Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la gestation pour autrui est interdite dans notre pays par un article précis du code civil : soit. Le recours à une mère porteuse est banni par la loi de bioéthique, qui interdit ainsi l’instrumentalisation du corps humain : soit. Le code pénal le condamne également, même s’il ne sanctionne en revanche ni la personne ou le couple désireux d’accueillir un enfant, ni la mère porteuse elle-même : soit. Le Président de la République, et le Premier ministre dans cet hémicycle, ont eux-mêmes rappelé que cette pratique était condamnable et qu’elle ne serait pas autorisée en France : soit.
Et pourtant…
Pourtant, au nom de l’intérêt de l’enfant, on reconnaît la gestation pour autrui au travers de la transcription dans l’état civil français des actes de naissance établis à l’étranger. En clair, on envoie le message suivant : « Allez à l’étranger, pour marchander votre désir d’enfant. À votre retour, on établira officiellement la filiation et le tour sera joué. » On laisse ainsi à d’autres la responsabilité d’autoriser la GPA tout en ayant bonne conscience : chez nous, c’est interdit mais pour l’intérêt supérieur de l’enfant, on régularise a posteriori. C’est à la fois facile et irresponsable.
Il est temps que notre assemblée prenne ses responsabilités. Je remercie mes collègues Valérie Boyer et Philippe Gosselin de nous permettre aujourd’hui de réexaminer le sujet car nous saurons enfin clairement si le Gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le secrétaire d’État, se prononce pour ou contre la gestation pour autrui. Renvoyer la responsabilité au niveau européen ne va convaincre personne, surtout si, comme vient de le rappeler notre collègue Jean Leonetti, votre gouvernement n’a engagé aucune démarche dans ce sens.
Ces propositions de loi ont, elles, le mérite de régler le problème de transcription des actes établis à l’étranger en vertu d’une convention de gestation pour autrui. Au-delà des questions législatives et de nos responsabilités respectives de députés, je compléterai ces propos par quelques réflexions personnelles.
Depuis que je siège dans cette assemblée, je suis intervenue sur toutes les questions concernant l’égalité entre les femmes et les hommes ou les violences faites aux femmes ; j’ai mesuré le travail qui restait à accomplir en devenant parlementaire et j’ai pensé qu’en tant que femme, il était juste de traiter de ces sujets. S’agissant du recours à une mère porteuse, on touche au plus profond de chaque femme qui a vécu la maternité, au plus profond de ce lien indéfectible qui existe entre une mère et l’enfant qu’elle met au monde.
C’est, pour une femme, l’acte d’une vie ; c’est, pour un enfant, le lien avec ses origines ; cette histoire qui commence est le ciment de chacun de nous. Je l’ai dit en commission : comment expliquerez-vous demain à ces enfants qu’ils ont été conçus pour être vendus à un prix variant selon le pays d’où ils viennent ?