La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

MISSION D'ÉVALUATION ET DE CONTRÔLE DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Mercredi 1er juillet 2015

La séance est ouverte à quatorze heures cinq.

(Présidence de Mme Gisèle Biémouret et M. Pierre Morange, coprésidents de la mission)

La Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) procède à l'audition, ouverte à la presse, sur « la gestion du régime de l'assurance maladie obligatoire par certaines mutuelles » de M. François Auvigne, inspecteur général des finances, et de Mme Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales, et M. Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé, coauteurs du rapport IGF-IGAS : « Les coûts de gestion de l'assurance maladie ».

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Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui M. François Auvigne, inspecteur général des finances, Mme Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales, et M. Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé, coauteurs d'un rapport de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale des affaires sociales, intitulées « Les coûts de gestion de l'assurance maladie ». Je souhaiterais rappeler à cet égard qu'il s'agissait du premier thème abordé par la MECSS en 2004, année de sa création.

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Madame, messieurs, votre rapport, publié en septembre 2013, est très exhaustif. Pouvez-vous nous en faire un résumé ? Quel regard portez-vous sur les mutuelles étudiantes et celles de fonctionnaires ? Quelles économies proposez-vous ? En cas de maintien du système, quelles évolutions préconisez-vous ?

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François Auvigne, inspecteur général des finances

Publié en septembre 2013, notre rapport sur « les coûts de gestion de l'assurance maladie » visait à analyser la gestion de l'assurance maladie obligatoire et complémentaire, dont le coût avait été estimé par la mission à 12,5 milliards d'euros pour l'année 2011. Dans le cadre de la politique de modernisation de l'action publique, les ministres de la santé et du budget avaient demandé à nos inspections générales de proposer des moyens permettant d'améliorer l'efficience de gestion de l'assurance maladie obligatoire et complémentaire.

Dans le cadre de cet exercice, la mission a noté la complexité de la structuration de l'assurance maladie obligatoire et complémentaire, malgré quelques exceptions anciennes, comme le régime d'Alsace-Moselle.

Nous avons également souligné la variété des opérateurs au nombre de 86 gérant 14 régimes d'assurance maladie obligatoires, les trois principaux étant la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), la Mutualité sociale agricole (MSA) et le Régime social des indépendants (RSI), auxquels s'ajoutent onze régimes spéciaux et les organismes délégataires du régime général.

Face à ce constat d'éclatement, nous avons souhaité procéder à l'analyse des processus métiers, partant du constat que l'assurance maladie était caractérisée par un nombre réduit de processus très structurants et par un traitement de masse des opérations. Il s'agit de la gestion des bénéficiaires, c'est-à-dire l'affiliation au régime – processus complexe mobilisant beaucoup d'effectifs –, des mutations, de la mise à jour des informations concernant l'assuré, de la liquidation des prestations en nature, c'est-à-dire le remboursement des soins médicaux, et de la liquidation des prestations en espèces, notamment le versement des indemnités journalières, et enfin de la fonction d'accueil des bénéficiaires. À titre d'illustration, tous ces processus représentent les deux tiers des effectifs des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM).

La mission a d'abord cherché à analyser les coûts de gestion des acteurs de l'assurance maladie obligatoire et de ceux de l'assurance maladie complémentaire, afin d'identifier les leviers, spécifiques à chacun, permettant d'arriver à des évolutions. S'agissant de l'assurance maladie obligatoire, nous avons constaté l'existence de gains d'efficience importants dans la période récente, à la faveur d'une dématérialisation croissante des feuilles de soins – évolution importante qui doit être poursuivie –, rendue elle-même possible par la diffusion des cartes Vitale. Néanmoins, nous avons noté une grande variabilité des niveaux d'efficience parmi les gestionnaires, d'où un écart très significatif entre les coûts moyens de gestion par bénéficiaire, qui varient selon les organismes dans un rapport de 1 à 5.

Sur le fondement de cette analyse, nous avons mis en exergue trois orientations principales.

La première est la poursuite des gains d'efficience grâce à l'achèvement de la dématérialisation du traitement des prestations en nature, d'une part, et à une forte amélioration de la dématérialisation des prestations en espèces, d'autre part.

