La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de l’Assemblée nationale de la République du Kenya conduite par son président, M. Justin Muturi.
Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.
Je souhaite également la bienvenue à une délégation du groupe d’amitié Kirghizistan-France conduite par sa présidente, Mme Irina Karamouchkina.
Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.
Je souhaite enfin la bienvenue à une délégation de l’Assemblée nationale du Ghana conduite par M. Emmanuel Kwasi Bandua, président de la commission des affaires étrangères, et M. Alfred Agbefi, vice-président du groupe majoritaire.
Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.
L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État aux transports.
Il y a quelques semaines, a été présenté le dispositif qui remplacera l’écotaxe et qui se fonde sur des règles plus équitables et moins pénalisantes pour les petits transporteurs et les circuits courts.
Ce péage de transit poids lourds, qui concernera une partie du réseau des routes nationales et locales à fort trafic, devrait rapporter à l’AFIT 550 millions d’euros par an contre les 1,1 milliard d’euros qu’aurait rapportés l’écotaxe ; de ce produit dépendent de nombreux projets d’infrastructures.
Partout où elle est instaurée en Europe, l’écotaxe se paie sur autoroutes et routes rapides. C’est le cas par exemple en Autriche, où les poids lourds paient en moyenne 22 centimes par kilomètre sur les autoroutes, contre 11 centimes en France.
La privatisation du réseau autoroutier français s’est faite dans des conditions très discutables, que nous n’avons pas oubliées. En 2005, l’État a encaissé 15 milliards d’euros, dont 4,7 seulement ont été attribuées à l’AFIT, qui se voyait ainsi privée de sa rente annuelle, que devait venir compenser l’écotaxe.
Les sociétés d’autoroutes seront doublement bénéficiaires de ce péage de transit. D’une part, la facturation de l’usage de routes auparavant gratuites fera se reporter une part significative du trafic sur les sections à péage. Quitte à payer 13 centimes le kilomètre sur une nationale qui roule mal, autant passer par l’autoroute et son péage privé. D’autre part, les sociétés habilitées de télépéage qui fournissent le boîtier embarqué sont des filiales des sociétés d’autoroutes. Le double jackpot en quelque sorte. Ces sociétés ne cachent pas par ailleurs les bénéfices retirés de la « braderie » de 2005, et se disent prêtes à participer au système en échange de l’allongement de la durée de leurs concessions. Quelle générosité !
C’est à l’État de fixer les nouvelles règles pour que le système fonctionne et qu’il soit juste. Il faut absolument commencer par ponctionner les autoroutes qui sont des déviations de routes écotaxées. De la même manière, les nouveaux itinéraires écotaxés devront concerner les routes rapides et autoroutes parallèles de sorte que l’argument du déséquilibre économique de la concession ne soit pas opposable.
Ma question est simple : quand la France franchira-t-elle le pas franchi par ses voisins européens en taxant les autoroutes et les flux internationaux qui ont le plus d’impact sur notre environnement ?
Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et écologiste et sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.
Je vous prie tout d’abord, monsieur le député, d’excuser l’absence de Frédéric Cuvillier, actuellement au Sénat pour l’examen du projet de loi de réforme ferroviaire.
Le péage de transit poids lourds sera instauré sur les itinéraires de grand transit qui supportent déjà un trafic supérieur à 2 500 poids lourds par jour. Ces itinéraires, vous le savez, représentent 4 000 kilomètres du réseau routier national et certaines routes alternatives départementales au lieu des 15 000 kilomètres qui étaient initialement prévus.
Le transport de proximité ne sera pas concerné. Les poids lourds de plus de 3,5 tonnes le seront, mais avec des exonérations, pour les véhicules agricoles ou les véhicules dédiés à la collecte de lait par exemple. Tout cela marchera à blanc pendant six mois de façon à se mettre en place.
Parallèlement, nous allons lancer une nouvelle discussion avec la société Ecomouv. Je n’ai pas besoin de rappeler ici les conditions dans lesquelles tout cela a été réalisé, puis contesté dans le pays.
Vous évoquez les autoroutes pour compléter les recettes que nous attendions de l’écotaxe. C’est une piste à laquelle nous réfléchissions, mais les autoroutes sont déjà soumises à un péage. Nous avons aussi un certain nombre de contraintes avec la directive européenne Eurovignette. Néanmoins, la ministre de l’écologie et les sociétés d’autoroutes entreront en contact pour aller, peut-être, dans le sens de ce que vous préconisez.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RRDP.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, le Président de la République a déclaré à l’ouverture de la conférence sociale : « Le dialogue social ne peut être une surenchère perpétuelle. » À qui s’adressait cette remontrance ? Au MEDEF, cela me paraît évident ! Celui-ci va toucher l’Euro Millions en baisses de cotisations sociales, sans ciblage et sans aucune garantie pour l’emploi et les salaires. Pardon, il y a l’observatoire des rémunérations. Et il en redemande. Pourquoi se gêner ? Le patronat tousse et le Gouvernement fournit le sirop, avec le pacte de responsabilité. Il menace de boycotter et on lui cède sur la pénibilité, au nom de la compétitivité et de l’emploi.
Mais cela fait des années que ces politiques de déresponsabilisation sociale des entreprises s’appliquent, et le résultat est toujours le même : toujours plus de chômage, de précarité et de baisse du pouvoir d’achat. Le salaire réel a baissé de 1,4 % depuis 2012, la consommation des ménages a reculé de 0,5 %. Cela veut dire des difficultés supplémentaires dans la vie quotidienne des familles, cela veut dire une croissance en berne faute de consommation.
La « rémunération équitable » était à l’ordre du jour de la conférence, mais cet objectif passe par une juste répartition des richesses créées par le travail, vers les salaires et non vers les dividendes. Et là-dessus, quasiment rien.
Monsieur le Premier ministre, quatre syndicats, la CGT, FO, SUD et la FSU, se sont retirés de la conférence sociale. Leur décision n’est pas une péripétie sans conséquence. Elle témoigne du mécontentement provoqué par votre politique et les attaques contre les grévistes.
Vous avez fixé hier, monsieur le Premier ministre, une feuille de route, mais allez-vous enfin entendre l’exigence d’une véritable négociation sur les salaires et la lutte contre la précarité, pour donner à notre pays une base solide de relance et de croissance ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Madame la députée, la grande conférence sociale était un moment important, utile et efficace pour les Français, les salariés et les entreprises.
Je regrette qu’un certain nombre d’organisations syndicales aient décidé de ne pas rester jusqu’au bout. Elles ont participé au dialogue, au débat avec le Président de la République et le Gouvernement lundi après-midi, mais elles n’ont pas souhaité être présentes mardi matin.
Cependant, je ne doute pas un seul instant qu’elles seront autour de la table à la rentrée, pour discuter des grands chantiers annoncés par le chef de l’État : l’emploi des jeunes, l’apprentissage, la mise en oeuvre du pacte et la vigilance nécessaire quant à la destination des aides aux entreprises, et le sujet essentiel de l’investissement. Nous réunirons autour du Président de la République les entreprises, les partenaires sociaux, les collectivités territoriales, car nous savons que la question de l’investissement est essentielle.
Vous pouvez qualifier comme vous le souhaitez la politique du Gouvernement et les résultats de la conférence sociale, mais, avec les ministres présents, notamment le ministre du travail, François Rebsamen, nous considérons que mettre le paquet sur l’apprentissage, c’est utile pour les Français et pour la jeunesse,
Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI
que mettre le paquet sur les jeunes, notamment ceux qui sont sans formation, sans emploi et sans stage, c’est utile !
Mêmes mouvements.
Le fait, comme nous l’avons annoncé hier, que 50 000 jeunes bénéficieront de nouveaux dispositifs dès 2015 et 100 000 en 2017, c’est en effet utile, et vous devriez vous en réjouir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Faire de l’investissement la priorité, parce que c’est utile pour notre économie, c’est aussi un rendez-vous que nous ne manquerons pas. Enfin, comme je l’ai dit encore hier soir, les Français, comme les entreprises, ont, depuis 2010, subi des hausses d’impôts trop importantes – 60 milliards depuis quatre ans –, et c’est devenu insupportable. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Faire en sorte que, dès 2014, plus de trois millions des ménages voient leur impôt sur le revenu baisser, jusqu’à 700 euros, que 1,9 million de ménages sortent de l’impôt sur le revenu, pour qui est-ce utile, madame Buffet ? Pour les salariés aux revenus les plus modestes !
