Amendement N° 282 rectifié (Adopté)

Statut des magistrats et conseil supérieur de la magistrature - modernisation de la justice du xxie siècle

(1 amendement identique : 283 )

Sous-amendements associés : 400 (Adopté) 401 (Adopté) 402 (Adopté)

Déposé le 17 mai 2016 par : Mme Crozon, M. Binet, Mme Michèle Delaunay, Mme Laurence Dumont, Mme Lemorton, M. Raimbourg, Mme Bouillé, Mme Bourguignon, Mme Bouziane-Laroussi, Mme Bruneau, Mme Capdevielle, Mme Chapdelaine, Mme Corre, Mme Coutelle, Mme Dombre Coste, Mme Sandrine Doucet, M. Dussopt, M. Olivier Faure, M. Germain, M. Gauquelin, M. Gille, Mme Gosselin-Fleury, Mme Guittet, M. Hammadi, Mme Karamanli, Mme Laclais, Mme Linkenheld, M. Le Borgn', Mme Le Dain, Mme Le Houerou, Mme Le Vern, Mme Lousteau, Mme Olivier, Mme Pochon, M. Premat, Mme Quéré, M. Roman, M. Rouquet, M. Sirugue, M. Touraine, Mme Untermaier.

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Compléter cet article par les dix-huit alinéas suivants :

« II. - Après la section 2 du chapitre II du titre II du livre Ier du code civil est insérée une section 2 bis ainsi rédigée :
«  Section 2 bis
« De la modification de la mention du sexe à l'état civil
«  Art. 61‑5 – Toute personne majeure dont la mention relative à son sexe à l'état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue peut en obtenir la modification.
«  Art. 61‑6 – Le Procureur de la République territorialement compétent du lieu de naissance ou de résidence du demandeur est saisi par écrit.
«  Le demandeur fait état de son consentement libre et éclairé à la modification de la mention relative à son sexe à l'état civil et produit les éléments de son choix au soutien de sa demande. Peuvent constituer de tels éléments :
«  1° Des attestations ou témoignages qu'il est connu dans le sexe revendiqué par son entourage familial, amical ou professionnel ;
«  2° Des attestations qu'il a engagé ou achevé un parcours médical pour adopter le comportement social ou l'apparence physique du sexe revendiqué ;
«  3° Des documents et correspondances établissant qu'il est connu sous l'identité revendiquée ;
«  4° Des décisions judiciaires établissant qu'il a subi des discriminations du fait de la discordance entre son sexe à l'état civil et le sexe revendiqué ;
«  5° Des décisions établissant qu'il a obtenu la modification de son prénom pour correspondre au sexe revendiqué.
«  Le Procureur de la République constate que le demandeur remplit les conditions fixées à l'article 61‑5 et ordonne sous trois mois la modification de la mention relative au sexe ainsi que, le cas échéant, aux prénoms, à l'état civil.
«  En cas de doute sérieux et motivé sur la sincérité de ces éléments, le Procureur de la République saisit le président du tribunal de grande instance qui statue dans les meilleurs délais. L'absence d'attestation médicale ne peut suffire à motiver ce doute.
«  Art. 61‑7 – Mention des décisions de modification de sexe et de prénoms est portée en marge des actes de l'état civil de l'intéressé.
«  Par dérogation aux dispositions de l'article 61‑4, les modifications de prénoms corrélatifs à une décision de modification de sexe ne sont portés en marge des actes de l'état civil des conjoints et enfants qu'avec le consentement des intéressés ou de leurs représentants légaux.
«  Les dispositions des articles 100 et 101 sont applicables aux modifications de sexe.
«  Art. 61‑8 – Toute personne ayant obtenu la modification de la mention de son sexe à l'état civil dispose de documents d'identité sans mention des sexe et prénoms antérieurs à cette modification. Un décret pris en Conseil d'État fixe la liste de ces documents.
«  Art. 61‑9 – La modification de la mention du sexe à l'état civil est sans effet sur les obligations contractées à l'égard de tiers, ni sur les filiations établies avant cette modification. ».

Exposé sommaire :

Aujourd'hui en France, on estime entre 10 000 et 15 000 le nombre de personnes ayant engagé ou achevé un parcours de transition sexuelle. Leur droit à modifier la mention de leur sexe à l'état civil est garanti par la CEDH depuis près de 25 ans sans que le législateur ne se soit à aucun moment saisi du sujet, ni a-fortiori que les modalités d'exercice de ce droit ne soient prévues par le code civil.

Ce vide législatif a conduit la Cour de cassation à adopter une jurisprudence aujourd'hui contraire aux recommandations de la Halde, de la CNCDH, et à la résolution 1728 du Conseil de l'Europe qui appelle les états membres « à traiter la discrimination et les violations des droits de l'homme visant les personnes transgenres et, en particulier, garantir dans la législation et la pratique les droits de ces personnes à des documents officiels reflétant l'identité de genre choisie, sans obligation préalable de subir une stérilisation ou d'autres procédures médicales comme une opération de conversion sexuelle ou une thérapie hormonale ».

En pratique, cette situation soumet les demandeurs à une procédure longue, coûteuse, incertaine, et à des conditions médicales dont la légalité est contestée au regard des articles 3 et 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme. Plus qu'une simple normalisation administrative, la modification de la mention du sexe à l'état civil apparaît donc pour les personnes transgenres comme l'enjeu central de la protection de leurs droits fondamentaux.

Cet amendement propose par conséquent d'introduire, dans le Code civil, une section relative à la modification de la mention du sexe, respectueuse de la vie privée et de la nécessité de lutter contre les discriminations transphobes.

Il repose sur l'autodétermination du demandeur, qui invite le procureur de la république compétent à « constater » qu'il « se présente et est connu » dans un sexe ne correspondant pas à celui qui est inscrit à l'état civil.

Le demandeur produit à l'appui de sa demande les documents de son choix permettant d'établir ce constat, sans qu'aucune condition médicale ne soit exigible ni suffisante à rejeter la demande. Le procureur de la république ordonne sous trois mois la modification de l'état civil. Une procédure de saisine du TGI est prévue dans les seuls cas où le procureur motive un doute sérieux sur la sincérité des documents produits.

L'amendement renvoie par ailleurs au décret en Conseil d'État pour prévoir la liste des documents officiels devant être établis sans mention des sexes et prénoms antérieurs à la modification.

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