisme ne puisse y avoir accès ? C’est une mesure indispensable.
Troisièmement et plus largement, combien y a-t-il maintenant d’individus suivis en fichier S pour rapprochement avec les réseaux islamistes et combien d’entre eux sont-ils assignés à résidence ?
Monsieur le Premier ministre, s’il y a prolongation de l’état d’urgence, c’est précisément pour vous donner les moyens d’agir. : il faut mettre ces individus hors d’état de nuire avant qu’ils ne passent à l’acte. Vous ne pouvez faire preuve d’aucun laxisme et nous devons à nos compatriotes la garantie que rien ne sera laissé au hasard. En matière de « fichier S », il est plus que temps d’agir.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains. – « Ce n’est pas sérieux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le député, il faut, sur ces sujets, être à la fois extrêmement vigilant et tout à fait précis.
Approbations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Pour ce qui concerne d’abord le niveau de vigilance, j’ai eu l’occasion de préciser à plusieurs reprises les dispositions prises par le Gouvernement pour atteindre l’objectif, qui est de faire en sorte que les fans zones – mais aussi les stades, comme vous l’avez souligné vous-même dans votre question – soient totalement sécurisés et que ne puissent s’y introduire des individus qui, par leur comportement ou par les moyens dont ils disposeraient, pourraient porter atteinte à la sécurité des supporters.
Nous avons pris pour cela des dispositions très lourdes : près de 70 000 policiers et gendarmes assureront la sécurisation à l’extérieur des fans zones et des stades. Dans le cadre du contrat que nous avons passé, il appartient en effet à l’État d’assurer la sécurité à l’intérieur des fans zones, aux collectivités à l’extérieur de celles-ci et à l’’Union des associations européennes de football – UEFA – à l’intérieur des stades.
Nous avons mobilisé près de 20 000 agents de sécurité privés et le faisons dans le cadre d’un protocole très précis.
Ce protocole permettra d’empêcher que puisse entrer quiconque peut représenter un danger en raison des armes dont il disposerait ou des objets dont il serait doté. Ce dispositif a été testé à de multiples reprises – sept fois avant le match de samedi dernier – et a parfaitement fonctionné. S’il ne l’a pas fait samedi dernier, ce n’est pas parce qu’il s’inscrivait dans le dispositif de l’Euro 2016, mais précisément parce que ce n’était pas le cas, car il s’agissait d’un match de la Fédération française de football, qui ne relevait pas de ce dispositif d’organisation.
Quant à la fiche « S », monsieur le député, il s’agit d’une fiche de mise en attention, et non pas d’une fiche de culpabilité. On ne peut donc pas enfreindre, compte tenu de ce qu’est le droit en France, la liberté d’aller et de venir des personnes qui font l’objet de telles fiches. En revanche, les dispositions prises permettront…
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Alain Calmette, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, le Gouvernement a impulsé une nouvelle dynamique en faveur de la ruralité. Le dernier comité interministériel, organisé il y a dix jours en Ardèche, en est l’illustration. Alors que la majorité précédente, de 2007 à 2012, a bradé les services publics dans les zones rurales à coups de RGPP aveugle,
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains
ce gouvernement essaie avec méthode et pragmatisme de répondre aux attentes du monde rural.
Ces attentes sont au nombre de quatre. D’abord, l’accès aux services publics : la réponse, c’est la création de 1 000 maisons de services au public d’ici à la fin de l’année. Ensuite, l’offre de soins : la réponse, ce sont 798 maisons de santé pluri-professionnelles, déjà en service.
Troisième préoccupation, l’offre éducative : la réponse, ce sont les « conventions ruralité », qui maintiennent le nombre de postes d’enseignants malgré la baisse du nombre d’élèves. Enfin, s’agissant de la résorption des zones blanches et de la couverture numérique, la réponse, c’est un plan gouvernemental sans précédent sur ces deux sujets.
Mais, monsieur le ministre, la ruralité est diverse et les territoires ruraux ne connaissent pas les mêmes trajectoires économiques et démographiques. Si trois quarts des communes rurales sont placées sous l’influence d’une ville, une partie de la population vit dans des communes isolées, éloignées de l’influence des pôles urbains, donc des bassins d’emploi. Cette ruralité-là a besoin d’une attention particulière, d’un État plus présent.
À cet égard, les contrats de ruralité annoncés par le Premier ministre le 20 mai à Privas pourraient être l’outil d’une plus grande efficacité, d’une plus grande cohérence et d’une plus grande mutualisation des efforts en faveur de ces territoires. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus sur le calendrier, le contenu et l’architecture de ces nouveaux contrats, qui viennent compléter l’action concrète et déterminée du Gouvernement en faveur de la ruralité ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.
Monsieur le député, vous avez bien fait de rappeler l’action des gouvernements précédents, notamment la détestable RGPP, qui a fait tant de mal à la ruralité, et au-delà, à la France tout entière !
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Oui, nous agissons concrètement pour les territoires ruraux. En quatorze mois, nous avons réuni trois comités interministériels aux ruralités,
« Bravo ! » et exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains
alors que depuis 2010, aucun comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire – CIADT – n’avait été réuni. Vous avez rappelé les décisions prises en ces occasions : la création des maisons de services au public, avec le retour, pour la première fois, du service public dans les zones défavorisées ; la création des maisons de santé, qui permettent de régler le problème de la proximité des soins dans ces zones les plus défavorisées. Vous avez bien fait de souligner que nous oeuvrons pour la couverture numérique et le réseau de téléphonie mobile.
Lors du dernier comité interministériel, à Privas, nous avons décidé de créer des contrats de ruralité, qui sont le pendant des contrats de ville, qui rencontrent un grand succès. Ils seront mis en place avec souplesse, en partenariat avec les pôles d’équilibre des territoires ruraux – PETR –, les communautés de communes et, s’ils le souhaitent, les départements et les régions.
Des projets d’investissement se construisent. Dans les prochains jours, je donnerai les instructions nécessaires aux préfets pour que l’action du Gouvernement se retrouve dans la réalité du terrain.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le Premier ministre, le 1er mai 2012, François Hollande écrit une lettre aux syndicats : « Tout texte de loi concernant les partenaires sociaux devra être précédé d’une concertation avec eux. Je modifierai la Constitution pour qu’elle reconnaisse le dialogue social ». Le 1er juin 2016, un mouvement de grève illimitée bloquera les trains, les métros, les aéroports, les avions d’Air France et les ports maritimes.
Après les manifestations qui dégénèrent et le blocage des raffineries, il faut reconnaître que, dans le dialogue social, vous vous surpassez ! Quel contraste ! Oui, quel contraste entre ce candidat qui promettait une France apaisée et ce président qui suscite le désordre ! Mais quand on est dans l’impasse, monsieur le Premier ministre, c’est bien connu, on recule ! Sur scène, vous affichez votre fermeté et le Président vous emboîte le pas en annonçant le maintien de l’article 2 de la loi travail. Mais dans les coulisses, vous vous apprêtez à un grand marchandage avec les syndicats les plus radicaux.
C’est d’ailleurs ce qu’a déclaré hier votre ministre, M. Le Guen : « Il n’y a pas de troc, mais le Gouvernement est dans une posture de dialogue avec les organisations syndicales pour résoudre un certain nombre de questions qui existent depuis très longtemps ». Ces questions, les Français les connaissent : la question des cheminots, qui prennent leur retraite à 55 ans ; celle des contrôleurs aériens, dont les primes atteignent jusqu’à 160 % de leur salaire ; celle, encore, des anciens monopoles d’État, qui sont menacés de faillite si l’on ne revoit pas les avantages historiques de leurs effectifs.
Alors, je me demande si la vraie loi que vous allez faire passer sera non pas la loi travail, que vous avez vidée de son contenu, mais plutôt la loi des bloqueurs, la loi des privilégiés, la loi de ceux qui salissent l’engagement syndical, alors que nous avons tant besoin de partenaires sociaux !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le Premier ministre, céderez-vous à ces vieilles négociations inavouées, ou redonnerez-vous enfin ses lettres de noblesse à la démocratie sociale ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Monsieur le député, nous avons été particulièrement clairs, et ce depuis plusieurs mois. Lorsque le rapport de Jean-Denis Combrexelle a été remis au Premier ministre, nous avons proposé une négociation aux partenaires sociaux, comme nous l’avions fait sur le compte personnel d’activité. S’agissant de la loi travail, ils ne l’ont pas souhaitée. Nous avons donc mené des concertations. L’article sur le licenciement économique ayant été ajouté tardivement, nous avons repris les discussions avec l’ensemble des organisations syndicales et patronales pendant quinze jours. Les améliorations, fruit d’un compromis, ont d’ailleurs été saluées par les organisations qui soutiennent aujourd’hui la loi travail. Oui, nous avons dialogué, et nous avons repris 700 amendements déposés par les députés dans le projet de loi qui sera présenté au Sénat.
Mais puisque vous utilisez cette tribune pour nous interroger sur la loi travail, à mon tour de vous poser une question : quel est votre projet ?
Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Les sénateurs, en commission, ont déposé certains amendements. Expliquez aux Français quel est le projet qui a été présenté !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Il ne m’est pas compliqué de dire ici quelle en est la mesure phare : c’est l’abrogation des 35 heures ; la possibilité, par accord d’entreprise, de travailler 40, 41 ou 42 heures et à défaut, 39 heures, qui devient ainsi la durée légale. Dites-le ! Vous vous faites les défenseurs des partenaires sociaux, mais avec vous, le dialogue social est à la main des patrons. Voilà votre projet !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le député, la social-démocratie, c’est le progrès économique et social pour tous. Le libéralisme décomplexé, c’est la richesse indécente pour quelques-uns, et la casse sociale pour le plus grand nombre. À chacun de choisir son camp !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Jean-Claude Buisine, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes âgées et de l’autonomie.
Madame la secrétaire d’État, le 10 décembre dernier, les députés votaient la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement et je tiens ici à saluer le travail de mes collègues de la commission des affaires sociales.
Cette loi est ambitieuse. Elle a pour but de préparer très concrètement notre société au vieillissement de la population française et de l’adapter aux nouvelles pratiques. Grâce aux progrès de la médecine et sachant qu’un Français sur trois aura plus de 60 ans en 2060, nous devons anticiper cette évolution sur nos territoires : vieillir oui, mais vieillir bien.
Aussi faut-il moderniser les logements des personnes qui vieillissent, leur proposer pour cela un appui financier ; revaloriser les aides aux personnes dépendantes et notamment l’allocation personnalisée d’autonomie ; enfin, reconnaître un statut et une place aux proches.
Cette loi part d’un principe simple : tout le monde souhaite rester autonome et bénéficier des soins de proximité. Cela passe par la lutte contre les déserts médicaux, lutte que nous avons entreprise via des dispositifs incitatifs d’installation pour les médecins, et cela passe aussi par le développement des aides à domicile.
Madame la secrétaire d’État, les services d’aide à domicile sont essentiels pour les personnes âgées ou dépendantes, notamment lorsqu’il n’y a pas d’établissement de soins de proximité. Outre l’aspect médical, les aides à domicile sont indispensables aux personnes âgées dans leur quotidien.
Vous allez lancer des opérations de soutien au secteur des aides à domicile, des missions d’appui locales, notamment dans le département de la Somme. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes âgées et de l’autonomie.
Monsieur le député, vous avez souligné avec raison l’importance de la loi d’adaption de la société au vieillissement. Le Gouvernement est pleinement mobilisé en vue de son application : plus de la moitié des décrets ont d’ores et déjà été publiés.
Cette loi a été élaborée en étroite concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. C’est dans le même esprit que je veille à sa mise en oeuvre concrète sur le territoire.
J’ai donc reçu ce matin M. Dominique Bussereau, président de l’Assemblée des départements de France, que je remercie parce que cette rencontre a été l’occasion de rappeler que toutes les nouvelles mesures de cette loi sont intégralement financées par l’État. Pour ne donner qu’un exemple, ce sont 453 millions d’euros pour une année qui ont été alloués à l’allocation personnalisée d’autonomie : tous les versements ont été effectués au mois d’avril dernier.
Toujours en vue d’améliorer les services aux personnes âgées, le Gouvernement a lancé, en concertation avec les fédérations du secteur, trois missions d’appui en Corrèze, en Meurthe-et-Moselle et dans la Somme.
Par ailleurs, la conférence des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées prévue par la loi fédère des acteurs dans chaque département et coordonne les dépenses de manière efficace. Ces conférences ont bénéficié dès le mois d’avril d’un concours de 102 millions d’euros et je vous annonce ici qu’une enveloppe supplémentaire de 5,58 millions bénéficiera à chaque département qui le demandera, pour un meilleur accompagnement.
Interruptions sur les bancs du groupe Les Républicains.
Sachez, monsieur le député, que je suis déterminée à faire appliquer tous les progrès prévus par cette loi : l’État restera à la fois présent, impliqué, mais aussi exigeant, avec pour objectif le respect des personnes âgées, de leur entourage, de celles et de ceux qui travaillent dans ces métiers.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Ma question s’adresse à Mme Ségolène Royal, ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer.
Madame la ministre, la presse a relaté la proposition du Gouvernement d’indemniser EDF à hauteur de 80 à 100 millions d’euros pour la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim…
…ce qui représente un trimestre de chiffre d’affaires, alors que le rapport parlementaire de mes collègues Mariton, des Républicains, et Goua, socialiste, avait conclu, je cite : « La seule fermeture de la centrale entraînerait une perte globale pour la collectivité de près de 5 milliards d’euros. »
Je rappelle qu’EDF aura à charge d’indemniser nos partenaires suisses et allemands qui totalisent 32 % des parts de la centrale.
Madame la ministre, je rappelle également que la dernière visite décennale s’est soldée par 300 millions d’euros de dépenses pour améliorer encore et toujours le niveau de sûreté de cette centrale.
Cela classe Fessenheim parmi les sites français qui intègrent le niveau d’exigence de sûreté le plus récent, ce qui vient d’être confirmé par l’Autorité de sûreté nucléaire pour laquelle « les performances en matière de sûreté nucléaire et de protection de l’environnement du site de Fessenheim se distinguent de manière positive ».
En revanche, dans votre proposition, pas un mot des 2 000 emplois directs et indirects qui seront supprimés par cette fermeture. Aucune annonce du Gouvernement pour installer de l’activité sur ce territoire. Pas un mot sur l’impact économique : fermetures de commerces, fermetures d’écoles, ventes de logements. Pas un mot sur les compensations de pertes fiscales pour les collectivités locales.
Il s’agit, madame la ministre, d’une proposition de dupes, irrespectueuse de cette grande entreprise française qu’est EDF et de ses salariés. Alors, madame la ministre, je vous demande de surseoir au projet de décret de fermeture de la centrale, et de ne pas faire de cet outil et de ses salariés les victimes d’un arrangement électoral avec les écologistes.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.
Monsieur le député, je ne veux pas polémiquer avec vous.
« Ah ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je connais votre attachement à votre territoire, où j’ai eu l’occasion de me rendre. J’ai pu y apprécier tout ce que vous entreprenez en faveur de la transition énergétique, des énergies renouvelables, sur un territoire à énergie positive. Je sais que vous êtes parfaitement conscient des exigences et de la difficulté à engager cette transition énergétique.
Vous avez parlé de respect, monsieur Sordi, et je vous rejoins sur ce point. Vous avez pu constater que la démarche entreprise est tout à fait respectueuse puisqu’un délégué interministériel à la fermeture de Fessenheim est au travail depuis trois ans.
Un débat a lieu avec la direction de l’entreprise : le président-directeur général lui-même m’a écrit pour demander que le dialogue s’approfondisse, « dans la perspective de la fermeture des deux réacteurs de Fessenheim ».
S’agissant de l’indemnisation, je rappellerai, puisque les Français nous écoutent, que l’État est actionnaire à 85 % de cette entreprise. Les Français sont donc propriétaires de 85 % de cette entreprise. Toute indemnisation revient par définition à l’État.
En outre, le consommateur qui paie ses factures d’électricité a payé depuis 40 ans – puisque Fessenheim aura 40 ans l’année prochaine – et la construction de la centrale, et le coût de son démantèlement qui est intégré dans les factures.
Ma responsabilité, c’est aussi de protéger le contribuable dans ce qui, vous avez raison, doit être donné pour favoriser la mutation industrielle du site. Je crois que nous pouvons partager cet objectif, cette exigence : le travail continue et je serai très heureuse de venir sur place pour y contribuer avec les salariés.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le Premier ministre, quel malin plaisir prenez-vous, avec le Président de la République, à diviser continuellement les Français ?
Protestations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Vous les divisez avec le projet de loi travail, avec les réformes controversées des rythmes scolaires et du collège, avec la remise en cause des fondements même de notre politique familiale.
Vous divisez les Français dans de nombreux domaines alors que nous devrions être au contraire rassemblés pour affronter une situation internationale explosive et pour relever les défis du redressement de notre économie.
La commémoration du centenaire de la bataille de Verdun aurait pu, aurait dû être une formidable occasion de nous rassembler dans le souvenir de tous les Poilus tombés au Champ d’honneur, au lieu de quoi les initiatives déplacées que vous avez prises ont suscité des polémiques.
Il y eut tout d’abord le concert de ce groupe de rap, connu pour dénigrer violemment notre pays. Heureusement, le sursaut de nombreux Français a entraîné son annulation.
Mais ensuite, ce week-end, les images de 3 400 jeunes courant au milieu des croix blanches qui recouvrent la nécropole nationale de Douaumont ont choqué nombre de nos compatriotes.
Car au-delà des intentions artistiques de cette chorégraphie, les Français ont surtout ressenti ce spectacle comme une énorme faute de goût.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Là où ils attendaient le recueillement et le respect dus aux héros de Verdun, là où ils attendaient un geste fort, à l’image des mains jointes de François Mitterrand et de Helmut Kohl, ils ont assisté à un spectacle qui piétinait – au sens propre et au sens figuré – les symboles de la mémoire et du sacrifice !
Monsieur le Premier ministre, comprenez-vous que pour beaucoup de Français courir entre des tombes, courir au milieu des morts de Verdun, c’est quelque chose qui ne se fait pas ?
Alors, monsieur le Premier ministre, quand cesserez-vous d’attiser le feu en divisant continuellement les Français au lieu de les rassembler ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le député : diviser, c’est chercher des polémiques où elles n’ont pas lieu d’être
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Très honnêtement et sincèrement, en vous écoutant, je me rappelais les images que j’ai eu l’occasion de voir dimanche – puisque je n’étais pas présent à Verdun. J’ai eu l’occasion de voir une belle cérémonie. Chacun, ensuite, peut avoir son avis, mais tout de même…
C’était une belle cérémonie pour rendre hommage à ceux qui ont versé leur sang pour notre patrie et pour la liberté. C’était une belle cérémonie, après les rénovations qui ont été engagées sur place, dans ce lieu unique de mémoire. C’était une belle cérémonie parce que la mémoire et la vie – c’est-à-dire la jeunesse – s’étaient données rendez-vous. Tout de même ! Les symboles étaient me semble-t-il suffisamment clairs !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Et cent ans après, alors qu’il n’y a plus aucun Poilu survivant, monsieur le député, quel message la Chancelière allemande et le Président de la République ont-ils voulu passer ? C’est un message d’amitié entre la France et l’Allemagne, ces deux pays qui se sont fait la guerre pendant des siècles !
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
C’est un message d’espoir pour la jeunesse et un message de foi dans l’Europe ! Voilà, monsieur le député, quel était le message !
Alors, on peut se diviser, polémiquer et débattre sur bien des sujets mais, tout de même, lorsqu’il s’agit de ces commémorations, de la France et de l’Allemagne main dans la main, de l’Europe, on cherche à élever le débat, monsieur le député !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Gaby Charroux, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, le quatre-vingt-dix-neuvième Congrès des maires de France s’est ouvert ce matin sur fond de colère de l’ensemble des élus locaux. Dans le même temps, un sondage IPSOS révèle que trois Français sur quatre témoignent d’un fort attachement à leur commune. Cette importance que revêt la commune pour nos concitoyens n’a pas empêché l’État de réduire drastiquement les moyens de celle-ci à travers la dotation globale de fonctionnement, la DGF.
Les baisses cumulées pour la période 2014-2017 devraient atteindre 28 milliards d’euros, dont 11 milliards pour le seul bloc communal. Ces réductions massives ont pour conséquence soit de contraindre les maires à augmenter la fiscalité pesant sur les ménages ou les entreprises, soit d’augmenter le coût ou de baisser le niveau des services rendus aux habitants.
L’investissement public local est lui aussi lourdement pénalisé. Il devrait reculer de 30 % d’ici à 2017, avec de nombreuses conséquences sur l’emploi.
À la réduction des dotations s’ajoute pour les communes celle de l’aide qu’elles recevaient des intercommunalités, des départements et des régions, et la hausse des dépenses obligatoires – je veux parler, par exemple, des dépenses sociales ou des activités périscolaires.
Cette austérité organisée ne date pas d’hier. Elle avait été largement entamée par la droite avec notamment, on s’en souvient, la suppression de la taxe professionnelle. Mais aujourd’hui, les maires n’en peuvent plus. Ils sont dans l’incapacité croissante de faire face aux besoins et aux attentes de leurs habitants comme aux charges nouvelles.
Rappelons que la DGF n’est pourtant en rien une subvention aux communes : c’est de l’argent que l’État doit aux collectivités en raison des missions qui leur sont confiées.
Aussi, monsieur le Premier ministre, allez-vous entendre la demande unanime des associations d’élus qui réclament l’annulation, dès le projet de loi de finances pour 2017, de la baisse des dotations ?
Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.
Monsieur le député, vous avez raison de souligner l’attachement des Français à leurs maires. Les Français ont raison de les aimer car ils sont admirables de dévouement !
Monsieur le député, je rappelle qu’avant notre arrivée aux responsabilités, il y a quatre ans, le Premier ministre de l’époque déclarait que la France était en faillite et que 700 millions d’euros de dette supplémentaire avaient été engagés pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy.
Il était donc indispensable que la nouvelle majorité et le Gouvernement, avec courage, prennent les choses en main pour redresser les comptes publics et qu’à cette fin nous fassions les efforts nécessaires. C’est précisément ce que nous avons décidé avec le pacte de stabilité de 50 milliards – lequel englobe aussi les collectivités locales. Nous en sommes à la troisième année.
Nous travaillons à une réforme de la dotation globale de fonctionnement,…
… mais je sais aussi que la dernière marche est la plus difficile à franchir. Nous rencontrons donc les élus. Le Président de la République s’adressera aux maires réunis en congrès jeudi après-midi et il aura naturellement l’occasion d’évoquer ces questions.
Sachez que nous sommes bien conscients des problèmes que rencontrent le bloc communal et l’ensemble des élus, mais sachez aussi que nous avons la volonté et le devoir de redresser les finances de la France !
Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent
la disparition d’Anne Grommerch, le 15 avril, a provoqué une émotion considérable à Thionville, dans le Nord mosellan, en Lorraine, au Luxembourg et à l’Assemblée nationale, où nous ne soupçonnions pas que cette femme si spontanée et souriante menait un tel combat contre la maladie.
Injustement emportée à l’âge de quarante-cinq ans, cette grande dame de conviction était estimée. Estimée par toutes celles et tous ceux qui, un jour, croisèrent son chemin, quels que soient leur condition sociale ou leur horizon politique. La foule qui se pressa à ses obsèques à Thionville en témoigne, comme ces applaudissements spontanés qui retentirent sur le parvis de l’église Saint-Maximin. Les innombrables témoignages de reconnaissance décrivent une femme exceptionnelle, une femme de conviction, une femme de dialogue, accessible et courageuse. « Vous avez gagné tous les combats, mais le mal se cache, fouine, ronge et jamais ne se montre. Ça n’était pas loyal, ça n’était pas pour vous », a écrit l’un de ses concitoyens thionvillois, en hommage à celle qui avait la noblesse et la simplicité des grandes âmes. Car Anne Grommerch était ce que l’on appelle une belle personne : sincère, débordante d’énergie, attachante et généreuse.
Notre regrettée collègue est née le 11 décembre 1970. Elle était originaire de Waldwisse, cette petite commune qui constituait autrefois un trait d’union ferroviaire entre le sommet des côtes de Moselle et la Sarre. Mais c’est à Thionville qu’elle grandit, où ses parents, Fernand et Irène Brandenbourger, tenaient une boucherie, rue de l’Agriculture.
Anne Grommerch était profondément enracinée dans sa région, la seule région française à partager ses frontières avec trois États. Même si la Lorraine est sans aucun doute profondément intégrée à la France, Thionville s’est toujours située dans un espace de transition entre les mondes roman et germanique. C’est ainsi que, outre le français, bien sûr, elle parle aussi l’allemand et le luxembourgeois. Toute petite, quand ses parents parlaient en platt, racontait-elle, elle notait les mots sur un bout de papier pour en demander le sens à sa grand-mère.
