Intervention de Christian Eckert

Séance en hémicycle du 9 juillet 2014 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2013 — Présentation

Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget :

Comme chaque année, le projet de loi de règlement est le moment de rendre hommage aux concepteurs de la LOLF et au principe de « chaînage vertueux » qu’ils ont instauré. Nous discutons cet après-midi de l’exécution budgétaire de l’année passée, avant d’examiner les perspectives des finances publiques. Savoir d’où l’on vient pour décider où l’on va, cela vaut aussi pour le budget de l’État ; dans ce débat, nous regardons le passé et la réalité des résultats.

D’où sommes-nous partis au début de la législature ? Une croissance à l’arrêt, de 0,3 % en 2012 et en 2013, avec un début de rebond au milieu de l’année 2013 ; une situation des finances publiques particulièrement dégradée, avec un niveau de dette publique sans précédent en temps de paix, à près de 90 % de la richesse nationale ; un taux de chômage sur une trajectoire de forte augmentation, qui dépasse en 2013 les 10 % de la population active ; des inégalités nourries par une décennie de mesures fiscales favorables aux ménages les plus aisés.

Dès la loi de finances rectificative de juillet 2012, puis avec la loi de finances pour 2013, le Gouvernement et la majorité ont mis en oeuvre un ensemble de mesures destinées à répondre à cette situation.

Ce projet de loi de règlement porte spécifiquement sur la situation budgétaire de notre pays. Il montre que les mesures adoptées ont eu des effets : le déficit public est passé de 4,9 % en 2012 à 4,3 % du PIB en 2013 et le déficit structurel s’est réduit de 1,1 % du PIB, soit de 22 milliards d’euros environ.

En 2012 et 2013, l’amélioration structurelle des finances publiques a atteint près de 2 % du PIB, soit près de 40 milliards d’euros. Le déficit de l’État est passé de 87,1 milliards d’euros en 2012 à 74,9 milliards d’euros en 2013, soit une diminution de 12,2 milliards d’euros. Après avoir atteint un pic de 148,8 milliards d’euros en 2010, il a donc été réduit de près de moitié à la fin 2013.

La croissance de la dépense publique en valeur a été limitée à 2 %, le plus bas niveau atteint depuis 1998. Les dépenses nettes du budget général de l’État, hors charge de la dette, pensions et prélèvements sur recettes, ont été inférieures de 144 millions d’euros au niveau fixé par l’autorisation parlementaire ; si l’on y ajoute la charge de la dette et les pensions, la sous-exécution ressort à 3,5 milliards d’euros.

Il faut le dire et le répéter : les efforts demandés aux Français ont produit des résultats dès l’année 2013. En fin d’année dernière, le déficit structurel a quasiment retrouvé son plus bas niveau depuis 2002. Les déséquilibres budgétaires accumulés pendant dix ans ont donc été apurés dans les dix-huit premiers mois de cette législature.

L’évolution du solde est la résultante de l’évolution des dépenses et de celle des recettes. Sur les dépenses, je pense que nous pouvons tous nous accorder sur les

résultats obtenus par le Gouvernement : elles sont tenues. Je n’y reviens donc pas. Sur les recettes, je souhaiterais insister sur deux points importants de l’exécution.

Le premier est la hausse des recettes fiscales nettes de l’État, en augmentation de 15,6 milliards d’euros par rapport à 2012. Cette progression est due aux mesures adoptées dans la loi de finances rectificative de juillet 2012 puis dans la loi de finances pour 2013. Ces mesures n’ont pas été seulement justifiées par des considérations budgétaires ; elles découlent de la volonté du Gouvernement et de la majorité de rétablir la progressivité du système fiscal, après dix ans d’une politique fiscale qui a réduit l’imposition sur le patrimoine et augmenté la CSG.

Ainsi, nous avons rétabli l’ISF, vidé de sa substance par la réforme de 2011, et les droits de successions et de donation, que la loi TEPA avait fortement minorés. Nous avons mis en place une tranche d’impôt sur le revenu à 45 % et abaissé le plafond du quotient familial, qui profite très largement aux ménages les plus aisés. Enfin, nous avons limité la déductibilité des charges financières et les reports de déficits d’impôt sur les sociétés, pour rapprocher le taux d’imposition des grandes entreprises de celui des PME.

Oui, nous avons augmenté les prélèvements, mais ces hausses, même si elles représentent un effort de tous, étaient ciblées d’abord sur les ménages les plus aisés et sur les entreprises les plus grandes, sur les contribuables qui disposent des ressources pour faire face à ces nouvelles contributions.