La deuxième orientation est la réduction des écarts de performance au sein de chacun des grands réseaux de caisses – CNAMTS, MSA, RSI –, mais aussi la poursuite de la convergence des niveaux de performance entre les trois grands réseaux, considérant que des gains très significatifs pouvaient en être attendus.

Enfin, dans la perspective d'investissements lourds, notamment s'agissant des systèmes d'information, nous avons considéré important de réfléchir à de nouveaux rapprochements entre les opérateurs du régime obligatoire. Nous avons alors défini une cible d'organisation à terme de la gestion de l'assurance maladie obligatoire qui pourrait reposer sur deux grands pôles, l'un autour de la CNAMTS, l'autre – à définir – autour de la MSA notamment. Telle est la troisième orientation de ce rapport 2013.

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Si j'ai bien compris, vous préconisez un rapprochement des opérateurs en deux pôles, l'un autour de la CNAMTS, l'autre autour de la MSA et du RSI.

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

Nous n'avons pas cherché à analyser la performance des différents organismes gérant le régime de l'assurance maladie obligatoire au regard de leur coût moyen. Nous nous sommes appliqués à déterminer le coût marginal que représenterait une reprise en gestion d'autres organismes par certains régimes obligatoires, afin de définir une cible autour des organismes les plus efficients et de calculer les économies générées par cette reprise en gestion. L'idée était de comparer les coûts des processus de gestion de la CNAMTS – qui s'avérait être l'organisme de gestion du régime obligatoire le plus efficient – avec les coûts des processus de gestion des autres organismes, afin de déterminer les processus impactés par une éventuelle reprise en gestion et le coût marginal de celle-ci.

Cette démarche nous a conduits à préconiser l'organisation à terme d'un système autour de deux cibles, dont l'une autour de la CNAMTS. En l'occurrence, nous avons chiffré la reprise en gestion du régime obligatoire de l'assurance maladie des fonctionnaires par la CNAMTS à un coût marginal de 29 euros par bénéficiaire actif. Nous avons fait ce même travail pour les bénéficiaires du RSI, les étudiants et les bénéficiaires de la MSA.

La question s'est posée pour nous de savoir si la cible ultime devait comporter un seul régime, c'est-à-dire un seul gestionnaire de l'assurance maladie dont la vocation serait de reprendre l'ensemble. Cette orientation ne nous a pas semblé optimale, notamment en raison des traitements particuliers réservés aux travailleurs indépendants en matière d'indemnités journalières, ces prestations en espèces justifiant probablement la présence d'un opérateur capable de prendre en gestion ces spécificités, ce que l'assurance maladie des travailleurs salariés ne faisait pas, en tout cas n'allait pas faire à court terme. D'où notre préconisation d'une cible à deux gestionnaires, l'un pour les salariés et l'autre pour les indépendants qui pourrait être la MSA. Nous n'avons toutefois pas complètement étudié les modalités pratiques de cette suggestion.

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Comment expliquez-vous les différences de coût de gestion entre les différents organismes ?

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

La première raison, évoquée par François Auvigne dans son propos liminaire, est l'éclatement du système. Une réponse consiste justement à fixer une cible avec un nombre de gestionnaires réduit à terme.

Deuxièmement, il existe des surcoûts très élevés, liés au choix de systèmes d'information par les opérateurs actuels, notamment par les mutuelles de la fonction publique autour de deux grands opérateurs de gestion, d'une part, Mutualité Fonction publique (MFP Services), qui regroupe des mutuelles avec un système d'information propre, et d'autre part, la Mutuelle générale de l'Éducation nationale (MGEN) et d'autres mutuelles qui ont acquis des systèmes d'information dans la sphère commerciale.

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Vous êtes-vous intéressés aux différents systèmes d'information ? Il a été démontré que les coûts de gestion des systèmes d'information des années 70 et 80, du type « mainframe », utilisés notamment pour la branche famille, étaient extrêmement élevés – au moins 35 millions d'euros par an. Les systèmes issus de la technologie actuelle permettent, eux, de dégager des économies d'au moins 15 millions à 20 millions d'euros.