Après avoir poursuivi des études en sciences de la nature et obtenu un diplôme d’études universitaires générales, elle devient, en 1991, assistante de direction dans un bureau d’expertise automobile au Luxembourg. En janvier 1999, elle est recrutée par une grande entreprise qui assure la vente et la distribution de boissons sur le marché luxembourgeois. Elle est déléguée commerciale, puis responsable de secteur avant de devenir, en 2006, directrice des ventes. Elle raconte qu’elle a gravi les échelons sans avoir jamais rien demandé. « C’est l’histoire de ma vie, dit-elle. J’ai été promue à des postes pour lesquels je n’avais pas postulé. »
Au Grand-Duché, elle rencontre, dans le cadre professionnel, Éric Grommerch, Belge originaire de la région de Spa, qui tient un cabinet d’expertise et qu’elle épouse le 28 juin 2001. « Il a fallu y aller par étapes, racontait-elle : pour lui faire franchir la frontière, j’ai accepté que nous nous installions à Roussy-le-Village, tout en sachant que nous irions à Thionville lorsque les enfants seraient en âge d’entrer au collège. »
Car celle qui vit au pays des batailleurs de Roussy, où elle fit son entrée en politique à l’occasion des élections municipales de 2008, a toujours gardé un attachement particulier à la ville de son enfance, à tel point que le député-maire de Thionville, Jean-Marie Demange, lui proposa d’être sa suppléante à l’occasion des élections législatives de 2007.
Devant cette proposition, Anne Grommerch hésite. Un cancer vient de lui être diagnostiqué. Elle pense à sa famille, à ses jeunes enfants, et entend ne pas abandonner son emploi. Mais la force et la constance de ses convictions refuseront de céder face à la maladie car elle fait partie de ces femmes et de ces hommes qui se font une haute idée du devoir et du faire. C’est ainsi qu’elle s’engage, avec énergie, dans cette bataille électorale couronnée de succès. Le 17 novembre 2008, le destin s’impose à elle une nouvelle fois : elle est propulsée de manière imprévue sur la scène politique nationale à la suite du décès de son député.
À l’Assemblée nationale, sous la XIIIe législature, elle découvre avec passion le travail en commission, d’abord à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, dont elle suit assidûment les travaux. En 2009, elle est notamment membre de la mission d’information de la commission des affaires sociales sur la prise en charge des victimes de l’amiante. Puis, à partir de 2011, elle siège à la commission des affaires économiques.
Incontestablement, Anne Grommerch se passionne pour la vie publique. Son objectif est de trouver des solutions simples à des problèmes simples : « Action, réaction », telle sera sa devise, qu’elle répétait régulièrement.
Son ascension est bientôt fulgurante. En mars 2010, elle est élue conseillère régionale de Lorraine, fonction qu’elle cumulera avec son mandat parlementaire jusqu’à sa démission, conformément à la loi. Elle se spécialise dans les problèmes des travailleurs transfrontaliers, qu’elle connaît bien, personnellement, dans tous leurs aspects concrets, et devient secrétaire nationale de l’Union pour un mouvement populaire, l’UMP, chargée des transfrontaliers.
En 2012, elle choisit de faire la campagne pour les élections législatives, alors qu’elle doit faire face à une récidive de son cancer et à un traitement médical lourd. Le combat politique rejoint le combat contre la maladie. « Rester à la maison à attendre, c’était mourir doucement », déclara-t-elle après l’élection, qu’elle remporte aux côtés de son suppléant, Patrick Weiten, recueillant 53,07 % des voix.
Dans les couloirs du Palais Bourbon, Anne Grommerch se fait un nom. Ses travaux parlementaires sont à son image : sérieux, rigoureux, continus. Elle est rapporteure pour avis de sa commission pour les projets de loi de finances, traitant de tout ce qui concerne les entreprises. Probablement en raison de sa proximité sentimentale, c’est presque naturellement qu’elle devient vice-présidente du groupe d’amitié France-Luxembourg.
Forte de son ancrage territorial et de son intérêt pour les questions de sidérurgie, elle devient membre de la mission parlementaire de suivi des accords entre l’État et le groupe Arcelor Mittal et de contrôle de la stratégie des entreprises à capitaux publics. En février 2013, elle devient vice-présidente de la commission d’enquête sur la situation de la sidérurgie et de la métallurgie françaises et européennes dans la crise économique et financière et sur les conditions de leur sauvegarde et de leur développement. Membre de la mission d’information commune sur la Banque publique d’investissement, elle prend également la vice-présidence du groupe d’études Sidérurgie et fonderie.
Car, depuis l’Assemblée nationale, elle garde un oeil sur son territoire, cette terre industrielle, cette porte de France, et l’on comprend mieux pourquoi elle confiera à son père, avant de s’éteindre, qu’ « [elle aura] toujours Thionville au coeur ».
En mars 2014, elle se jette dans la bataille des municipales et devient première magistrate de sa ville de coeur, avec seulement 77 voix d’avance. Si l’élection est annulée en avril 2015 par le Conseil d’État, les électeurs lui renouvellent leur confiance, le 21 juin 2015, cette fois par 53,74 % des suffrages exprimés.
Également élue présidente de la communauté d’agglomération Portes de France-Thionville, elle s’investit dans le développement de son territoire et nous livre une véritable leçon de grammaire urbaine, où le temps de la ville se conjugue avec le temps de la vie des habitants.
S’appuyant sur ses connaissances du monde économique, elle obtient, en juin 2015, le label Métropole French Tech pour la Lor’NTech, cette communauté du sillon lorrain, qui réunit les agglomérations de Thionville, Metz, Nancy et Épinal. Elle suit également avec attention les conditions de fonctionnement de la centrale nucléaire de Cattenom et les problèmes de l’emploi local. Mai c’est la création de la maison de l’emploi à Thionville, qu’elle mène à bien, qui aura été son combat prioritaire, comme elle se plaisait à le dire.
La devise nationale luxembourgeoise, extraite du chant patriotique Le char de feu du poète Michel Lentz et qui est gravée au fronton de la maison communale d’Esch-sur-Alzette, ville où elle est décédée une semaine après son hospitalisation dans un état grave, correspond bien à la personnalité d’Anne Grommerch, dont la forte identité, le courage et la ténacité méritent l’éloge de tous : « nous voulons rester ce que nous sommes. »
Comme l’ont reconnu les Thionvillois, « c’est un rayon de soleil qui s’en va et une étoile qui apparaît. »
À son mari, Éric, à ses enfants, Thomas et Charlotte, à sa famille, à vous, Fernand et Irène Brandenbourger, ses parents, à sa soeur et à son frère, ici présents, à ses amis, à son fidèle premier adjoint devenu maire de Thionville, vous, Pierre Cuny, à ses collègues du groupe Les Républicains, à ses proches de Thionville, de Lorraine et du grand-duché du Luxembourg, j’adresse, au nom de tous les députés de l’Assemblée nationale et en mon nom personnel, mon amitié et mes condoléances profondément émues et attristées.
La parole est à M. le Premier ministre.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs, il y a six semaines, Anne Grommerch nous quittait, laissant un vide immense au sein de son groupe, Les Républicains, mais aussi au sein de notre assemblée toute entière.
Aujourd’hui, avec M. le président Christian Jacob, nous lui rendons cet ultime hommage, dans ce lieu qui avait tant d’importance pour elle – M. le président de l’Assemblée nationale vient de le rappeler. Ce lieu était pour elle le symbole de son long engagement et de sa volonté, qui ne s’est jamais démentie, de servir son pays, en étant fidèle à ses idées.
Dans de telles circonstances, face à l’immensité de la tristesse de ses proches, de ses amis, de sa famille, il est toujours difficile de trouver les mots justes. Pour Anne Grommerch, un mot s’impose, celui de « détermination », car la détermination de cette élue locale, qui avait su développer ce rapport particulier aux gens, était exemplaire.
Anne Grommerch était en effet avant tout une femme de contact, une femme de terrain. Elle le revendiquait. Peu avant son décès, elle affirmait d’ailleurs son désir de se consacrer pleinement à son mandat de maire, à l’issue de son second mandat à l’Assemblée nationale. Les nombreux témoignages le prouvent : il y avait chez elle une amitié sincère pour ses semblables et un souci constant de ses concitoyens. Au cours de ses obsèques, il y a eu, je le sais, non seulement des applaudissements, mais aussi de nombreuses larmes sur les visages des quelques milliers de personnes qui y assistaient. Tous – habitants, responsables publics de toute tendance, fonctionnaires – savaient qu’ils venaient de perdre une élue hors du commun.
Autant que ce mot de détermination, un lieu s’impose, celui de Thionville. C’est là qu’Anne Grommerch est née et a grandi. C’est là, dans ce département de la Moselle, tout près de la frontière avec le Luxembourg, qu’elle a construit sa vie professionnelle et personnelle. Maîtrisant quatre langues, cette battante avait commencé à travailler dès l’âge de vingt ans. Puis, remarquée pour ses qualités, sa soif constante d’apprendre, elle a gravi tous les échelons, jusqu’à devenir la directrice des ventes d’une société frontalière. Elle décide par la suite de se consacrer pleinement à l’exercice de ses mandats, locaux et nationaux, comme conseillère municipale puis régionale, mais aussi comme députée, puis maire de sa ville de Thionville, qu’elle voulait vraiment conquérir – j’en ai été le témoin – et pour laquelle elle voulait le meilleur.
Anne Grommerch savait tout concilier – ses mandats, son engagement, sa vie de famille –, tout en gardant une très grande pudeur, malgré la maladie, qui ne la ménageait pas. Pourtant elle ne se plaignait pas : elle savait garder le sourire, donner le change, continuer d’avancer, malgré aussi les attaques, qui l’ont parfois meurtrie.
Anne Grommerch laissera l’image d’une élue de la Nation dynamique et impliquée, notamment sur les questions de l’entreprise, de l’innovation, de la formation professionnelle et, bien sûr, de l’emploi, dans cette région lorraine. Elle les connaissait très bien, ces questions, pour les avoir elle-même explorées dans la première partie de sa vie professionnelle. Elle était une élue au contact des réalités.
Nous n’étions certes pas d’accord sur tout mais elle maîtrisait ses sujets. Elle défendait ses idées avec pugnacité et honnêteté. En tant que ministre de l’intérieur, je connaissais sa préoccupation en matière de sécurité. Cet engagement de chaque instant, local comme national, cette envie de parler à tous, de convaincre, cette foi dans la défense de l’intérêt général sont au fond le plus bel hommage que l’on peut rendre à la responsabilité confiée par le peuple. Je crois pouvoir dire qu’Anne Grommerch, par son travail, par son humanité, par son engagement,méritait pleinement cette confiance.
Il est souvent question ici de ce qui nous divise mais c’est la magie de cette assemblée que d’être le lieu où nous débattons, où nous nous confrontons, comme à l’instant, mais où nous sommes aussi capables de rendre hommage à une élue appréciée sur tous les bancs.
Ce qu’Anne Grommerch nous a montré, c’est que la rigueur de l’engagement, la mobilisation pour la collectivité sont des valeurs que nous devons tous partager. Son exemple, comme celui de Sophie Dessus, à qui nous avons rendu hommage il y a quelques semaines, restera, je le sais.
À Éric Grommerch, son époux, à ses enfants, à ses parents, à sa famille et à ses proches, à ses collègues du groupe Les Républicains et à ses collaborateurs, j’adresse, au nom du Gouvernement et en mon nom personnel, mes condoléances les plus attristées et toute mon affection.
En hommage à la mémoire de notre regrettée collègue, j’invite l’Assemblée à respecter une minute de silence.
Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement observent une minute de silence.
La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Marc Le Fur.
L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales (nos 3336, 3761), de la proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des ressortissants d’un État membre de l’Union européenne autre que la France pour les élections municipales (nos 3338, 3763) et de la proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France (nos 3337, 3762).
La Conférence des présidents a décidé que ces trois textes donneraient lieu à une discussion générale commune.
Ce rappel au règlement porte sur le déroulement de nos travaux en vertu de l’article 58, alinéa 1, monsieur le président.
Nous avions examiné ces questions de manière approfondie avec M. Jean-Jacques Urvoas, le président de la commission des lois de l’époque, aujourd’hui ministre. Plusieurs points essentiels avaient alors été actés, notamment le fait que les nouvelles dispositions ne s’appliqueraient pas aux prochaines élections et qu’une concertation serait menée avec les élus des Français de l’étranger. Malheureusement, ladite concertation n’a pas eu lieu. Il n’y a eu en particulier aucune concertation avec l’Assemblée des Français de l’étranger. Or la commission des lois de l’AFE a émis un avis défavorable sur les dispositions retenues dans le cadre de la présente proposition de loi, qui semblent pourtant recueillir l’assentiment du Gouvernement ainsi que celui de l’ensemble des groupes, y compris le mien.
Une telle démarche soulève une réelle difficulté. S’agissant de l’inscription de nos compatriotes de l’étranger, la concertation la la plus large aurait été normale.
Il arrive que ma famille politique me reproche de soutenir des textes du Gouvernement. En l’espèce je m’opposerai à un texte soutenu non seulement par le Gouvernement, mais aussi par mon propre groupe et par divers parlementaires sur tous les bancs, car je serai toujours là pour défendre les Français de l’étranger quand ils sont attaqués dans leurs droits – ce qui est le cas. Et je veux dire avec force que je le regrette.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Monsieur le président, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, chers collègues, les trois propositions de loi qui vous sont soumises sont l’aboutissement d’un travail mené conjointement par M. Jean-Luc Warsmann et moi-même dans le cadre d’une mission d’information créée par la commission des lois en septembre 2014.
Dans notre rapport d’information, adopté à l’unanimité le 17 décembre 2014, nous avions dressé un constat alarmant : un nombre trop élevé de nos concitoyens se trouvent éloignés du processus électoral. On peut en effet estimer à 3 millions le nombre des non inscrits et à 6,5 millions celui des mal inscrits, c’est-à-dire des personnes inscrites dans un bureau de vote qui ne correspond pas à leur lieu de résidence effectif. Notre rapport contenait une série de propositions visant à lutter contre ce phénomène, afin de renforcer la participation aux élections tout en garantissant la sécurité du processus électoral.
Les trois propositions de loi que nous avons déposées le 9 décembre 2015 visent à mettre en oeuvre l’essentiel de nos propositions d’ordre législatif. La première, ordinaire, rénove les modalités d’inscription sur les listes électorales en France. La deuxième, organique, transpose aux listes consulaires cette réforme. La dernière, elle aussi organique, l’applique aux listes complémentaires servant à la participation des ressortissants de l’Union européenne aux élections municipales : conformément à l’article 88-3 de la Constitution, elle devra être votée dans les mêmes termes par les deux assemblées.
La rédaction de ces trois textes a fait l’objet d’une concertation étroite avec le Gouvernement, puisque nous avons eu de nombreux échanges au cours de l’année 2015 avec le ministère de l’intérieur, lequel a conduit, parallèlement à ces échanges, une concertation interministérielle. Par ailleurs, le volet administratif et technique de la réforme a fait l’objet d’un travail d’expertise mené conjointement par les inspections générales des finances, de l’administration et de l’Institut national de la statistique et des études économiques, qui ont rendu un rapport extrêmement complet en septembre 2015.
Enfin, compte tenu des enjeux de cette réforme, nous avons proposé au président de l’Assemblée nationale de saisir pour avis le Conseil d’État en application du dernier alinéa de l’article 39 de la Constitution. Le Conseil d’État a approuvé les objectifs des propositions de loi, soulignant « l’intérêt général qui s’attache à la réussite de cette réforme pour le renforcement de la démocratie et de la participation électorale, comme en termes de simplification des démarches et de modernisation des relations entre le public et l’administration », et formulé plusieurs recommandations, principalement d’ordre technique, qui nous ont amenés à proposer plusieurs amendements, lesquels ont été adoptés par la commission des lois.
La réforme que nous vous proposons d’adopter assouplit le calendrier d’inscription sur les listes électorales grâce à la suppression de la période annuelle d’inscription et de révision : tout électeur aura la possibilité de s’inscrire jusqu’à trente jours avant un scrutin. Nous avons en effet constaté, dans le cadre de notre mission d’information, l’effet déterminant du calendrier d’inscription sur les phénomènes de non-inscription et de mal-inscription. Cette mesure de simplification permettra une meilleure adaptation du calendrier d’inscription au rythme électoral et à la mobilité résidentielle et professionnelle des électeurs. Nous avons veillé par ailleurs à ce que ce nouveau calendrier permette un examen des différents recours, hors cassation, avant chaque scrutin.
Un répertoire électoral unique, tenu par l’Institut national de la statistique et des études économiques – l’INSEE –, sera créé, avec pour seule finalité la gestion du processus électoral. Les listes électorales communales en seront extraites, ce qui permettra de les rendre plus fiables en garantissant l’unicité de l’inscription.
Les personnes ayant acquis la nationalité française seront inscrites d’office, comme c’est déjà le cas aujourd’hui pour les jeunes majeurs.
Les jeunes atteignant l’âge de 18 ans entre les deux tours pourront participer au second tour d’un scrutin.
La proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France transpose la réforme aux listes consulaires. Elle organise la fin de la double inscription pour les Français établis hors de France, afin de remédier aux difficultés relevées par le Conseil constitutionnel lors des élections présidentielles de 2007 et de 2012. Une procédure d’urgence avait en effet dû être mise en place afin de permettre à de nombreux électeurs, affirmant être indûment inscrits comme « votant à l’étranger », de voter en France.
Enfin, nous proposons que la réforme entre en vigueur au plus tard le 31 décembre 2018, ce qui permettra de mener une opération de mise en cohérence des listes communales et du fichier général des électeurs tenu par l’INSEE. Pendant cette opération, les listes électorales existantes resteront bien entendu disponibles afin de permettre à tout moment l’organisation d’élections.
L’initialisation du répertoire électoral unique représente un important chantier technique et administratif, un projet quasi « industriel », ainsi qu’il a pu être qualifié lors des débats du Conseil d’État. Je salue le fait qu’un chef de projet ait d’ores et déjà été désigné pour coordonner la mise en oeuvre du nouveau système, qui nécessitera un important travail de formation des agents communaux.
La commission des lois a adopté des amendements sur plusieurs des points que j’ai évoqués.
Elle a souhaité que les modalités de constitution et de fonctionnement du répertoire électoral unique soient définies par décret en Conseil d’État, de même que les informations, autres que celles énumérées dans la loi, nécessaires à son bon fonctionnement. Cela permettra l’éventuelle extension du répertoire à d’autres usages, comme le développement d’un « compte électoral personnalisé » permettant aux électeurs d’accéder aux données les concernant et de demander leur mise à jour.
Une disposition transitoire pour la première année d’application de la réforme a été prévue : le délai d’inscription sera fixé à quarante-cinq jours environ au lieu de trente jours, afin de remédier à d’éventuelles difficultés dans la mise en oeuvre du nouveau système.
Mes chers collègues, je vous invite à voter ces trois propositions de loi, qui ont été élaborées dans un esprit transpartisan. Au-delà de l’objectif évident de simplification et de modernisation, la réforme des modalités d’inscription sur les listes électorales contribuera à renforcer la participation citoyenne aux élections, indispensable au fonctionnement de notre démocratie.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
Étant donné que je partage ce qui vient d’être dit par ma collègue, mon intervention se limitera à trois points.
Je m’arrêterai en premier lieu sur la démarche qui a été suivie. Celle-ci a été très longue, puisqu’elle a commencé par la création d’une mission transpartisane, confiée par la commission des lois à ma collègue Elisabeth Pochon et à moi-même. Le rapport que nous avons rendu le 17 décembre 2014 a reçu le soutien unanime des collègues de la commission des lois. Je les en remercie.
Ce travail s’est poursuivi par la rédaction de trois propositions de loi. Je tiens, monsieur le ministre, à remercier tant votre cabinet que vos services pour les nombreuses réunions de travail qui ont permis, d’abord de partager un diagnostic, puis d’échanger sur les solutions juridiques susceptibles d’être proposées. C’est ainsi que trois propositions de lois ont pu être déposées en décembre 2015, à l’issue d’une année de concertations et d’approfondissements.
Nous avons pu à nouveau apprécier combien la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a été positive puisqu’elle nous a donné la possibilité de recueillir l’avis du Conseil d’État sur ces propositions de loi. Nous avons eu avec le Conseil une séance de travail approfondi, qui nous a permis d’enrichir nos réflexions. Nous en avons tiré les conséquences en adoptant des dispositions complémentaires.
En deuxième lieu, j’insisterai, en complément de ce qui vient d’être présenté, sur quelques apports des propositions de loi.
D’abord, la compétence en matière d’inscription ou de radiation est transférée des commissions administratives aux maires. Actuellement la révision des listes électorales est faite en fin d’année et ce sont les commissions administratives qui prennent les décisions d’inscription ou de radiation. Le principe de la réforme est celui d’une inscription au fil de l’eau : quand on vient habiter dans une commune, on se présente au secrétariat de la mairie, s’il existe une redevance d’enlèvement des ordures ménagères, on s’enregistre, et immédiatement après on est inscrit sur les listes électorales. Si au contraire on vous le refuse, on vous le notifie et vous pouvez le contester.
Il s’agit d’une marque de confiance dans les maires de notre pays, qui nous paraissent les autorités les plus aptes à effectuer ce travail de manière sérieuse et honnête – ma collègue et moi-même tenons à le souligner, en cette semaine où se tient le congrès des maires. Les commissions administratives seront maintenues, mais elles ne joueront plus du tout le même rôle : elles exerceront un contrôle a posteriori des modifications des listes électorales, en s’appuyant par exemple sur les cartes d’électeurs qui ne sont pas parvenues à leurs destinataires. Le système actuel sera conservé pour les communes de moins de 1 000 habitants ; pour les communes de plus de 1 000 habitants où il existe une opposition au sein du conseil municipal, nous proposons que la commission de contrôle soit transpartisane.
Je veux insister, mes chers collègues, monsieur le ministre, sur l’importance de l’innovation que constitue le répertoire électoral unique. Comme ma collègue vient de le rappeler, on dénombre plus de 6 millions de mal inscrits. L’établissement d’un répertoire national suppose qu’on remédie le plus possible à ce phénomène de mal inscription. Les services du Gouvernement ont indiqué aux services de la commission des lois que l’INSEE comptait utiliser un certain nombre de fichiers, dont celui de l’assurance maladie et le répertoire national d’identification des personnes physiques, l’objectif étant d’identifier et de localiser le plus grand nombre d’électeurs possible.
Soyons clairs – et je crois que le Gouvernement souhaite le préciser par voie d’amendement – : il n’est pas question que ces dispositions s’appliquent aux élections de 2017. L’échéance est trop proche et chacun mesure l’ampleur du travail qui reste à faire.
En revanche, monsieur le ministre, il serait peut-être bon que la circulaire précisant les modalités d’organisation des élections présidentielles et législatives impose aux présidents des bureaux de vote de faire un relevé de toutes les inexactitudes qui auraient été constatées. Nous savons bien, pour avoir fait les uns et les autres l’expérience de la tenue d’un bureau de vote, qu’on constate à chaque élection des erreurs dans les prénoms, les dates de naissance, etc. Il serait utile que tout cela soit collecté de sorte que l’on rectifie les erreurs matérielles afin de garantir l’exactitude des listes.
Enfin, nous avons souhaité exclure la Nouvelle-Calédonie de l’application de ces nouvelles dispositions car la constitution des listes y est un élément du processus en cours, avec lequel nous ne voulons interférer en rien.
En troisième lieu, je voudrais vous indiquer les apports de la commission des lois.
Premier apport, nous avons modernisé une disposition désuète relative aux commerçants. Il y a cinquante ou soixante ans, quand on était installé en son nom propre – ce qui était le cas de presque tous les commerçants –, on avait le droit de voter là où l’on payait ce qu’on appelait la « patente », la taxe professionnelle. Cette disposition n’est plus adaptée à la situation actuelle, où la plupart de ces activités s’exercent dans le cadre d’une société, afin notamment de protéger son patrimoine. Il existe par conséquent une inégalité entre les commerçants qui exercent en nom propre, devenus très minoritaires, qui peuvent voter là où ils exercent, et les autres, qui ne le peuvent pas. Nous avons donc adopté un amendement assurant une égalité de traitement entre les commerçants qui sont depuis plus de deux ans consécutifs indivisaires, gérants de société ou actionnaires majoritaires et ceux qui exercent en nom propre.
Nous avons, au cours de la réunion tenue en application de l’article 88, donné un avis favorable à un amendement proposé par plusieurs de nos collègues et qui nous semble régler un problème souvent évoqué, celui rencontré par les jeunes ayant à s’insérer dans la vie professionnelle. La situation des jeunes qui louent une chambre dans la ville où ils étudient et paient à ce titre une taxe d’habitation sans avoir le moindre intérêt à voter dans une commune où ils ne sont que de passage offre l’exemple même du domicile subi, sans parler de ceux qui partent à l’étranger dans le cadre du programme ERASMUS – European action scheme for the mobility of university students – ou de ceux qui, à leur entrée dans la vie active, sont amenés à résider quelques mois dans une autre ville dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée.
Alors que le maire de leur commune d’origine pourrait à bon droit radier ces jeunes des listes électorales – et parfois le fait, si bien qu’ils ne votent plus –, cet amendement vise à leur permettre de rester inscrits jusqu’à l’âge de vingt-six ans – soit la limite d’âge pour l’affiliation à la sécurité sociale étudiante –, dans la commune de leurs parents, sauf si, bien entendu, ils font souche dans leur lieu de résidence où, dans ce cas, ils iront voter. Cette mesure contribuera, je crois, à éviter certaines radiations peu appréciées et qui parfois éloignent durablement les jeunes de l’exercice de la citoyenneté.
Nous avons aussi adopté un amendement de nos collègues écologistes aux termes duquel les réunions de commissions de contrôle seront publiques. Les textes réglementaires devront donc prévoir la possibilité de rendre publics les dates et lieux de ces réunions, faute de quoi la mesure n’aurait pas grand sens.
