Nous sommes là au coeur d’une question difficile, qui est souvent revenue dans les débats de votre assemblée. Je souhaiterais à tout prix que ce projet de loi la prenne à bras-le-corps car il ne peut l’évacuer.
C’est une question légitime, qui a toute sa place dans un texte sur la biodiversité. Chacun sait, en effet, que la production d’huile de palme se fait encore trop souvent au prix d’une déforestation sauvage, qui bouleverse des écosystèmes et porte atteinte à une flore et une faune précieuses. Elle est aussi un facteur de disparition d’espèces menacées.
Lors des précédentes lectures, le Gouvernement et la commission ont travaillé ensemble pour tenter d’imaginer un dispositif qui, d’une part, relève la taxe d’importation sur l’huile de palme, pour la porter au niveau de celle de l’huile la plus taxée, et, d’autre part, exempte de cette hausse les huiles de palme certifiées durables, afin d’enclencher, de soutenir, de favoriser des pratiques vertueuses, qui sont forcément l’avenir de ces productions. C’est au demeurant le dispositif que la commission a voté.
Deux questions demeurent pour autant en suspens.
Il s’agit tout d’abord de la cohérence de cette démarche avec la réflexion sur la taxation des produits agroalimentaires. Celle-ci a abouti récemment au rapport de M. Hammadi et de Mme Louwagie, qui avait été évoqué lors des précédentes lectures du texte, mais que nous n’avions pas encore reçu. Ce travail est à présent achevé puisqu’il a été présenté ce matin. Ses conclusions s’éloignent significativement du dispositif sur lequel l’Assemblée est appelée à s’exprimer ce soir.
La seconde question réside dans le risque juridique que M. Hammadi et quelques autres députés ont mentionné. En effet, le dispositif ne porterait que sur un type d’huile, alors que la certification conduisant à la détaxation ne serait pas encore définie clairement. Je prends ce risque au sérieux : l’hypothèse selon laquelle le dispositif serait attaqué et sanctionné reviendrait à abandonner toute perspective de traiter réellement la question initiale, qui relève bien de la biodiversité.
Le Gouvernement estime donc qu’il ne serait satisfaisant ni d’ignorer le problème en supprimant l’article, comme vous le suggérez, messieurs et mesdames les députés, ni de feindre de le traiter, en adoptant une disposition qui ne serait pas juridiquement certaine, et pourrait être considérée comme discriminatoire.
À ce stade, je le redis au nom du Gouvernement, il n’est absolument pas question de stigmatiser tel ou tel pays.