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

La mission a reçu l'appui du Secrétariat général à la modernisation de l'action publique pour dresser un bilan des systèmes d'information, car ce sujet nous a semblé très important non seulement en termes de structuration de l'ensemble du système, mais aussi en termes de coût, les coûts des investissements informatiques étant tels qu'ils apparaissaient déterminants dans l'évolution à moyen terme de la gestion du régime obligatoire.

En pratique, les situations varient en fonction des opérateurs. Certains systèmes d'information sont relativement récents, comme ceux de la MGEN et d'une partie des mutuelles de la fonction publique dans le cadre du GIE Chorégie, logiciel de liquidation des prestations plus récent que celui de l'assurance maladie.

En fait, notre analyse était moins axée sur l'existence de systèmes d'information récents, performants et coûteux, que sur la présence de systèmes d'information redondants. En effet, le système liquide quasiment de façon identique pour tous : les prestations en nature de l'assurance maladie sont uniformisées, d'où des développements parallèles de systèmes d'information nécessairement redondants.

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Vous soulignez dans votre rapport que la pyramide des âges laisse prévoir des départs en retraite massifs d'ici à 2020 pour la CNAMTS. Avez-vous eu une réflexion similaire concernant les mutuelles ? Selon la Cour des comptes, que nous avons auditionnée la semaine dernière, la reprise par la CNAMTS de la gestion des mutuelles étudiantes impliquerait le transfert de 490 salariés et de 5 000 à 6 000 salariés pour les mutuelles de fonctionnaires. Des départs massifs à la retraite permettraient-ils cette reprise d'effectifs de façon lissée, grâce par exemple au non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux ou trois ?

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Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé

S'agissant des départs à la retraite, nous n'avons pas de données précises pour les mutuelles, mais nous en avons pour l'Union des caisses nationales de sécurité sociale (UCANSS), ce qui nous a permis de constater que les départs à la retraite à la CNAMTS étaient suffisants pour permettre la reprise des effectifs des mutuelles.

Concernant les systèmes d'information, nous suggérons le maintien de deux régimes pour deux raisons. La première est l'existence de stratégies informatiques différentes entre la MSA et la CNAMTS. Le système d'information de la CNAMTS est un empilement d'outils successifs, au point qu'il est devenu extrêmement complexe et difficilement lisible, car il a été développé essentiellement en interne. De son côté, la MSA achète plutôt des logiciels « sur étagère » et est, de ce point de vue, beaucoup plus souple. Jusqu'à présent, personne n'a voulu initier le chantier de modification du système d'information de la CNAMTS pour le rendre plus productif.

La deuxième raison est l'existence d'un régime interbranche et d'un régime de pure assurance maladie. Nous n'avons donc pas tranché le fait de savoir s'il était plus productif de maintenir l'un plutôt que l'autre.

Par ailleurs, nous notons une dérive extrêmement forte de tous les projets de système d'information, que ce soit au niveau des mutuelles ou des organismes d'assurance maladie obligatoire. À cet égard, nous avons relevé un pilotage insuffisant au niveau du ministère – en raison d'un manque de compétence interne à l'État –, ce qui ne laisse pas espérer un dialogue avec la CNAMTS qui permette à l'État d'imposer ses propres vues.

Enfin, la MSA nous a semblé beaucoup plus réceptive et souple pour faire des offres de reprise en Infogérance.

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En matière de rationalisation des moyens, nous avions mis en avant l'option d'un régime interbranche, dont la souplesse nous avait semblé exemplaire.

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Pouvez-vous nous apporter des précisions sur les organismes privés qui proposent des services informatiques ?

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Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé

Il y a la société CEGEDIM notamment. Les organismes privés commercialisent des logiciels ou proposent l'infogérance, essentiellement pour le régime complémentaire.

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Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé

En fait, il s'agit plutôt d'achats de logiciels « sur étagères ».

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La gestion mise en place début avril entre la CNAMTS et la MFP Services constitue-t-elle une piste intéressante ?

