Déposé le 15 novembre 2013 par : M. Schwartzenberg, M. Tourret, M. Giraud, M. Braillard, Mme Dubié, M. Robert, M. Chalus, M. Carpentier, Mme Girardin, M. Krabal, M. Saint-André.
Supprimer cet article.
Longtemps, notre pays a connu un cumul excessif des mandats. D'où plusieurs propositions faites pour le limiter.[1] A l'initiative de deux gouvernements de gauche, auxquels appartenait le président de l'actuel groupe RRDP, les lois du 30 décembre 1985, puis du 5 avril 2000, ont légitimement instauré une limitation de ce cumul. Elles ont établi une situation équilibrée qu'il convient de maintenir.
– Il est utile de pouvoir exercer à la fois un mandat parlementaire et une fonction exécutive locale. Le fait d'être maire, par exemple, place au contact direct des préoccupations de ses concitoyens, de ce qui concerne leur vie de tous les jours : le logement, les transports, l'école, la santé, l'action sociale, etc.
Cet enracinement dans les réalités quotidiennes, ce capital d'expérience permettent d'être au Parlement un législateur mieux informé et donc plus efficace.
Certes, selon le présent projet de loi organique, les députés et sénateurs pourront continuer à exercer « un mandat local simple » en même temps que leur mandat parlementaire. Toutefois, la fonction de maire, de président d'établissement public de coopération intercommunale, de président de conseil général ou régional assure une connaissance plus générale, plus globale des divers domaines d'action des collectivités concernées.
- Les parlementaires doivent rester réellement enracinés dans le terrain. Leur désignation doit prendre en compte leur implantation locale sans dépendre très principalement des appareils de parti.
Sinon, à terme, le Parlement risque de comporter surtout ce qu'on appelle parfois des « élus hors sol », issus des états-majors de partis, plutôt que des parlementaires issus de la vie publique locale, placés au contact direct de leurs concitoyens et de leurs préoccupations quotidiennes. Ce qui conduirait à un autre type de Parlement.
– Par ailleurs, ne plus accepter la compatibilité du mandat parlementaire avec une fonction exécutive locale risquerait de fausser l'équilibre entre le Législatif et l'Exécutif. En effet, la présence au Parlement de maires de grandes villes et de présidents de conseil général ou régional, disposant d'une audience importance, contribue à l'autorité du Parlement par rapport au Gouvernement.
En revanche, cet équilibre des pouvoirs risque d'être remis en cause si le Gouvernement ne trouve plus en face de lui, au Parlement, des élus ayant cette notoriété et cette influence.
La Vème République s'est toujours caractérisée par un déséquilibre au profit de l'Exécutif : il importe de ne pas renforcer ce déséquilibre et de ne pas rendre le Parlement moins représentatif et influent qu'aujourd'hui.
– Enfin, les États qui n'admettent pas ou ne pratiquent pas le cumul entre mandat parlementaire et fonction exécutive locale sont très généralement ceux où les collectivités de base et leurs dirigeants disposent de prérogatives considérables. Qu'il s'agisse d'États à forte décentralisation ou, a fortiori, d'États fédéraux. Dans ce cas, les responsables d'entités décentralisées ou fédérées détiennent de très importants pouvoirs et disposent donc, de ce fait, d'une moindre disponibilité qu'un président de conseil général ou régional en France.
- D'une manière générale, il est préférable, au lieu d'établir telle ou telle interdiction, de laisser le suffrage universel libre de se déterminer par lui-même. Les électeurs savent très bien si tel député ou sénateur exerçant aussi une fonction exécutive locale est ou non un parlementaire actif et, s'il ne l'est pas, ne lui renouvellent pas leur confiance aux scrutins suivants.
Le libre choix des électeurs doit être la règle principale en démocratie.
– En dernier lieu, si une réforme du régime des incompatibilités intervenait, elle devrait logiquement commencer par le commencement et se conformer à la hiérarchie des normes juridiques. En révisant – d'abord et en priorité – l'article 23 de la Constitution relatif aux incompatibilités qui concernent les membres du Gouvernement, avant de modifier les lois relatives aux parlementaires.
En effet, actuellement, au plan juridique, rien n'interdit à un ministre d'exercer simultanément une fonction exécutive locale, alors qu'il serait très préférable qu'il se consacre exclusivement à sa fonction gouvernementale.
Si, en pratique, depuis mai 2012, aucun ministre n'exerce une fonction exécutive locale, il importerait, pour assurer la pérennité de ce non-cumul, d'inscrire son interdiction dans la Constitution.
Initialement, début 2013, l'Exécutif avait annoncé le dépôt d'un projet de loi constitutionnelle instaurant cette incompatibilité des fonctions de membre du Gouvernement avec l'exercice d'une fonction exécutive locale. A ce jour, ce projet de révision n'a pas été déposé. Il constituerait pourtant le préalable normal et nécessaire à d'autres modifications éventuelles du régime des incompatibilités.
[1] Cf. notamment Roger-Gérard Schwartzenberg, « Libertés nouvelles », Le Monde du 12 février 1978.
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