Tels sont les principaux apports que je souhaitais évoquer. Nous avons bien sûr entendu tous ceux qui en ont fait la demande : la dernière audition à laquelle ma collègue et moi avons procédé a eu lieu ce midi. Vous trouverez, à la page 179 de notre rapport, la liste des personnes auditionnées ; cette liste a d’ailleurs été complétée depuis.
Je remercie par avance chacune et chacun de la part qu’il prendra au débat, et, à la suite de ma collègue rapporteure, forme le voeu que ces trois propositions de loi soient adoptées par notre assemblée. Je forme aussi celui que le Gouvernement soit attentif à ce que l’ordre du jour des assemblées permette au Sénat de se se saisir de ces textes et à ceux-ci d’entrer dans notre droit aussi vite que possible. Cela pourra vous sembler excessivement volontariste mais nous connaissons d’expérience l’ampleur du travail administratif et informatique qui sera nécessaire. Le fait que le Parlement se prononce définitivement dans les prochaines semaines donnerait aux services et administrations concernés la meilleure visibilité pour faire en sorte que ces textes entrent pleinement en application d’ici 2019.
Applaudissements sur de nombreux bancs.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, les trois textes, sur lesquels vous êtes appelés à vous prononcer aujourd’hui à l’initiative d’Élisabeth Pochon et de Jean-Luc Warsmann portent une réforme ambitieuse et moderne de l’accès au suffrage et de la construction des listes électorales.
Il y a quelques mois, dans ce même hémicycle, j’indiquais déjà à quel point le Gouvernement était soucieux de réformer en profondeur les listes électorales. Votre assemblée était alors réunie pour examiner un texte permettant de rouvrir de façon exceptionnelle, jusqu’au 30 septembre 2015, l’inscription sur ces listes afin de mettre le plus grand nombre possible de Français en situation de participer au scrutin régional des 6 et 13 décembre. Cette réforme, adoptée ici même le 13 juillet dernier, a connu, nous le savons, un franc succès puisque près d’un million de Français en ont bénéficié.
J’avais alors indiqué qu’il ne s’agissait que d’une première étape vers une réforme structurelle de plus grande ampleur. À l’origine de ces réformes, il y a, je veux le souligner, d’une part l’engagement du Président de la République en faveur d’une modernisation de l’accès au scrutin, grâce en particulier à la possibilité pour nos concitoyens de s’inscrire sur les listes électorales jusqu’à trente jours avant un scrutin, et d’autre part le rapport des députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann, remis en décembre 2014, dont je salue la qualité et qui a constitué la préfiguration des dispositions législatives que nous examinons aujourd’hui.
Ce rapport évalue à 3 millions le nombre d’électeurs non-inscrits et à 6,5 millions celui des électeurs mal inscrits. Ces chiffres éloquents suffisent à montrer la nécessité de moderniser notre système de gestion des listes électorales.
La majeure partie des préconisations du rapport, dont les plus ambitieuses, sont reprises par les propositions de loi aujourd’hui soumises à votre examen. J’ai souhaité que mes services se mettent à la disposition des parlementaires pour l’élaboration de ces textes et nous entretenons, depuis plus d’un an maintenant, des échanges réguliers qui nous ont permis d’aboutir.
Ainsi, le Gouvernement a missionné au printemps 2015 ses meilleures inspections générales – celle des finances, celle de l’administration, celle de l’INSEE et celle des affaires étrangères – afin de préciser les modalités concrètes de mise en oeuvre de la réforme. Elles ont défini les contours du répertoire électoral unique, innovation au coeur des textes qui vous sont présentés. Avec Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann, nous avons cherché à en mesurer les implications pratiques pour les maires, acteurs centraux du processus électoral, dont la compétence dans ce champ s’exerce au nom de l’État. Nous avons également cherché à adopter le point de vue de l’électeur, à qui cette réforme doit bien entendu bénéficier.
Les rapporteurs ont conduit de très nombreuses auditions pour affiner le dispositif afin de le rendre plus accessible aux citoyens et de le faire correspondre au mieux à ce que sont leurs pratiques.
Enfin, j’y insiste, cette réforme a vocation à servir l’intérêt général. Très symboliquement, elle est portée de façon bipartisane par deux députés que je veux remercier pour l’immense travail accompli ces derniers mois : ils ont toute ma gratitude et ma reconnaissance et je me réjouis de l’esprit qui a présidé à l’élaboration de ces textes.
Mesdames et messieurs les députés, les trois propositions de loi en discussion contiennent de nombreuses mesures. La plus emblématique d’entre elles est sans doute celle qui permettra à nos concitoyens de s’inscrire sur une liste électorale jusqu’à trente jours avant un scrutin. Ce rapprochement entre la date butoir d’inscription et le jour du scrutin permettra d’établir des listes électorales plus représentatives. Cette disposition permettra surtout à nos concitoyens de mieux faire coïncider le cycle de mobilisation électorale et le calendrier des démarches administratives nécessaires pour accéder au scrutin.
Deux autres dispositions m’apparaissent centrales en ce que, au-delà même de la modernisation des listes électorales, elles favoriseront l’acte d’inscription sur ces listes : l’inscription d’office des personnes venant d’acquérir la nationalité française et celle des jeunes atteignant la majorité entre deux tours d’un scrutin. L’accès à la nationalité doit en effet s’accompagner d’un plein accès à la citoyenneté ; il n’existe par ailleurs aucune raison de priver des jeunes majeurs du droit de participer à une élection. Vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, la motivation fondamentale de cette réforme est d’assouplir les conditions d’accès au scrutin.
Cette réforme exige en parallèle de revoir en profondeur le processus d’élaboration et de mise à jour des listes électorales. Le temps est au coeur du processus d’inscription. Or nous avons désormais l’opportunité de tirer tous les bénéfices des nouvelles technologies. C’est pourquoi l’innovation majeure introduite par ces propositions de loi est la dématérialisation complète des échanges d’informations entre les communes et l’Institut national des études et de la statistique. Une telle dématérialisation est en effet indispensable pour permettre les inscriptions jusqu’à trente jours avant le scrutin : sans elle les nécessaires flux de documents sous format papier entre les communes, puis des communes à l’INSEE ne permettraient pas de respecter ces délais ambitieux.
La dématérialisation et la création du répertoire électoral unique permettront de traiter le problème des doubles inscriptions, autre dysfonctionnement majeur mis en évidence par le rapport des députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann. En effet, le système informatique que nous construirons pour agréger les listes électorales permettra de recouper les listes communales entre elles et, par conséquent, de simplifier des vérifications aujourd’hui complexes pour les communes.
De surcroît, cette réforme est positive par son postulat : remettre le maire au coeur du dispositif. Elle s’accompagne en effet d’une nouvelle distribution des compétences : ce sont désormais les maires, et non plus des commissions administratives, qui seront compétents pour procéder aux inscriptions et aux radiations des listes électorales ; ce sont leurs décisions qui alimenteront directement le répertoire électoral unique tenu par l’INSEE. Ils restent maîtres de leur liste communale, laquelle sera extraite du répertoire.
Enfin ces propositions de loi traitent d’un sujet qui fut à l’origine de nombreuses difficultés lors de précédents scrutins, notamment présidentiels : celui de la double inscription des Français établis hors de France qui peuvent, vous le savez, être inscrits à la fois sur une liste électorale consulaire et sur une liste électorale communale.
Si la double inscription a pu paraître nécessaire pour des raisons pratiques, l’évolution du droit électoral en faveur de cette catégorie d’électeurs a fait perdre toute légitimité à ce système totalement dérogatoire. En effet, depuis la création des mandats de députés des Français de l’étranger en 2009, les Français inscrits uniquement sur une liste électorale consulaire disposent d’une représentation parlementaire complète. Auparavant il fallait, pour exercer son droit de vote lors des élections législatives, être inscrit en France, ce qui justifiait la possibilité d’être inscrit sur deux listes distinctes. Avec la création des sièges de députés élus par les Français établis hors de France et la possibilité pour ceux-ci de voter lors des élections européennes, la double inscription semble perdre de sa pertinence.
Par ailleurs, l’extrême complexité des règles ou leur mauvaise compréhension – lesquelles conduisent à devoir préciser pour chaque scrutin si les intéressés sont autorisés à voter en France ou à l’étranger – ont été sources de difficultés, de nombreux électeurs étant persuadés qu’ils avaient le droit de voter à un endroit alors qu’ils auraient dû voter à un autre. Le sujet a été abordé il y a quelques semaines, dans ce même hémicycle, à l’occasion de la discussion de la proposition de loi organique réformant l’élection présidentielle, qui a apporté une première pierre à l’édifice : l’automaticité entre la désinscription du registre des Français de l’étranger et la radiation des listes électorales consulaires. Cette mesure ne règle pas tout, certes, mais elle apporte une réponse à la situation qui nous semblait la plus urgente, celle des Français résidant à l’étranger de bonne foi qui, se désinscrivant du registre, pensaient cette démarche suffisante et se trouvaient dans l’impossibilité d’accéder au suffrage en France.
Il est donc proposé, dans un souci de simplification et de clarté qui ne peut être que bénéfique à la sincérité du scrutin, de revenir sur cette possibilité : chaque électeur devra choisir entre l’inscription sur une liste consulaire ou sur une liste communale. Toutefois, je veux rassurer sur ce point les électeurs inscrits hors de France : ce volet de la réforme ne sera mis en oeuvre qu’après les échéances électorales de 2017,afin notamment de ne pas modifier le corps électoral à un an des échéances législatives.
De la même manière, les électeurs inscrits hors de France doivent savoir que leur choix n’est pas irrévocable. Chaque Français pourra à tout moment choisir de modifier sa situation électorale en fonction de sa situation personnelle, à condition, bien entendu, d’effectuer les démarches d’inscription nécessaires sur la liste électorale dans les trente jours qui précèdent le scrutin.
Mesdames et messieurs les députés, ces propositions de loi, qui sont, comme leur nom l’indique, l’émanation du travail du Parlement et non du Gouvernement – même si celui-ci a eu l’occasion de dire par ma voix tout le bien qu’il en pensait –servent un objectif démocratique de première importance. C’est peut-être pour cette raison qu’elles n’émanent non d’un seul groupe mais d’un consensus entre le principal groupe de la majorité et celui de l’opposition.
Nous entendons par ce texte faciliter l’inscription de nos concitoyens sur les listes électorales en faisant en sorte que celles-ci reflètent le plus possible la réalité du corps électoral car nous voulons lutter contre l’abstention qui mine notre démocratie.
C’est là un sujet sur lequel nous devrions pouvoir nous rassembler, au-delà de nos intérêts particuliers. Toutes les élections récentes ont montré combien il est urgent de s’attaquer à l’abstention : c’est un enjeu républicain et un enjeu de rassemblement.
C’est pourquoi Le Gouvernement remercie les députés Jean-Luc Warsmann – issu des rangs de l’opposition – et Élisabeth Pochon – issue de ceux de la majorité – pour leur initiative et apporte un soutien sans réserve aux textes aujourd’hui soumis à votre examen.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la question des modalités d’inscription sur les listes électorales a souvent été sous-estimée en raison de son apparence technique. Aujourd’hui cependant, au regard de l’accroissement constant de l’abstention, elle constitue un enjeu démocratique non négligeable. Plusieurs études ont en effet pointé les contraintes pesant sur le calendrier d’inscription sur les listes électorales ainsi que sa complexité.
Notre système est en effet l’un des plus lourds et des plus compliqués au monde. Dans leur ouvrage La démocratie de l’abstention, publié en 2007, Cécile Braconnier et Jean-Yves Dormagen relèvent que les électeurs qui sont correctement inscrits sont rarement des abstentionnistes constants mais que le vote intermittent se développe depuis les années 1980, tendance qui s’est d’ailleurs confirmée et amplifiée ces dernières années. La non-inscription sur les listes électorales, ou la « mal-inscription », c’est-à-dire l’inscription un bureau de vote ne correspondant plus au domicile, constitue ainsi un facteur essentiel d’exclusion durable du jeu électoral.
Comme les rapporteurs l’ont parfaitement indiqué, sur les 45 millions d’inscrits sur les listes électorales, on dénombre 6,5 millions de mal-inscrits auxquels il faut ajouter au moins 3 millions de Français qui ne sont pas inscrits du tout.
Face à ce constat, auquel évidemment personne ne peut se résigner, la mission d’information créée en 2014 s’est très utilement interrogée sur les conditions qui permettraient de concilier l’impératif démocratique de participation citoyenne aux élections et la nécessaire sécurisation de la procédure d’inscription. Dans leur rapport, nos collègues Elisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann avaient formulé vingt-et-une propositions particulièrement pertinentes en vue d’assouplir le calendrier de l’inscription et de simplifier sa procédure.
Les trois propositions de loi que nous examinons aujourd’hui s’appuient sur ces recommandations. Notre groupe soutient la philosophie et les principaux axes de la réforme proposée au travers de ces trois textes, et d’abord l’assouplissement du calendrier d’inscription sur les listes électorales, qui offrirait la possibilité à tout électeur de s’inscrire jusqu’à trente jours avant un scrutin.
Cette disposition apparaît nécessaire : actuellement, la révision annuelle de la liste électorale communale oblige à s’inscrire au plus tard le 31 décembre de chaque année pour participer aux scrutins organisés à partir du mois de mars de l’année suivante. Ce calendrier contraignant dissuade certainement un nombre important d’électeurs potentiels de venir aux urnes. Comme la mission d’information l’a souligné, ce calendrier joue un rôle déterminant dans l’éloignement de millions d’électeurs de l’institution électorale. La révision permanente des listes devrait permettre de remédier, de manière significative, même si ce n’est que partiellement, à cette situation.
De même, la création par l’INSEE d’un répertoire électoral unique, dont les listes électorales communales seront extraites, permettra, en garantissant l’unicité de l’inscription, de les rendre plus fiables.
Le remplacement dans chaque commune de la commission électorale par une commission de contrôle chargée de vérifier la régularité des décisions prises par le maire constitue également une avancée. Ces commissions exerceront un contrôle a posteriori et disposeront du pouvoir de saisir le juge d’instance.
Nous sommes également favorables à une meilleure prise en compte de la mobilité résidentielle des électeurs via la réduction de cinq à deux ans de la durée minimale nécessaire à la reconnaissance de la qualité de contribuable local.
Autre mesure positive, la procédure d’inscription d’office, aujourd’hui applicable aux jeunes de dix-huit ans, sera étendue aux personnes qui acquièrent la nationalité française. De même, les jeunes devenant majeurs entre les deux tours d’une élection pourront voter lors du second tour de scrutin.
Nous aurions, pour notre part, préféré que la réforme puisse entrer en vigueur dès les élections de l’année prochaine, mais nous nous rangeons à l’avis éclairé de nos rapporteurs : ils nous ont convaincu qu’il n’était guère possible d’aller plus vite au regard de l’ampleur de la réforme. Ainsi la mise en place d’un répertoire unique nécessitera plusieurs mois.
Toutes ces mesures concrètes vont incontestablement dans le bon sens, même si, bien sûr – chacun en conviendra – la réforme proposée ne suffira pas à revitaliser notre démocratie. La désaffection de nos concitoyens envers les élections est en effet un phénomène bien plus profond. Beaucoup de nos concitoyens ne s’inscrivent pas sur les listes électorales et beaucoup d’autres ne se déplacent pas le jour du scrutin parce qu’ils doutent de l’utilité de leur vote. Il s’agit d’un point crucial : ce constat se vérifie désormais à chaque scrutin, à l’exception, probablement, des élections municipales. La crise démocratique que connaît aujourd’hui le pays est telle qu’à l’évidence, la réforme des modalités d’inscription sur les listes électorales ne peut, à elle seule, permettre d’y répondre.
Cependant, cette réforme est de nature à favoriser une meilleure participation aux élections, tout en garantissant la sécurisation du processus électoral. C’est pourquoi le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera pour ces trois propositions de loi.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’État et de la simplification, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, depuis de nombreuses années, une défiance envers le système politique et ses représentants s’est installée.
Cette méfiance s’enracine élection après élection et se manifeste, de façon très concrète, par une augmentation nette du taux d’abstention lors des différents scrutins, y compris lors de l’élection présidentielle, alors que celle-ci reste la plus mobilisatrice. L’écart se creuse : en 1974, l’abstention ne s’élevait au second tour qu’à 12,7 %, alors qu’elle était de près de 20 % en 2012.
Cependant, ces chiffres sont trompeurs en ce qu’ils ne reflètent pas une réalité bien plus préoccupante. En effet, ils font l’impasse sur les quelque dix millions de Français qui ne prennent pas ou plus part au scrutin parce qu’ils ne sont pas ou sont mal inscrits sur les listes électorales – les rapporteurs l’ont rappelé.
Il faut rappeler que 7 % du corps électoral ne sont pas actuellement en capacité de voter faute d’inscription sur les listes électorales. À cela s’ajoutent 6,5 millions de Français mal-inscrits, c’est-à-dire inscrits dans un bureau de vote ne correspondant plus à leur lieu de résidence effectif. Ces chiffres sont considérables !
Certes certains choisissent de ne pas participer à la vie démocratique mais ces textes visent à faciliter, autant que faire se peut, la participation des autres. S’il est de notre responsabilité collective de travailler quotidiennement à redonner l’envie aux Français qui s’abstiennent de prendre à nouveau part à la vie démocratique, il est également de notre ressort de faciliter les procédures d’inscription sur les listes électorales.
Le fait de ne pas être inscrit ou d’être mal inscrit reflète une réalité sociologique qui ne peut nous échapper. Selon les chiffres de l’INSEE, des caractéristiques comme le lieu de naissance ou le niveau de diplôme joue un rôle important dans l’inscription. Les chiffres de l’Institut sont éloquents : plus de dix-huit points séparent le taux d’inscription des jeunes adultes ayant au plus le brevet des collèges – 72 % – du taux d’inscription de ceux ayant un diplôme supérieur au baccalauréat, qui s’élève à 91 %.
Les textes que nous allons étudier visent donc à favoriser l’égalité de l’ensemble des citoyens français devant l’inscription sur les listes électorales. De ce point de vue, la mesure la plus importante est, bien entendu, la modification du délai d’inscription figurant à l’article 2 de la proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales.
Les Français pourront désormais s’inscrire jusqu’à trente jours avant un scrutin Cette disposition est de bon sens. En effet, nos concitoyens prennent plus facilement connaissance des échéances électorales quelques semaines avant celles-ci, notamment du fait de leur couverture par les médias. Or les modalités d’inscription actuellement en vigueur ont pour conséquence que nombre d’électeurs se rendent compte bien trop tard qu’ils ne pourront pas participer à un scrutin faute d’inscription conforme. Il semble donc qu’en levant cette barrière administrative et technique on gagnerait un nombre important d’électeurs, qui prendraient prendre part aux scrutins si ce délai était modifié.
Dans de nombreux pays européens les délais sont très réduits : c’est le cas en Espagne, où les listes électorales sont tous les mois automatiquement mises à jour grâce aux déclarations domiciliaires obligatoires. Cette obligation de déclaration du domicile permet à de nombreux pays de mettre à jour leurs registres électoraux de façon automatique, dans des délais relativement courts avant chaque élection : c’est le cas en Allemagne, en Belgique, ou encore au Danemark. Outre-Rhin par exemple, le délai est de trente-cinq jours.
Une telle obligation de déclaration domiciliaire, qui semble pourtant faciliter l’inscription, n’existe pas en France, en raison notamment, d’après les informations dont je dispose, d’obstacles constitutionnels, touchant notamment au respect de la liberté d’aller et de venir. Il faudrait cependant que nous puissions débattre d’une telle possibilité, qui me paraît intéressante.
C’est pourquoi les rapporteurs ont fait le choix de rénover les modalités relatives à l’inscription en conservant un relais local qui aura la charge de transmettre à l’INSEE les informations issues des demandes d’inscription. Il est important de rappeler que cette proposition de loi confère à l’INSEE la mission de centraliser ces informations et de tenir ce répertoire national, qui sera mis à jour en permanence et d’où seront extraites les listes électorales.
Cependant, au-delà de cette évolution majeure du rôle de l’INSEE, ce sont bien les maires qui occuperont une place centrale dans le nouveau dispositif. Actuellement, au sein de chaque commune, une commission administrative de révision est chargée de statuer sur les demandes d’inscription et de radiation. Elle se compose de trois membres pour chaque bureau de vote. Cette organisation est particulièrement lourde et peu adaptée aux modifications proposées par le texte, en particulier en matière de délais d’inscription. C’est pourquoi l’article 2 de la proposition de loi ordinaire vise à modifier L. 18 du code électoral afin de transférer au maire la compétence de radiation et d’inscription.
Afin de lutter contre le risque d’accumulation de demandes non traitées et d’engorgement des services municipaux à l’approche des dates limites d’inscription avant un scrutin, l’alinéa 15 de ce même article 2 prévoit que le maire devra statuer sur toute demande d’inscription « dans un délai de cinq jours suivant son dépôt. »
Cependant, dans la mesure où le législateur va accorder des pouvoirs importants et décisionnels au maire, nous devons nous assurer qu’ils s’exerceront dans un cadre clairement défini et mettre en place des organes de contrôle ainsi que des procédures permettant de contester ses décisions.
C’est pourquoi le texte propose de modifier l’article L. 20 du code électoral afin de permettre à tout électeur inscrit sur la liste électorale de la commune de demander au tribunal d’instance l’inscription d’un électeur sur cette liste ou sa radiation ou au contraire de contester de telles décisions. Tous les problèmes de recours ont donc été examinés et les dispositions concernées vont dans le bons sens.
S’agissant du contrôle, point qui me paraît également important, le texte de loi prévoit la mise en place d’une commission de contrôle composée d’élus qui, dans les commune de moins de 1 000 habitants, n’appartiendront pas à l’exécutif municipal. Pour celles de plus de 1 000 habitants, l’opposition y sera même quasiment majoritaire. Le rôle de cette commission sera essentiel puisqu’elle sera indépendante et pourra même former des recours à l’encontre de décisions des maires qui ne lui paraîtraient pas justifiées.
La proposition de loi ordinaire est assortie de deux propositions de loi organiques visant à rénover, l’une les modalités d’inscription sur les listes électorales des ressortissants d’un État membre de l’Union européenne autre que la France pour les élections municipales et l’autre les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France. Ces propositions de loi prévoient que ces nouvelles règles s’appliqueront également à l’établissement des listes électorales complémentaires servant à la participation des ressortissants de l’Union européenne aux élections européennes et municipales.
Quelques précisions et adaptations sont prévues pour l’établissement des listes électorales consulaires, notamment s’agissant des compétences exercées dans les circonscriptions consulaires en lieu et place du maire par l’ambassadeur, le chef de poste consulaire ou leur représentant. Le contrôle sera également assuré puisque le texte prévoit la création de commissions de contrôle chargées de vérifier la régularité des listes électorales.
Pour ma part, j’estime que ces trois textes doivent faire l’objet d’un large consensus puisqu’ils visent à revigorer la démocratie de notre pays. Ils ne constituent évidemment pas la seule réponse à apporter mais lever des obstacles administratifs est un préalable simple et néanmoins indispensable dans cette optique.
Il va de soi que le groupe socialiste, écologiste et républicain votera ce texte qui renforcera le lien entre les électeurs et leurs élus.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame et monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, les trois propositions de loi que nous examinons aujourd’hui sont issues d’un travail mené conjointement par Jean-Luc Warsmann et Elisabeth Pochon dans le cadre d’une mission d’information créée par la commission des lois en septembre 2014. Aussi, je tiens d’abord à remercier les rapporteurs pour la grande qualité de leur travail et, surtout, le temps qu’ils ont y consacré afin d’arriver à ce résultat.
Aux termes de l’article 3 de la Constitution, « Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques. » Le suffrage universel direct ouvert à tous les citoyens français majeurs est donc un principe fondateur de notre démocratie. Il appartient cependant à la loi de déterminer les conditions dans lesquelles le droit de vote s’exerce, notamment les règles définissant les modalités d’inscription des électeurs sur les listes électorales.
Dans la mesure où près de 9,5 millions d’électeurs sont mal inscrits ou non inscrits sur les listes électorales et où la date de clôture de l’inscription sur les listes électorales est éloignée de la date du scrutin, le système actuel peut apparaître relativement préjudiciable à l’implication des citoyens dans le processus électoral. C’est pourquoi une mission d’information commune aux députés des groupes socialiste, radical et citoyen et aux députés Les Républicains de la commission des lois avait été créée au début de la législature pour assouplir les modalités d’inscription sur les listes. Elle avait formulé vingt-trois propositions en ce sens.
Voici donc l’Assemblée nationale saisie de propositions de loi déposées à la fois par Mme Elisabeth Pochon et M. Jean-Luc Warsmann, auteurs et rapporteurs des trois propositions de loi, qui en outre ont pu bénéficier de l’avis éclairé du Conseil d’État.
La proposition de loi ordinaire tend à rénover les modalités d’inscription sur les listes électorales s’appliquant à toutes les élections régies par des dispositions ordinaires du code électoral, tandis que les deux propositions de loi organique transposent cette réforme aux listes électorales dont le régime relève d’une loi organique.
La première proposition de loi organique vise à moderniser les modalités d’établissement des listes électorales des Français établis hors de France, fixées par la loi organique du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l’élection du Président de la République, déclinaison de la loi du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel, ayant elle aussi valeur organique conformément à l’article 6 de notre Constitution.
