Intervention de Rémi Pauvros

Séance en hémicycle du 15 juin 2016 à 15h00
Lutte contre les nuisances sonores de certains engins motorisés en milieu urbain — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRémi Pauvros, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

De plus, les riverains se sentent agressés par cette intrusion violente, amplifiée par la vitesse et le bruit, dans leur espace de vie.

Les nuisances sonores sont d’autant plus difficiles à supporter par les habitants des quartiers de grands immeubles, où le son se répercute sur les murs. Il faut chercher à mettre fin à ces comportements déviants. C’est le sens de la proposition de loi que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui.

Distinguons deux types d’engins : ceux qui sont soumis à réception, qui doivent répondre à différentes prescriptions techniques et obtenir un certificat de conformité puis être immatriculés, et peuvent circuler sur la voie publique, et ceux qui ne sont pas soumis à réception et ne peuvent pas circuler sur les voies ouvertes au public.

Ces derniers étaient à la base destinés à l’apprentissage du cross pour les enfants, mais la nouvelle génération d’engins motorisés a finalement été utilisée sur la voie publique par des individus à la recherche de sensations fortes, dans des conditions dangereuses tant pour leurs utilisateurs que pour les riverains.

Les mini-motos et les quads, du fait de leur petite taille, de la qualité de fabrication, ou de leur faible prix de vente, sont aujourd’hui impliqués dans de nombreux accidents.

Quant aux moto-cross non réceptionnées, du fait de l’évolution des techniques et du passage de la motorisation de deux à quatre temps, elles sont aujourd’hui plus rapides, plus bruyantes et plus résistantes qu’avant. Elles doivent être utilisées sur des circuits adaptés. Elles sont souvent revendues à des prix très bas après sept ou huit années d’utilisation. Elles peuvent également être volées ou maquillées dans le cadre de trafics divers. Elles sont ainsi plus dangereuses et à l’origine des accidents les plus meurtriers.

Il y a un an, le 8 juin 2015, rue d’Hautmont, à Maubeuge, un jeune homme de vingt ans sur une moto-cross a percuté de plein fouet un piéton septuagénaire qui traversait la rue. Le conducteur et le piéton sont décédés. La moto-cross impliquée n’était pas homologuée pour rouler sur la route.

Dans la seule circonscription de Maubeuge, selon le commissaire de police, ses équipes sont intervenues à quatre-vingts reprises en 2014 pour essayer de mettre fin aux circulations abusives de ce genre de véhicules.

En mai 2015, à Corbeil-Essonnes, le pronostic vital de deux personnes a été engagé après que deux moto-cross roulant à vive allure et sans phare se sont encastrées dans une voiture arrivant en sens inverse.

Les exemples sont malheureusement trop nombreux.

L’ampleur de ce phénomène et sa persistance engendrent des tensions insupportables pour les riverains, qui ont le sentiment que les auteurs de ces abus bénéficient d’une impunité. L’absence d’arsenal juridique adéquat pour les sanctionner et les consignes données aux services de police de ne pas poursuivre les contrevenants afin d’éviter le pire le confirment.

Les auteurs de ces abus, individus souvent animés par une volonté de provocation, motivés par une recherche de plaisir immédiat, agissent sans aucune appréhension du danger ni pour eux-mêmes ni pour les autres. L’attitude d’une minorité d’individus, parce qu’ils n’ont jamais appris les règles de la vie en société et du respect de l’autre, pose un vrai problème.

La pratique de cette activité, qui est reconnue comme un sport, doit s’exercer dans le cadre de circuits dédiés et être encadrée par du personnel qualifié.

Le projet de loi Égalité et citoyenneté que nous examinerons très prochainement apportera un certain nombre de réponses à ces problématiques en créant une véritable culture de l’engagement et du développement du sens des responsabilités des jeunes. À ces jeunes qui ne l’ont jamais appris, il nous appartient, en tant que législateurs, de faire savoir que tout n’est pas possible, en particulier mettre en cause la vie des autres.

Notre proposition de loi visant à lutter contre les nuisances de certains engins motorisés s’inscrit dans la continuité des lois du 5 mars 2007 et du 26 mai 2008 relatives aux conditions de commercialisation et d’utilisation de certains engins motorisés, issues de deux propositions de loi, l’une émanant de l’UMP, l’autre du groupe SRC.

La loi de 2007 relative à la prévention de la délinquance réprime par une contravention de cinquième classe le fait de circuler avec un deux-roues, un tricycle ou un quadricycle à moteur non soumis à réception sur les voies ouvertes à la circulation publique ou les lieux ouverts à la circulation publique ou au public.

La loi de 2008 a permis des avancées substantielles et renforcé le cadre juridique en réservant la vente de véhicules non soumis à réception dont la vitesse peut excéder 25 kmh aux professionnels et en interdisant leur vente aux mineurs, en restreignant l’utilisation des quads et mini-motos non soumis à réception, en créant une obligation d’identification des véhicules non soumis à réception dont la vitesse peut excéder 25 kmh et en instituant une peine complémentaire de confiscation du véhicule applicable en cas de récidive à l’infraction constituée par le fait de circuler sur les voies ouvertes à la circulation publique avec un engin non soumis à réception.

Le dispositif législatif et réglementaire a eu un effet dissuasif sur le comportement des utilisateurs de ces engins dans les zones habitées, mais il se révèle aujourd’hui largement insuffisant.

La présente proposition de loi visant à lutter contre les nuisances de certains engins motorisés renforce les dispositions adoptées en 2008, en complétant et simplifiant le cadre juridique défini ci-avant. Elle a fait l’objet d’échanges intéressants et a reçu un avis positif à l’unanimité de la commission des lois.

Je remercie d’ailleurs mes collègues qui participent aujourd’hui encore, par leurs amendements, à enrichir ce texte. À ce titre, je vous indique d’ores et déjà que je donnerai un avis favorable à l’amendement déposé par Sébastien Huyghe, qui était le rapporteur de la proposition de loi de 2008, visant à modifier le titre de ce texte afin de concerner, si vous le décidez, l’ensemble du territoire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion