Intervention de Daniel Gibbes

Séance en hémicycle du 16 juin 2016 à 15h00
Remboursement des taxes d'aéroport — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Gibbes :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe Les Républicains a souhaité inscrire dans sa journée d’initiative parlementaire une proposition de loi de Jean-Marie Tétart relative au remboursement des taxes d’aéroport. Il s’agit d’une proposition de bon sens, qui vise à garantir l’effectivité et la connaissance du droit existant. Elle vise à améliorer la transparence sur la composition du prix des billets d’avion et à renforcer l’information des consommateurs.

Les taxes représentent en effet une part significative du prix du billet d’avion. Elles sont nombreuses et ont des objectifs différents : utilisation et fonctionnement des aérogares, fonctionnement de l’administration de l’aviation civile et de l’aménagement du territoire, financement des mesures de sûreté et de sécurité dans les aéroports, financement du fonds de solidarité pour le développement UNITAID, ou encore surcharge carburant.

Vous me permettrez de profiter de cette tribune pour ouvrir une parenthèse, à titre personnel, sur une incongruité relative à l’une de ces taxes.

J’ai défendu un amendement lors de l’examen du dernier projet de loi de finances rectificative pour exonérer de taxe de solidarité, dite taxe Chirac, les vols de moins de cinquante kilomètres – une taxe qui, je le rappelle, s’élève à 1,13 euro pour les vols intérieurs et 4,51 euros pour les vols internationaux.

Cela peut paraître anecdotique mais, pour l’ultramarin que je suis, cette taxe est parfaitement disproportionnée et injustifiée. Par exemple, un passager de Saint-Barthélemy rejoignant l’île voisine de Saint-Martin, soit dix minutes de vol, via l’aéroport international de Juliana situé dans la partie néerlandaise de l’île et donc non européen, doit acquitter la même somme que le passager d’un Paris-Tokyo. Au risque de paraître hors sujet, je souhaitais aujourd’hui sensibiliser de nouveau l’Assemblée à cette question importante pour nos outre-mer.

Cela dit, je ferme la parenthèse et reviens au sujet qui nous intéresse. Certaines de ces taxes sont dues à l’État uniquement lorsque le détenteur du billet d’avion a effectivement voyagé. Lorsqu’il renonce à son voyage et perd son billet, la compagnie aérienne ne reverse rien à l’État. Tel est le cas de la taxe d’aéroport et de la redevance passager. Conserver le produit de ces taxes représente donc un enrichissement sans cause.

C’est sur ce fondement que le principe du remboursement des taxes au détenteur du billet a été affirmé, mais encore faut-il que les consommateurs connaissent ce principe. Nul n’est censé ignorer la loi, mais combien de nos concitoyens savent que, lorsqu’ils n’utilisent pas un billet d’avion, ils peuvent se faire rembourser certaines taxes afférentes ?

Lors de l’examen de la loi relative à la consommation du 17 mars 2014, dite loi Hamon, notre collègue Catherine Vautrin, oratrice de notre groupe, avait soulevé cette question, poursuivant d’ailleurs un débat commencé en 2011 dans le cadre de l’examen du projet de loi Lefebvre sur le droit des consommateurs. Un amendement avait été adopté afin d’encadrer et de sécuriser le remboursement de ces taxes.

Désormais, l’article L. 113-8 du code de la consommation précise les délais de remboursement et limite les frais de dossiers. Par exemple, si la demande est faite en ligne, le remboursement ne peut donner lieu à des frais de dossier. Si elle est réalisée par tout autre moyen, les frais de dossier ne peuvent excéder 20 % du montant remboursé.

La proposition de loi de Jean-Marie Tétart s’inscrit dans la continuité de cet article, car force est de constater que la loi n’est pas appliquée correctement. Un premier volet concerne les modalités de remboursement. La proposition de loi pose le principe du remboursement automatique dès lors que le moyen de paiement utilisé le permet. Un second volet concerne l’information du consommateur, d’une part sur le remboursement et d’autre part sur le détail de la composition du prix du billet.

Ainsi, la possibilité de remboursement, automatique ou par demande expresse, doit faire l’objet d’une information claire, avec confirmation par le client qu’il en a bien pris connaissance. Concrètement, lors de l’achat, le client devra cocher une case, en un clic.

De même, la composition du prix des billets devra être clarifiée, tant à l’achat que sur le reçu du paiement, en faisant apparaître le montant de chacune des taxes dont le client s’acquitte. Il ne s’agit là ni plus ni moins que d’appliquer le règlement européen du 24 septembre 2008, et plus précisément son article 23.

Lors de l’examen en commission, Jean-Marie Tétart a présenté plusieurs amendements qui ont amélioré la rédaction initiale de la proposition de loi tout en la complétant utilement, avec un encadrement des pratiques commerciales des comparateurs de prix en ligne par exemple.

Comme moi, mes chers collègues, vous avez entendu certaines critiques sur ce texte, notamment sur des conséquences sur la compétitivité des compagnies aériennes en France. Je comprends l’inquiétude de certains acteurs mais, soyons clairs, cette proposition de loi ne vise pas à imposer une taxe supplémentaire à nos compagnies aériennes. Nous ne leur enlevons rien. Nous permettons seulement l’application du droit, qui consiste en un remboursement au consommateur de sommes indûment conservées par un opérateur.

Par ailleurs, comme l’a rappelé Daniel Fasquelle en commission des affaires économiques, cette proposition de loi est également de nature à mettre fin à des pratiques s’assimilant à de la concurrence déloyale entre les professionnels respectant la loi et les règlements européens et ceux qui exercent leur activité au mépris de ces textes.

Je crois, en outre, qu’il faut faire confiance à notre rapporteur. Jean-Marie Tétart travaille sur ce sujet depuis très longtemps. Il a auditionné tous les acteurs concernés. Ses auditions, mais aussi sa personnalité mesurée et son pragmatisme, l’ont conduit à amender le texte initial de sa proposition de loi pour qu’elle soit efficiente et réponde de manière concrète au but recherché.

Ce texte pourrait nous réunir, quelle que soit notre place sur ces bancs, comme il a réuni les membres de la commission des affaires économiques, puisque le groupe majoritaire a fait part de son abstention « constructive », pour reprendre le terme de notre collègue. Je souhaite, au nom du groupe Les Républicains, que ce texte, qui s’adresse aux consommateurs, soit adopté mardi. C’est une proposition de loi de bon sens. Aussi nul ne comprendrait que les députés soient dans une posture politicienne sur ce sujet.

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