La seconde proposition de loi organique prévoit la même rénovation des listes électorales des ressortissants communautaires pour les élections municipales, en application de l’article 88-3 de la Constitution.
Les deux propositions de lois organiques et la proposition de loi visent donc avant tout à moderniser la procédure d’inscription sur les listes, en réformant profondément les conditions d’examen et de contrôle de la recevabilité des demandes d’inscription ; à mieux articuler les démarches administratives et les démarches liées au déménagement avec les démarches d’inscription ; à créer un répertoire électoral permanent et unique géré par l’INSEE ; à mettre fin à la révision annuelle des listes et à permettre aux citoyens de s’inscrire jusqu’à trente jours avant la date d’une élection ; à permettre aux personnes atteignant l’âge de dix-huit ans entre les deux tours d’une élection de voter au second tour ; à confier au maire la compétence de l’inscription et de la radiation sur les listes électorales ; à coordonner le droit applicable aux droits des citoyens de l’Union européenne concernant les élections municipales avec le droit commun ; à modifier la loi organique du 31 janvier 1976 relative à l’inscription sur les listes électorales consulaires pour mettre fin à ce qu’on a pu appeler la double inscription – qui peut s’avérer problématique quand les électeurs concernés reviennent en France –, mais pas avant 2018, en tout cas après la présidentielle et les législatives de 2017, pour répondre à la demande du Conseil constitutionnel.
En ce qui concerne le vote des Français de l’étranger, comme beaucoup dans cet hémicycle, en tout cas la totalité de ceux de mes collègues Les Républicains qui les représentent, j’aurais souhaité que le système de double inscription soit maintenu mais, en 2007 et en 2012, le Conseil constitutionnel a appelé le législateur organique à mettre fin aux difficultés récurrentes rencontrées par certains de nos compatriotes expatriés pour accéder au vote dans leur commune française de rattachement.
Ceux qui sont doublement inscrits, qui sont actuellement plus de 475 000, ont en effet la possibilité, lors des élections nationales, soit de voter à l’étranger dans un bureau de vote ouvert dans leur ambassade ou leur poste consulaire, soit de voter en France dans la commune dans laquelle ils sont inscrits. En 2007 comme en 2012, entre 20 000 et 25 000 citoyens inscrits sur les listes électorales consulaires et qui étaient rentrés en France n’ont pas pu voter dans leur commune de rattachement, au motif qu’ils étaient, indûment selon eux, inscrits comme votants à l’étranger sur la liste d’émargement de la commune.
Afin de faire face à ces difficultés, le Conseil constitutionnel avait mis en place, en lien avec le ministère de l’intérieur, un dispositif d’urgence permettant à une partie seulement de ces électeurs, et sous certaines conditions, d’exercer leur droit de vote en France. Dans ses observations sur l’élection de 2012, le Conseil a souligné que la reconduction de ce dispositif ne saurait constituer une solution pérenne et invité les pouvoirs publics à mener une réflexion globale sur le dispositif retenu. L’enjeu est d’autant plus important que les règles encadrant le choix du lieu de vote s’appliquent à d’autres élections, législatives et européennes, se déroulant simultanément à l’étranger et en France.
Il convient de rappeler que voter à l’étranger n’est pas toujours simple. La participation aux élections présidentielle et législatives y est hélas inférieure à ce à quoi ont pourrait s’attendre, en raison des difficultés matérielles entravant l’exercice du vote. Les électeurs établis hors de France sont parfois contraints de parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour aller voter, ce qui, pratiquement, empêche certains d’entre eux de prendre part au scrutin. Pour eux, aller voter représente une sérieuse contrainte de temps, sans parler du coût parfois élevé du déplacement. Je pense à certains électeurs de ma circonscription établis en Australie, en Chine ou en Russie. Un Français résidant à Perth doit parcourir plusieurs milliers de kilomètres pour voter. Les difficultés sont les mêmes pour certains de nos compatriotes établis dans des pays plus petits, comme l’Indonésie, la Thaïlande ou les Philippines, ou les Français habitant à la frontière de deux pays – Frédéric Lefebvre me parlait tout à l’heure des difficultés rencontrées par nos concitoyens habitant Buffalo.
Par ailleurs, j’ai pu constater lors de mes nombreux déplacements combien il était difficile d’établir et de tenir à jour la liste électorale consulaire en raison de notre système de registre domiciliaire.
En outre les Français établis à l’étranger sont attachés à la possibilité de voter en France aux élections municipales, régionales et départementales, qui leur permet de maintenir un lien avec notre pays.
Par ailleurs les moyens de fonctionnement de notre réseau consulaire diminuent depuis de nombreuses années, conduisant parfois à la suppression du volet consulaire. Ainsi nos compatriotes ne pourront plus s’exprimer directement dans les vingt-six pays où le consulat va disparaître. Vous me permettrez de citer l’exemple de pays de ma circonscription, tels que le Népal, Brunei, la Moldavie ou bien encore trois pays d’Asie centrale. Ainsi, notre présence diplomatique dans certains pays ne s’accompagne plus désormais d’un service aux Français, ce que l’on peut regretter.
Même si les Français vont regretter le système actuel, qui leur laissait le choix, nous sommes obligés de tenir compte des arguments du Conseil constitutionnel. Il est donc souhaitable que l’administration du ministère des affaires étrangères soit très attentive à ce que les Français établis à l’étranger ne soient pas pénalisés par une réforme qui va dans le bon sens. J’espère que les élus des Français de l’étranger, quelle que soit les opinions qu’ils défendent dans cet hémicycle, seront associés à la rédaction des décrets d’application. Espérons que cette démarche consensuelle pourra trouver un aboutissement au profit des Français souhaitant participer, par leur vote, à l’activité démocratique.
Notons tout de même que ces mesures supposent, d’un point de vue pratique, une importante modernisation administrative, du fait, d’une part de la dématérialisation des échanges entre l’INSEE, les communes, les consulats et les autres administrations appelées à alimenter le répertoire et, d’autre part, du développement des inscriptions en ligne.
Pour le reste, la réforme renforce le rôle central des communes dans l’établissement des listes électorales tout en allégeant leur travail d’instruction et de gestion de ces listes. Il appartient au Gouvernement de s’engager pleinement dans sa mise en oeuvre concrète, ainsi que dans la mise en place des mesures de publicité adéquates, gage de l’effectivité réelle de la réforme souhaitée par le législateur.
Sous la réserve des regrets que je viens d’exprimer – tout en reconnaissant qu’il faut bien tenir compte des décisions du Conseil constitutionnel –, le groupe les Républicains dans sa majorité votera en faveur de ces propositions de lois.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame et monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, élection après élection, nous assistons à la progression inexorable de l’abstention. Si ce phénomène est essentiellement lié à un désintérêt vis-à-vis de la politique, qui va parfois jusqu’au rejet, il peut aussi s’expliquer par des dysfonctionnements techniques et une mauvaise information des électeurs sur les démarches à entreprendre.
Nos collègues Elisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann ont constaté les défauts de la procédure actuelle et proposé, à l’issue de la mission d’information sur les modalités d’inscription sur les listes électorales dont ils étaient chargés, des pistes intéressantes de réforme. Ces propositions, traduites dans les trois propositions de loi que nous nous apprêtons à examiner, visent ceux de nos concitoyens qui ne sont pas inscrits ou qui sont mal inscrits et se trouvent de ce fait dans l’incapacité de voter : ceux qui ont déménagé, ceux qui ont eu dix-huit ans entre les deux tours d’une élection, ceux encore qui, vivant à l’étranger, souhaitent voter à leur retour en France. Le phénomène est majeur puisque ce sont près de 9,5 millions d’électeurs qui sont mal inscrits ou non inscrits sur les listes électorales.
Si une révision de notre législation peut réduire, ne serait-ce que de façon minime, l’abstention qui mine notre démocratie, notre devoir d’élu de la nation est d’accompagner ce travail de réforme, afin de permettre au plus grand nombre de s’exprimer par les urnes.
Le rapport découlant de la mission d’information conduite par nos deux collègues rapporteurs ainsi que les présentes propositions de loi partent d’un constat que nous partageons : la procédure d’inscription n’est plus adaptée à la réalité de notre société et contribue à l’éloignement des citoyens de la participation électorale et donc de notre vie démocratique. En effet les contraintes qui pèsent sur le calendrier d’inscription sur les listes électorales et sa complexité sont l’une des sources déterminantes de l’abstentionnisme.
En outre, l’éloignement entre la date de clôture de l’inscription sur les listes électorales et le déroulement du scrutin peut être préjudiciable à l’implication des citoyens dans le processus électoral. Décalé par rapport au rythme démocratique, ce calendrier ne permet pas à ceux qui sont les moins sensibilisés à la politique et les moins susceptibles d’être mobilisés pendant les campagnes électorales de s’inscrire à temps. Figé jusqu’à la révision des listes électorales, il est de plus inadapté à la mobilité résidentielle croissante des électeurs.
Ces mêmes constats avaient amené les parlementaires, parmi lesquels les membres du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, à adopter l’an dernier une proposition de loi du groupe SRC, devenue loi du 13 juillet 2015, visant à la réouverture exceptionnelle des délais d’inscription sur les listes électorales. Il s’agissait de permettre la réouverture des délais d’inscription sur les listes électorales pour l’année 2015 en revenant de façon exceptionnelle sur le principe de la révision annuelle des listes électorales, les élections régionales ayant lieu en décembre.
Mes chers collègues, nous approuvons globalement les propositions de ces textes, qui visent à assurer un meilleur établissement des listes électorales pour revitaliser notre démocratie. Les conditions d’inscription sur la liste électorale d’une commune seront rénovées, via notamment un élargissement du champ de la procédure d’inscription d’office des jeunes de dix-huit ans.
Il est nécessaire en outre de moderniser les modalités d’établissement des listes électorales communales. Le calendrier actuel joue un rôle déterminant dans l’éloignement des électeurs de l’institution électorale.
On constate, par ailleurs, une défaillance du dialogue entre les communes et l’INSEE, qui ne permet qu’une coordination imparfaite des listes électorales au niveau national. Pour y remédier, vous prévoyez d’instaurer une révision préélectorale des listes à la place de la révision annuelle, en ouvrant le délai d’inscription jusqu’à trente jours avant un scrutin.
La proposition de loi ordinaire prévoit également de transférer au maire, plutôt qu’à une commission administrative, la responsabilité d’inscrire et de radier les électeurs. Elle crée également un répertoire électoral unique servant à l’extraction des listes communales et qui sera tenu par l’INSEE. Afin de rendre possible ce nouveau calendrier d’inscription, elle institue en effet un répertoire électoral unique géré par l’INSEE, alimenté par les décisions d’inscription et de radiation prises par le maire, auquel est confiée cette responsabilité aujourd’hui dévolue à des commissions administratives, et à partir duquel seront extraites les listes électorales de chaque commune.
Cette réforme ne s’appliquera pas à la Nouvelle-Calédonie, dans l’attente de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté à laquelle ce territoire devra se soumettre en novembre 2018 au plus tard. L’applicabilité de cette réforme pose en effet problème, en raison notamment de l’existence de listes électorales spéciales, dont la constitution répond à des règles spécifiques et qui ont fait l’objet, ces dernières années, d’un certain nombre de polémiques.
En revanche, conformément à l’avis rendu par les communes et l’Assemblée de Polynésie française, plusieurs adaptations seraient nécessaires pour appliquer cette réforme à la Polynésie. Le délai de trente jours avant la date d’un scrutin pourrait être porté à soixante, afin de laisser le temps aux communes de gérer les éventuels recours et de se concentrer sur les opérations électorales elles-mêmes.
Le remplacement des commissions administratives de révision pour chaque bureau de vote par une commission de contrôle unique constitue un allégement notable pour les services communaux, qui éprouvent parfois des difficultés à les réunir. Or, aucune disposition n’est prévue pour les communes de plus de 1 000 habitants avec communes associées, ni pour les communes associées avec discontinuité géographique. La composition des commissions des communes associées devrait être alignée sur celles des communes de moins de 1 000 habitants.
S’agissant de la création d’un répertoire unique, les dispositions relatives aux échanges dématérialisés entre les communes et l’Institut de la statistique de la Polynésie française se heurtent au fait que les communes les plus isolées de Polynésie française n’ont pas nécessairement accès à l’internet. Il faudra donc, soit faire évoluer ce texte à l’occasion de la navette, soit prévoir dans un texte ultérieur les dispositions nécessaires en termes d’adaptation à la Polynésie française.
Enfin, ces propositions de loi adaptent les modifications envisagées au cas spécifique des Français établis hors de France et, partant, à la liste électorale consulaire. La suppression de la double inscription sur une liste consulaire et une liste communale semble inéluctable, compte tenu de la mise en place d’un répertoire unique. Cette possibilité peut soulever des difficultés, en particulier lorsque des électeurs, de retour en France après plusieurs années passées à l’étranger, veulent voter à un scrutin national dans la commune où ils sont inscrits et découvrent alors que leur inscription ne vaut que pour les scrutins locaux.
Néanmoins, dès lors que la proposition de loi supprime la double inscription, la procédure de radiation automatique de la liste électorale consulaire d’un Français radié du registre des Français établis hors de France, prévue par la loi du 25 avril 2016 de modernisation de diverses règles applicables aux élections, n’est plus justifiée. Nous devrons donc nous assurer que cette mesure est bien supprimée par la présente proposition de loi organique.
Une autre disposition soulève quelques interrogations. La liste électorale consulaire permanente réduira le travail supplémentaire dû aux inscriptions de dernière minute en fin d’année et permettra une flexibilité d’inscription aux électeurs qui pourront le faire jusqu’au trentième jour précédant un scrutin. En revanche, cette facilité risque de poser problème lors des scrutins pour lesquels le vote électronique est possible. Si le délai est maintenu, il sera nécessaire d’adapter les textes régissant le vote en ligne.
Mes chers collègues, cette réforme comporte des dispositions particulièrement utiles et nécessaires à la lutte contre l’abstentionnisme. Elle nécessitera sans doute quelques adaptations s’agissant de son application ultérieure à l’outre-mer et aux Français de l’étranger. Le groupe UDI n’en soutiendra pas moins ces trois propositions de loi.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner les propositions de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales. Elles font suite aux préconisations contenues dans le rapport de la commission des lois de Mme Élisabeth Pochon et de M. Jean-Luc Warsmann, que je tiens à féliciter pour leur travail.
Bien évidemment, comme nous le disons depuis quatre ans, il est nécessaire d’envisager une modernisation de la procédure d’inscription, afin de la rendre plus simple et plus efficace pour nos concitoyens. Les propos que je vais tenir s’inscrivent dans la continuité de ce que j’ai déjà dit et répété ici à plusieurs reprises. Il est certes indispensable de simplifier l’inscription sur les listes électorales, mais il faut aussi aller plus loin, en instaurant le droit de vote pour tous et le devoir de vote.
Pour commencer, sans entrer dans le détail comme l’ont fait les rapporteurs, il me semble important de revenir sur le titre Ier. Qui pourrait ne pas être d’accord avec ces propositions de bon sens : extension de la procédure d’inscription d’office sur les listes électorales pour les personnes atteignant l’âge de dix-huit ans au premier comme au second tour et pour les personnes qui viennent d’acquérir la nationalité française ; modernisation des modalités d’établissement des listes électorales communales ; création d’un répertoire électoral unique et permanent tenu par l’Institut national de la statistique et des études économiques ; enfin, réduction à trente jours avant la date du scrutin de la période de révision préélectorale des listes, comme cela avait été le cas pour les dernières régionales de 2015 ?
Ainsi, nous concrétisons les intentions du Président de la République qui avait déclaré : « j’ai demandé au ministre de l’intérieur de conduire ce chantier avec les maires, pour qu’aucun Français ne soit privé de son droit de vote à cause de la rigidité des règles. […] On doit pouvoir s’inscrire sur les listes électorales un mois avant le scrutin et je pense que nous devons aller là-dessus jusqu’au bout. » Nous pouvons nous en féliciter.
Si ces mesures sont utiles, permettront-elles d’endiguer la montée de l’abstention et de revitaliser la démocratie ? Les élections se succèdent et se ressemblent malheureusement. À chaque consultation, le grand vainqueur, c’est l’abstention – aux régionales, elle s’est élevée à 50,9 % des suffrages. Elle est accompagnée d’une poussée du parti d’extrême droite qui a été porté en tête dans 19 637 communes, essentiellement rurales. Il est urgent de trouver des solutions pour réduire l’abstention et faire revenir ou venir aux urnes les électeurs, notamment les jeunes âgés de 18 à 34 ans, dont plus des deux tiers ne votent pas. Il est temps d’agir !
C’est pourquoi, pour nous, si ce texte va dans le bon sens, il manque d’ambition. Dans un contexte où les citoyens s’éloignent de plus en plus des urnes, en facilitant la procédure d’inscription, ces mesures envoient un bon signal, toutefois insuffisant. Une réforme plus globale et de fond serait souhaitable. Pour entraîner nos concitoyens, il est nécessaire de les responsabiliser et de leur dire que l’évolution de la société, la quête du bonheur individuel, mais aussi collectif, dépendent également d’eux et que la société compte sur eux pour faire reculer l’égoïsme et le repli sur soi. Construire une citoyenneté active et responsable, c’est un objectif que nous devons nous assigner. Pour cela, nous devons nous saisir de tous les moyens et de toutes les innovations proposés par les nouvelles technologies, tout en étant conscients de leurs limites.
D’abord, d’un point de vue technique, à l’ère de l’informatique et de l’internet, pourquoi ne pas automatiser l’inscription sur les listes électorales et simplifier le vote par procuration ? Dans de nombreux pays, la première inscription sur les listes électorales est effectuée d’office et la modification des données individuelles sur les listes électorales est automatique. C’est le cas en Allemagne, en Belgique, au Danemark, en Espagne, en Italie et aux Pays-Bas, où les listes électorales sont établies à partir des fichiers municipaux de population. Tout électeur est donc inscrit d’office sur les listes électorales. Il est nécessaire d’examiner la constitutionnalité de cette solution.
Aujourd’hui, dans 3 000 communes, le citoyen a la possibilité de s’inscrire en ligne sur les listes électorales. En raison de leur simplicité et de leur rapidité, ces procédures connaissent un succès notable quand elles sont efficacement mises en oeuvre. Elles doivent être améliorées et développées, en veillant à assurer, monsieur le secrétaire d’État, que toutes les communes disposent d’un site internet et, bien évidemment, en facilitant la mise en oeuvre du haut débit dans les petites communes.
Nous ne pouvons pas pour autant sacrifier la propagande électorale sur l’autel de la dématérialisation. Comment peut-on prétendre lutter contre l’abstention et, dans le même temps, supprimer la propagande électorale sous format papier distribuée par voie postale dans tous les foyers ?
Au-delà de ces aspects techniques, lutter contre l’abstention et le vote extrême nécessite un combat plus global et plus profond. Cessons de priver de vote celles et ceux qui vivent parmi nous ! Le droit de vote pour toute personne vivant en France de façon légale depuis dix ans est devenu une nécessité. Nous avons le devoir de dire à ceux qui partagent la vie de la cité, qui y travaillent, qui y paient des impôts qu’ils sont aussi des nôtres. Là encore, de nombreux pays permettent aux habitants étrangers de voter aux élections locales. Pourquoi ne le ferions-nous pas, d’autant qu’il s’agit là de la proposition no 50 du candidat François Hollande ? Il ne s’agit pas d’agiter je ne sais quel chiffon rouge, mais simplement de redonner des couleurs à la démocratie et favoriser le vivre ensemble.
N’oublions pas que si le vote est un droit, pour lequel des femmes et des hommes donnent encore leur vie aujourd’hui, au Congo, en Birmanie ou en Corée du Nord, c’est aussi un devoir. Plus que jamais, nous devons rappeler qu’en s’érodant, le droit de vote devient une arme qui se retourne contre la démocratie et contre la liberté. S’il faut une profonde réforme de la pratique politique, nous devons également tout faire pour que les citoyens s’intéressent à la vie sociale et politique de leur pays. La démocratie, la liberté d’expression leur donnent de nombreux droits. C’est bien. Mais rappelons-leur qu’il faut aussi être acteurs, qu’il faut participer et non pas seulement critiquer. S’il est légitime de se demander ce que la société fait pour soi, il est tout aussi légitime de se poser la question de la contribution citoyenne de chacun. Selon la formule de John Fitzgerald Kennedy, « ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ».
Plus que jamais, nous devons être à l’offensive pour plus de démocratie et de citoyenneté. Contrairement à ce que l’on dit, je ne pense pas que le vote obligatoire se traduirait automatiquement par un report massif des électeurs vers les extrêmes ; bien au contraire. Chez nos amis belges ou dans certains cantons suisses où voter est une obligation, le vote extrême est nettement inférieur à ce qu’il est chez nous. Surtout, dans un contexte où nous devons refonder la nécessité d’appartenance à la communauté nationale, c’est un premier geste de participation à la vie citoyenne du pays. Le renforcement d’une citoyenneté active passe aussi par là.
Par ailleurs, le devoir de vote doit être accompagné de la reconnaissance arithmétique du vote blanc. Je suis de ceux qui pensent que la démocratie représentative a montré ses limites et qu’il est impératif de promouvoir la démocratie participative.
Comment la France, pays des droits de l’homme et du citoyen, peut-elle se satisfaire du rejet de la démocratie auquel nous assistons ? Il est urgent de tout mettre en oeuvre pour permettre aux habitants de notre pays de retrouver confiance en la politique. Telle est la tâche à laquelle nous devrions tous nous atteler ! Retrouver confiance en la politique, c’est bien sûr faire reculer le chômage et la pauvreté. Pour cela, il faut en finir avec les promesses qui se transforment en désillusions, comme nous le constatons depuis de nombreuses années.
Comment ne pas comprendre le doute et le mécontentement de nos concitoyens quand on voit le spectacle que nous offrons ici même, trop souvent, les mardis et mercredis après-midi ? Comment appeler au rassemblement et à l’union, quand nous montrons ici l’esprit partisan et la désunion ? Comment mobiliser quand les lois apparaissent injustes, complexes et trop longues à s’appliquer ? Voilà des questions que nous devons nous poser et auxquelles nous devons surtout apporter des réponses pour que les Français retrouvent espoir en la politique et en la démocratie. Ces réponses ne dépendent pas du peuple ; elles ne dépendent que de nous.
Le torchon brûle ! Ensemble, démocrates, progressistes, républicains, éteignons l’incendie qui couve partout et surtout dans nos territoires ruraux. Nous, les élus, nous devons nous appuyer sur le peuple et ne pas avoir peur de lui. N’oublions jamais la célèbre formule d’Abraham Lincoln prononcée devant le Congrès en 1856 : « Un bulletin de vote est plus fort que la balle d’un fusil. » Voter, c’est lutter contre l’obscurantisme et les extrémismes. Voter c’est favoriser la cohésion sociale, c’est appartenir à la société. Voilà autant de finalités qui doivent nous inciter plus que jamais à agir pour faciliter le vote. La gravité de la situation sociale, économique et politique nous l’impose. Le civisme et la citoyenneté ne sont pas que de simples mots, mais le ciment de notre unité nationale.
Comme l’écrivait Jean de La Fontaine dans la fable L’Hirondelle et les petits oiseaux, « nous n’écoutons d’instincts que ceux qui sont les nôtres et ne croyons le mal que quand il est venu. » Écoutons ce que les citoyens nous disent avant qu’il ne soit trop tard ! C’est à nous de les rapprocher des urnes. Vous l’aurez compris, même si nous souhaiterions aller encore plus loin, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste est favorable à ces trois propositions de loi.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame et monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, au-delà de la question des abstentionnistes, la proposition de loi présentée par Elisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann vise les 6,5 millions de Français mal inscrits et les 3 millions de non inscrits sur les listes électorales, par exemple les personnes qui, à la suite d’un déménagement, ne font pas les démarches nécessaires et découvrent trop tard qu’elles ne figurent pas sur les listes électorales. On se situe là dans la meilleure des hypothèses, celle où le citoyen n’a pas renoncé à son droit essentiel de mettre un bulletin dans l’urne, et vous conviendrez qu’il est bien dommage qu’une procédure administrative trop exigeante en temps et en délai puisse faire obstacle à ce droit.
Ce constat n’est pas nouveau. En revanche, la volonté de simplifier ainsi les formalités d’inscription l’est assurément, par la qualité et l’ambition de la réforme consensuelle qui nous est présentée dans ces trois textes. Plusieurs points retiennent l’attention : la possibilité de s’inscrire jusqu’à trente jours avant l’élection ; le remplacement de la commission électorale par une commission de contrôle ; la dématérialisation des échanges entre l’INSEE, les communes et les autres administrations ; la tenue par l’INSEE d’un répertoire électoral unique, dont chaque liste communale sera un extrait.
À mon sens, c’est le point le plus fécond de cette réforme. Il implique un travail interministériel considérable et une collecte des données permettant la création d’un système de révision permanente des listes électorales. Ce dispositif permet l’extension de l’inscription d’office prévue pour les jeunes qui atteignent l’âge de dix-huit ans aux personnes qui acquièrent la nationalité française, et la possibilité pour les jeunes qui atteignent l’âge de dix-huit ans entre les deux tours d’une élection de participer au second tour du scrutin.