Le choix que nous avons fait, pour le 1er janvier prochain, de permettre aux smicards de toucher à cette occasion 500 euros, c’est-à-dire la moitié d’un SMIC, pour qui est-ce utile, madame Buffet ? Est-ce une politique d’austérité ou un politique juste ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Augmenter les salaires des fonctionnaires, c’est utile, efficace : qui cela concerne-t-il, madame Buffet ?
Voilà la différence entre une politique sérieuse et une politique d’austérité !
Nous allons bientôt présenter la loi de finances pour 2015 et je signerai les lettres plafonds. Vous verrez alors, non seulement que nous préservons les emplois dans l’éducation nationale, mais que nous allons même continuer à les augmenter, conformément aux engagements du Président de la République.
Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
C’est utile, efficace ; est-ce une politique de rigueur ? C’est une politique qui va dans le sens de l’intérêt général, pour les Français, une politique qui prépare l’avenir, une politique de progrès.
Alors sortons des caricatures. Regardez les résultats de notre politique et de la conférence sociale, et vous verrez que nous pouvons avancer ensemble !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. Martial Saddier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Protestations sur les bancs du groupe SRC
je ferai en sorte que les partenaires sociaux puissent être considérés, aussi bien les organisations professionnelles que les syndicats, et que nous puissions avoir régulièrement une discussion. » Prononcée par l’actuel Président de la République, il y a à peine deux ans, cette phrase, qui résumait la méthode en matière de concertation sociale, ne semble plus être aujourd’hui d’actualité. La lune de miel entre le Gouvernement et les syndicats a définitivement touché à sa fin.
Menaces de boycott de la conférence sociale par les organisations patronales représentatives, annonce sans aucune concertation préalable avec les syndicats et par voie de presse, le 1er juillet dernier, d’un report partiel du compte pénibilité et d’une simplification du code du travail, boycotts successifs de la conférence sociale par la CGT, FO, Solidaires et FSU : voilà dépeint en quelques mots le climat particulièrement tendu dans lequel se sont tenus les débats de l’édition 2014 de ce rendez-vous.
Cette situation est totalement inédite. Jamais, sous aucune majorité, il n’y a eu une telle détérioration et une telle rupture entre l’exécutif et les syndicats.
Ce dialogue de sourds qui a remplacé le dialogue social est un véritable camouflet pour le Gouvernement. Ce blocage arrive de surcroît au plus mauvais moment pour notre pays. Le chômage poursuit, mois après mois, son inexorable hausse et il a même atteint le mois dernier un niveau record.
L’emploi des jeunes et l’apprentissage, thèmes centraux de cette troisième conférence sociale, doivent impérativement être relancés et faire l’objet d’une mobilisation générale. Alors qu’il y a urgence à agir pour relancer l’emploi, comment allez-vous rétablir le dialogue social si durement mis à mal ces derniers mois ? Quand allez-vous, monsieur le Premier ministre, enfin prendre les mesures nécessaires et indispensables pour relancer durablement l’emploi et la croissance et répondre aux attentes des Français ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social.
« Et du chômage ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, on dirait que vous souhaitez qu’il n’y ait pas de dialogue social !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
On dirait que vous oubliez ce qui s’est passé de 2007 à 2012.
Mêmes mouvements.
On dirait que vous oubliez un peu facilement cette volonté qui existait à l’époque, et qui fut presque théorisée, de voir disparaître ou de nier les corps intermédiaires. Avec ce Président et ce gouvernement, nous avons rétabli le dialogue social, que cela vous plaise ou non.
Mêmes mouvements.
C’est ainsi que, tout au long des deux premières grandes conférences sociales, un certain nombre d’avancées ont été acquises. Elles se sont ensuite traduites par des décisions. La première conférence sociale a acté le fait que, pendant une douzaine d’années, nos entreprises avaient progressivement perdu de la compétitivité ; d’où le rapport de Louis Gallois.
Lors de la deuxième conférence, c’est le compte personnel de formation qui a été créé et qui entrera en vigueur au 1erjanvier 2015. Lors de cette conférence, qui a été un succès,…
Rires et exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI
Oui, ne vous en déplaise, un véritable succès !
…des avancées ont été réalisées, des propositions concrètes ont été faites.
La grande conférence sociale est un accélérateur de dialogue social, pour l’emploi et la croissance, et un accélérateur de décisions qui concernent concrètement les jeunes, les seniors et les chômeurs de longue durée. Vous devriez au contraire vous féliciter des conclusions de cette grande conférence sociale !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le Premier ministre, lundi et mardi s’est tenue la troisième conférence sociale de cette législature. La méthode de notre majorité, qui est nouvelle, place le dialogue social au coeur des réformes et doit permettre à notre démocratie de gagner en maturité, en qualité et en efficacité. De toute évidence, en effet, mettre les partenaires sociaux autour de la table pour discuter très concrètement des sujets sur lesquels notre modèle social doit évoluer pour être plus dynamique et plus juste est une bonne méthode. Elle permet de créer des consensus pour réussir les réformes. La troisième conférence sociale ne fera pas exception.
Monsieur le Premier ministre, à l’occasion de votre discours de clôture, hier soir, vous avez formulé des propositions ambitieuses. Elles précisent la feuille de route établie par le Président de la République et devront être mises en oeuvre au cours des prochains mois. Il s’agit tout d’abord, bien évidemment, du maintien de la priorité à l’emploi – l’emploi des jeunes, mais aussi l’emploi des seniors et des chômeurs de longue durée. Il s’agit ensuite des mesures en faveur de l’apprentissage avec l’objectif de 500 000 apprentis en 2017, car la conjugaison de la formation et de la pratique professionnelle est le meilleur remède contre le chômage. Ce sont également des propositions pour le pouvoir d’achat, avec l’annonce de la poursuite en 2015 de la baisse de l’impôt sur le revenu, qui complétera la baisse de 2014. Ce sont enfin des mesures en faveur de l’investissement privé et public, comme vous venez de le rappeler, avec la nécessaire mobilisation du secteur financier au service de l’économie réelle et la réussite du chantier de la simplification. Monsieur le Premier ministre, les parlementaires se saisiront eux aussi de ces chantiers prometteurs pour les Français, avec la volonté d’aller plus vite et plus loin au service du redressement de la France. Pouvez-vous nous dire, monsieur le Premier ministre, quel bilan vous tirez de la conférence sociale ?
Applaudissements sur certains bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe écologiste.
Comme je le disais tout à l’heure et comme le ministre du travail le rappelait également, la grande conférence sociale a été un moment important. Le Gouvernement, les syndicats, les organisations patronales, mais aussi les représentants des collectivités territoriales ont travaillé ensemble pour écrire la feuille de route des prochains mois. Nos priorités, vous les connaissez et vous les avez rappelées, c’est l’emploi et la croissance. Pour cela, il faut réformer, il faut avancer, surmonter les blocages et trouver des solutions. Plusieurs actions ont été lancées. Je veux insister encore une fois sur l’emploi des jeunes. Le dispositif « garantie jeunes » qui permet un accompagnement renforcé vers la formation et l’emploi des jeunes les plus fragiles sera développé. Ensuite, les formations seront mieux adaptées à l’évolution des emplois dans les entreprises, puisque les professionnels seront associés aux diplômes.
Enfin, et j’insiste sur ce point qui a été l’un des sujets de la table ronde, l’emploi de tous les jeunes passe par une lutte efficace contre les discriminations, lutte dans laquelle le Gouvernement s’engage tout entier. Je veux également revenir sur la question de l’apprentissage. Nous en parlons depuis très longtemps, mais les résultats demeurent médiocres. Il y aura à la rentrée une grande mobilisation autour de l’apprentissage à l’initiative du Président de la République et du Gouvernement. L’apprentissage doit être une voie d’excellence pour l’insertion professionnelle. C’est pourquoi, sans attendre, et en plus des fonds européens, ce sont 200 millions d’euros qui seront débloqués et proposés à votre vote dès la semaine prochaine.