Notre objectif est que chacun contribue au service public suivant ses facultés. Ce sont les impôts sur les donations, les successions et la fortune – ISF – qui ont été réduits entre 2007 et 2012, tandis qu’étaient adoptées des augmentations générales et indifférenciées, comme le gel du barème de l’impôt sur le revenu, décidé pour deux ans en 2011. Notre politique fiscale est tout le contraire : elle est redistributive, et fondée sur la conviction que chacun doit participer au financement du service public en fonction de sa capacité contributive. Les mesures que le Gouvernement propose pour la deuxième partie de la législature poursuivent ce que nous avons entamé en 2012 ; j’y reviendrai ce soir.

Le deuxième point sur lequel je souhaiterais insister renvoie à la notion d’élasticité des recettes à la croissance. L’affaire est entendue, nous avons eu le débat plusieurs fois : les écarts entre la prévision et l’exécution des recettes fiscales sont dus à la moindre croissance économique, mais aussi et surtout à la très faible élasticité des recettes à la croissance.

La notion d’élasticité est technique – pas autant que le solde structurel, mais complexe, tout de même ! – et elle peut donner lieu à des interprétations erronées des rentrées fiscales. L’élasticité rapporte la progression des recettes fiscales à la croissance économique. Si l’élasticité est inférieure à l’unité, les recettes fiscales ont progressé moins rapidement que l’activité économique. À moyen terme, l’élasticité est unitaire : les recettes publiques augmentent tendanciellement comme l’activité économique.

Pourquoi l’élasticité des recettes a-t-elle été aussi faible en 2013 ? Pour une raison principale : la faiblesse de l’impôt sur les sociétés. Celui-ci a connu une dynamique négative parce que le bénéfice fiscal, surtout des sociétés financières – banques et assurances –, a fortement diminué. Nous évaluons cette baisse à environ 7 %. L’autre impôt qui explique une part importante de la faible élasticité des recettes est la taxe sur la valeur ajoutée. Si l’on regarde précisément les facteurs d’évolution de la TVA en 2013, on constate que son rendement a souffert de la chute de la construction immobilière et de l’investissement des ménages en biens immobiliers.

Cette faible élasticité des recettes est bien conjoncturelle : elle est liée à des évolutions défavorables dans deux secteurs fortement cycliques, le secteur financier et le secteur immobilier. Il faut donc faire preuve de beaucoup de prudence lorsque l’on analyse l’exécution des recettes fiscales en 2013 : nous entendons, depuis plusieurs mois, que cette exécution serait le signe que « trop d’impôt tue l’impôt ». Aucun élément technique ne permet d’étayer une telle affirmation. Dans ce débat sur l’exécution de 2013, comme dans bien d’autres, il faut se méfier des fausses évidences données par les chiffres bruts. Leur analyse nous montre que la faiblesse des recettes en 2013 est due avant tout aux évolutions cycliques de deux secteurs, qui ont entraîné une déconnexion temporaire entre l’évolution des recettes publiques et celle de l’ensemble de l’économie.

Comme je l’ai fait en commission des finances, je voudrais rappeler qu’à l’occasion du dépôt du projet de loi de règlement, le Gouvernement présente au Parlement les comptes de l’État, certifiés par la Cour des comptes, ce qui permet d’en garantir la sincérité et la régularité au Parlement, et aux citoyens. Les comptes de l’armée 2013 ont été certifiés avec cinq réserves, soit deux de moins qu’en 2012. Les réserves levées portent sur l’évaluation du patrimoine immobilier de l’État, ainsi que sur les passifs non financiers, deux sujets majeurs. Nous sommes parvenus en particulier à un suivi fiable des engagements hors bilan de l’État.

Je vois dans ce progrès continu de la qualité comptable le signe de la mobilisation du Gouvernement mais aussi de celle des services de l’État, qui font constamment progresser la qualité des informations financières et patrimoniales – qu’il me soit permis de leur adresser des remerciements, à mon avis trop rares. La France est le seul État de la zone euro à faire certifier ses comptes, ce qui est un gage de crédibilité internationale.

Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de règlement vous montre qu’en l’espace de dix-huit mois, le Gouvernement et la majorité ont amélioré les fondamentaux budgétaires de notre pays, jusqu’à un niveau presque sans précédent depuis 2002. Il faut toujours le rappeler, la situation économique et budgétaire au début de cette législature était très mauvaise. C’est dans ce contexte exceptionnel que nous avons dû adopter en urgence des mesures qui ont non seulement permis de réduire le déficit public, mais aussi de rétablir la progressivité de notre système fiscal après dix ans d’une politique fiscale injuste.

C’est donc le bilan budgétaire des dix-huit premiers mois de la législature qui est l’objet de notre débat cet après-midi. De ce bilan, le Gouvernement et la majorité peuvent être fiers.

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