Le texte permet aussi les radiations sans examen à partir des informations transmises par les ministères de la justice, de l’intérieur et de la défense. Électeurs décédés, mise sous tutelle, privation pénale des droits de vote, perte de la nationalité française : toutes ces informations, qui n’appellent pas d’appréciation spéciale, permettront désormais à l’INSEE de procéder directement aux radiations dans le répertoire électoral unique et sur chaque liste électorale communale. La création de ce répertoire, qui stocke les informations relatives à l’ensemble des électeurs, est capitale pour éviter les doubles inscriptions, faciliter la procédure d’inscription et de radiation des électeurs et raccourcir les délais.
Il sera donc mis fin au caractère annuel de la révision de la liste électorale qui oblige à s’inscrire avant le 31 décembre de l’année précédente pour participer à une élection qui aura lieu au plus tôt en mars. L’alimentation continue des listes électorales permettra de limiter à trente jours le délai d’inscription. Mais un tel répertoire implique des exigences et des contraintes en matière de gouvernance, confiée au ministère de l’intérieur qui devra mobiliser, coordonner et accompagner, en particulier les communes. Des réunions devront être tenues avec les maires et les secrétaires de mairie ainsi que les préfectures.
L’INSEE sera informé par chaque commune du bureau de vote de chaque électeur, la répartition par bureau de vote relevant toujours de l’organisation interne de chaque mairie. Cette information pourra utilement être conservée dans le répertoire, permettant en tant que de besoin une ventilation par bureau de vote des données du répertoire. Tout comme l’enregistrement de l’adresse des électeurs, celui des bureaux de vote est un service que l’INSEE pourra ainsi rendre aux communes.
Le maire se voit confier la compétence de l’inscription et de la radiation des électeurs sur la liste électorale. La commission administrative disparaît au profit d’une commission de contrôle garantissant la régularité de la liste électorale communale. Elle pourra, à la majorité de ses membres, contester en justice les décisions du maire avant chaque scrutin ; ses réunions seront publiques. Cette commission comportera des membres de l’opposition municipale. Comme vous l’avez dit, monsieur Warsmann, ce dispositif ne doit pas être considéré comme traduisant un manque de confiance vis-à-vis des maires : il répond aux exigences des citoyens en matière de simplification, mais aussi de transparence des procédures.
Ces trois textes sont ambitieux et pragmatiques. Ils impliquent un important travail des administrations, ce qui justifie leur entrée en vigueur à l’horizon 2019. On peut raisonnablement penser que ce répertoire et la mise en réseau qu’il implique ouvrent des perspectives pour l’inscription d’office à terme de tous les citoyens – un objectif qui est poursuivi par beaucoup d’entre nous, comme Joachim Pueyo l’a souligné en faisant valoir la pratique de certains pays européens. Par ailleurs, la transparence, comme toutes les bonnes choses, n’attendant pas, je me permets de suggérer que la nouvelle commission de contrôle qui invite le citoyen à ses réunions puisse être mise en place sans attendre trois ans.
Je voterai résolument ces textes très utiles et je vous invite à faire de même et à faire connaître autour de vous la qualité de ce travail collectif.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame et monsieur les rapporteurs, chers collègues, mon intervention portera sur les mesures de ces propositions de loi organiques et ordinaire visant à rénover les modalités d’inscription sur les listes électorales qui sont spécifiques aux Français de l’étranger.
Le Conseil constitutionnel avait émis le souhait d’ouvrir une réflexion sur les difficultés rencontrées par certains électeurs inscrits sur la liste consulaire et sur celle d’une commune à leur retour en France. Ces électeurs ne sauraient pas – à moins qu’ils feignent de ne pas le savoir –, sur quelle liste électorale ils sont inscrits.
Or, s’ils sont inscrits sur deux listes, c’est pour s’exprimer lors d’élections différentes : on n’est en aucun cas inscrit deux fois pour la même élection. L’inscription sur les listes consulaires permet de voter aux élections nationales, celle sur les listes communales aux élections locales. Les électeurs le savent. Ils savent où ils votent puisqu’ils ont fait eux-mêmes une demande d’inscription et la renouvellent tous les cinq ans lors du renouvellement de leur inscription au registre des Français établis hors de France. Chaque électeur a donc fait le choix consciemment. Il ne peut l’ignorer. En cas de doute, il peut à tout moment consulter sa situation électorale sur le site monconsulat.fr. Quant aux électeurs qui rentrent en France, ils doivent signaler leur départ au consulat. Un certificat de radiation de la liste électorale leur est alors délivré. La difficulté mentionnée par le Conseil constitutionnel n’a donc pas une origine législative.
En conséquence, même si la disposition prévue aux articles 1er de la loi organique et 12 de la loi ordinaire est adoptée, les difficultés persisteront. En effet, un électeur qui n’aura pas signalé son départ restera inscrit à l’étranger et ne pourra pas voter à son retour. Allons-nous priver de leur droit de vote partiel plus de 35 % des Français de l’étranger – soit, à la fin de décembre 2015, 434 563 personnes –, pour essayer de remédier à l’ignorance de quelques-uns ? La difficulté ne sera aucunement résolue.
Les textes en discussion répondent à la demande du Conseil constitutionnel par deux mesures. La première est la création du répertoire électoral permanent et unique. Cependant ce répertoire tenu par l’INSEE ne sera fiable que si les erreurs de saisie sont réduites au minimum et l’encodage des caractères spéciaux, tels que le « ñ » des noms espagnols ou les trémas des noms allemands –, revu. L’administration consulaire doit donc être dotée d’outils informatiques performants. La seconde est l’inscription « au fil de l’eau », qui permettra de modifier son inscription jusqu’à trente jours avant la date de l’élection.
En revanche, la suppression de l’article L. 330-3 du code électoral ouvre d’autres difficultés. Les propositions de loi en débat confient au maire la compétence de l’inscription et de la radiation des listes électorales. Le maire pourra donc radier une personne qui, selon lui, n’a pas ou n’a plus de liens avec la commune. Rien n’est prévu dans les propositions de loi pour protéger ceux qui résident hors de France.
Autre conséquence non négligeable d’une telle mesure, cette réforme fera de facto décroître le nombre d’électeurs qui voteront depuis l’étranger. Elle mettra ainsi en difficulté l’ouverture de bureaux de vote que l’administration veut au plus près de l’électeur. De plus, la diminution du nombre d’électeurs à l’étranger sera néfaste à la confidentialité du vote. Les listes consulaires de 2013 mentionnaient, pour quatre-vingt-seize d’entre elles, un nombre d’électeurs inférieur à mille ; soixante-neuf listes comptaient moins de cinq cents électeurs et trente-neuf moins de deux cents électeurs. De surcroît, le vote en lignet venant s’ajouter au vote à l’urne pour les élections législatives, la confidentialité du vote sera d’autant plus mise en cause. Je ne parle même pas du surcroît de travail et des difficultés que l’administration va connaître du fait des va-et-vient incessants des électeurs entre les deux listes.
Je terminerai par une difficulté – triste mais réelle – que les textes que vous présentez créent en matière d’inhumation. Les caveaux de famille se font rares ; où nos compatriotes trouveront-ils leur dernière demeure s’ils ne sont plus inscrits sur la liste électorale d’une commune française ?
En effet, la loi de 2008 relative à la législation funéraire a étendu aux personnes inscrites sur la liste électorale d’une commune le droit de s’y faire inhumer. Ce point n’est pas neutre et aucune alternative n’est proposée dans ces textes.
J’espère, chers collègues, que vous voterez les amendements que je défendrai pour maintenir la possibilité pour tous nos compatriotes d’être des citoyens à part entière et de participer à la vie politique locale, quel que soit leur pays de résidence. Il est de notre rôle, de notre devoir de législateurs et d’élus, de ne pas rendre le vote difficile.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, mes chers – et rares ! – collègues, ce texte a au moins le mérite de mettre de l’ordre dans les procédures, ce qui est à l’évidence nécessaire et doit être salué. Je voudrais cependant faire trois observations dont le caractère n’est en rien polémique, mais purement clinique, si j’ose cette expression.
La première concerne la création d’un répertoire électoral unique tenu par l’INSEE. Je trouve dangereux de transférer un pouvoir décisionnel à une administration contrôlée par Bercy, donc par l’exécutif. Je crains qu’il y ait là un mélange des genres susceptible de nourrir des suspicions. Par ailleurs, on ne voit pas par quel miracle les autorités municipales et consulaires qui, dans le cadre législatif actuel, ont du mal à échanger leurs informations avec l’INSEE, seront désormais plus diligentes.
Ma deuxième réserve porte sur l’application de l’article 3 concernant la composition des commissions électorales. Il est normal, me semble-t-il, que les membres de l’opposition municipale soient associés aux travaux des commissions communales de contrôle. Cependant le texte interdit aux maires, aux adjoints et aux conseillers municipaux délégués de faire partie de ces commissions. Or il existe – c’est une réalité de la vie municipale – de nombreuses communes où les élus majoritaires ont tous cette qualité.
Enfin – il s’agit de réflexions plus que de réserves, que je me permets de vous indiquer pour qu’elles nous permettent d’avancer dans le bon sens –, je pense qu’il serait utile de s’interroger sur la manière dont le texte réoriente le traitement des Français à l’étranger.
Ces trois réserves mises à part, je ne peux qu’approuver ce qui, dans ces textes, vient mettre de l’ordre dans les procédures. C’est nécessaire et je ne me prive pas de le dire, avec même un certain plaisir.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, une société démocratique ne peut survivre que si les citoyens qui la composent considèrent le processus politique comme un droit, un devoir et une responsabilité. Le droit de vote est à la base de la démocratie. C’est une chance pour le citoyen de pouvoir participer aux choix de notre société ; dans bien d’autres pays, des hommes et des femmes se battent pour obtenir ce droit.
Nous sommes réunis aujourd’hui pour évoquer la proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales. Cette proposition de loi a fait l’objet d’une étude de faisabilité approfondie, réalisée par différents corps d’inspection, ainsi que d’une mission d’information menée par deux de mes collègues. À ce titre, je remercie Élisabeth Pochon ainsi que Jean-Luc Warsmann pour le travail qu’ils ont accompli ces derniers mois.
Un nombre élevé de nos concitoyens est encore trop éloigné du processus électoral : en 2012, les non-inscrits et mal inscrits représentaient près de 9,5 millions de Français, et il y a fort à parier que la situation ne se soit pas améliorée. Mes chers collègues, la démocratie ne s’use que si on ne s’en sert pas. Ne rien faire pour mettre le citoyen en contact direct avec le processus politique serait renier nos valeurs républicaines.
Renforcer, comme vise à le faire cette proposition de loi, la participation démocratique des personnes naturalisées, serait une mesure fortement symbolique, car celles-ci sont déjà des acteurs économiques et socioculturels de notre pays. Tout les rattache à la France : il ne faudrait pas que l’exercice du droit de vote relève pour eux du parcours du combattant. Cela serait terrible pour notre pays !
Il faut changer la manière d’aborder l’intégration, et s’orienter vers une politique fondée sur l’égalité des droits et la lutte contre les discriminations. Le terme du processus d’intégration est la naturalisation, qui confère le droit de vote. C’est à quoi s’est attelé depuis 2012 le Gouvernement, ainsi que la majorité socialiste à l’Assemblée nationale. J’en veux pour preuve la loi sur les droits des étrangers en France, qui renforce et améliore l’intégration et les droits des étrangers présents sur le sol français. Je considère donc qu’il est de notre devoir de faciliter leurs démarches administratives et citoyennes, afin de les intégrer pleinement à la société française.
À ce titre, étendre la procédure d’inscription d’office aux personnes qui acquièrent la nationalité française est indispensable, car certains de nos concitoyens ne savent tout simplement pas qu’il faut s’inscrire à la mairie après avoir acquis la nationalité française, et encore moins quels documents sont nécessaires pour cela.
L’inscription des personnes ayant acquis la nationalité française se fera désormais d’office, sans exclure toutefois la démarche volontaire, qui restera prévue au 4° de l’article L. 30 du code électoral. Cette inscription d’office sera effectuée sans délai.
Il apparaît par ailleurs nécessaire d’adapter le temps de la révision des listes au rythme des élections et à la mobilité des électeurs, afin de permettre aux citoyens de s’inscrire jusqu’à trente jours avant la date d’une élection. Je rappelle que lors des dernières élections régionales, près de 800 000 Français ont profité de la prolongation de la période d’inscription sur les listes électorales pour s’inscrire, et ainsi être en mesure de voter. Cela a été rendu possible par l’adoption d’une proposition de loi défendue par ma collègue Élisabeth Pochon, que je salue.
Pour conclure, j’insisterai sur le caractère fondamental de cette proposition : je crois qu’il est de notre devoir de moderniser et d’adapter convenablement le processus de vote, pour que chaque citoyen puisse s’exprimer, quelles que soient ses origines.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ces trois propositions de loi, dont les rapporteurs ont été nommés de manière transpartisane – il s’agit d’Élisabeth Pochon et de Jean-Luc Warsmann – sont issues de leur rapport d’information déposé en décembre 2014. Ces textes reprennent plusieurs des propositions formulées dans ce rapport.
La proposition centrale de ce rapport était de fixer le principe d’une révision préélectorale des listes, au lieu d’une révision annuelle, afin de lutter contre l’absence d’inscription ou les mauvaises inscriptions. Il y aurait en effet 3 millions de non-inscrits, selon une enquête de l’INSEE de 2012, et 6,5 millions de mal inscrits, c’est-à-dire de personnes inscrites dans un autre bureau que celui correspondant à son véritable lieu de résidence. Nous retrouvons donc, logiquement, cette mesure à l’article 2 de la proposition de loi ordinaire, qui vise à supprimer le caractère annuel de la révision des listes électorales, et à instaurer une révision permanente, afin de permettre à tout électeur qui souhaite participer à un scrutin de s’inscrire au plus tard trente jours avant celui-ci.
Il s’agit d’une avancée importante : puisque les inscriptions ne seront closes que lorsque le déroulement du scrutin sera imminent, le nombre d’inscrits devrait augmenter. En effet, combien de cas nous ont été rapportés de personnes n’ayant pu voter faute de s’être inscrites à temps, soit par négligence, soit par manque d’information ? Mais comment les blâmer de ne pas y avoir pensé six mois à l’avance ? L’intérêt pour l’élection ne naît souvent qu’au cours des dernières semaines de la campagne, voire dans les tout derniers jours. Il s’agit donc d’une mesure de bon sens.
La faute ne revient pas forcément à l’électeur qui ne se serait pas inscrit à temps, comme le montre d’ailleurs la consultation organisée en Loire-Atlantique à propos de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. L’organisation de cette votation ayant été décidée peu de temps avant son déroulement, les personnes n’étant pas inscrites sur la liste électorale de leur commune au 31 décembre 2015 ne pourront pas y participer. Cela est source d’importantes frustrations dans ce département breton !
Ce même article institue par ailleurs un répertoire électoral unique et permanent tenu par l’INSEE, par lequel transiteront les inscriptions et les radiations, et dont seront extraites les listes électorales communales. Ce répertoire, mis en oeuvre grâce à un système d’information partagé entre les différents acteurs de l’inscription – citoyens, communes, INSEE, administrations centrales –, permettra de coordonner au niveau national les décisions d’inscription et de radiation prises au niveau local. Il aura pour seule finalité la gestion du processus électoral. Cette avancée permettra également de faire baisser le nombre important d’électeurs dits mal inscrits. Ceux-ci votent dans une commune dans laquelle ils ne payent pas leurs impôts locaux, une commune dans laquelle, tout simplement, ils ne vivent plus, et participent ainsi à des décisions s’appliquant à d’autres qu’eux-mêmes !
Chose importante, à l’article 4, est conservée la faculté pour tout électeur inscrit de contester la liste électorale de la commune dans un délai de 7 jours.
L’article 1er modernise quant à lui les conditions d’inscription sur la liste électorale de la commune. S’agissant des inscriptions volontaires, il assouplit la condition d’attache avec la commune liée à la qualité de contribuable en réduisant de cinq à deux années consécutives la durée d’inscription au rôle des contributions directes communales exigée. Cette mesure de simplification permettra, elle aussi, de vivifier la participation démocratique.
Cet article étend par ailleurs l’inscription d’office, déjà applicable aux jeunes qui atteignent l’âge de 18 ans, aux personnes qui acquièrent la nationalité française. Il n’y a aucune raison, en effet, de faire une distinction entre ceux qui acquièrent le droit de vote par la nationalité et ceux qui l’acquièrent par l’âge. C’est donc une mesure d’égalité importante.
Je reste toutefois un peu sceptique quant à l’opportunité de l’article 8, qui autorise les jeunes ayant atteint l’âge de dix-huit ans entre les deux tours d’une élection à participer au second tour du scrutin. Je comprends l’objectif : éviter la frustration de certains jeunes dont l’anniversaire se trouve compris dans le laps de temps séparant les deux tours. C’est vrai qu’ils n’ont pas de chance !
Sourires.
Il est cependant curieux que la loi autorise à certaines personnes de participer à la deuxième moitié d’une élection, après leur avoir interdit de participer à la première. Vous me répondrez que les citoyens en âge de voter peuvent tout à fait s’abstenir au premier tour, et voter au second tour ; mais cela relève uniquement de leur choix.
Mes chers collègues, cette proposition de loi fait donc oeuvre utile pour la vitalité de notre démocratie, en simplifiant les démarches d’inscription sur les listes électorales pour nos concitoyens. Nous réjouissons, par surcroît, que les préconisations d’un rapport parlementaire soient aussi fidèlement reprises par une proposition de loi. C’est donc avec intérêt que je vous appelle à la voter.
La discussion générale commune est close.
La parole est à Mme la rapporteure.
Vous avez réservé à ces textes un accueil quasi unanimement favorable, à quelques exceptions près. Cela nous touche, car dès le départ nous avons voulu travailler dans cet esprit, d’une manière transpartisane, pour régler un problème commun : le fait qu’un nombre croissant de nos concitoyens s’éloigne des élections. Nous n’avons jamais eu, bien entendu, la prétention de régler le problème de l’abstention par des solutions uniquement administratives et techniques. Toutefois cette adaptation, cette modernisation de nos règles électorales nous permettra de revitaliser notre démocratie, et de redonner, par l’augmentation de la participation, une plus grande légitimité aux élus.
Nous avions formulé, dans le rapport d’information que vous avez mentionné, vingt-trois propositions. Ces propositions de loi en reprennent vingt et une – les deux dernières relevant du domaine du règlement. Nous avons été aidés, pour formuler notre diagnostic, par les auditions que nous avons menées, et par les administrateurs des services de l’Assemblée nationale – avec lesquels nous travaillons depuis maintenant plus d’un an et demi.
En revanche, nous n’avions pas pris la mesure de la tâche représentée par la mise en place du répertoire électoral unique. D’une certaine manière, il faut pour cela accomplir une véritable révolution technique : l’inspection générale de l’administration estime qu’il faudra au moins douze trimestres. L’idée est de rapprocher le plus possible les citoyens des élections en autorisant l’inscription sur les listes électorales jusqu’à trente jours avant le scrutin, tout en faisant en sorte que les listes soient le plus fiables possible.
Il faudra ainsi mettre tout le pays au travail. Cela concerne absolument tous les territoires ; il nous a fallu examiner si cela conviendrait aussi bien à la campagne qu’à la ville, outre-mer qu’en métropole – il est vrai que des difficultés se posent parfois. La mise en place de ce répertoire sera l’occasion d’un vaste travail de modernisation, car dans toutes les villes il faudra oeuvrer à la mise en concordance des listes actuelles avec le répertoire électoral unique. Cela permettra de balayer l’intégralité de nos listes électorales. Heureusement que nous avons un pilote pour diriger ce grand travail !
Nous avons souhaité que les naturalisés soient inscrits d’office sur les listes électorales. Il y aura ainsi une véritable égalité devant la première inscription. Cela permettra de dire à ceux qui nous rejoignent dans la communauté française qu’il est important de voter : pour cela, comme les jeunes citoyens français, ils sont inscrits d’office sur les listes électorales – mais ils peuvent, comme tous les Français, changer de domicile et donc se réinscrire sur d’autres listes.
Certains pensent que nous n’avons pas été assez loin, que nous ne nous sommes pas montrés assez ambitieux. Je voudrais leur répondre que nous devions tenir compte du caractère transpartisan de ces textes. Nous devions donc parvenir à un consensus, notamment sur la question des personnes autorisées à s’inscrire sur les listes électorales. Cela ne signifie pas que des problèmes tels que le droit de vote des étrangers ne nous taraudent pas !
Vous avez raison, ce n’est pas consensuel, et nous avons voulu éviter les sujets qui ne le sont pas – et encore, parfois des désaccords se sont fait jour sur certains points. Quoi qu’il en soit, nous avons travaillé sur ces textes sans arrière-pensées, et nous irons jusqu’au bout, en espérant que nous aurons permis, ensemble, d’avancer vers un système électoral plus moderne.
Je tiens à mon tour à remercier les neuf orateurs qui sont intervenus pour apporter leur soutien aux textes, et apporter plusieurs réponses concrètes aux questions qui ont été soulevées.
Je vous sais gré, monsieur Dolez de votre proposition, mais ce serait techniquement impossible de mettre en place le dispositif avant 2017. Si le Parlement parvient à clore le parcours législatif avant fin juillet, ce qui serait l’idéal, cela donnera juste le temps nécessaire aux ministères concernés de se coordonner pour mettre en place les nouvelles dispositions – aucune élection n’est prévue pour 2018, mais tout peut arriver.
Je vous remercie, monsieur Pueyo, non seulement pour votre intervention mais aussi pour votre participation aux auditions.
Je me tourne maintenant vers Thierry Mariani qui a soulevé la question de la non-application du dispositif en 2017. Je le confirme, même si notre idée initiale et celle du Gouvernement était de l’appliquer dès les élections de l’année prochaine, ce dernier faisant valoir la position prise par le Conseil constitutionnel depuis les scrutins présidentiels du 22 avril et du 6 mais 2012, invitant les pouvoirs publics à une réflexion globale sur le dispositif retenu qui autorise l’inscription simultanée d’un même électeur sur deux listes électorales pour la même élection – liste électorale d’une commune en France et liste consulaire à l’étranger. C’est bien là le coeur de la décision qu’il a alors rendu. Vous en avez pris acte mais faites partie de ceux qui ont souhaité que le nouveau dispositif ne s’applique pas dès 2017, et, en vertu de la volonté de parvenir à un accord aussi large que possible, comme vient de l’expliquer ma collègue, le Gouvernement s’est rallié à la position de la commission sur la possibilité d’un report. Il est d’autant plus clair à cet égard qu’il a déposé un amendement visant à préciser que les textes d’application sortiront entre le 1er janvier et le 31 décembre 2018. L’année 2017 n’est donc pas concernée, ce qui satisfait ce que vous demandiez fort justement, mon cher collègue.
Monsieur Gomes, vous avez évoqué des problèmes d’application en Polynésie française ; nous en sommes conscients après avoir auditionné notre collègue et le Gouvernement aussi, mais on ne peut pas tout régler en même temps. Le Gouvernement est donc en train de procéder à des vérifications, et il faudra régler les problèmes techniques qui risqueraient de se poser dans les communes multi-îles car la réforme ne fonctionnera que dans le cadre d’une dématérialisation.
J’ai par ailleurs entendu les remarques sur la composition des commissions électorales, mais je rappelle qu’elles demeureront inchangées dans les communes de moins de mille habitants – je pense qu’il faudra développer les contacts avec les élus concernés à ce sujet.
Je n’ai rien à ajouter à ce que ma collègue a répondu à jacques Krabal, et j’ai déjà apporté une réponse à certaines de vos interrogations, madame Schmid, en m’adressant à Thierry Mariani. Vous exprimez votre inquiétude sur les conditions d’attache à une commune en métropole pour les Français de l’étranger, mais je rappelle que nous ne touchons pas à l’article L.12 du code électoral, je tiens à vous rassurer. Vous avez aussi évoqué des problèmes de confidentialité du vote, mais je ne suis pas du tout convaincu par vos arguments. Je rappelle que certaines communes n’ont qu’une vingtaine d’électeurs inscrits, et cela n’empêche pas l’organisation des élections. Que la liste électorale comporte vint, trente, cinquante ou cent personnes, cela ne remet pas en cause la confidentialité du scrutin. Vous avez en outre abordé la question de l’inhumation de ces Français sur leur terre natale : elle sera réglée par un amendement qui devrait recevoir un avis favorable du Gouvernement.
Gilbert Collard a fait trois remarques, la première pour nous mettre en garde contre le transfert de pouvoirs décisionnaires à l’INSEE. Je vais donc rappeler ce qui est écrit à l’alinéa 9 de l’article 2 du projet de loi : « L’Institut national de la statistique et des études économiques procède directement, dans le répertoire national unique, aux inscriptions et radiations ordonnées par l’autorité judiciaire. » Il ne décide donc rien en la matière mais en prend acte. Je poursuis la lecture de l’alinéa : « Il procède également aux radiations des électeurs décédés et des électeurs qui n’ont plus l’exercice du droit de vote [ Il ne s’agit, ici encore, que de constatations]. Lorsqu’une personne déjà inscrite dans le répertoire électoral unique s’inscrit comme électeur dans une nouvelle commune ou circonscription consulaire, l’Institut national de la statistique et des études économiques met à jour ce répertoire en ne retenant que la dernière inscription de cet électeur. » L’INSEE n’est donc pas en position décisionnaire : la décision relève du maire, sous le contrôle du juge puis de la commission de contrôle.