Lors de cette conférence sociale, la question des chômeurs de longue durée et des seniors a également été abordée. Les contrats initiative emploi, pour l’embauche dans le secteur marchand, seront concentrés notamment sur les seniors et les chômeurs de longue durée. Ces 80 000 contrats seront proposés dès 2015. Enfin, vous me permettrez d’insister sur le sujet du pouvoir d’achat. Nous avons déjà agi, puisque, en septembre, 3,7 millions de ménages verront leur impôt sur le revenu diminuer, de sept cents euros pour certains. Nous continuerons en 2015, par une baisse de l’impôt sur le revenu des ménages des classes moyennes. C’est une attente très forte de nos compatriotes, mais aussi de certaines organisations. Enfin, nous proposerons un agenda ambitieux de refonte de l’épargne salariale pour mieux partager la richesse créée par les entreprises.
Cette conférence sociale a été l’occasion de faire le point sur la mobilisation pour le pacte de responsabilité et de solidarité. Le Gouvernement tient ses engagements, notamment grâce à la majorité, mais ce pacte, ce sont des engagements réciproques. J’ai dit clairement aux organisations patronales qu’il faut accélérer les négociations dans les branches, car elles sont insuffisantes pour l’instant. La mobilisation de tous est indispensable pour réussir ! Celle des parlementaires de la majorité, comme cela a été le cas il y a huit jours et hier, en votant le pacte de responsabilité, mais aussi celle des partenaires sociaux. Ceux qui étaient présents hier ont fait preuve de responsabilité et ont défendu l’intérêt général, c’est-à-dire celui de la France.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
Monsieur le ministre des affaires étrangères, le 26 juin dernier, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a adopté un projet de résolution déposé conjointement par l’Afrique du Sud et l’Équateur visant à contraindre juridiquement les multinationales au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cette résolution propose de créer un groupe de travail chargé d’élaborer un instrument international, juridiquement contraignant, pour réglementer les activités des multinationales. Elle est soutenue par de nombreux États, ainsi que par des centaines d’organisations sociales et de réseaux citoyens.
De Bhopal au Rana Plaza, en passant par le cas de Chevron en Équateur ou celui de Coca Cola en Colombie, les exemples de violations des droits humains sont nombreux. Qui peut donc ignorer encore aujourd’hui que certaines multinationales bénéficient d’une regrettable impunité ? Elles disposent en effet non seulement de toute une batterie d’instruments normatifs – accords de libre-échange, traités bilatéraux sur les investissements ou mécanismes d’arbitrages internationaux – pour protéger leurs droits et leurs intérêts et de moyens financiers colossaux pour leur défense, mais aussi parfois de la complicité bienveillante des États. Il y a urgence à introduire des dispositions contraignantes garantissant que les droits économiques, sociaux, politiques et environnementaux des populations ne puissent être violés par les multinationales en toute impunité. C’est par vingt votes favorables, quatorze contre, dont celui de la France, et treize abstentions que la résolution a été adoptée.
Le groupe écologiste et plus largement, je crois, l’ensemble de la majorité souhaitent connaître les raisons qui ont conduit la France à voter contre cette résolution. Se réfugier derrière une prétendue position européenne serait une dérobade, monsieur le ministre, et une mauvaise manière faite à la représentation nationale. Le Gouvernement entend-il néanmoins participer à la mise en oeuvre d’un cadre international contraignant pour garantir le respect des droits de l’homme par les multinationales ? Nos vies et nos droits valent plus que leurs profits, monsieur le ministre !
Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme la Secrétaire d’État chargée du développement et de la francophonie.
Je vous remercie de votre question qui me permet de rendre des comptes sur les efforts que la France mène pour renforcer les normes sociales au niveau international. Lors du dernier Conseil des droits de l’homme, la France a soutenu la résolution portée par la Norvège, laquelle promeut la mise en oeuvre effective des principes directeurs des Nations unies sur les entreprises et les droits de l’homme. La France, comme les autres États membres, et notamment l’Allemagne, a regretté que l’Afrique du Sud et l’Équateur aient présenté une résolution concurrente, en refusant tout compromis. Il n’a donc pas été possible de débattre et de nous mettre d’accord sur un certain nombre de manières d’appliquer ces décisions.
Le choix entre les deux résolutions ne portait pas tant sur les objectifs que sur la manière de les atteindre. La France a préféré une approche progressive qui s’appuie sur les travaux engagés depuis 2011, de façon à pouvoir appliquer concrètement ces mesures plus rapidement. Mais notre pays agit également au niveau national. Vous avez débattu dans cet hémicycle avec mon prédécesseur, à la demande du Président de la République, sur une loi relative au développement international et à la solidarité. La loi a été promulguée il y a deux jours et nous pouvons nous en féliciter. Ce travail a été mené, avec du coeur et de la volonté, par Pascal Canfin en concertation avec les ONG, les collectivités et l’ensemble des partenaires.
La parole est à M. Dominique Dord, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, vos amis frondeurs ici présents n’ont pas que des défauts !
Ils sont simplement restés fidèles aux convictions, certes un peu archaïques, de la gauche, mais surtout fidèles aux engagements du Gouvernement devant les Français en 2012. Je sais bien que vous-même, comme un certain nombre de vos amis considérez, sans trop leur dire, que leurs convictions sont totalement dépassées, d’un autre âge, et qu’elles conduiront le pays dans le mur. (Mêmes mouvements.)
Mais il faut tout de même reconnaître que quand c’était le moment de le dire, à savoir lorsque vous et les vôtres avez pris des engagements devant les Français, on ne vous a pas beaucoup entendu sur le sujet !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Du coup, il faut se mettre à la place de vos amis frondeurs, comme il faut se mettre à la place de vos anciens alliés communistes, à la place de vos anciens alliés écologistes, à la place des syndicalistes qui vous lâchent les uns après les autres,
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC
et des millions de Français qui ont voté pour vous de bonne foi et qui, eux, veulent y croire encore,
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP
et on ne voit pas pourquoi ils délaisseraient ces convictions et ces promesses. Je le dis d’autant plus que, vous le savez, monsieur le Premier ministre, s’il n’y avait pas eu de promesses mensongères, vous n’aurez pas gagné les élections de 2012.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.
Au fond, les frondeurs, c’est votre mémoire et votre mauvaise conscience. Cela dit, cette situation pose tout de même un problème politique puisque aujourd’hui, compte tenu d’eux vous n’avez plus de majorité. Monsieur le Premier ministre, il faut donc en tirer les conséquences : quand reviendrez-vous devant les Français avec un programme de vérité ?
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur Dord, aucun député socialiste n’a besoin de vous pour parler à sa place,
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC
ni aucun membre du groupe communiste. Je pense surtout qu’aucun syndicaliste n’a besoin de vous pour parler à sa place, vous et les vôtres qui les avez fait siffler dans tous les meetings de la fin de campagne du précédent Président de la République.
Mêmes mouvements.
La vérité, monsieur Dord, c’est celle que nous avons trouvée et à laquelle nous faisons face aujourd’hui ; la vérité, c’est une France dont les entreprises avaient perdu leur compétitivité et des parts de marché au cours des dix années précédentes ;…
…la vérité, c’est une France qui, alors qu’elle était excédentaire du point de vue de son commerce extérieur en 2002, était devenue profondément déficitaire lorsque vous avez quitté le pouvoir ; la vérité, vous le savez et vous pourriez le dire comme chacun des députés socialistes et des députés communistes, c’est que votre majorité a mis le budget de la France, comme disait un ancien Premier ministre, « au bord de la faillite ». Voilà la vérité à laquelle nous avons dû faire face ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La politique que nous menons est donc une politique de redressement de la compétitivité de nos entreprises. Ai-je besoin de vous rappeler ce qui a été voté par la majorité de cette assemblée, qu’il s’agisse de la loi de finances rectificative ou encore de la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale, pour apporter aux entreprises des capacités d’investissement et d’emploi ? Dois-je vous rappeler les mesures de pouvoir d’achat pour les plus modes des Français, mesures que vous avez refusé de voter ? Dois-je vous rappeler l’effort énorme que nous accomplissons pour rétablir progressivement les finances de la France ?
La vérité est là, et la politique de vérité, c’est celle que nous menons !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Maina Sage, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le président, mes chers collègues, les députés polynésiens Jonas Tahuaitu et Jean-Paul Tuaiva se joignent à moi pour adresser cette question à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Madame la ministre, la Polynésie française sort d’une décennie de crises politiques qui a fortement impacté nos comptes économiques et nos régimes sociaux. Quelques chiffres : sur cinq ans, notre PIB s’est contracté de 10 % et le taux de chômage a quasiment doublé, avoisinant 22 %. De ce fait, notre régime de solidarité a été gravement touché : le nombre de bénéficiaires a doublé, passant de 44 000 à 80 000 en dix ans, et le coût global atteint 225 millions d’euros par an.
