Intervention de Benoît Hamon

Séance en hémicycle du 1er octobre 2013 à 21h30
Simplification et sécurisation de la vie des entreprises — Discussion générale

Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation :

Pour ma part, j’ai compris, tout comme le président de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas : au moins nous étions quatre. Mais je ne suis pas certain que les entreprises ont tout à fait saisi.

Je commencerai par l’intervention de votre rapporteur, Jean-Michel Clément, qui a formulé quelques critiques à propos du choix du Gouvernement de recourir à des ordonnances, choix sur lequel j’aimerais apporter quelques éclaircissements.

Le pacte de compétitivité débute avec le vote du crédit d’impôt compétitivité emploi dans la loi de finances pour 2013. Il se poursuit dans la loi de finances pour 2014 avec différentes mesures annoncées lors des assises de l’entrepreneuriat, notamment la réforme des plus-values de cession de valeurs mobilières, la réforme du plan d’épargne en actions et du PEA-PME ainsi que la création du statut de jeune entreprise innovante. À travers ces deux lois, voici des mesures décisives pour favoriser la compétitivité des entreprises, donc la restauration de leurs marges, et par conséquent la croissance et l’emploi.

Il s’agissait aussi de frapper vite et fort en matière de simplification administrative. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de mettre en place ce dispositif bottom-up, comme on dit, puisqu’il part des demandes des entreprises et des collectivités locales elles-mêmes, de la réalité des relations entre administrations et entreprises, pour construire un ensemble de dispositions qui relèvera autant de la loi que du règlement. À cet égard, je me réjouis que nous ayons essayé d’alléger au maximum ce qui pouvait relever du législatif pour ne pas encombrer les discussions au Parlement.

Cela dit, nous avons souhaité impliquer considérablement le Parlement. Le député Thierry Mandon aura notamment joué un rôle important au travers de sa mission, choisissant une méthode collaborative qui l’a amené non seulement à rencontrer les représentants des entreprises mais aussi à travailler au plus près du terrain, à travers des petits groupes de travail qui lui ont permis de formuler toute une série de mesures aujourd’hui reprises par le Gouvernement.

S’agissant des délais de mise en oeuvre des ordonnances, sur lesquels vous avez appelé notre attention, monsieur le rapporteur, je peux d’ores et déjà vous annoncer trois trains de mesures. Dès janvier, des mesures fortes immédiatement utiles aux entreprises seront prises, comme l’allégement des obligations comptables, qui concernera plus d’un million de très petites entreprises. Puis viendront deux autres groupes de mesures, au printemps puis à l’été prochains, concernant des dossiers qui feront l’objet d’une plus grande concertation parce qu’ils sont plus complexes. Ainsi, à la fin du mois de juillet, la quasi-totalité des mesures seront prises.

Et je le redis, nous souhaitons associer les parlementaires à notre démarche tant en amont qu’en aval de ces lois d’habilitation.

S’agissant des ordonnances de transposition des directives européennes en matière financière du 26 juin 2013 que vous avez évoquées, le recours à l’habilitation se justifie par l’urgence en même temps que par la technicité de ces matières. Nous devions transposer l’ordonnance relative aux établissements de crédit, dite CRD IV, pour janvier 2014. Pour ce qui est du mécanisme européen de surveillance unique, vous savez la pression qui s’exerce sur la mise en place d’une régulation financière à l’échelle européenne. Nous avons voulu là encore faire en sorte d’associer les parlementaires à l’élaboration des dispositions nécessaires. Le calendrier ne nous a pas permis d’intégrer ces transpositions dans la loi bancaire, d’où notre décision de procéder de la sorte. Nous soutenons fortement l’union bancaire : il était clair que la France se devait de ne pas être en retard en ce domaine, compte du fait qu’elle a porté ce débat au niveau européen. Tout cela justifiait donc une action énergique.

Monsieur Taugourdeau, vous avez déclaré de façon un peu provocatrice que le Gouvernement ne savait pas compter. M. Larrivé, quant à lui, a évoqué la considérable bureaucratie qui freinait l’esprit d’entreprendre et qui avait interdit de libérer les énergies pour créer des entreprises. Je suis heureux que nous vous ayons sortis de la longue hibernation qui, dix ans durant, vous semble avoir empêché, à quelques exceptions près, de remettre en cause cette somme de codes dont vous considérez aujourd’hui qu’elle est un frein à l’esprit d’entreprise et dont nous avons hérité, pardonnez-moi de le souligner.

Je me réjouis que les assises de la simplification de M. Lefebvre, avec lequel je travaille très bien, notamment en matière de consommation, nous aient permis d’avancer. Mais il est tout de même assez invraisemblable de vous entendre parler de lourdeurs de la bureaucratie alors que vous avez dirigé le pays pendant dix ans. Je vous le dis avec beaucoup de simplicité.

Nous allons aujourd’hui travailler à trouver des réponses. Il eût été plus juste de votre part de considérer qu’une partie de ce travail-là, vous ne l’aviez pas fait. Aujourd’hui, le Gouvernement prolonge une de vos préoccupations. Peut-être considérez-vous qu’il ne va pas aussi loin que vous le souhaitez, c’est normal : nous appartenons à des formations politiques différentes et nous n’avons pas forcément le même avis sur tout. Cela dit, je regrette que dans ce domaine-là, vous n’ayez pas avancé plus vite.

En matière de comptabilité, il faut savoir qu’un million de TPE bénéficieront immédiatement de la réduction des obligations comptables. Cette mesure, outre qu’elle simplifiera leur vie, aura un impact sur la réduction des délais de paiement sur lesquels nous avons commencé à agir du point de vue de la commande publique et des paiements de l’État mais aussi, je vous le rappelle, à travers la loi sur la consommation. Nous avons donné à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, les moyens, à travers une palette de sanctions administratives, de faire en sorte que les PME subissant des retards de paiement puissent obtenir satisfaction dans des délais plus rapides et raisonnables.

De la même manière, 5 millions de fournisseurs bénéficieront de la facturation électronique. Ce sont donc des millions d’euros qui pourront être ainsi économisés. Selon un rapport de la Commission européenne publié en 2010, un allégement de 25 % de la paperasserie des entreprises permettrait de gagner jusqu’à 10 milliards d’euros. L’OCDE, dans ses premières analyses, qui remontent à 2002, estimait que cela représentait entre 2 à 7 points de PIB entre les meilleurs, les Finlandais, et les moins bons, les Espagnols.

Nous mobilisons aujourd’hui beaucoup d’énergie pour améliorer la situation. Et je vous prie de croire qu’en tant que ministre chargé de la consommation, qui a eu à débattre encore ce week-end du travail le dimanche, je dois constater les conséquences de ce qu’a été votre action en ce domaine. En 2004, en 2008, en 2009 avec la loi Mallié, avez-vous simplifié et le code du travail et la vie des entreprises ou les avez-vous compliqués ? Je crains que vous les ayez compliqués, et je me permets de dire que lorsque François Fillon trouve absurde une loi qu’il a lui-même fait voter, cela a quelque chose de particulièrement cocasse.

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