Ensuite, notre collègue s’inquiète de ce qui se passerait si les membres de la majorité du conseil municipal seraient sinon tous adjoints ou adjointes – ce qui est de toute façon impossible puisque ceux-ci ne peuvent dépasser 30 % dudit conseil –, tous conseillers délégués. Je le rassure : dans l’hypothèse où, dans les communes de plus de 1 000 habitants, ne s’est pas constituée une commission avec l’opposition comme le texte le prescrit, nous avons inscrit dans le projet de loi une disposition-balai qui prévoit qu’elles seront constituées comme dans les communes de moins de 1 000 habitants, c’est-à-dire comme elles le sont actuellement. Cela réglera le problème.
Il a également évoqué les Français de l’étranger, et, sur ce point, je renvoie aux différents éléments de réponse que j’ai déjà apportés.
Madame Untermaier, vous avez abordé les conditions de réussite de la mise en oeuvre des nouvelles dispositions. Je rappelle qu’il y a quelques années, un grand effort de formation en vue de la mise en place de la comptabilité M14 en 1997 a été fait dans tous les secrétariats de mairie par le CNFPT – le Centre national de la fonction publique territoriale. On estime que 35 00 000 à 40 000 agents dans les mairies vont être concernés et que l’État pourra bénéficier à cet égard de l’appui du CNFPT. Ce sera encore un grand effort de formation à mener dans le courant de l’année 2018 pour que les fruits de celle-ci se répandent dans toutes les communes l’année suivante et que le dispositif puisse s’appliquer.
J’appelle en premier lieu, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.
La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.
Le vote n’est jamais un acte banal. C’est un acte important, notamment pour les peuples d’outre-mer puisque ce n’est qu’en 1946, grâce à l’initiative de Lamine Guèye, alors député de Sénégal-Mauritanie à l’Assemblée nationale, que le droit de vote a été étendu à tous les Français d’outre-mer. En effet si, depuis 1791, la France, gouvernée à l’époque par une monarchie constitutionnelle, permettait aux citoyens français de bénéficier du droit de vote indirect via le suffrage censitaire, ce n’était pas le cas pour les colonisés, qui ont dû attendre la promulgation de la loi Lamine Guèye du 25 avril 1946, puis la Constitution du 27 octobre 1946, pour obtenir le statut de citoyen et donc le droit de vote. Par la suite, la représentation des citoyens est longtemps restée inégalitaire en raison du principe du double collège électoral, l’un étant fondée sur la qualification « d’indigènes » attribuée aux populations autochtones.
Aujourd’hui, il est question d’améliorer les modalités d’inscription sur les listes électorales, et, chacun l’aura compris, nous nous sentons particulièrement concernés, nous qui avons été privés des droits les plus élémentaires, mais également parce qu’il y a chez nous aussi un accroissement de l’abstention, y compris de l’abstention involontaire qui biaise l’exercice de la démocratie. Outre le manque de choix ou d’alternative politique, l’abstention est surtout imputable à l’extrême lourdeur administrative, qui tend à exclure certaines catégories de citoyens, notamment les jeunes, les personnes, qui ont déménagé, celles doublement inscrites ou encore, par exemple, radiées arbitrairement. Cette situation est d’autant plus préjudiciable dans nos territoires insulaires où la mobilité, interne comme externe, est exacerbée.
On doit donc trouver une réponse adaptée à la non-inscription, à la mal-inscription sur les listes électorales ou à la désinscription, à la rigidité, à la désuétude des procédures, et procéder à un renforcement et à une modernisation des contrôles.
Si cette proposition de loi n’est pas la panacée, et qu’elle n’est pas d’effet immédiat – ce que nous regrettons –, elle permettra toutefois des évolutions positives réelles. C’est pourquoi, comme l’ensemble du groupe GDR, je suis favorable à l’article 1er et au texte dans son ensemble.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, je suis bien entendu favorable à ce texte. Comment pourrait-on ne pas l’être ? Mais le but que nous recherchons va bien au-delà et est bien plus difficile à atteindre que par ces dispositions de bon sens que nous allons prendre.
Je crois que, depuis une trentaine d’années, nous avons négligé le peuple, laissé s’effacer le citoyen à mesure que le changement du monde nous prenait de court, qu’il effaçait nos valeurs, et aussi pour les jeunes, pour nos propres enfants, les repères par rapport auxquels nous nous étions construits. Comme beaucoup d’entre vous, j’ai souvent l’occasion de parler avec les jeunes, à commencer par mes fils – et c’est toujours avec les plus proches qu’il est le plus difficile d’aborder cette question : ils ne se retrouvent pas du tout dans la politique. Des fils de députés qui ne se retrouvent pas dans la politique, c’est tout de même ennuyeux.
Cela étant, ce n’est pas mieux ailleurs : beaucoup me disent : « Mais pourquoi voulez-vous qu’on aille voter, monsieur le député ? Ce ne sont pas nos affaires, cela ne nous concerne pas. C’est un monde de vieux. Vous êtes finis. Ce n’est plus notre monde. » Cela fait très mal à entendre et plus encore de le dire ici. Il faut engager un travail en profondeur, monsieur le secrétaire d’État, et nous devons le faire tous ensemble tant qu’il est encore temps. Les échéances qui se profilent à l’horizon nous en donnerons l’occasion, mais il faut faire vite. Il est moins une.
J’interviens sur cet article parce que je veux évoquer devant vous tous un principe général, m’adressant en particulier à M. le secrétaire d’État, s’il veut bien me prêter une oreille attentive,…
… car j’ai un message à lui confier pour le compte du ministre des affaires étrangères. Un certain nombre d’entre nous serons, si Dieu le veut, si notre santé nous le permet, candidats aux prochaines élections législatives. Or il faut que vous sachiez qu’en ce qui concerne au moins deux circonscriptions des Français de l’étranger, voire trois, on nous a confisqué les listes électorales !
Il s’agit d’une dizaine de pays chez moi et de presque autant chez Thierry Mariani, et ce pour des motifs de sécurité. Dans ma circonscription par exemple, je ne dispose pas de la liste électorale des 5 000 Français résidant au Nigeria ni, pire encore, celle du Cameroun alors que la sécurité y est pourtant à peu près assurée. Je ne dispose pas non plus de la liste pour la Centrafrique – même si c’est plus explicable –, etc. Cela pose un problème de nature constitutionnelle. Certes, la loi ne peut pas le régler, il dépend du bon-vouloir – ou du mauvais-vouloir – du ministre des affaires étrangères – en l’occurrence sans doute de son prédécesseur et de son administration.
Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d’État, que vous interveniez auprès de M. Ayrault afin que nous ayons accès aux listes électorales. Notre intention n’est évidemment pas de les transmettre à l’État Islamique ou à Boko Haram – je ne connais pas les groupes terroristes qui sévissent dans la circonscription de Thierry Mariani, mais je suppose qu’il y en a aussi quelques-uns de fameux –, mais si le ministère pense qu’un tel danger existe, il faut essayer de mettre en place un système nous permettant de communiquer avec nos électeurs. À cet effet, je souhaite que les consulats soient les intermédiaires, en quelque sorte des facteurs, les transmetteurs de nos messages afin que nous puissions au moins faire savoir à nos électeurs potentiels d’Afrique, d’Asie ou du Moyen-Orient que nous somme candidats. C’est un problème de principe qui se pose exactement dans les mêmes termes pour l’élection présidentielle. Je le répète, monsieur le secrétaire d’État : je compte sur vous pour en parler au ministre des affaires étrangères afin de régler au mieux ce problème dans l’intérêt de la démocratie. J’ajoute que cela ne sera en aucun cas de nature à remettre en cause la sécurité de nos compatriotes.
Monsieur le secrétaire d’État, mon collègue Alain Marsaud vient de vous faire part du malheur qui nous frappe en tant que députés de la dixième et de la onzième circonscription des Français de l’étranger. La crainte que ces listes soient diffusées est tout à fait compréhensible, mais c’est pourquoi, comme l’a dit M. Marsaud, il faut trouver une solution pragmatique. Si les députés en exercice, en dehors de la campagne officielle, pouvaient s’adresser à leurs électeurs, ne serait-ce tout simplement que par l’intermédiaire des consulats, cela me satisferait tout à fait. Je prends deux exemples situés dans ma circonscription : le Pakistan et l’Afghanistan ; les listes ne sont évidemment pas publiques, ce qu’on peut à la limite comprendre, mais il faudrait au moins que les messages des parlementaires, quels qu’ils soient, soient relayés auprès de leurs électeurs potentiels. Voilà tout ce qu’on demande et je vous remercie de le faire savoir au ministre des affaires étrangères.
Je comprends les impératifs de sécurité, même si dans certains pays, comme ceux situés dans la circonscription d’Alain Marsaud, ils sont pris dans un sens un peu trop extensif – on n’est jamais trop prudent. Je pense que cette solution pourrait être acceptée à l’unanimité. Je vous remercie de transmettre ce message au ministre des affaires étrangères.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 9 .
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et de la simplification, pour donner l’avis du Gouvernement ?
Je n’ai pas souhaité m’exprimer après la discussion générale et les interventions des rapporteurs, qui ont fait un travail remarquable, mais je tiens à vous transmettre les excuses du ministre de l’intérieur, car il a dû partir en urgence dans le centre de la France, notamment dans le Loiret, qui connaît des inondations si fortes que le centre de Montargis, en particulier, va commencer à être évacué cet après-midi. Vous savez que c’est un noeud ferroviaire et routier extrêmement important dans la région : des magasins, des parkings sont inondés. La préfecture a annoncé que les écoles seront fermées demain et le centre pénitentiaire situé dans les alentours de Montargis est en train d’être évacué. Le ministre de l’intérieur, qui connaît précisément le texte, de même que ses services et son cabinet, vous présente donc ses excuses, mais j’imagine que vous mesurez l’urgence des circonstances.
J’ai donc le grand plaisir d’être ici pour représenter le Gouvernement. J’ai écouté vos interventions et découvre un peu la matière, même si, sur les bancs de l’opposition, on sait que je suis de près les questions électorales.
Ce sont des sujets très intéressants. Je salue l’exceptionnel travail des deux rapporteurs et me réjouis que vingt et une préconisations de leur rapport d’information sur vingt-trois ont été retenues. C’est un texte de bon sens car nous souhaitons tous l’accroissement de la participation des Français aux scrutins. Comme l’a très bien dit Mme Pochon, nous ne pourrons le faire artificiellement ou techniquement ; cela tient d’abord à la mobilisation et au débat d’idées. Pour autant, je suis particulièrement intéressé par la simplification des procédures car je suis le ministre chargé de la simplification. La mobilisation des parlementaires représentant les Français de l’étranger prouve l’attachement de ceux-ci au développement de la participation des Français éloignés de la métropole, qu’ils soient aux États-Unis, à Moscou, à Shanghai, au Liban, au Nigeria ou même, plus près de nous, en Suisse ou au Liechtenstein. Ils en ont bien besoin. Vos préoccupations sont tout à fait intéressantes.
J’ai parlé de l’Amérique du nord et de mon ami Frédéric Lefebvre, ici présent.
Rires.
Je vois votre mobilisation. Les réponses des rapporteurs et du Gouvernement sur le sujet de la double inscription, qui vous préoccupe, ne manqueront pas de vous convaincre, à l’issue d’un débat fructueux.
Je commencerai mes brillantes interventions de la soirée en étant favorable à l’amendement de coordination de la rapporteure
Sourires.
Puisque l’amendement no 3 , qui est un amendement d’appel, va tomber, je tiens à dire dès à présent que le rapport d’information des rapporteurs, qui a inspiré cette proposition de loi, contient des éléments intéressants sur le téléservice d’inscription sur les listes électorales. Ce service en ligne a été lancé en 2009 sur le site mon.service-public.fr. Toutefois, selon le rapport d’information, fin 2014, seules 4 100 communes avaient demandé leur raccordement au service. Je ne sais pas si ce nombre a fortement évolué depuis mais, sur 36 000 communes, c’est peu !
Dans la pratique, ce raccordement est plus compliqué pour les petites communes. Il faudrait peut-être mieux communiquer à ce sujet et les aider au plan matériel, car la généralisation de ce service assez méconnu serait un vrai levier pour faciliter l’inscription sur les listes électorales et donc pour mieux lutter contre l’abstention. Vous proposiez par ailleurs de lier ce service en ligne avec les démarches de changement d’adresse, ce qui a été fait, me semble-t-il. Dans tous les cas, un déploiement à grande échelle est attendu.
Là où il est implanté, ce service marche. Selon votre rapport, à Paris, plus d’un tiers des inscriptions ont été réalisées sur internet lors de la période de révision 2013-2014. Malheureusement, il fait défaut là où il est le plus nécessaire, notamment dans les communes rurales. Les modalités de ce déploiement sont d’ordre réglementaire mais j’espère que le Gouvernement prendra un engagement à ce sujet. Cette disposition supplémentaire enrichirait encore cette proposition de loi, qui permettra une modernisation salutaire des modalités d’inscription sur les listes électorales.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 20 .
Les représentants des Français de l’étranger ne sont pas les seuls à s’intéresser au texte. Permettez au député de la cinquième circonscription de la métropole du Nord, dans la belle région des Hauts-de France, de défendre ses amendements ! Puisque vous avouez ne pas connaître bien la matière, faites-nous confiance et acceptez l’ensemble de nos amendements, qui enrichiront ce texte !
Je n’ai jamais dit que je ne connaissais pas bien la matière !
L’amendement no 20 vise à permettre aux électeurs de moins de 26 ans, en particulier les étudiants, de rester inscrits dans la commune de résidence de leurs parents. Même s’ils ont déménagé, souvent de façon provisoire, pour faire leurs études, la plupart des étudiants ont des attaches fortes avec leur commune d’origine et souhaitent continuer à être inscrits sur les listes électorales de leur ancienne résidence. Il convient d’officialiser cette pratique. Comme les communes doivent radier les électeurs dont l’inscription sur les listes n’est plus valide, il convient d’ouvrir cette possibilité aux étudiants.
Notre collègue pointe un problème fréquent. Les étudiants sont l’exemple même de personnes qui n’ont pas choisi leur lieu de résidence : ils vont habiter dans la ville de leur université ou dans une ville voisine, où ils n’ont généralement aucune attache. Ils pourraient alors être radiés par le maire des listes électorales de leur commune d’origine, car ils paient une taxe d’habitation dans leur ville de résidence, s’ils y louent un studio ou une chambre. En outre, l’entrée des jeunes dans la vie active est plus difficile aujourd’hui. Si un jeune obtient un CDD de trois ou quatre mois, il sera peut-être amené à vivre dans un endroit où il n’aura aucune attache et qu’il quittera à l’issue du contrat. Le maire de sa commune d’origine, où sa famille réside et où il a toutes ses attaches, pourrait le radier, au risque qu’il ne soit pas réinscrit.
C’est donc une très heureuse proposition, qui a été acceptée par la commission. Cela éviterait de nombreuses radiations de jeunes, qui ne se réinscrivent pas ensuite, et cela assurerait une stabilité des inscriptions : si le jeune se met en ménage et part de manière stable et continue, il s’inscrit dans sa commune de résidence ; s’il entre dans la vie active ou est en formation, votre amendement permet de sécuriser son inscription sur les listes électorales de sa commune d’origine. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
Le Gouvernement est favorable à ce très bon amendement, pour les raisons que vient d’évoquer M. Warsmann. Il existe de nombreux cas d’étudiants qui préfèrent être inscrits dans leur commune d’origine. On pourra étudier à Paris et revenir dans la cinquième circonscription du Nord, à Lille, les dimanches, pour voter chez les parents, et c’est bien sympathique.
À mon tour, je voudrais apporter mon soutien à cet amendement, qui est d’une importance capitale, notamment dans les zones rurales et en outre-mer, où les étudiants sont nombreux à devoir partir pour étudier. Il ne faut pas que le lien au pays d’origine soit rompu et ce lien se traduit notamment par le vote, même par procuration.
L’amendement no 20 est adopté.
Nous vivons dans une société où la mobilité, notamment celle des jeunes, s’accroît. Cet amendement vise à réduire à un an la durée d’inscription au rôle des contributions directes communales exigée pour être reconnu comme contribuable local, afin de faciliter les modalités d’inscription sur les listes électorales, en particulier pour les personnes qui changent régulièrement de domicile.
La proposition de loi procède déjà à un toilettage considérable du code électoral. Aujourd’hui, il faut avoir payé pendant cinq années consécutives l’un des impôts locaux pour être inscrit. C’est complètement daté : cela correspond à l’époque où la plupart des activités de commerce étaient exercées en nom propre. Aujourd’hui, la plupart s’exercent en société. Nous proposons dans le texte une solution d’équilibre, qui est de réduire de cinq à deux ans consécutifs la durée d’inscription au rôle des contributions directes locales exigée et d’ouvrir à l’indivisaire, au gérant de société et à l’associé majoritaire de société la possibilité d’être inscrit sur les listes. Cela concerne les créateurs d’entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée – EURL –, les créateurs de sociétés par actions simplifiées – SAS – soucieux de protéger leurs biens, ou les créateurs de sociétés civiles, par lesquelles la transmission d’un patrimoine immobilier aux enfants est facilitée.
On a adapté à 2016 une disposition qui était restée dans les années cinquante. Elle est désormais adaptée à la société actuelle. En revanche, réduire à une année la durée d’inscription au rôle des contributions directes locales exigée, cela me semble vraiment trop court. La disposition proposée par la proposition de loi est équilibrée et j’aurais aimé vous en convaincre, en sorte que vous retiriez votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
J’ai bien compris que vous souhaitiez toiletter le code électoral et ramener cette durée de cinq à deux ans, mais il faut faire un grand pas tout de suite. Sinon, nous aurons à modifier cette disposition dans quelques années. La société a changé : les gens se déplacent beaucoup plus fréquemment et changent de région. Réduire cette durée à un an aurait ouvert à beaucoup de personnes la possibilité de voter.
L’amendement no 1 n’est pas adopté.
L’article 1er, amendé, est adopté.
J’ai eu l’occasion de faire plusieurs voyages ces derniers temps, notamment grâce à l’association des populations des montagnes du monde, que je préside. La création de circonscriptions pour les Français de l’étranger ont permis de beaucoup améliorer la représentation de ces derniers. Elle avait beaucoup souffert : la fin des alliances françaises, si utiles pour l’apprentissage du français et la connaissance de notre culture, la baisse des crédits alloués à nos ambassadeurs et à la diplomatie française, que nous avons laissée choir progressivement pendant ces trente dernières années alors que c’était la meilleure au monde, le recul très net du français par rapport à l’anglais, avaient nui à la visibilité de notre pays. Nombre de mes interlocuteurs étrangers ou Français résidant à l’étranger avaient du mal à s’y retrouver.
De plus, l’absence sidérale de débats, l’alignement total des positions de gauche sur celles de la droite, ont fait que la France n’est plus considérée comme ce pays qui parlait au monde.
Les députés des Français de l’étranger, avec leurs circonscriptions hors du commun – toutes sont difficiles mais les leurs le sont particulièrement – ont beaucoup apporté à cet égard. Maintenant, il faut retrouver cette force du débat qui fait que, quelles que soient les dispositions et quels que soient les lieux, lorsqu’un électeur a envie de voter, il va voter quoi qu’il arrive. Il faudrait pour cela que nous apparaissions un peu moins alignés, notamment par rapport à l’OTAN. On me le disait encore il y a deux jours : nous donnons le sentiment d’être les petits valets de l’OTAN, qui nous fait faire les guerres qu’elle veut et nous pousse à ne plus être ce que nous devrions être et ce pour quoi nous voudrions voter.
Il tend à fixer à quinze jours le délai dans lequel le maire transmet à l’INSEE les informations dont il a connaissance au sujet du déménagement de ses administrés.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir le sous-amendement no 36 .
Sans imposer au maire un délai trop contraignant pour transmettre ces informations à l’INSEE, votre amendement, monsieur Huyghe, contribue à l’esprit de la réforme en facilitant une mise à jour régulière du répertoire électoral unique. Le Gouvernement souscrit donc à l’intention, mais souhaite sous-amender votre proposition.
En effet, afin d’assurer le bon déroulement du processus de mise à jour du répertoire, il est nécessaire que l’INSEE soit informé sans délai des décisions ou informations utiles. Ainsi, l’article 6 de la proposition de loi dispose que la décision d’inscription au titre de l’article L. 30 est notifiée immédiatement par le maire à l’intéressé et à l’INSEE. De même, pour une inscription ou une radiation, l’article 2 dispose que le maire doit statuer sous cinq jours et notifier sa décision sous deux jours à l’intéressé.
S’agissant d’un changement d’adresse, il semble donc approprié que le maire procède à la transmission à l’INSEE dans un délai plus court, que nous proposons, si vous en êtes d’accord, de fixer à sept jours. S’agissant d’une inscription ou d’une radiation, le maire informe concomitamment l’intéressé et l’INSEE.
Tel est le sens du sous-amendement no 36 à votre amendement no 21 . Remplacer le délai de quinze jours par un délai de sept jours serait, me semble-t-il, un bon compromis.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?
Vous l’avez compris, mon cher collègue, la réussite de cette réforme repose sur la réactivité de chaque niveau. Avis favorable, donc, à l’amendement sous réserve de l’adoption du sous-amendement du Gouvernement. Il nous paraît en effet plus raisonnable de prévoir une transmission dans les sept jours.
Dans un esprit de compromis, je voterai votre sous-amendement, monsieur le secrétaire d’État. Il faut effectivement de la rapidité, tout en laissant à la commune le temps de se retourner – mais je crois qu’elle sera capable de le faire en sept jours. Cette disposition va dans le sens d’une bonne administration. Je vous remercie donc d’accepter mon amendement ainsi sous-amendé.
Le sous-amendement no 36 est adopté.
L’amendement no 21 , sous-amendé, est adopté.
Vous avez de nouveau la parole, monsieur Huyghe, pour soutenir l’amendement no 30 rectifié .
Confier la radiation d’électeurs de sa commune au maire présente le risque d’une utilisation détournée à la veille des scrutins. En outre, cette responsabilité pourrait peser lourdement sur les épaules de certains maires de petites communes, susceptibles d’être soumis à des pressions pour obtenir le maintien sur la liste électorale. Il est préférable de confier cette responsabilité à la commission de contrôle.
C’est pourquoi je propose par cet amendement de supprimer l’alinéa 16. Mieux vaut s’en remettre à la commission de contrôle, sachant que celle-ci n’est pas soumise aux pressions qui peuvent s’exercer sur les maires et sachant aussi que l’on trouve parfois des personnes qui ne respectent pas les règles.
Hélas, elle ne peut donner qu’un avis défavorable. Le coeur de la réforme est en effet de permettre au maire, en sa qualité de représentant de l’État, d’inscrire ou de radier au fil de l’eau, jour après jour.
J’ai bien compris, mon cher collègue, que vous craignez d’éventuelles radiations abusives. Mais, dès lors que la ratification est effectuée, elle est immédiatement notifiée à la personne, laquelle se voit alors ouvrir un délai de sept jours pour attaquer la décision au tribunal et faire annuler la radiation.
Le deuxième niveau de contrôle, c’est la commission de contrôle elle-même, qui, dans toutes les communes de plus de 1 000 habitants, sera pluraliste. Imaginons donc, comme vous nous suggérez de le faire, un maire procédant à des radiations d’électeurs lui étant supposés défavorables : l’opposition, qui siège à la commission de contrôle, ne manquera pas de remarquer la série de radiations et pourra, elle aussi, saisir le tribunal.
Au total, nous avons donc trois niveaux de contrôle : la justice, la commission de contrôle, puis à nouveau la justice. Nous avons voulu concilier, j’espère vous en avoir convaincu, l’efficacité dans la mise à jour de la liste électorale et la qualité des contrôles.
Avis défavorable, donc.
Il n’est pas question, bien entendu, de jeter l’opprobre sur l’ensemble des maires, mais il ne faut pas non plus fermer les yeux sur l’existence et la persistance de certaines pratiques et de certaines pressions. Imaginons que la personne radiée soit en déplacement. Si elle ne dispose que de sept jours pour réagir, la cause est perdue ! Et c’est celui qui l’aura radié peut-être à tort qui aura raison à l’arrivée.
On est obligé de fixer des délais suffisamment courts, dans la mesure où l’objectif est de pouvoir s’inscrire jusqu’à trente jours avant le scrutin. Que peut faire une personne qui découvre la lettre après avoir été en voyage pendant un mois ? Saisir la commission de contrôle, lui notifier la réception d’un avis de radiation, lui apporter les éléments montrant que la radiation n’est pas valable, indiquer la raison pour laquelle il lui était impossible de contester la décision et lui demander d’exercer un recours contre la radiation injustifiée dont elle a été victime.
J’entends bien vos arguments, monsieur le rapporteur, mais pour aller jusqu’à contester une radiation, il faut d’abord avoir vraiment envie de s’exprimer lors d’un scrutin. Or, avec la désespérance et le découragement qui s’installent, rares sont les citoyens qui iront jusqu’au bout de la procédure pour faire valoir ce droit-là une fois la décision notifiée. C’est la triste réalité !
La situation la plus fréquente actuellement, celle que nous avons tous rencontrée dans nos permanences, c’est la radiation par la commune d’une personne qui a déménagé et l’envoi de la notification à l’adresse où la personne n’habite plus. N’ayant pas été informée de sa radiation, la personne ne la découvre qu’au moment du vote. En instituant le répertoire unique, le texte permettra de lutter contre ce type de situation.