Sachez que ce régime est un véritable amortisseur social pour les Polynésiens les plus démunis, qui ne bénéficient pas des dispositifs sociaux métropolitains. La situation s’est d’autant plus dégradée que l’État a décidé en 2008 d’interrompre brutalement sa participation financière. En juillet de l’année dernière, mon prédécesseur, Édouard Fritch, vous interpellait sur le retour du financement de l’État, et vous vous êtes alors engagée à envoyer une mission de l’IGAS afin d’évaluer notre système de santé. C’est chose faite depuis le mois de décembre dernier et, avec beaucoup de retard, quelques conclusions techniques nous sont enfin parvenues.
Sachez que pendant ce temps, la nouvelle majorité, élue en mai 2013, s’est engagée à moderniser notre régime de solidarité pour mieux en contrôler l’accès. Cette réforme s’inscrit dans un train de mesures courageuses que vous avez entreprises. Je suis convaincue que nous sommes sur le bon chemin. Mais nous avons encore besoin de l’État. Aussi pouvez-vous nous dire très concrètement quelle est votre position sur le retour du financement de l’État au RSPF ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
Madame Maina Sage, permettez-moi tout d’abord de vous féliciter pour votre élection, suite à la démission de votre collègue Édouard Fritch.
Applaudissements sur divers bancs.
Vous interrogez le Gouvernement sur la possibilité que l’État accorde à nouveau son soutien à la Polynésie française afin de compenser le déséquilibre financier de son régime de solidarité territoriale. Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, avait diligenté, en octobre 2013, une mission d’accompagnement de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale de l’administration, et s’était engagée, en réponse en effet à une question de votre prédécesseur, à ce que le rapport conjoint vous soit remis.
Je veux d’abord vous assurer que le Gouvernement est très attentif à la situation sanitaire de la Polynésie, tant en ce qui concerne la santé publique que l’organisation des soins qui est, je le rappelle, gérée par l’assemblée territoriale de la Polynésie.
Nous savons aussi qu’une grande partie de la population vit dans la précarité.
Par conséquent, le rapport propose diverses mesures et recommandations pour remédier aux difficultés de la Polynésie française, sachant que ce régime est en effet un amortisseur social. Le rapport vous sera transmis officiellement dans les prochains jours. il devra être étudié et analysé. Le mieux serait la mise en place d’un groupe de travail mais aussi d’une méthode de travail conjoint définie entre les ministères concernés et votre gouvernement pour nous permettre de progresser et de trouver des solutions. Je serai en tout cas très attentif à la situation de la Polynésie et à vos propositions.
La parole est à M. Camille de Rocca Serra, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, depuis quinze jours, la Corse est prise en otage par une entreprise dont l’État est actionnaire à 25 %.
Ce énième conflit à la SNCM est une violence faite à la Corse, à son économie, à sa population. Violence, aussi, à l’activité économique de Marseille, en raison des bateaux de croisière déroutés. Mais lorsque les artisans, les agriculteurs, les commerçants, l’ensemble des chefs d’entreprise du secteur du tourisme et de tous les autres secteurs d’activité viennent demander, vendredi dernier, au préfet de Haute-Corse de faire respecter l’état de droit, à Marseille comme ailleurs, et de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour libérer un bateau dont l’équipage n’est pas en grève afin de pouvoir desservir la Corse, alors ces personnes, déjà victimes du conflit, et qui ne demandaient que d’être respectées et de pouvoir travailler, se voient confrontées aux forces de l’ordre.
Cela n’est pas supportable. Ces gens sont venus défendre le droit de travailler, qui reste garanti dans ce pays, et non demander l’arrêt de la grève.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe UDI.
Ils ont seulement demandé au Gouvernement – c’est-à-dire à vous, monsieur le Premier ministre –, de faire respecter l’état de droit, et donc de libérer les ports et de permettre la circulation des navires. Ils sont aussi venus vous demander – et je le demande également en leur nom – de prendre les mesures nécessaires, dans les domaines fiscal, social et bancaire, pour compenser la perte d’activité qu’ils subissent et continueront de subir.
Je vous demande également, monsieur le Premier ministre, de dire enfin la vérité aux salariés de la SNCM, de leur révéler que leur avenir n’est pas celui qu’on leur avait promis, et de garantir à la Corse un service minimum.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Monsieur le député, depuis plus de deux semaines, la SNCM est en effet touchée par un mouvement de grève. Le devoir du Gouvernement – et Frédéric Cuvillier l’a dit avec force il y a quelques jours – est donc de dire, sur ce dossier comme sur bien d’autres, la vérité aux Français.
La vérité, et il faut la dire aussi aux salariés de la SNCM, est que cette situation est insupportable et qu’elle a trop duré. La société est confrontée depuis très longtemps à de graves difficultés, et sans réforme d’envergure, elle ne s’en sortira pas. Au cours des dix dernières années, la SNCM a en effet été déficitaire à neuf reprises. J’en appelle donc une nouvelle fois au sens de la responsabilité de ses agents, car cette grève, si elle devait se poursuivre, sera fatale à l’entreprise.
C’est la troisième grève en six mois, et elle intervient au début de la saison touristique, c’est-à-dire au pire moment. Ce mouvement remet en cause la survie même de l’entreprise, et il touche à la survie même de l’économie corse, liée, pendant cette période, au dynamisme de l’économie touristique. J’entends donc parfaitement l’exaspération de la population, des milieux économiques corse et marseillais, des chefs d’entreprise, des responsables d’hôtels, des agriculteurs, devant ces grèves à répétition qui paralysent l’économie locale.
Notre objectif est simple : trouver les solutions – on les cherche depuis longtemps, et c’est pourquoi personne n’est en mesure de donner des leçons sur ce dossier
Murmures sur les bancs du groupe UMP.
– pour la société et ses salariés. Je le dis clairement une nouvelle fois : la SNCM ne s’en sortira pas sans une restructuration dans le cadre d’un redressement judiciaire.
C’est la condition même pour que l’entreprise puisse repartir sur des bases assainies et qu’un repreneur puisse se manifester.
Cela fait trop longtemps que l’on refuse de la dire, mais j’assume cette vérité, car nous la devons aux salariés comme à ceux qui subissent les conséquences de la grève.
C’est la raison pour laquelle, compte tenu du climat de tension qui règne en Corse comme à Marseille, et que personne ne peut ignorer, nous avons nommé un médiateur.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Au moment où nous parlons, une négociation est en cours, et je crois aux vertus du dialogue.
Dans le même temps, j’appelle l’ensemble des parties prenantes de ce dossier à garder leur sang-froid. Le blocage des navires et les violences sont non seulement inacceptables, mais ne permettront pas de dénouer la situation. Le Gouvernement prendra donc, dans les heures qui viennent, toutes les mesures nécessaires pour que cessent ces blocages qui n’ont que trop duré : il y va du respect de l’état de droit.
Par ailleurs, une enquête administrative a été demandée par le ministre de l’intérieur concernant les incidents qui ont eu lieu à la préfecture de Haute-Corse.
Depuis le début de cette grève, le Gouvernement agit pour s’assurer que la desserte de la Corse soit maintenue. C’est essentiel pour l’île, pour son attractivité, pour le secteur du tourisme et pour l’économie locale. J’ai moi-même signé, comme ministre de l’intérieur, le plan de développement économique dont l’île avait besoin, et dont elle a bénéficié de manière continue depuis plus de dix ans, quelles que soient les majorités. Je recevrai d’ailleurs demain les représentants du monde économique et social de la Corse pour parler des mesures de compensation.
La SNCM, monsieur le député, pourrait repartir sur de bonnes bases. Les solutions existent ; pour cela, il faut que les salariés reprennent le travail. Un accord est possible, et les acteurs doivent continuer à travailler ensemble pour discuter d’un avenir commun. Si chacun joue pleinement son rôle, si nous tenons un discours de responsabilité, mais aussi de fermeté, si nous sommes à l’écoute des salariés, mais aussi des entrepreneurs, du monde économique corse et des Corses, alors je crois que nous pourrons trouver la bonne solution.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.
La parole est à M. Jacques Valax, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
C’est avec une très grande émotion que je m’exprime en cet instant. J’espère que je le ferai, monsieur le ministre, avec la même délicatesse, la même dignité, mais aussi la même sincérité que celle qui a été la vôtre lorsque vous êtes venu à Albi soutenir la communauté éducative, les parents, les enfants, la famille et les amis de Fabienne Terral.