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

C'est une des pistes que nous avions identifiées. La CNAMTS propose plusieurs solutions d'infogérance, c'est-à-dire de gestion pour le compte des mutuelles de fonctionnaires, avec différents degrés d'intégration : certaines mutuelles font appel à elle pour utiliser ses systèmes d'information, d'autres adoptent la gestion partagée, d'autres encore ont choisi une intégration extrêmement poussée. À titre d'exemple, MFP Services a fait le choix récemment de se faire infogérer par la CNAMTS, ce qui va dans le sens de nos préconisations, à savoir une cible avec l'ensemble des salariés gérés par l'assurance maladie. Nous allions même au-delà en chiffrant les économies générées par la reprise complète de la gestion, c'est-à-dire la reprise des personnels, étape qui nous paraît effectivement judicieuse.

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Il est clair que des méthodologies de travail standardisées permettent de réduire les coûts. Mais au-delà, avez-vous mené une réflexion sur l'optimisation des ressources humaines ? On pourrait imaginer le développement de métiers à même d'augmenter la rentabilité du système ; je songe, en particulier, aux fonctions de contrôle pour la récupération de prestations indûment versées. La lutte contre la fraude sociale et fiscale trouverait là tout son sens.

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François Auvigne, inspecteur général des finances

À l'issue d'une réunion récente du Comité national de lutte contre les fraudes, des actions majeures ont été évoquées pour l'ensemble des régimes sociaux. Toutes les caisses nationales se positionnent dans cette perspective. La CNAMTS a consenti un important effort méthodologique pour améliorer ses techniques de contrôle, en utilisant des compétences tant administratives que médicales, en vue d'identifier les gisements de fraude et de développer des outils de contrôle. Les évolutions très significatives notées en matière de dématérialisation, d'amélioration des processus et de standardisation, laissent entrevoir pour la CNAMTS et les autres caisses d'assurance maladie des redéploiements d'effectifs vers des missions tournées vers l'analyse du risque et l'échange d'informations avec d'autres administrations, notamment de la sphère fiscale. Il s'agit là d'un axe de progrès important.

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Que pensez-vous de l'intégration des mutuelles étudiantes au sein de la CNAMTS, au regard de leurs difficultés actuelles ?

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

Il s'agirait de la reprise de la gestion et des personnels par la CNAMTS, ce qui correspond à l'une des recommandations de notre rapport et qui va même au-delà, en traitant les étudiants dans leur ensemble, alors que le sujet est pour l'instant circonscrit à La Mutuelle des étudiants (LMDE). En l'occurrence, nous préconisons une cible autour de la CNAMTS regroupant l'ensemble des salariés et des étudiants.

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Quelles économies seraient générées par cette intégration ?

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

Notre rapport mentionne des économies potentielles de diverses natures. Nous avons chiffré les économies liées à la poursuite des gains d'efficience pour l'ensemble des régimes, grâce notamment à une dématérialisation accrue. Nous avons également chiffré la reprise en gestion par la CNAMTS, d'une part, et la MSA, d'autre part, des autres régimes au coût marginal. Pour les fonctionnaires, l'économie induite se situe autour de 142 millions d'euros par an ; vous trouverez dans notre rapport les chiffres pour les étudiants et les autres régimes.

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Votre rapport souligne des coûts de gestion qui varient de un à cinq. Un coût de gestion intègre toute une série de paramètres, de la masse salariale à la gouvernance, en passant par le patrimoine, la dette, voire les valorisations financières. Selon certains experts, ces valorisations représentent le double de ce qu'elles devraient être sur un plan strictement assurantiel. Avez-vous mené une réflexion à ce sujet, ainsi que sur la gestion patrimoniale de ces mutuelles ?

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François Auvigne, inspecteur général des finances

Nous ne nous sommes pas intéressés à l'équilibre d'ensemble du système. Nous avons eu une approche en termes de coûts de gestion : notre rapport se fonde sur l'analyse comparée des processus de l'assurance maladie.

En revanche, les inspections générales mènent actuellement des travaux sur le patrimoine immobilier des caisses de sécurité sociale.

