Intervention de Gérard Sebaoun

Séance en hémicycle du 17 avril 2014 à 9h30
Arrêts de travail et indemnités journalières — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Sebaoun :

Je n’ai pas dit que cela n’existait pas, j’ai dit que cela représentait 3 millions d’euros ! La fraude existe et elle doit être combattue sans faiblesse, monsieur Tian, mais il convient de l’apprécier à sa juste réalité plutôt que d’en faire, comme vous le faites régulièrement, un outil de propagande.

Le comportement abusif de certains acteurs, assurés ou prescripteurs, doit également être repéré et sanctionné, et je reprends à mon compte une phrase du rapport 2012 de la Cour des comptes sur la Sécurité sociale, qui dit que la CNAMTS doit redéfinir clairement sa doctrine sur les contrôles. Leur bilan économique est en effet très limité et, à ce propos, on peut relever l’exemple de la caisse de l’Aube qui, en 2010, a mis en évidence un gain annuel, toutes charges déduites, de 11 000 euros pour 1 400 contrôles effectués, soit un bénéfice de 8 euros par contrôle, ce qui doit aussi nous interroger. Il nous faut donc mieux contrôler, mieux sensibiliser et mieux responsabiliser tous les acteurs.

Un mot sur les gros prescripteurs, dont on parle peu, qualifiés d’« hyper-prescripteurs » par la CNAMTS. Ce sont près d’un millier de médecins qui en 2010 ont prescrit plus de 10 000 journées d’arrêt, quatre fois plus que la moyenne de leurs confrères. Là encore, les outils existent, comme la mise sous accord préalable des praticiens. La campagne 2008 aura, semble-t-il, permis d’éviter, toujours selon la CNAM TS, 9 millions d’euros de dépenses, essentiellement à la médecine libérale, car il faut le rappeler et être justes, les médecins hospitaliers, à l’origine de 20 % des prescriptions d’arrêt maladie, ne sont pas concernés. Je n’ai malheureusement pas le temps d’aborder la question de la densité des praticiens sur les territoires, qui pourrait être intéressante.

J’en viens maintenant au coeur nucléaire de votre proposition de loi, madame Poletti, qui réside dans l’article 8 avec la mesure phare du texte : le rétablissement du jour de carence pour les fonctionnaires. Il ne vous aura pas échappé que le groupe SRC, qui siégeait sur les bancs de l’opposition en 2011, s’était fortement opposé à son instauration par les voix autorisées de Marisol Touraine, d’Alain Vidalies, de Christian Eckert ou encore de Jean Mallot, et j’en oublie. Devenus majoritaires, nous n’avons pas changé d’avis en votant sa suppression dans la loi de finances pour 2014, à l’initiative de la ministre de la fonction publique, Mme Marylise Lebranchu. Et puisqu’il faut encore aujourd’hui rappeler nos arguments, je vais le faire en m’appuyant sur les études existantes et non sur quelques chiffres publiés dans les médias et qui, sortis de leur contexte, ont surtout vocation à nourrir une suspicion généralisée contre la fonction publique.

Un rapide historique du feuilleton permet également d’éclairer le chemin tortueux emprunté par le gouvernement Fillon avant l’adoption définitive du jour de carence. En effet, la proposition initiale de ce gouvernement se limitait à un exercice strictement comptable, avec un nouveau mode de calcul des indemnités journalières, qui conduisait mécaniquement à une baisse de revenus pour les salariés en arrêt maladie. Stigmatisée même à l’intérieur de l’UMP, elle a évidemment été rapidement abandonnée.

C’était sans compter l’obstination de notre collègue Tian, auteur du rapport de la MECSS sur la lutte contre la fraude sociale, qui déposa le 15 novembre 2011 un amendement au projet de loi de finances pour 2012 visant à aligner les délais de carence du privé et du public. Le débat était donc relancé, avec ou sans l’aval du gouvernement d’alors – je l’ignore, même si j’ai ma petite idée ; M. Tian nous le dira peut-être tout à l’heure.

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