Par ailleurs, la commission de contrôle sera saisie de toutes les radiations. Il lui appartiendra de vérifier, indépendamment du fait que l’électeur a changé de résidence, que les radiations paraissent cohérente.
Vous l’avez vous-même indiqué, nous avons confiance dans les maires de notre pays. Je pense qu’ils sont l’autorité appropriée pour prendre ces décisions au nom de l’État. Cela dit, dans tout système démocratique il faut un contrôle, d’où la création de la commission de contrôle où l’opposition est représentée. Si vous siégez au sein cette commission en tant que conseiller municipal d’opposition, vous irez regarder les radiations. Dans le cas où elles vous paraîtraient quelque peu à sens unique – beaucoup plus nombreuse, par exemple, dans un secteur de la ville que dans un autre –, vous poserez des questions.
Nous avons conçu le dispositif pour qu’il y ait ce deuxième niveau de contrôle. À partir du moment où les listes seront « affichées », nous ouvrons de nouveaux délais de contentieux, y compris pour les commissions de contrôles qui pourront se substituer à un électeur négligent ou peu motivé.
Aucun système ne peut couvrir les risques à 100 %, certes, mais nous avons vraiment recherché à obtenir un équilibre entre efficacité et possibilité de recours.
L’amendement no 30 rectifié n’est pas adopté.
Il vise à préciser que le délai dans lequel le maire transmet à l’INSEE ses décisions de radiation et d’inscription est de sept jours à compter de leur prise d’effet.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 33 .
Je vous demanderai de retirer votre amendement, monsieur Huyghe. Vous nous avez tellement alertés, à juste titre, sur les délais que nous avons remarqué qu’il n’était même pas nécessaire d’aller jusqu’à sept jours. Puisque le maire doit transmettre la décision à l’intéressé dans les quarante-huit heures, nous avons jugé qu’il pouvait la transmettre à l’INSEE de la même façon et dans le même délai. C’est ce qui est proposé dans l’amendement no 33 , qui répond encore plus favorablement à votre préoccupation.
Je souscris à l’amendement de la rapporteure et partage son avis concernant l’amendement no 22 .
Le délai que je propose s’ouvre, je le précise bien, à partir de la prise d’effet de la décision. Il s’agit d’éviter qu’une radiation ne soit transmise à l’INSEE alors qu’elle sera par la suite contestée. Est-il vraiment souhaitable de notifier immédiatement une radiation à l’INSEE, au risque de devoir, le cas échéant, lui notifier peu de temps après une réintégration ?
Si le tribunal dénonce la radiation, nous prévoyons que la décision de justice sera directement transmise à l’INSEE. Il y aura en effet, mon cher collègue, deux passages par l’INSEE dans ce cas.
…mais je veux bien me ranger à votre avis. Je retire donc mon amendement, tout en vous demandant bien vouloir m’associer au vôtre.
Nous aurions bien voulu, mais ce n’est plus possible. Considérez que vous y êtes moralement associé, mon cher collègue.
L’amendement no 22 est retiré.
L’amendement no 33 est adopté.
Dans cet amendement déjà présenté lors de l’examen en commission, il est proposé d’intégrer à la partie du code électoral consacrée aux dispositions pénales la disposition pénale prévue à l’alinéa 17 pour sanctionner un maire ou un vice président de conseil consulaire qui inscrirait ou radierait un électeur de manière frauduleuse.
Nous avons adopté un amendement allant en ce sens, mais, suivant l’avis du Conseil d’État, nous n’avons pas intégré la disposition à l’article L. 87 du code électoral, qui concerne les fraudes relatives à la délivrance ou à la production d’un certificat d’inscription ou de radiation, mais à l’article L. 113 de ce même code, qui regroupe les sanctions pénales applicables aux manoeuvres frauduleuses de manière générale. Dans le texte de la commission, il s’agit des alinéas 22 et 23.
Il s’agit donc d’un différend non pas sur le fond, mais sur la place de la sanction dans le code. La position prise par la commission nous semble plus justifiée. À mon grand regret, donc, avis défavorable.
L’amendement no 13 est retiré.
L’article 2, amendé, est adopté.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 23 .
Il précise que l’affichage des listes électorales doit être accessible aux électeurs, de manière à éviter les contournements de la loi.
Il nous semble aller de soi que l’affichage doit être prévu dans des lieux accessibles au public. Pour cette raison, avis défavorable, à moins que M. Huyghe n’accepte de retirer son amendement.
Non. Ce qui va sans dire va mieux en le disant. Il arrive que l’on détourne la loi en affichant les listes dans un lieu inaccessible, par exemple pour travaux ou pour toute autre raison temporaire.
L’amendement no 23 n’est pas adopté.
Il s’agit d’assurer une forme de transparence, d’information et même de contrôle citoyen. L’amendement propose que l’ensemble des membres du conseil municipal soient informés de la date et du lieu de la réunion de la commission de contrôle par voie électronique au moins trois jours francs avant qu’elle ne se tienne et que ces informations soit affichées avec la liste électorale.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 24 .
Il a pour objet la communication des dates et lieux de réunion des commissions de contrôle, qui sont publiques, par insertion de cette information dans le journal municipal et annonce en conseil municipal afin qu’elle soit connue du plus grand nombre.
La transparence est en effet un gage de réussite de la fiabilité des listes que nous souhaitons. Néanmoins, les dispositions proposées nous semblent relever du champ réglementaire. Il importe donc que le Gouvernement confirme que notre demande a été entendue et comprenne à quel point nous tenons à la transparence afin que les choses soient dites et clairement énoncées.
Le Gouvernement préfère l’affichage en mairie à la publication dans le journal municipal, monsieur Huyghe, mais je vous propose d’en débattre dans un autre cadre, car ces mesures relèvent du champ réglementaire. Je saisirai les services du ministre de l’intérieur lorsque le décret d’application sera sur le point d’être publié. Nous y serons attentifs. J’espère que ma parole, retranscrite dans le Journal officiel, fera foi ! Je fais la même réponse au député Coronado, dont la présence ce soir démontre que la représentation des Français de l’étranger inclut l’Amérique du Sud !
Sourires.
J’ai bien conscience que les dispositions que je propose relèvent du champ réglementaire, mais le but de mon amendement était d’aborder le sujet dans l’hémicycle afin que tous les aspects du sujet soient bien précisés. Il serait bon de prévoir, dans le cadre du règlement, que ces informations seront communiquées en conseil municipal, dont il existe des comptes rendus et qui est parfois retransmis sur internet, même en différé, afin d’en assurer la plus large diffusion.
Si vous pouviez confirmer une telle annonce dans le cadre de nos débats, monsieur le secrétaire d’État, je vous en saurais gré.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 25 rectifié .
Cet amendement propose de transmettre le pouvoir de radiation du maire à la commission de contrôle afin de renforcer l’objectivité de la décision et de réduire les pressions, dans la lignée de l’amendement no 30 rectifié que j’ai présenté tout à l’heure. Sur le terrain, le traitement des listes électorales est très mal connu des conseillers municipaux. En raison de cette méconnaissance, de nombreuses commissions de révision sont composées de soutiens du maire. J’en compte plusieurs exemples dans ma circonscription. Donner le pouvoir de radiation au maire, c’est prendre le risque de dérives, notamment dans les communes dont la commission de contrôle n’est pas pluraliste. Il semble sage de confier tous ces pouvoirs à la commission.
Nous avons rejeté un amendement similaire tout à l’heure car il était complètement contraire à l’esprit de la réforme. Je ne rappellerai pas tous les garde-fous que nous avons mis en place. En l’absence d’opposition dans une commune de moins de 1 000 habitants, la commission comporte un représentant du préfet et un autre du tribunal. L’avis de la commission est donc défavorable. Adopter cet amendement empêche de procéder à des inscriptions au fil de l’eau tout au long de l’année, ce qui est le premier objet de la réforme.
L’amendement no 25 rectifié n’est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 26 .
Cet amendement prévoit la désignation en conseil municipal du membre du conseil qui siégera à la commission de contrôle. Il vise à rendre publique cette désignation au bénéfice de la transparence. Un vote organisé au sein du conseil municipal fera connaître à tous le nom du conseiller chargé de siéger au sein de la commission ainsi que l’objet de la commission.
Nous avons préféré au vote l’ordre bien connu du tableau, ce qui est plus simple. En outre, dans les équipes municipales présentant une majorité et une opposition, un vote tendrait à exclure les membres de cette dernière. Il est bien plus simple de suivre l’ordre du tableau, comme nous le proposons, et plus transparent, car l’ordre du tableau est public par définition. L’avis de la commission est donc défavorable si l’amendement n’est pas retiré.
Je souscris aux arguments avancés par M. le rapporteur. Par ailleurs, comme nous partageons les mêmes préoccupations de transparence et d’information, monsieur le député, nous pourrions convenir que le décret d’application complète l’ordre du tableau par une obligation d’information du conseil municipal.
Je préfère un vote, qui ressortit à la démocratie. Un vote en conseil municipal est toujours un processus positif. Je comprends néanmoins les impératifs de la simplification. Je remercie M. le secrétaire d’État de proposer de compléter le décret par une obligation d’information du conseil municipal au bénéfice de la transparence et retire mon amendement.
L’amendement no 26 est retiré.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 34 .
Notre collègue Sébastien Huyghe a eu l’excellente idée de déposer, avec certains de nos collègues, l’amendement no 27 que la commission s’apprête à accepter. Néanmoins, s’il est adopté et complète l’alinéa 20, il faut par cohérence compléter également l’alinéa 13. Tel est l’objet de l’amendement no 34 de la commission. Je précise d’ores et déjà que nous sommes favorables à l’amendement no 27 déposé par Sébastien Huyghe.
L’amendement no 34 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 27 .
Cet amendement étend aux agents des EPCI et des communes membres l’incompatibilité entre cette qualité et celle de membre de la commission de contrôle. Le texte actuel rend incompatible la qualité de membre de la commission avec celle d’agent de la commune. Par extension, il semble légitime de rendre cette mission incompatible avec la fonction d’agent de l’EPCI et de ses communes membres qui peuvent tout autant faire l’objet de pressions.
L’amendement no 27 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 28 .
Cet amendement prévoit la communication de la composition de la commission dans les mêmes conditions que celle des listes électorales. Il semble légitime de lier ces deux affichages afin d’accroître la transparence, maître mot de la réforme, et d’empêcher toute suspicion.
Votre amendement est conforme à l’esprit du texte et à ses objectifs, cher collègue. La commission émet donc un avis très favorable.
L’amendement no 28 est adopté.
L’article 3, amendé, est adopté.
L’article 4 est adopté.
L’article 5 est adopté.
L’article 6 est adopté.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 29 .
Cet amendement prévoit la délivrance de la copie intégrale des listes électorales dès lors qu’elle est autorisée. Certaines communes et préfectures, celle du Nord par exemple, rechignent en effet à fournir la copie intégrale de ces listes et n’en communiquent qu’une version expurgée de plusieurs informations, telles que le lieu et la date de naissance ou le bureau de vote. Afin de garantir l’application pleine et entière de la loi, cette précision semble nécessaire.
La commission émet un avis défavorable à l’amendement. D’abord, si les exemples évoqués sont avérés, il faut saisir la CADA, qui dira très vite le droit. En outre, nous avons privilégié la souplesse du dispositif. Le système mis en place comportera un répertoire de l’INSEE incluant plus d’éléments que l’actuel. Par exemple, l’INSEE gardera en mémoire cachée les précédentes inscriptions des électeurs pour la tenue de son répertoire. Lors d’une demande d’extrait de liste électorale, l’INSEE dira où est inscrit tel électeur au moment de la demande et non s’il a été inscrit ailleurs ni pendant combien de temps. La nécessité de cette souplesse nous a été confirmée par un dialogue avec le Conseil d’État. Nous émettons donc un avis défavorable à l’amendement. En cas de litige, il faut saisir la CADA. Sur ce point, nous ne souhaitons pas que le texte législatif comporte le terme « intégral »
Je souscris aux propos de M. le rapporteur et ajoute une autre raison pour refuser cet amendement. Nous avons compris le terme « intégral » comme une extension à l’échelle de l’ensemble du territoire, ce qui nous semble particulièrement excessif. En revanche, le caractère complet des informations que vous évoquez, monsieur le député, mérite selon nous une réflexion. Pour la raison que j’ai indiquée initialement, le Gouvernement souhaite le retrait de l’amendement et émet à défaut un avis défavorable, mais la question soulevée, par-delà la CADA, les services du ministère de l’intérieur et les préfectures, qui porte sur le caractère complet des informations, ne me choque pas du tout. Je vous propose donc que nous continuions le dialogue hors du cadre de cet amendement et de cet hémicycle.
Vous confirmez donc, monsieur le secrétaire d’État, que l’intégralité des informations doit être accessible. Que vous le disiez dans l’hémicycle constitue déjà un pas en avant pour certaines administrations qui en douteraient !
Il va sans dire, mais cela va mieux en le disant, que ces informations ne doivent pas faire l’objet d’un usage commercial, car elles sont très précises et portent aussi sur la vie privée des individus. Nous avons compris le terme « intégral » en termes d’échelle et non de précision des fichiers préfectoraux. Je ne fais aucune réponse définitive mais nous pouvons continuer la discussion, par exemple sous forme d’une question écrite à laquelle je ne doute pas que les services répondront très rapidement.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État. Je poserai très rapidement une question écrite au ministre de l’intérieur, sur votre suggestion, et retire donc l’amendement.
L’amendement no 29 est retiré.
Cet amendement reprend l’une des conditions à la communication des listes électorales prévue au premier alinéa du nouvel article L. 37 du code électoral mais absente du second, celle de s’engager à ne pas en faire un usage commercial. Comme certains de nos collègues représentant les Français de l’étranger peuvent le confirmer, nous avons vu se développer dans certaines circonscriptions, lors des dernières élections législatives qui en la matière étaient une première, une politique très offensive de ciblage commercial. Il ne faut donc pas négliger ce sujet et ne pas se contenter de l’absence de mention de cette condition à l’alinéa 2.
Les électeurs auront uniquement accès aux données du répertoire électoral unique qui les concernent, afin que fonctionne le compte électoral personnalisé. Par conséquent, il leur est impossible d’avoir accès à d’autres informations dont ils pourraient faire un usage commercial. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable. Il s’agit ici des relations entre le répertoire et l’électeur et non entre la liste et l’électeur.
J’ajoute à ce que vient de dire Mme la rapporteure un argument complémentaire : l’article 7 de la proposition de loi satisfait votre demande, monsieur le député. Je propose donc le retrait de l’amendement et émets à défaut un avis défavorable.
Je ne demande qu’à vous croire, monsieur le secrétaire d’État. Néanmoins, je vous invite à vous pencher sur les listes électorales communiquées actuellement. J’ai signalé ce problème lors de l’audition des services des Français de l’étranger. Il s’agit d’un ensemble de données très personnelles telles que l’adresse de courriel, l’adresse physique ou la date de naissance qui peuvent servir à établir une base de données, par exemple en les segmentant par sexe ou par âge. C’est sur la base de ces données que le démarchage commercial s’est développé.
Je suis entièrement d’accord avec mon collègue Coronado, et l’ensemble des députés représentant les Français de l’étranger ne peuvent que partager cet avis. Pourquoi ? Les listes électorales sont disponibles sur internet – je le précise à mes collègues de métropole. Disposer de 80 000, 100 000 – voire davantage – adresses internet, avec toute une série d’informations, comme l’âge etc. représente un véritable atout commercial. On a pu constater que ces listes étaient complètement dévoyées depuis la dernière élection où des candidats les ont diffusées à tout va. Cela pose un vrai problème qui n’est pas d’ordre politique.
Si l’on ne veut pas que les électeurs – Français de l’étranger – soient inondés de mails, l’engagement à ne pas faire un usage commercial de ces listes serait la moindre des choses.
J’apporte donc mon soutien à l’amendement de mon collègue.
J’ai dû mal me faire comprendre. L’article 7 satisfait votre demande. On a bien compris que vous dénonciez l’usage commercial des listes électorales. Mais votre demande porte sur l’alinéa 7 qui concerne le répertoire électoral.
L’électeur n’a alors accès qu’aux données qui sont les siennes. L’ajout que vous proposez n’est donc pas utile.
L’amendement no 16 est retiré.
L’article 7 est adopté.
L’article 8 est adopté.
La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement no 17 portant article additionnel après l’article 8.
Cet amendement reprend la proposition no 22 du rapport d’information sur les modalités d’inscription sur les listes électorales qui visait à confier au président du bureau de vote le soin de recenser et de signaler à la commission administrative compétente les erreurs sur les listes électorales.
J’espère que Mme la rapporteure y donnera une suite favorable dans la mesure où il s’agit de l’une de ses propositions dans le rapport qu’elle a commis avec M. Warsmann.
La proposition est si bonne que j’en ai parlé lors de la présentation du texte en m’adressant au Gouvernement.
Nous avons tous été un jour ou l’autre président d’un bureau de vote et nous avons pu constater qu’il y avait des erreurs de toutes sortes : erreur sur l’adresse, sur l’orthographe des noms etc. Généralement, ces informations sont très peu collectées. Même si le présent texte ne s’appliquera pas aux élections de 2017, nous avons souhaité que, dans les circulaires d’organisation des prochaines élections présidentielles et législatives, consigne soit donnée par le Gouvernement pour relever toutes ces irrégularités. Cela sera l’occasion de toiletter les listes électorales et permettra d’atténuer les différences entre le répertoire de l’INSEE et la réalité de la liste de la commune.
Cependant, nous ne souhaitons pas que cela figure dans le procès-verbal pour ne pas susciter des vagues de recours contre le résultat des élections. Si le Gouvernement peut nous garantir qu’il demandera un relevé des irrégularités qui se sont produites dans les bureaux de vote, et sans que cela figure dans un procès-verbal, on aurait abouti à un bon équilibre. Dans ces conditions, et sous réserve de l’engagement du Gouvernement sur ce point, vous pourriez, mon cher collègue, accepter de retirer votre amendement d’autant que je pressens qu’un de vos prochains amendements pourrait connaître une issue favorable.
Sourires.
Et je rejoins ses arguments pour vous demander de retirer de votre amendement. En effet, produire un procès-verbal spécifique pourrait susciter nombre de contentieux. Le Gouvernement s’engage à produire une circulaire appropriée dans laquelle il serait demandé aux présidents de bureaux de vote de faire figurer dans un document annexe le relevé des erreurs matérielles, vous donnant ainsi satisfaction, sachant que par ailleurs il y aura un important toilettage des listes électorales pour 2017.
Oui, monsieur le président. Il s’agissait d’un amendement d’appel pour obtenir un engagement de la part du Gouvernement.
L’amendement no 17 est retiré.
Nous avons eu une discussion sur le montant des amendes, qui nous a conduits à le réduire quelque peu.
L’article 7 prévoit que la personne qui obtient une copie d’une liste électorale doit s’engager à ne pas en faire un usage commercial. Cet amendement vise à y associer, en cas d’infraction, une peine d’amende de 15 000 euros, montant plus modeste que celui qui a été proposé en commission, vous en conviendrez.
L’amendement no 18 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Les articles 9, 10 et 11 sont successivement adoptés.
Plusieurs orateurs sont inscrits à l’article 12.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre.
Avec ma collègue Schmid, nous souhaitons abroger l’alinéa 5 du présent article car les engagements pris par le Gouvernement et la commission des lois, en l’occurrence par le président Urvoas qui est maintenant ministre du Gouvernement n’ont pas été respectés. Il n’y a pas eu d’injonction de la part du Conseil constitutionnel ; il a seulement incité à mener une réflexion sur le sujet, ce qui signifie que nous disposons de temps. Conformément à l’engagement pris par le Gouvernement, il est clair que le dispositif ne s’appliquera pas aux élections à venir, mais aux suivantes, preuve supplémentaire s’il en est que nous disposons de temps.
Nous aurions pu éviter un certain nombre d’erreurs qui figurent dans ce texte et sur lesquelles nous reviendrons si l’engagement de consulter les élus des Français de l’étranger avait été respecté – ni ma collègue Schmid ni moi-même ne l’avons été. Au-delà, l’assemblée des Français de l’étranger – AFE – n’a pas été consulté non plus, une seule personnalité a été auditionnée. L’AFE s’est prononcée à 80% contre le dispositif actuel. Quant à la commission des lois, c’est à l’unanimité qu’elle s’est prononcée contre le dispositif actuel considérant que la suppression de la double inscription était une erreur et une perte de droits pour les Français de l’étranger.
Le propos de M. Cazeneuve tout à l’heure ne correspondait pas à la réalité. Faisant référence à la réforme de 2008 qui a institué une représentation des Français de l’étranger à l’Assemblée nationale, il a indiqué que cela avait provoqué un bouleversement des équilibres de la représentation. Or je veux rappeler – cela a été excellement dit par le rapporteur M. Warsmann – que les remarques et les demandes du Conseil constitutionnel incitant à engager une réflexion sur ces sujets datent de 2007. Cela signifie que l’on ne peut pas prendre argument de la réforme constitutionnelle et de la représentation de nos compatriotes de l’étranger à l’Assemblée nationale.
Je reviendrai rapidement tout à l’heure sur les raisons pour lesquelles je suis défavorable à l’ensemble de ces dispositions.
Je m’étonne de l’absence des députés des Français de l’étranger issus du parti gouvernemental, majoritaire dans cette assemblée. J’aurais bien voulu les entendre sur cet article et connaître leur position. Je suis dans l’embarras et leur absence me donne à penser qu’ils sont du même avis que Frédéric Lefebvre et moi-même.
Je remercie cependant Mme et M. les rapporteurs d’avoir accepté de me recevoir à midi, à ma demande. J’ai cru entendre que le Gouvernement déposerait, suite à l’une de mes observations, un amendement relatif à l’inhumation.
Si nous avions, en amont, travaillé tous ensemble, nous aurions pu trouver un consensus sur cet article.
J’avais exprimé mon désaccord lors du débat en commission. Comme mes collèges représentant les Français de l’étranger, je suis très réservé quant aux réponses et aux solutions qui ont été privilégiées par le Gouvernement et les rapporteurs.
Le Conseil constitutionnel n’a, en effet, pas donné d’injonction visant à supprimer la double inscription. Il a seulement alerté sur le fait que cela posait problème.
Une question me paraît prioritaire. Le Gouvernement doit se mobiliser – je sais que le ministre est très sensible à la question des circonscriptions des Français de l’étranger, particulièrement à l’une d’entre elles (Sourires ) – afin de faciliter la participation aux élections, notamment par internet.
Nous avons supprimé le vote par correspondance. Nous connaissons les difficultés : au-delà de quarante kilomètres de distance entre le domicile et le point de vote, la participation chute considérablement. Il est de la responsabilité du Gouvernement de faciliter la participation des Français établis à l’étranger, qui ne sont pas moins Français que les citoyens de l’hexagone.
Se pose enfin la question de la double inscription. Aujourd’hui, il est possible de voter pour les présidentielles, les européennes, les législatives et les référendums à l’étranger et de voter aux municipales, aux départementales, aux régionales en France. Cette possibilité a été octroyée. Pourquoi une telle levée de boucliers aujourd’hui ? Les Français de l’étranger représentent environ 2,5 millions de personnes. Certains sont nés à l’étranger, sont bi-nationaux et n’ont peut-être jamais mis les pieds en France.
Ce vote dans l’hexagone, à ces élections-là, fait partie de leur lien avec la France. C’est un lien fort, construit sur la citoyenneté. Quand on leur annonce aujourd’hui de façon unilatérale alors que tous leurs élus sont opposés à ces dispositions, qu’ils ne pourront plus exercer leur citoyenneté sur le territoire national,…
…c’est à la fois une grande déception et une forme de colère. Pour ma part, je les comprends.
Le présent amendement vise à supprimer l’aliné 5 de l’article 12 visant à abroger l’article L. 330-3 du code électoral mettant fin à la double inscription. Comme je me suis déjà longuement exprimée sur ce point, je rappelle que le texte apporte des solutions, à savoir la création du registre électoral permanent et l’inscription au fil de l’eau.
Rien n’est prévu non plus dans le texte pour protéger contre les radiations, ce qui pose problème. S’agissant de l’inhumation, nous en discuterons au moment de l’examen de l’amendement qui a été déposé par la commission.
Quelles seront les conséquences ? L’électeur mécontent de ne plus pouvoir voter, pourra trente jours avant l’élection, puisque vous avez offert la possibilité de changer de liste électorale au fil de l’eau, changer de liste électorale et s’inscrire en France avec pour conséquence un surcroît de travail pour l’administration. Il y a toujours une possibilité de trouver une solution, ce n’est peut-être pas la plus simple, mais elle existe et nous la ferons connaître.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement identique no 5 .
Mme Schmid vient de le dire, nous ferons connaître cette possibilité. L’article 12 générera beaucoup de mécontentement, de frustrations, voire provoquera des blessures sans parler des complexités administratives, dans les consulats notamment.
Nous avons acté que cela ne concernerait pas les élections prochaines – c’est un point important –, mais les élections suivantes. Cela signifie que nous avons du temps pour réfléchir. J’ai en effet déploré la précipitation qui a prévalu, ainsi que le choix de recourir à la procédure accélérée, le tout sans concertation alors que le président de la commission des lois de l’époque, M. Urvoas, s’y était engagé. De ce fait, j’attends que le Gouvernement nous dise, puisque nous disposons de temps, qu’il mènera une concertation pour déterminer les modalités d’application de l’ensemble des dispositions avec la perspective de modifier tel ou tel aspect car l’on voit bien que leur impact n’a pas été mesuré : or c’est bien ce que je déplore.