Rendre hommage à la mémoire de Fabienne Terral, c’est rappeler ici qu’à travers elle, ce sont des symboles de la République qui ont été touchés. Ce n’est pas seulement une jeune enseignante passionnée par son métier – et Fabienne l’était vraiment – qui a été ainsi attaquée, mais aussi l’éducation, l’école elles-mêmes. Ce sont également les symboles de l’égalité et de la tolérance qui sont visés, car Fabienne Terral souhaitait apprendre à tous, sans distinction d’origine sociale, de nationalité. L’égalité et la tolérance, tel était son credo. À travers ce geste, c’est donc toute l’institution scolaire qui est mise en danger.
En effet, quelle est aujourd’hui la réalité ? Une étude de l’INSEE indique que plus d’une personne sur dix travaillant dans l’éducation nationale fait l’objet de menaces et d’insultes. C’est la démonstration que les campagnes contre les fonctionnaires, et plus particulièrement contre les enseignants, alimentent des comportements inadmissibles,
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP
Les enseignants sont et doivent rester les piliers de nos institutions : à ce titre, ils doivent être respectés par tous. Il est essentiel de revaloriser leur rôle et leur image, de restaurer leur autorité en rappelant à tous que l’école est et doit rester le coeur laïque de nos institutions. Il y va de l’avenir de notre modèle républicain.
Fabienne éduquait les enfants des autres. Les siens doivent pouvoir recevoir protection et reconnaissance de la part de la France pour l’engagement de leur mère au service de l’État. Alors, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître les mesures que vous allez prendre pour cette famille meurtrie à jamais.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le député, le vendredi 4 juillet, c’était la fin de l’année scolaire et le début des vacances, et donc un jour supposé joyeux pour les millions d’élèves, mais aussi pour les enseignants. Ce jour a été endeuillé…
…par le meurtre épouvantable, abominable, de Fabienne Terral-Calmès. Cette enseignante remarquable avait trente-quatre ans. Elle est morte au service de la République. Je reviendrai sur les devoirs et la dette de l’État à l’égard de sa famille et de ses enfants.
À la demande du Président de la République, je me suis immédiatement rendu à Albi. Nous pouvons être fiers de la communauté éducative qui entourait Fabienne Terral-Calmès : ses collègues, la directrice de l’école, les agents territoriaux spécialisés, les assistants présents m’ont tous demandé d’honorer sa mémoire en précisant que cet acte abominable est étranger au climat qui régnait dans l’école Edouard-Herriot – une école où la tâche est difficile, mais où les relations entre les parents et les enseignants sont bonnes.
Je veux donc saluer le travail de ces derniers, mais aussi le rôle des forces de police, qui sont intervenues rapidement et ont permis l’interpellation de l’auteur de ce crime – désormais mis en examen et interné en hôpital psychiatrique –, ainsi que la rapidité avec laquelle les sapeurs pompiers et le SAMU sont intervenus.
La dette de la Nation m’amènera à proposer, dans les heures qui viennent, la reconnaissance officielle des circonstances de la mort de Fabienne Terral-Calmès en tant que dépositaire de l’autorité publique. La mention « mort au service de la Nation » sera portée à son état civil, ce qui permettra à ses deux filles de disposer du statut de pupille de la Nation, impliquant une prise en charge financière et éducative, en reconnaissance de la lourde dette que l’État a envers ses enfants.
Applaudissements sur tous les bancs.
Nous n’avons pas oublié la communauté éducative de l’école : un soutien psychologique sera assuré jusqu’au 20 août, de façon à ce que la rentrée s’y passe dans les meilleures conditions. C’est le plus important, et c’est ce qu’aurait souhaité la victime.
À travers cet exemple, nous souhaitons dire et redire que l’école doit être protégée des violences et rester un lieu de paix.
Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.
La parole est à Mme Anne Grommerch, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, pour faire suite aux propos du ministre de l’éducation nationale, je regrette que vous n’ayez pas fait observer une minute de silence pour cette enseignante au début de la séance.
Monsieur le Premier ministre, « faire et défaire », telle est la marque de fabrique de votre Gouvernement, comme elle était celle du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. On s’en souvient, votre prédécesseur avait supprimé, d’un trait de plume, en 2012, la fiscalité anti-délocalisation, pour se rendre compte, deux ans plus tard qu’il y avait un problème de compétitivité dans notre pays. La même idéologie, que l’on peut résumer par la formule « faisons table rase du passé », vous a conduit à supprimer des mesures puissantes d’incitation à l’apprentissage. Des aides ont été rabotées, un crédit d’impôt a été malmené, le préapprentissage a été supprimé. Vous avez ainsi mis à bas l’excellente loi que nous avions votée à l’initiative de notre collègue Gérard Cherpion.
Tout cela pour quel résultat ? Un nombre d’apprentis en chute libre : 8 % d’apprentis en moins en 2013 et 14 % au premier semestre 2014 ! Au moment où le chômage des jeunes est une préoccupation majeure, vous avez mis à mal les opportunités proposées à des jeunes de s’insérer dans la vie active et sur le marché de l’emploi. À ma question du 10 avril sur l’apprentissage, le ministre de l’emploi me répondait, c’est une citation : « Vous avez raison sur l’apprentissage, nous avons encore des efforts à faire, je m’y emploierai immédiatement. » Il aura fallu attendre encore trois mois avant que soit annoncé le rétablissement des aides à l’apprentissage ! Et encore les conditionnez-vous à des accords de branche ! De quoi s’agit-il si ce n’est de non-assistance à jeunes en détresse ?
Pour plusieurs milliers de jeunes, ce sont déjà deux ans de perdus, mais vous semblez ouvrir les yeux sur la réalité. Alors, chiche, allez plus vite et plus loin pour valoriser l’apprentissage et vous nous trouverez à vos côtés.
Monsieur le Premier ministre, vous dites vouloir aller vite, alors que le Président de la République a annoncé l’ouverture d’une négociation en septembre pour « lever tous les blocages ». Il y a urgence, monsieur le Premier ministre ! Quel est le calendrier de la mise en application réelle de ces mesures ?
La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social.
Madame la députée Grommerch, je suis sensible à votre intervention. Ce matin, j’ai eu l’occasion de dire à votre collègue M. Cherpion combien ce sujet devait nous rassembler. J’ai, en effet, répondu longuement devant la commission des affaires sociales de votre assemblée à des questions de l’ensemble de la représentation nationale, dans sa diversité, au sujet de l’apprentissage.
Un certain nombre de décisions ont été prises, lors de cette grande conférence sociale, qui traduisent l’urgence qu’il y a à agir pour que tout le monde se rassemble autour de l’apprentissage. Car tout le monde en parle – les entreprises vantent l’apprentissage et la qualité de celui-ci – mais sans agir assez. Ainsi les entreprises, vous le savez, ne prennent-elles pas assez d’alternants. Il y a donc un effort à faire en la matière – ce n’est pas nouveau, mais il est bon de le rappeler.
J’ai quelque mal à développer ce sujet en deux minutes, mais il y a en effet, madame, des freins conjoncturels et des freins structurels à l’apprentissage. Pour lever les freins structurels, nous travaillerons au mois de septembre. Une grande réunion nous permettra alors d’analyser ces freins et d’y remédier.
Quant au conjoncturel, des réponses immédiates ont été annoncées hier par le Premier ministre. C’est ainsi que 200 millions d’euros seront dégagés pour l’apprentissage. Et, connaissant votre engagement et celui de vos collègues, je ne doute pas que la semaine prochaine, lorsque le projet de loi de finances rectificative pour 2014 sera examiné en deuxième lecture, vous voterez cette disposition.
Il s’agit en l’occurrence de 200 millions d’euros pour les jeunes, de 200 millions d’euros pour l’apprentissage, de 200 millions d’euros pour l’emploi !
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Sophie Errante, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à M. Thierry Mandon, secrétaire d’État à la réforme de l’État et à la simplification.
Dans un monde qui bouge à vitesse grand V, la France n’a d’autre devoir que celui de s’adapter aux nouvelles réalités économiques pour entrer dans la modernité et être à nouveau attractive. Parmi ces adaptations majeures, figure l’obligation de s’engager fermement sur le chemin de la simplification administrative afin de débloquer la France. Votre nomination, monsieur le secrétaire d’État, à la tête de ce département ministériel marque une réelle volonté d’accélérer ce processus tant attendu des citoyens et des entreprises.
Chaque semaine, je vais à la rencontre des entreprises de ma circonscription de Loire-Atlantique. Chaque semaine, j’entends la même chose, la volonté de voir l’État amplifier la simplification des normes et du carcan administratif qui les enserrent pour leur faire gagner du temps, économiser de l’argent et de l’énergie. Pour relancer les investissements et combattre efficacement le chômage, il faut rassurer les TPE, PME et ETI, car c’est là, comme vous le savez, que se créent le plus d’emplois. Que demandent ces entreprises ? Elles veulent de la tranquillité d’esprit pour embaucher avec une véritable visibilité, ainsi qu’une simplification urgente.
L’OCDE a évalué à près de 60 milliards d’euros le coût que représente la complexité administrative pour les entreprises. Ce sont 60 milliards de gaspillés qui n’entrent pas dans les tuyaux dynamiques de l’investissement et de l’emploi. Assouplir certaines obligations contraignantes, c’est également valoriser la création et le développement des entreprises, et donc actionner les leviers en faveur de l’embauche.
Je sais l’importance que vous accordez à ce chantier de la simplification. Au mois d’avril dernier, en tant que coprésident du Conseil de la simplification, vous avez présenté un travail sans précédent. Merci, monsieur le secrétaire d’État, de nous indiquer les lignes directrices de votre action prochaine pour simplifier la vie des entreprises, celle des agents, celle des citoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et de la simplification.
Votre question, madame la députée, me donne l’occasion de dresser un premier bilan des décisions que vous-mêmes et vos collègues avez prises ici même, dans cet hémicycle, en adoptant deux lois habilitant le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance, les lois du 1er juillet 2013 et du 2 janvier 2014.
L’ensemble des ordonnances qui devaient être prises sur ce fondement ont été mises en oeuvre. Elles marquent un certain nombre de progrès très significatif, tant dans le domaine du droit de l’urbanisme qu’en termes d’allégement de procédures réglementaires déclaratives pour les toutes petites entreprises. En ce qui concerne le droit de l’urbanisme et tout ce qui relève désormais de grands projets de construction de logements ou d’immobilier d’entreprises, projets qui prennent généralement environ dix à douze années lorsqu’il y a des recours en justice, oui, vous avez bien entendu, tous les délais ont été divisés par deux, grâce à un certain nombre de dispositifs que je n’ai pas le temps de détailler ici. Quant aux déclarations des toutes petites entreprises, leur nombre a été divisé par cinq, pour rester au minimum du minimum – je reçois des lettres de ces entreprises, qui nous témoignent leur reconnaissance.
Mais il faut aller beaucoup plus loin. Dans quelques jours, vous serez saisis d’un troisième projet de loi d’habilitation, qui fera faire des progrès majeurs à la simplification : élargissement du champ du rescrit, ouverture du TESE, le titre emploi service entreprise, à toutes les entreprises de moins de vingt salariés, suppression d’un certain nombre de pièces justificatives demandées à plusieurs occasions à des entreprises – je ne puis ici les détailler.
Mieux encore, au mois de septembre prochain, avec l’application du dispositif « silence vaut accord pour l’administration », l’absence de réponse de l’administration vaudra autorisation dans le cadre, désormais, de 1 155 procédures. Bref, nous continuons méthodiquement, résolument, systématiquement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Sylvain Berrios, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement affiche la volonté de résoudre la crise des emprunts toxiques qui exposent les collectivités à des risques très élevés. En décembre 2011, une commission d’enquête présidée par M. Bartolone adoptait à l’unanimité un rapport rédigé par Jean-Pierre Gorge qui reconnaissait la responsabilité des banques. Ce rapport préconisait d’aider les collectivités à renégocier les prêts, et même de légiférer pour plafonner les taux. Aujourd’hui votre gouvernement a choisi de faire exactement l’inverse !
Après plusieurs condamnations de banques, vous avez déposé un projet de loi visant à empêcher les acteurs locaux de faire valoir leurs droits devant les tribunaux. Il s’agit, en fin de compte, d’un projet de loi d’amnistie pour les banques. S’appuyant sur une étude d’impact pour le moins imprécise, votre gouvernement nous assure que la généralisation des décisions de justice provoquerait la déroute des banques et même que le pacte de stabilité du Président de la République serait mis en péril.
Vous vous êtes même engagé auprès des banques à ce que le projet de loi soit adopté.
Vous invoquez l’intérêt général alors que vous transférez le coût pour l’État vers les acteurs locaux, qui, comme moi dans ma commune, ont souvent hérité d’une situation financière explosive, et qui se battent chaque jour pour s’en sortir. Vous oubliez qu’il y a un précédent : en 1996, le Gouvernement avait fait voter une loi identique pour clore un contentieux opposant des particuliers aux banques, mais la France a été condamnée au nom du droit à un procès équitable – relevons, au passage, que l’État était actionnaire indirect de la banque en question.
Alors, monsieur le Premier ministre, pourquoi avez-vous choisi de déposer une loi en urgence pour offrir un blanc-seing aux banques alors que leur responsabilité est reconnue par la justice de notre pays ?
Pourquoi ne pas avoir suivi les recommandations de la commission d’enquête parlementaire présidée par M. Bartolone, qui ont été adoptées à l’unanimité ?
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget, pour répondre à cette bonne question.
Sourires.
Monsieur le député, des collectivités territoriales et des établissements publics ont souscrit des emprunts structurés pour des montants considérables. Certains l’ont fait en connaissance de cause,…
…d’autres ont été trompés et sont victimes de pratiques commerciales trompeuses et scandaleuses.
C’est la majorité précédente qui, en 2011, a décidé de démanteler Dexia. Cela a coûté suffisamment cher !
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
C’est la majorité précédente qui, en 2011, a regroupé les emprunts toxiques dans une structure, la SFIL – Société de financement local – dont l’État est actionnaire.
L’État a accepté de garantir, en dernier ressort, l’ensemble des emprunts toxiques logés dans la SFIL. Cela signifie qu’en cas de défaillance de cette dernière, le coût pour l’État pourrait s’élever – dans le pire des cas – à 17 milliards d’euros. Personne ne souhaite une telle défaillance !
Certaines collectivités ont été abusées, d’autres se sont montré imprudentes.
« Lesquelles ? »sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Le projet de loi qui sera examiné demain à l’Assemblée nationale apporte une réponse équilibrée, qui met les banques à contribution. Il vise à aider les collectivités à sortir des contrats qui les asphyxient : 1,5 milliard d’euros sur quinze ans sont destinés à cela. Les banques financeront la moitié de cette somme. Un autre fonds est prévu pour les établissements hospitaliers.
Monsieur le député, cette situation complexe mérite mieux que la caricature et l’instrumentalisation. J’ose espérer que l’Assemblée nationale comme le Sénat feront preuve de responsabilité pour sortir de cette situation.
Applaudissements sur certains bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Sonia Lagarde, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Avant toute chose, au nom de mon collègue Philippe Folliot et de l’ensemble des députés du groupe UDI, je salue la mémoire de l’institutrice assassinée la semaine dernière à Albi devant sa classe.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur. À Nouméa, il y a quelques jours, nous avons hélas encore assisté au caillassage et à l’attaque de patrouilles de police dans les quartiers nord de la ville. Cette fois, un policier municipal a été blessé, et je ne parle pas des agressions de commerçants qui sont de plus en plus nombreuses.
Maire de Nouméa, je suis, avec l’État, garante dans la ville de l’ordre républicain. Dès les premiers jours qui ont suivi mon élection, j’ai remis en place une vraie police de proximité avec une présence effective des policiers municipaux sur le terrain. Cependant, pour assurer la sécurité d’une ville de 100 000 habitants, il faut obligatoirement renforcer la présence de la police nationale et resserrer la coopération entre les polices.
Si l’insécurité touche l’ensemble de la ville, les quartiers nord subissent de plein fouet les conséquences de la fermeture du commissariat de police de Tindu en 2010. Les Nouméens paient le prix fort d’une politique hasardeuse, je dirais même : irresponsable. Cette délinquance n’est pas nouvelle, mais elle est de plus de plus en plus violente, et ce dans un contexte d’échéances déterminantes pour notre avenir institutionnel.
Chacun sait combien les équilibres sont fragiles en Nouvelle-Calédonie. Il est temps d’entendre l’exaspération des populations avant qu’elle ne tourne au drame. Alors, monsieur le ministre, êtes-vous prêt à envisager la réouverture d’un commissariat de la police nationale à Tindu et à renforcer les effectifs de cette même police sur le terrain ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et plusieurs bancs du groupe UMP.
Madame la députée, je vous remercie pour votre question. Vous connaissez bien la situation à Nouméa. Je le confirme : des problèmes de sécurité se posent, non seulement à Tindu mais aussi ailleurs. Ils résultent de la conjonction de plusieurs phénomènes. Après s’être fortement alcoolisés, des jeunes commettent les actes inacceptables que vous avez dénoncés, et que je condamne avec la plus grande fermeté. L’alcoolisation des jeunes n’est pas la seule cause : entrent en ligne de compte le trafic d’armes – qui existe, et qu’il faut dénoncer – et le trafic de stupéfiants – contre lequel nous devons nous mobiliser.
C’est pourquoi nous avons décidé de prendre un ensemble de mesures, au cours des derniers mois, pour rétablir la sécurité sur l’île, en relation étroite et confiante avec la police municipale. Premièrement, nous voulons lutter contre l’alcoolisation des jeunes. C’est pourquoi nous avons mobilisé la police nationale afin de veiller à l’application rigoureuse des arrêtés interdisant la consommation d’alcool et la vente de boissons alcoolisées à emporter. Ces arrêtés ont été pris par les autorités locales ; ils sont destinés à faire cesser cette consommation chez les jeunes.
Nous avons également mis en place un puissant dispositif de démantèlement des réseaux de stupéfiants, qui commence à donner des résultats significatifs. Pour ce qui concerne le trafic d’armes, nous avons soumis au Conseil d’État un projet de décret qui permettra d’appliquer dans les meilleures conditions possible les dispositions de la loi de mars 2012 relative à ces sujets.
Vous avez également appelé mon attention sur la situation particulière de Tindu. Il est vrai qu’en 2010, le commissariat de ce quartier a été supprimé, ce qui était sans doute une erreur. Nous avons voulu corriger cette erreur en augmentant les effectifs de police à Nouméa et en Nouvelle-Calédonie, pour permettre une bonne application des règles. Les effectifs sont passés de 372 à 400 : si cela ne suffit pas, madame la députée, je suis prêt à vous recevoir…
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre et j’y associe le député de la Charente-Maritime, Didier Quentin.
Monsieur le Premier ministre, c’est pour tirer la sonnette d’alarme que je m’adresse à vous aujourd’hui. Le secteur des travaux publics est en danger pour de multiples raisons. La première est liée, bien évidemment, aux élections municipales car, nous le savons tous ici, les années électorales ne sont pas fastes pour le bâtiment et les travaux publics.
Les autres raisons sont bien plus graves et appellent une prise de conscience immédiate et des décisions rapides de votre part. Le secteur des travaux publics dépend à hauteur de 75 % de la commande publique et de 25 % des investissements privés au niveau national, avec des différences selon les zones géographiques.
La commande publique, notamment celle des communes, est au point mort. Les communes ont des contraintes budgétaires énormes liées, d’une part, à la baisse inédite des dotations de l’État et, d’autre part, à l’augmentation de leurs dépenses, comme celles induites par les rythmes scolaires et par l’insécurité liée à la perspective de la réforme territoriale.
Elles sont obligées de faire des choix. Malheureusement, ces choix affectent directement les investissements. Le secteur n’embauche plus depuis deux ans et n’est plus en capacité d’offrir des contrats aux jeunes en apprentissage.
Le recours aux travailleurs détachés devient occasionnellement une roue de secours mais fragilise un peu plus encore l’emploi dans ce secteur. Pour la seule région Champagne-Ardenne, le secteur prévoit la suppression de 1 000 à 1 500 emplois d’ici la fin 2015. Au niveau national, 60 000 emplois sont menacés d’ici à 2017. C’est une hémorragie.
Aussi, monsieur le Premier ministre, alors que les chiffres du chômage continuent de se dégrader en France, nous vous demandons instamment de bien vouloir prendre les mesures urgentes de sauvetage de ce secteur.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Le secteur des travaux publics, et plus généralement celui du bâtiment, rencontre de grandes difficultés, comme vous l’avez souligné. Il convient de regarder la réalité en face. Le secteur souffre beaucoup aujourd’hui.
Vous en avez donné certaines raisons, comme celle du cycle électoral. Le secteur est souvent dans une situation plus compliquée l’année précédant l’élection. Cette année, les nouvelles équipes – parfois à votre avantage sur le plan politique ! – se mettent en place : il y a donc un temps de réflexion avant de lancer des investissements. Nous sommes dans cette période délicate.
Par ailleurs, il est indispensable que les efforts d’économie soient partagés par l’État – nous aurons cet après-midi, avec Christian Eckert, l’honneur de vous décrire les perspectives d’économies de l’État que nous soumettrons au vote du Parlement – et par les collectivités territoriales, sans pour autant sacrifier, pour l’un comme pour l’autre, l’investissement. On peut diminuer les dépenses de fonctionnement de l’État et celles des collectivités territoriales, sans pour autant – j’ai été très longtemps maire et président de conseil régional et je parle donc en connaissance de cause – sacrifier, je le répète, l’investissement. Cela demande un effort, mais nous ferons ce travail avec les collectivités territoriales.
Les Assises de l’investissement, qui auront lieu à l’automne, nous permettront de travailler avec ces dernières mais également avec le secteur privé, de façon que l’investissement ne soit pas une victime et devienne même le moteur de la croissance de notre économie. C’est vrai dans le secteur des travaux publics comme dans bien d’autres secteurs.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Jean-Claude Perez, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
J’associe à cette question, qui s’adresse à M. le ministre de l’agriculture, M. Dupré et Mme Fabre, députés de l’Aude.
Monsieur le ministre, dimanche dernier, en fin de journée, un orage de grêle d’une violence sans pareille a traversé le département de l’Aude, laissant derrière lui un paysage chaotique et de désolation. Il a semé le chaos parmi les 18 400 hectares agricoles, dont une très grande partie est constituée de vignes, atteintes pour la plupart entre 80 % et 100 %, mais qui sont également constitués de grandes cultures céréalières, de pépinières viticoles, de productions de semences arboricoles et maraîchères…
L’orage a semé la désolation parmi nos concitoyennes et nos concitoyens, qui ont vu en ce dimanche disparaître le travail d’une vie, leurs biens personnels endommagés, leurs infrastructures commerciales durement touchées. En ce jour, au nom des parlementaires audois, je tiens à leur exprimer notre entier soutien et notre admiration pour leur courage, leur force de réaction, ainsi que pour l’élan de solidarité qu’ils ont su immédiatement créer dans leurs communes afin de faire face à ce phénomène exceptionnel.
Dès le lendemain, à la demande du ministre de l’agriculture, les services de l’État sont venus mesurer l’ampleur des dégâts aux côtés de la chambre d’agriculture de l’Aude, des exploitants et des maires des communes concernées. Une cellule de crise a été mise en place afin, entre autres, de recenser précisément les dommages causés par l’orage. Les premiers éléments qui en sont ressortis, parmi lesquels le fort impact de l’orage y compris sur la récolte 2015, vous ont permis, monsieur le ministre, d’annoncer les premières mesures. Je vous en remercie.
Mais aujourd’hui, un problème d’ordre général est soulevé par cette cellule de crise. En effet, la grêle n’est considérée ni comme une catastrophe naturelle, ni comme une calamité agricole, contrairement aux inondations ou à la sécheresse. Monsieur le ministre, quelles mesures exceptionnelles pourront être prises pour ces pauvres viticulteurs, qui ne se sont pas assurés contre la grêle ?
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Vous avez rappelé l’événement qui a eu lieu en particulier dans l’Hérault et dans l’Aude. Les averses de grêle ont touché, selon les premières estimations, près de 15 000 hectares de vigne, mais aussi d’autres cultures. Ce phénomène devient malheureusement assez récurrent. La fréquence de ces averses et de ces orages de grêle et leur intensité constatée depuis quelques années se caractérisent par un changement d’échelle. Cela pose la question plus large du bouleversement climatique en cours.
S’agissant de la situation que vous évoquez, le préfet de région s’est rendu sur place, une cellule de crise a été mise en place, des décisions immédiates ont été prises, comme les exonérations sur le foncier non bâti. J’appelle d’ailleurs les communes concernées à faire connaître aux services de l’État les résultats de leurs investigations sur ce sujet. J’ai également saisi la MSA afin de mettre en place des allégements de cotisations sociales. Telles sont les mesures immédiates.