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Une réflexion en matière de comptabilité analytique ne serait pas illégitime, dans la mesure où chaque mutualiste participe à la constitution de ce patrimoine…

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Étant donné le nombre de mutuelles – environ 600 –, ne pensez-vous pas qu'il faudra un jour ou l'autre s'orienter vers un regroupement ? Certaines mutuelles sont très petites, mais cela ne les empêche pas, au contraire même, d'entraîner des coûts de gestion importants. En Allemagne, le système fonctionne efficacement avec peu de mutuelles.

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Comme le propose notre collègue Jacqueline Fraysse, l'assurance maladie obligatoire pourrait-elle développer elle-même une offre d'assurance maladie complémentaire ? Cette mesure avait été évoquée lors de la création de la couverture maladie universelle (CMU) dans les années 2000, mais avait fait l'objet de réserves dans la mesure où elle s'attaquerait à une situation de monopole. Le Gouvernement souhaite faciliter l'accès des patients à des mutuelles moins chères, Mme la ministre Marisol Touraine ayant évoqué trois types de prestation avec différents niveaux de prises en charge et des baisses de prix allant jusqu'à 45 %. Ainsi, il ne serait pas absurde que la CNAMTS développe une offre d'assurance complémentaire de santé et devienne à ce titre un aiguillon par rapport à l'offre concurrente, non seulement pour générer des économies, mais aussi pour améliorer la prise en charge assurantielle de l'optique, ou des soins dentaires. D'autant que le renoncement aux soins peut se révéler très problématique dans certains cas, comme l'a encore souligné la Cour des comptes la semaine dernière.

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Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé

Une des préconisations de notre rapport suggère que la CNAMTS développe une offre de complémentaire santé. En effet, les mutuelles devraient être les plus productives du système – la liquidation simultanée des prestations obligatoires et complémentaires est théoriquement le système le plus performant. Or, dans la pratique, les mutuelles ne sont pas forcément les plus efficientes.

Il faut faire attention lorsque l'on évoque les mutuelles en termes d'efficience. En réalité, c'est le secteur privé qui est le plus cher, c'est-à-dire les assureurs, en raison des dépenses de marketing, les moins coûteux étant les institutions de prévoyance. Ainsi, la logique du privé pour l'assurance complémentaire santé n'est pas forcément celle qui engendre les coûts de gestion les plus faibles.

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Le coût du marketing de certaines mutuelles n'est pas négligeable. Nous avons tous entendu des messages publicitaires, particulièrement généreux en termes de solidarité, décliner des prestations en fonction de facteurs de risque ou de tranches d'âge, assorties de tarifs variables ! Or les coûts publicitaires sont intégrés dans la cotisation que doit verser l'assuré à sa mutuelle.

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Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé

Généralement, les assureurs privés sont chers en matière d'offre d'assurance complémentaire santé.

S'agissant du regroupement des mutuelles que vous évoquez, il faut distinguer le régime obligatoire et l'assurance complémentaire. En ce qui concerne le régime obligatoire, le sujet est plutôt la reprise, au moins pour les tâches informatiques et de « back-office », de l'activité des mutuelles par la CNAMTS.

Les 142 millions d'euros d'économies potentielles citées dans le rapport intègrent la reprise de l'affiliation des assurés et le volet prévention. Nous avons recommandé en revanche de laisser l'affiliation aux mutuelles étudiantes. Pour les mutuelles de fonctionnaires, un tel schéma pourrait être acceptable dans la mesure où elles craignent de tout perdre au profit de la CNAMTS, c'est-à-dire de ne pas pouvoir vendre leur complémentaire en même temps que l'assurance obligatoire. Ainsi, le schéma LMDE semble être le plus raisonnable pour une majeure partie des mutuelles, à l'exception de la MGEN qui devra amortir les coûts de son système d'information qu'elle avait développé avec d'autres.

À mon avis, le regroupement doit s'effectuer sur la partie complémentaire. Un vaste mouvement est déjà engagé en ce sens et doit se poursuivre pour aboutir à des prestations compétitives, dans l'optique par exemple.

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S'il est nécessaire d'augmenter l'efficience du système, il faut aussi penser aux bénéficiaires qui rencontrent des difficultés à trouver un interlocuteur, a fortiori s'ils sont en situation d'exclusion. Or le manque de lien entre les organismes et les services sociaux est réel. Que pensez-vous de la possibilité de prévoir un ou deux référents dans chaque département, aptes à fournir des renseignements aux services sociaux ?

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Xavier Chastel, conseiller général des établissements de santé

En l'occurrence, laisser l'accueil de la population spécifique aux mutuelles peut être une voie de sortie. Mais il faudrait relever le seuil du nombre d'adhérents à partir duquel une mutuelle peut créer une section locale mutualiste – ce seuil étant de 1 000 adhérents actuellement. Maintenir l'accueil mutualiste et prévoir, comme vous le suggérez, des référents dans les départements impliquerait de pousser les mutuelles à organiser un accueil unique.

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S'agissant des mutuelles étudiantes, la Cour des comptes a mis en lumière, dans le cadre de son rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de 2013, une dégradation de la qualité du service, une gouvernance illisible, une accessibilité médiocre, avec comme conséquences des renoncements aux soins et des situations médicales inadmissibles. Pour prendre l'exemple de la LMDE, un appel sur quatorze avait une chance d'être réceptionné au standard, 200 000 à 300 000 courriers de bénéficiaires n'étaient pas ouverts… On se demande comment un regroupement pourrait pallier un tel niveau de dégradation du service rendu.

Parallèlement à la piste de reprise de gestion par la CNAMTS, afin de fournir une réponse professionnelle aux étudiants, est évoquée l'alternative du maintien des étudiants au sein du régime d'assurance maladie des parents auxquels ils seraient rattachés. Quel est votre avis sur le sujet ?

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

S'agissant des fonctionnaires, nous avions proposé de revenir sur un des principes de la loi Morice du 9 avril 1947 en laissant aux mutuelles la possibilité de continuer à gérer des fonctionnaires et à ces derniers le choix d'être gérés en caisse primaire d'assurance maladie (CPAM). En pratique, les fonctionnaires entrants pourraient choisir de rester rattachés à la CPAM dont ils relevaient avant de travailler dans la fonction publique – mais on peut imaginer une gestion différenciée du flux et du stock. De leur côté, certaines mutuelles pourraient renoncer à la délégation de gestion de l'assurance maladie obligatoire des fonctionnaires, sachant qu'elles se trouvent parfois dans des situations complexes au regard des remises de gestion qui leur sont versées et qui ne leur permettent pas de continuer à gérer le remboursement des prestations obligatoires. Ainsi, l'idée serait de donner aux assurés la liberté de choisir leur organisme gestionnaire.

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D'un côté, la liberté de choix est un principe noble. De l'autre, les coûts de gestion des mutuelles sont problématiques, tandis que l'assurance maladie offre le meilleur rapport coûtefficacité grâce à la standardisation de ses processus. La généralisation des complémentaires santé par tous les salariés, voulue par le Gouvernement, ne doit-elle pas intégrer cette dimension ? Certes, il faut distinguer régime obligatoire et couverture complémentaire. Mais que doit privilégier le politique pour l'option de rattachement : la liberté ou l'efficience ?

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Virginie Cayré, inspectrice des affaires sociales

La mission a tranché puisqu'elle a conclu à l'intérêt d'un système avec deux gestionnaires. Les pistes pour arriver à cette cible sont nombreuses, elles peuvent être plus ou moins longues. L'un des moyens d'atteindre cette cible réside dans la liberté de choix, option possible pour gérer un flux, voire un stock.

Nous avons touché du doigt la question que vous évoquez sur les complémentaires. Nous nous étions interrogés au sujet de l'impact de l'accord national interprofessionnel (ANI) sur la recomposition du secteur et en particulier sur la complémentaire santé des fonctionnaires, avec potentiellement une démutualisation liée à des mutuelles familiales obligatoires pour l'un des deux conjoints. Mais nous n'avons pu approfondir la réflexion dans la mesure où nous ne connaissions pas, à l'époque de la rédaction de notre rapport, le devenir du secteur mutualiste.

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Une généralisation des complémentaires santé implique d'en définir le champ, le rendement et le coût.

La séance est levée à quatorze heures cinquante-cinq.