Le rapporteur le sait bien qui, lorsqu’il était président de la commission des lois, s’est beaucoup battu, et à juste titre, pour qu’on mesure l’impact des textes. Malheureusement, celui-ci n’a pas fait l’objet d’une étude d’impact pour nos circonscriptions des Français de l’étranger.
Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous puissiez vous engager à ce que nous ayons des discussions, voire à ce qu’un groupe de travail soit constitué avec des représentants des Français de l’étranger, puisque nous avons le temps.
La commission a émis des avis défavorables à ces amendements de suppression. Je m’en suis déjà expliqué tout à l’heure, lisant la décision du Conseil constitutionnel qui remettait en cause le principe de l’existence de deux votes et deux listes électorales. Lorsque, par exemple, l’un de nos concitoyens habite à Paris et que sa famille est originaire du Touquet, où il a un appartement, il peut choisir de voter au Touquet, auquel cas il doit voter entièrement Touquet, ou de voter à Paris, auquel cas il doit voter entièrement à Paris. Il existe en effet des règles et il doit faire son choix. Nous nous trouvons là devant situation du même type.
Par ailleurs, je souhaiterais que le Gouvernement puisse s’exprimer sur les modifications apportées en matière de procurations. De fait, il importe de savoir s’il est facile de donner procuration lorsqu’après avoir choisi de voter au consulat, on passe, au printemps, deux mois dans sa famille en métropole. Il n’y a pas là de volonté de nuire à quiconque, mais un problème d’égalité qu’il nous faut régler. Aujourd’hui, le système de la double inscription ne fonctionne plus juridiquement.
Ce sujet est débattu depuis fort longtemps – j’en veux pour preuve que le Conseil constitutionnel a émis à cet égard un avis très clair, simple et lisible. Le Conseil d’État a également été saisi et je vous rappelle, en tant qu’ancien sénateur, que nous avons la chance d’avoir un système bicaméral et que le texte, s’il est voté ce soir, sera transmis au Sénat où je suis certain…
…que vous aurez des relais puissants. Nous continuerons bien évidemment la discussion, ce qui est le propre du débat parlementaire.
Je tiens à vous rassurer sur le fait que, comme cela vient d’être dit, la fin de la double inscription ne produira pas deux types de Français. Au contraire, le Français de l’étranger sera un citoyen à part entière. Vous êtes ici les dignes représentants des Français de l’étranger, qui sont en effet pleinement représentés au Parlement – à l’Assemblée nationale et au Sénat – par suite de la révision constitutionnelle de 2008, dont je ne ferai pas l’apologie ce soir, mais qui représente, en la matière au moins, une avancée très significative. Vous savez aussi que, depuis 2013, une représentation de proximité est également assurée par les conseillers consulaires.
Le Français de l’étranger, y compris s’il a gardé un lien fort avec la métropole, aura donc la possibilité de s’inscrire dans une commune de France jusqu’à trente jours avant les élections municipales s’il remplit les conditions pour le faire. De même, dans la perspective d’un prochain scrutin national ou consulaire, un Français de l’étranger pourra, dans les mêmes conditions, se réinscrire sur la liste consulaire – cette faculté n’est pas donnée à tout le monde.
La suppression de la double inscription maintient donc une réelle flexibilité qui permettra à chaque Français de l’étranger, s’il le souhaite, de faire son choix avant chaque scrutin. C’est d’ailleurs le sens du droit existant, qui impose aux Français de l’étranger de faire un choix en manifestant avant le 31 décembre de chaque année leur souhait de voter par exception en France, alors que le principe est d’un celui d’un vote à l’étranger sur la base de listes électorales consulaires.
La suppression – que nous assumons pleinement – de la double inscription pour les Français de l’étranger permettra en réalité de clarifier le système actuel, source de confusion pour l’électeur, qui ne sait pas où il peut voter et pour quelle élection. Elle introduit donc une simplification de ces démarches. Le système de classification actuelle en trois catégories – PR1, PR2 et PR3 – n’est en effet ni clair, ni satisfaisant. Du reste, il ne s’agit même pas d’une véritable classification, mais simplement d’une mention « Vote en France ». Ce système entraîne une très grande confusion, en particulier pour les 470 000 personnes – sur 1,2 million – qui sont doublement inscrites sur une liste consulaire et sur une liste communale. Ces électeurs sont au demeurant persuadés, à tort, de pouvoir voter indifféremment, quel que soit le scrutin, dans leur commune ou dans leur consulat.
Je viens d’évoquer la demande du Conseil constitutionnel. Il existe un réel dysfonctionnement, en particulier, pour le vote des Français de l’étranger lors de l’élection présidentielle. Comme vous le savez, nous avons dû mettre en place, la procédure « crash », totalement exorbitante du droit commun et que je n’ose même pas décrire dans cet hémicycle, qui permet notamment d’appeler les consulats et les ambassades le jour même du scrutin. Je ne développerai pas davantage ce point – heureusement que les scrutins ne sont pas trop serrés, car le nombre de recours serait inimaginable !
La loi organique du 25 avril 2016 sur l’élection présidentielle a déjà apporté, vous le savez, une première pierre à l’édifice en prévoyant un lien automatique entre la radiation du registre et la sortie de la liste électorale consulaire – LEC – afin de régler de façon prioritaire la délicate situation des Français à l’étranger qui, en toute bonne foi, ne peuvent participer à une élection nationale car, étant désinscrits du registre consulaire, ils pensent être radiés des listes électorales consulaires et, de la sorte, ne plus avoir à manifester avant le 31 décembre leur intérêt et leur souhait de jouir de la possibilité de voter l’année suivante dans leur commune de France.
Cependant, cette première mesure, applicable en 2017, ne règle, au mieux, que le cas des doubles inscrits dont l’inscription au registre des Français établis hors de France est arrivée à échéance. Il s’agit donc de répondre à la crainte d’une diminution de facto du nombre d’électeurs sur liste consulaire et je ne doute pas que vous partagiez en toute bonne foi cette inquiétude, pour des raisons bien légitimes liées à la participation au scrutin et au souci que le débat d’intérêt général se manifeste par le vote.
Je ne vois cependant pas pourquoi un tel mouvement se produirait. Il n’y a du reste pas plus à redouter de conséquences en termes d’ouverture des bureaux de vote au plus près des électeurs, dont le nombre n’est pas en diminution mais, au contraire, en hausse constante depuis dix ans. En effet, si les distances à parcourir jusqu’à un bureau de vote peuvent parfois paraître longues, la possibilité de voter par procuration dématérialisée, qui répond à la préoccupation exprimée par M. Warsmann, ou par voie électronique – question qui, vous vous en souvenez, a donné lieu à bien des débats – pour les élections législatives et consulaires permet de pallier cette difficulté.
Je rappelle enfin, pour que mon propos soit très complet, que depuis septembre 2015, le Gouvernement facilite les démarches de vote par procuration en France pour les Français de l’étranger. Désormais, en effet, la procédure de transmission de ces procurations par les consulats aux mairies est entièrement dématérialisée.
Pour toutes ces raisons, notre position est très claire : l’article L. 333 du code électoral doit être abrogé. Le Gouvernement est donc très défavorable à votre amendement qui, par essence, est même contraire à l’esprit de la proposition de loi. Nous cherchons en effet à simplifier l’exercice du droit de vote, et non pas à le compliquer ou à le rendre confus et illisible. Nous avons fait en la matière le choix de la lisibilité et de la clarté.
Le Gouvernement, monsieur le député, continue à discuter. Je sais notamment que le ministre des affaires étrangères rencontre très régulièrement l’ensemble des députés et des sénateurs des Français de l’étranger, légitimement émus par cette préoccupation. Nous poursuivrons également la discussion au Sénat. C’est cela aussi, la démocratie parlementaire.
Même s’il n’est pas prévu de consultation obligatoire de l’Association des Français de l’étranger – AFE –, que je connais bien, je suis certain que, dans le cadre notamment de la navette, s’exprimera le souci de l’écouter et d’avoir une discussion. Cependant, même si je suis, comme vous, très attaché au gouvernement ouvert et à la démocratie ouverte, le dernier mot restera malgré tout aux parlementaires et vous ne pouvez, me semble-t-il, que vous en réjouir.
Je voterai ce dispositif, auquel j’étais pourtant hostile initialement. D’abord, en effet, comme l’ensemble des représentants des Français de l’étranger – et je crois qu’à cet égard chacun dans cet hémicycle est de bonne foi, car il s’agit là d’un débat purement technique, et nullement politicien –, je suis attaché à ce que nos concitoyens puissent s’exprimer, s’ils y ont un attachement particulier, par un vote dans leur commune. Je n’aurais cependant pas voté ce dispositif s’il ne prévoyait pas désormais cette ouverture des listes électorales à trente jours du scrutin. De fait, avec un tel délai, celui qui a un véritable attachement qui le pousse à voter dans la commune où se trouvent sa famille ou ses racines pourra tout à fait s’y inscrire.
C’est peut-être une usine à gaz mais, depuis 2007, le Conseil constitutionnel a formulé une remarque en 2012. Je m’occupe des Français de l’étranger au sein de mon parti depuis 2000 et, s’il existait une solution miracle, peut-être l’aurions-nous déjà trouvée, depuis dix ans que cette question se pose. Cette solution ne me semble donc pas satisfaisante, mais c’est la moins mauvaise, dès lors que la liste est rouverte dans les trente jours. Cela permettra en effet à ceux qui le veulent de voter dans les consulats et de venir voter aux élections municipales.
Je voterai donc ce texte, nonobstant le système qui existait auparavant. Il faut en effet, dans un État de droit, tenir compte des avis du Conseil constitutionnel.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 6 .
L’amendement no 6 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
M. Coronado a engagé tout à l’heure la discussion sur l’usage qui peut être fait des listes électorales. L’amendement no 2 tend à ajouter la phrase suivante : « et à ne pas s’immiscer dans la politique intérieure de l’État de résidence de l’électeur ». Nous avons en effet vu très récemment qu’un parti politique avait écrit à tous nos compatriotes de l’étranger pour leur donner des consignes de vote dans le cadre d’une élection locale qui se déroulait dans un certain pays. Bien qu’il s’agisse d’un pays qui connaît le mot de démocratie et où cette dernière est très présente, une telle démarche n’a pas été bien acceptée. Il n’y a pas eu de conséquences pour nos compatriotes, mais si l’on commençait, par l’intermédiaire des listes électorales, à s’immiscer dans la politique intérieure des pays, tous les gouvernements ne le prendraient probablement pas comme l’a pris celui que je viens d’évoquer.
Nous devons protéger nos compatriotes et je vous demande donc de compléter l’alinéa 6 par les mots que je viens de lire.
Madame Schmid, nous avons été très sensibles au rappel que vous venez de faire et serions plutôt favorables à cet amendement, sous réserve cependant de lui apporter une rectification. Le terme « s’immiscer » nous semble en effet un peu fort et nous préférerions les mots : « à des fins de politique intérieure ». Accepteriez-vous cette rectification ?
Il conviendrait qu’une telle proposition de rectification soit très précisément formulée.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Madame la députée, le Gouvernement partage votre préoccupation. Vous avez en outre eu l’amabilité de ne pas citer le parti, assez majoritaire dans ce gouvernement et à l’Assemblée nationale, qui s’est exprimé à propos d’une votation citoyenne organisée en Suisse.
Je comprends du reste qu’il s’agit d’une vision d’intérêt général, même si elle s’appuie sur un cas particulier. Dès que vous aurez trouvé un compromis avec Mme la rapporteure, j’y souscrirai volontiers au nom du Gouvernement.
Je propose de remplacer les mots : « s’immiscer dans la » par les mots : « l’utiliser à des fins de ». L’ajout proposé par l’amendement serait donc le suivant : « et à ne pas l’utiliser à des fins de politique intérieure de l’État de l’électeur ». Notre collègue accepte-t-elle de faire sienne cette rectification ?
Madame Schmid, êtes-vous d’accord avec ce qui deviendrait l’amendement no 2 rectifié ?
L’amendement no 2rectifié est adopté.
L’article 12, amendé, est adopté.
Je suis saisi d’un amendement no 35 rectifié , portant article additionnel après l’article 12. La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour le soutenir.
Le présent amendement vise à tirer les conséquences de la fin de la double inscription pour les Français établis hors de France en ce qui concerne le droit à une sépulture. En l’état du droit, la sépulture dans une commune est due aux Français établis hors de France n’ayant pas une sépulture de famille dans la commune et qui sont inscrits sur la liste électorale de celle-ci. Il convient donc de leur permettre de conserver ce droit dès lors qu’ils répondent aux conditions d’attache spécifiques avec la commune.
L’amendement no 35 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 10 .
L’amendement no 10 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 13, amendé, est adopté.
L’article 14 est adopté.
L’article 15 de la proposition de loi fixe la date d’entrée en vigueur de cette réforme. Si la révision des conditions d’inscription sur les listes électorales est indispensable, cette réforme ne doit pas, à quelques mois d’un scrutin, déstabiliser les échéances électorales. Aussi est-il nécessaire de préciser que cette réforme ne pourra entrer en vigueur qu’après le 1er septembre 2017. J’ai entendu le Gouvernement et les rapporteurs nous rassurer, mais il serait plus clair que cette date figure dans la loi, d’autant que nous sommes tous d’accord !
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 31 .
Votre préoccupation est la nôtre. Je vous propose d’adopter le présent amendement, qui vise à substituer aux mots « et au plus tard » les mots « entre le 1er janvier et ». Ainsi, cette réforme, conformément à nos engagements, entrera en vigueur après les échéances électorales de 2017.
Avis favorable à l’amendement no 31 . Je demande à M. Mariani de bien vouloir retirer son amendement.
L’amendement no 7 est retiré.
L’amendement no 31 est adopté.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 11 .
L’amendement no 11 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 15, amendé, est adopté.
La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l’amendement no 8 portant article additionnel après l’article 15.
Cet amendement vise à mettre en place une évaluation des dispositions prévues par le texte. En visant à moderniser les règles d’établissement des listes électorales, cette proposition de loi touche directement aux conditions d’exercice du droit de vote. Il est donc essentiel de s’assurer du bon déroulement de la mise en oeuvre des dispositions, gage de l’efficacité réelle de la réforme souhaitée par le législateur. Il s’agit également de s’assurer que le système mis en place tend à une amélioration de l’implication des citoyens dans le processus électoral.
Cet amendement demande qu’un rapport relatif à l’application de la loi et de la modernisation administrative qu’elle implique soit établi dans un délai d’un an après la promulgation de la loi.
Le Parlement dispose de tous les moyens nécessaires pour le suivi de l’application des lois. La commission n’est donc pas favorable à un tel rapport. Néanmoins, nous souhaitons que le Gouvernement fasse des rapports d’étape pendant les 24 ou 30 mois nécessaires à cette réforme.
Par définition, le Gouvernement est disposé à discuter avec le Parlement. Si une étude est demandée à l’exécutif, cela sera examiné au cas par cas, en fonction des calendriers qui pourront être proposés par les commissions de l’Assemblée. Par ailleurs, il revient au Parlement de juger des moyens d’exécuter sa mission de contrôle de l’exécutif. Vous n’en voudrez donc pas au Gouvernement s’il s’en remet à votre sagesse !
L’amendement no 8 n’est pas adopté.
La proposition de loi est adoptée.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des ressortissants d’un État membre de l’Union européenne autre que la France pour les élections municipales.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 3 .
L’amendement no 3 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 1er, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 4 .
L’amendement no 4 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 2, amendé, est adopté.
L’article 3 fixe la date d’entrée en vigueur de cette réforme. Là encore, il s’agit de garantir aux ressortissants communautaires une certaine stabilité concernant les conditions dans lesquelles ils pourront exercer leur droit de vote lors des élections municipales. Il convient donc de préciser que l’entrée en vigueur de la réforme ne pourra avoir lieu qu’après le 1er septembre 2017. Si un amendement gouvernemental propose la même chose, mon esprit consensuel – exceptionnel aujourd’hui ! – me fera m’y rallier.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 5 .
Il est défendu. Je note que c’est la deuxième fois que Thierry Mariani se rallie à un amendement du Gouvernement, et je l’en remercie !
Avis favorable à l’amendement no 5 . Je demande à M. Mariani de bien vouloir retirer son amendement.
L’amendement no 1 est retiré.
L’amendement no 5 est adopté.
L’article 3, amendé, est adopté.
La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l’amendement no 2 , portant article additionnel après l’article 3.
Cet amendement demande au Gouvernement un rapport sur l’application des dispositions contenues dans ce texte. En visant à moderniser les règles d’établissement des listes électorales, cette proposition de loi touche directement aux conditions d’exercice du droit de vote pour les ressortissants communautaires. Il est donc essentiel de s’assurer du bon déroulement de la mise en oeuvre des dispositions, gage de l’efficacité réelle de la réforme souhaitée par le législateur. Dans le cadre de la mission de contrôle du Parlement, un rapport me semble souhaitable.
Avis défavorable. Autant nous souhaitons que le Gouvernement s’engage à faire des points d’étape, autant la forme du rapport ne nous semble pas opportune.
L’amendement no 2 n’est pas adopté.
La proposition de loi organique est adoptée.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 4 .
Au regard de l’étendue des circonscriptions des Français de l’étranger, l’affichage prévu ne concerne que les électeurs vivant près du poste. Or, ce sont surtout ceux qui en sont éloignés qui sont le plus souvent radiés injustement. L’évolution des chiffres dans les circonscriptions où un poste a perdu ses compétences de chancellerie le montre très clairement.
En outre, la liste étant permanente, ces affichages seront permanents ou réguliers. À l’heure du tout numérique prôné par l’administration et le politique, ne peut-on pas prévoir un envoi numérique ou un accès protégé sur un site ? Cet amendement prévoit une communication numérique des décisions d’inscription, en plus de l’affichage au consulat ou à l’ambassade.
Si vous le permettez, je prendrai un exemple concret. Le Tadjikistan est l’un des 26 pays où nos consulats ont disparu ou sont en voie de suppression. Le consulat de rattachement se trouve désormais à Astana, au Kazakhstan, à 3 heures d’avion de Douchanbé, les jours où il y a un vol. L’amendement est donc réaliste !
À partir du moment où il est bien clair que l’électeur peut consulter les décisions concernant sa propre inscription de manière dématérialisée, nous estimons que c’est une bonne initiative. Avis favorable.
La communication se fera par le site service public.fr. Excellent amendement.
L’amendement no 5 est adopté.
L’article 1er, amendé, est adopté.
L’article 2 est adopté.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 8 .
L’amendement no 8 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 3, amendé, est adopté.
Monsieur le président, je ne redemanderai pas la parole sur l’amendement no 3 , cosigné par Mme Schmid, qui vise à décaler l’entrée en vigueur de cette proposition de loi.
Monsieur le secrétaire d’État, à partir du moment où il n’y a pas eu d’étude d’impact et que l’Assemblée des Français de l’étranger, notamment sa commission des lois, n’a pas été consultée officiellement – contrairement aux engagements pris notamment par M. Urvoas – il me paraît indispensable que vous vous engagiez à ce que le Gouvernement consulte les élus des Français de l’étranger.
Cette réforme est une usine à gaz, sans étude d’impact avant, et sans rapport d’impact après. Je peux me prévaloir d’un certain recul sur la question, ayant mené le combat de l’enregistrement numérique des Français et obtenu cette avancée de M. Fabius, alors ministre des affaires étrangères, en me basant sur une étude réalisée avec le consul de San Francisco. Malgré ce progrès, je vous affirme, monsieur le secrétaire d’État, qu’avec le découplement et la fin de l’enregistrement automatique, le nombre de Français de l’étranger inscrits sur les listes électorales baissera. Il me paraît donc indispensable que le Gouvernement s’engage à réunir l’Assemblée des Français de l’étranger et les parlementaires pour examiner dans quelles conditions ce dispositif sera mis en oeuvre.
Je m’associe aux propos de M. Lefebvre : une concertation serait utile et il serait bon que le Gouvernement s’engage en ce sens.
Cet amendement vise à préciser que la réforme pourra entrer en vigueur seulement après le 1er septembre 2017. Je ne doute pas que M. le secrétaire d’État défendra un amendement auquel, pour la troisième fois de la journée, je me rallierai. Heureusement, nous ne siégeons pas ce soir !
Sourires.
Je profite de cette fin d’examen pour vous poser un problème concret. Je souhaiterais que, lors de cette réunion de concertation, soit évoqué le problème des postes à présence diplomatique – soit les 26 pays où les consulats ont été supprimés. Ces pays auront-ils des bureaux de vote physiques pour les élections présidentielle et législatives ? Autant pour les législatives, il serait acceptable qu’il n’y ait pas de bureau de vote, puisque l’on peut voter par internet, autant pour la présidentielle, cela me semble problématique !
Permettez-moi de vous soumettre trois cas. On explique aux Français établis à Port Moresby, capitale de Papouasie-Nouvelle-Guinée, ou à Douchanbé, au Tadjikistan, qu’ils pourront donner leur procuration lors d’une tournée consulaire le mois précédent. Mais il faut que ces électeurs connaissent respectivement quelqu’un à Sydney et à Astana. C’est quasiment impossible ! Ou il faudrait vraiment que les partis politiques fassent du bon travail.
Sourires.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 12 .
Puisque je bénéficie pour la troisième fois du ralliement par anticipation de M. Mariani, je ne vais pas développer la défense de cet amendement.
Je ne suis pas le ministre des affaires étrangères, mais je transmettrai cette question importante. Vous le savez, je m’intéresse aussi à ce qui se passe à l’étranger. Sur ces 26 pays où il n’y a plus de poste consulaire, je suis sûr que vous partagez les préoccupations des services régionaux de nos ambassades. Vous aviez vous-mêmes engagé, sous le précédent quinquennat, cette politique de rationalisation et d’efficacité.
Pour répondre aussi à Frédéric Lefebvre, le Gouvernement est très clair sur la fin de la double inscription. Je peux m’engager au nom du ministre des affaires étrangères, il recevra les représentants des Français de l’étranger. Je lui recommanderai de recevoir également la commission que vous m’avez indiquée de l’Assemblée des Français de l’étranger, pour faire en sorte que la concertation ait lieu avant la fin de la discussion parlementaire. Mais je le dis très clairement, nous n’évoluerons pas sur la double inscription.
En revanche, pour compenser l’absence d’étude d’impact – qui n’est pas le fait du Gouvernement mais tient à la nature du texte, qui est une proposition de loi – la mise en oeuvre de cette réforme se fera en concertation avec vous.
L’amendement no 6 est retiré.
L’amendement no 12 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement no 3 .
Je l’ai déjà défendu.
Un mot toutefois pour prendre acte de ce que vient de dire M. le secrétaire d’État : je le remercie d’essayer de remédier à un certain nombre de faiblesses, mais je n’ai pas seulement évoqué la question de la double inscription. J’ai abordé aussi celle du découplage de l’inscription au registre des Français de l’étranger et de l’inscription sur une liste électorale. Je mets au crédit du Gouvernement sa volonté de faire en sorte qu’un maximum de nos compatriotes puissent être inscrits, mais les réunions de travail qui ont été évoquées sont indispensables.
Je prends acte que la commission des lois de l’Assemblée des Français de l’étranger pourra être reçue avant la fin du processus, mais il faut malgré tout tenir compte du peu de temps qui nous sépare des futures échéances et aussi, comme l’a souligné le secrétaire d’État, de l’absence d’étude d’impact, s’agissant d’une proposition de loi. Nous remettre au travail, avec cette fois-ci les élus des Français de l’étranger, nous permettra de faire évoluer le dispositif avant les prochaines échéances. J’ai la certitude, en effet, qu’il peut avoir des conséquences négatives sur le bon fonctionnement de notre processus électoral à l’étranger.
L’amendement no 3 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Elisabeth Pochon, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 9 .
L’amendement no 9 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 1 est retiré.
L’article 4, amendé, est adopté.
Il prévoit la remise au Parlement d’un rapport permettant d’évaluer la mise en place des dispositions prévues par ce texte.
En effet, le Gouvernement s’engage sur cette mise en oeuvre concrète ainsi que sur les mesures de publicité adéquates, gages d’effectivité de la réforme souhaitée par le législateur.
Je voudrais que nous soyons bien d’accord sur un point, dans la majorité comme dans l’opposition. J’ai bien noté que rien ne changerait pour les prochaines élections. Je ne voudrais pas qu’on modifie le sort des nouveaux inscrits dans les consulats. Aujourd’hui, l’inscription sur la liste électorale est la règle : rien ne doit changer d’ici les prochaines échéances.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, sans aucun esprit polémique dans cette séance très consensuelle, je me permettrai de vous reprendre : la précédente majorité avait certes entrepris de revoir l’outil diplomatique, mais en aucun cas de fermer des consulats. Nous nous étions attachés à ce que tous les pays gardent leurs consulats.
L’amendement no 7 n’est pas adopté.
Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi organique.
La proposition de loi organique est adoptée.
Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Lecture du rapport de la CMP sur la proposition de loi réformant le système de répression ds abus de marché ;
Lecture du rapport de la CMP sur la proposition de loi pour l’économie bleue ;
Discussion du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures vingt.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly