Intervention de Éric Alauzet

Séance en hémicycle du 17 décembre 2013 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2013 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Alauzet :

Ce projet de loi montre qu’encore plus en temps de crise, la solidarité nationale est un filet de sécurité indispensable pour nombre de nos concitoyens. Nous devons assumer collectivement cette solidarité et nous détourner de la stigmatisation des bénéficiaires au motif qu’une minorité abuse du système. Qui nous fera croire que cinq millions de Français se satisfont des allocations-chômage ou du temps partiel non choisi pour survivre ? Même si un million d’entre eux abusent du système – ce qui reste d’ailleurs à vérifier –, quatre millions de personnes dépendent réellement de ces aides. La fraude sociale que certains mettent si souvent en avant, si elle existe bel et bien, ne vient pas toujours de là où l’on croit : sur les 155 millions d’euros de fraude détectés en 2010, près de la moitié était le fait des établissements de santé, 25 % des professionnels de santé et 15 % des transporteurs alors que la fraude imputable aux assurés se montait à 17 millions d’euros, soit 12 % du total. De quoi modérer les propos. Je ne veux minimiser aucune fraude, seulement alerter contre les discours qui nous égarent.

Nous devons donc assumer les abondements supplémentaires qu’apporte le projet de loi de finances rectificative, qu’il s’agisse des adultes handicapés, pour 230 millions d’euros, des personnes ayant des revenus modérés afin qu’elles puissent se loger, pour 268 millions d’euros au titre de l’APL, de nos concitoyens cherchant un emploi, avec 25 millions d’euros de plus pour les allocations et au titre de la politique de lutte contre le chômage, enfin, pour celles et ceux qui aujourd’hui sont sans logement, il est prévu 100 millions supplémentaires au titre de l’hébergement d’urgence. Il faut espérer que les prévisions du dernier PLF ne nous conduiront pas à renouveler le même exercice en PLFR 2014. Je le dis parce que c’était le cas lors du PLFR 2012. À la droite de cette assemblée, il est de bon ton de fustiger les dépenses sociales, oubliant un peu vite qu’aujourd’hui, 8,7 millions de nos concitoyens vivent dans la pauvreté, que 140 000 d’entre eux n’ont pas de domicile et sont à la rue. Oui, il est nécessaire de mettre en oeuvre les sécurités permettant à chacun de vivre dignement.

Une telle priorité reste compatible avec l’objectif tout aussi impérieux de réduire la dette et les déficits. Sans cette action, c’est notre économie et notre système social mêmes qui seraient mis en grave danger.

La question consiste bien à choisir les économies. Les écologistes l’affirment clairement : non, ce n’est pas dans des dépenses de subsistance qu’il faut rogner ; regardons plutôt du côté des niches fiscales néfastes à l’environnement, du côté de l’efficience des aides aux grandes entreprises, comme le crédit impôt recherche, et recentrons le CICE ou, à défaut, trouvons les recettes équivalentes du côté des entreprises non soumises à la compétition internationale. Les pistes ne manquent pas, vous le voyez, et nous avons d’autres choix que d’annuler des crédits au sein du budget de l’environnement ou de l’aide publique au développement.

Évidemment, la question de l’efficience des dépenses, quelles qu’elles soient, doit être posée constamment, comme celle de l’efficacité des prélèvements, plus encore au vu des estimations défavorables sur les rentrées fiscales 2013. Celles-ci soulèvent en effet des inquiétudes puisque la recette est en baisse de plus de 11 milliards d’euros par rapport aux prévisions initiales : moins 5,6 milliards d’euros pour les recettes de TVA, moins 3,1 milliards d’euros pour l’impôt sur le revenu et moins 3,8 milliards d’euros pour l’impôt sur les sociétés. Cette diminution est due en grande partie, vous l’indiquez, monsieur le ministre, à un ralentissement de l’activité économique, mais aussi à un recul de l’investissement et à une moindre consommation. Mais il ne faut pas négliger les pertes liées aux fraudes, que certains discours semblent malheureusement justifier au risque de mettre à mal tout esprit civique et républicain. Quoi qu’il en soit, ces moindres recettes rendent encore plus impérieuse la refonte de notre système fiscal.

Mais il est tout aussi essentiel, par un meilleur recouvrement de l’impôt, par la lutte contre la fraude et par l’investissement dans l’économie réelle et l’emploi, de permettre à chacun de vivre mieux, comme de permettre une rentrée optimale des recettes fiscale finançant notre sécurité sociale.

Je préciserai notre vote lors à l’issue du débat sur les amendements.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion