Comment parvenir à un juste équilibre entre la territorialisation des politiques de logement, les contraintes nationales, et, le cas échéant, la substitution lorsque les territoires sont peu vertueux ? On voit bien qu'il s'agit d'un sujet sur lequel on oscille ; d'ailleurs, le projet de loi lui-même comporte des dispositions parfois contradictoires qu'il faudra sans doute retravailler. Je considère, pour ma part, qu'il faudra favoriser le plus possible la capacité de contractualisation des territoires afin de tenir compte des spécificités locales tout en veillant à les inscrire dans des enjeux nationaux de mixité sociale.
J'aimerais connaître le point de vue de nos invités : le texte est-il en retrait au regard de la montée en charge des EPCI dans les politiques de logement telle qu'elle émergeait de la loi ALUR ? Est-il en retrait en matière de pouvoir des préfets et de substitution de l'État ?
La présidente de l'ANAH que je suis est convaincue que le parc privé, en fonction des particularismes locaux, doit tenir une place primordiale dans la mixité et l'accessibilité du logement. Vous avez cité le conventionnement avec ou sans travaux ou le recours accru à l'intermédiation locative. Outre les crédits de l'ANAH, destinés à couvrir 70 000 logements en 2016 et 100 000 en 2017, d'autres outils existent-ils dont vous pensez qu'ils devraient être davantage mobilisés aujourd'hui pour favoriser l'accessibilité du parc privé ?
J'ai entendu Christophe Robert évoquer une possible harmonisation des loyers à l'échelon territorial : quel pourrait être le regard de la Fondation Abbé Pierre sur l'expérimentation consistant à unifier le niveau de loyer, en QPV et hors QPV, de sorte que le loyer ne soit plus un obstacle à une politique de mixité dans l'habitat ? Aujourd'hui, le loyer bas ne favorise pas l'attractivité des logements en QPV, puisque ce sont les logements enregistrant le plus fort taux de refus, même en zones tendues. Par contre, un niveau élevé de loyer hors QPV est susceptible d'exclure les ménages les plus modestes – au-delà des 25 % prévus par la loi. Comment, afin de ne pas créer de nouveaux QPV hors QPV, selon l'expression de Philippe Bies, recourir à des harmonisations plus lourdes que ce que prévoit le projet de loi aujourd'hui ?