Parallèlement, se pose la question plus générale de l’organisation d’une mutualisation de l’assurance pour les aléas climatiques, qui sont de plus en plus fréquents. Un travail a été engagé depuis six mois pour trouver des éléments de financement et d’organisation de ce système.
Cette semaine, nous aurons à rendre compte de ces travaux structurants, menés avec les assureurs, le ministère de l’agriculture, la Caisse des dépôts et consignations et l’ensemble des partenaires concernés. Il faut organiser une mutualisation de ce risque, sans quoi nous ne pourrons pas répondre aux besoins des agriculteurs.
Pour finir, j’indique que je me déplacerai cette semaine dans l’Aude et en Bourgogne car, en l’espace d’un mois, deux régions viticoles ont été touchées.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Dégâts dus à la grêle
La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Denis Baupin.
Le Secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement a fait savoir au président de l’Assemblée nationale que celle-ci reprendra ce soir, à l’issue du débat d’orientation sur les finances publiques, la suite de la discussion en deuxième lecture, du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
Il s’agit simplement d’une demande de précision par rapport à ce que vous venez d’indiquer, monsieur le Président. Si je comprends bien, nous devrions donc achever le débat d’orientation sur les finances publiques en fin d’après-midi.
S’il n’est pas achevé à la levée de notre séance de cet après-midi.
Mais, quoi qu’il en soit, après la fin du débat d’orientation sur les finances publiques, nous débattrons ce soir du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
Comme chaque année, le projet de loi de règlement est le moment de rendre hommage aux concepteurs de la LOLF et au principe de « chaînage vertueux » qu’ils ont instauré. Nous discutons cet après-midi de l’exécution budgétaire de l’année passée, avant d’examiner les perspectives des finances publiques. Savoir d’où l’on vient pour décider où l’on va, cela vaut aussi pour le budget de l’État ; dans ce débat, nous regardons le passé et la réalité des résultats.
D’où sommes-nous partis au début de la législature ? Une croissance à l’arrêt, de 0,3 % en 2012 et en 2013, avec un début de rebond au milieu de l’année 2013 ; une situation des finances publiques particulièrement dégradée, avec un niveau de dette publique sans précédent en temps de paix, à près de 90 % de la richesse nationale ; un taux de chômage sur une trajectoire de forte augmentation, qui dépasse en 2013 les 10 % de la population active ; des inégalités nourries par une décennie de mesures fiscales favorables aux ménages les plus aisés.
Dès la loi de finances rectificative de juillet 2012, puis avec la loi de finances pour 2013, le Gouvernement et la majorité ont mis en oeuvre un ensemble de mesures destinées à répondre à cette situation.
Ce projet de loi de règlement porte spécifiquement sur la situation budgétaire de notre pays. Il montre que les mesures adoptées ont eu des effets : le déficit public est passé de 4,9 % en 2012 à 4,3 % du PIB en 2013 et le déficit structurel s’est réduit de 1,1 % du PIB, soit de 22 milliards d’euros environ.
En 2012 et 2013, l’amélioration structurelle des finances publiques a atteint près de 2 % du PIB, soit près de 40 milliards d’euros. Le déficit de l’État est passé de 87,1 milliards d’euros en 2012 à 74,9 milliards d’euros en 2013, soit une diminution de 12,2 milliards d’euros. Après avoir atteint un pic de 148,8 milliards d’euros en 2010, il a donc été réduit de près de moitié à la fin 2013.
La croissance de la dépense publique en valeur a été limitée à 2 %, le plus bas niveau atteint depuis 1998. Les dépenses nettes du budget général de l’État, hors charge de la dette, pensions et prélèvements sur recettes, ont été inférieures de 144 millions d’euros au niveau fixé par l’autorisation parlementaire ; si l’on y ajoute la charge de la dette et les pensions, la sous-exécution ressort à 3,5 milliards d’euros.
Il faut le dire et le répéter : les efforts demandés aux Français ont produit des résultats dès l’année 2013. En fin d’année dernière, le déficit structurel a quasiment retrouvé son plus bas niveau depuis 2002. Les déséquilibres budgétaires accumulés pendant dix ans ont donc été apurés dans les dix-huit premiers mois de cette législature.
L’évolution du solde est la résultante de l’évolution des dépenses et de celle des recettes. Sur les dépenses, je pense que nous pouvons tous nous accorder sur les
résultats obtenus par le Gouvernement : elles sont tenues. Je n’y reviens donc pas. Sur les recettes, je souhaiterais insister sur deux points importants de l’exécution.
Le premier est la hausse des recettes fiscales nettes de l’État, en augmentation de 15,6 milliards d’euros par rapport à 2012. Cette progression est due aux mesures adoptées dans la loi de finances rectificative de juillet 2012 puis dans la loi de finances pour 2013. Ces mesures n’ont pas été seulement justifiées par des considérations budgétaires ; elles découlent de la volonté du Gouvernement et de la majorité de rétablir la progressivité du système fiscal, après dix ans d’une politique fiscale qui a réduit l’imposition sur le patrimoine et augmenté la CSG.
Ainsi, nous avons rétabli l’ISF, vidé de sa substance par la réforme de 2011, et les droits de successions et de donation, que la loi TEPA avait fortement minorés. Nous avons mis en place une tranche d’impôt sur le revenu à 45 % et abaissé le plafond du quotient familial, qui profite très largement aux ménages les plus aisés. Enfin, nous avons limité la déductibilité des charges financières et les reports de déficits d’impôt sur les sociétés, pour rapprocher le taux d’imposition des grandes entreprises de celui des PME.
Oui, nous avons augmenté les prélèvements, mais ces hausses, même si elles représentent un effort de tous, étaient ciblées d’abord sur les ménages les plus aisés et sur les entreprises les plus grandes, sur les contribuables qui disposent des ressources pour faire face à ces nouvelles contributions.
Notre objectif est que chacun contribue au service public suivant ses facultés. Ce sont les impôts sur les donations, les successions et la fortune – ISF – qui ont été réduits entre 2007 et 2012, tandis qu’étaient adoptées des augmentations générales et indifférenciées, comme le gel du barème de l’impôt sur le revenu, décidé pour deux ans en 2011. Notre politique fiscale est tout le contraire : elle est redistributive, et fondée sur la conviction que chacun doit participer au financement du service public en fonction de sa capacité contributive. Les mesures que le Gouvernement propose pour la deuxième partie de la législature poursuivent ce que nous avons entamé en 2012 ; j’y reviendrai ce soir.
Le deuxième point sur lequel je souhaiterais insister renvoie à la notion d’élasticité des recettes à la croissance. L’affaire est entendue, nous avons eu le débat plusieurs fois : les écarts entre la prévision et l’exécution des recettes fiscales sont dus à la moindre croissance économique, mais aussi et surtout à la très faible élasticité des recettes à la croissance.
La notion d’élasticité est technique – pas autant que le solde structurel, mais complexe, tout de même ! – et elle peut donner lieu à des interprétations erronées des rentrées fiscales. L’élasticité rapporte la progression des recettes fiscales à la croissance économique. Si l’élasticité est inférieure à l’unité, les recettes fiscales ont progressé moins rapidement que l’activité économique. À moyen terme, l’élasticité est unitaire : les recettes publiques augmentent tendanciellement comme l’activité économique.
Pourquoi l’élasticité des recettes a-t-elle été aussi faible en 2013 ? Pour une raison principale : la faiblesse de l’impôt sur les sociétés. Celui-ci a connu une dynamique négative parce que le bénéfice fiscal, surtout des sociétés financières – banques et assurances –, a fortement diminué. Nous évaluons cette baisse à environ 7 %. L’autre impôt qui explique une part importante de la faible élasticité des recettes est la taxe sur la valeur ajoutée. Si l’on regarde précisément les facteurs d’évolution de la TVA en 2013, on constate que son rendement a souffert de la chute de la construction immobilière et de l’investissement des ménages en biens immobiliers.
Cette faible élasticité des recettes est bien conjoncturelle : elle est liée à des évolutions défavorables dans deux secteurs fortement cycliques, le secteur financier et le secteur immobilier. Il faut donc faire preuve de beaucoup de prudence lorsque l’on analyse l’exécution des recettes fiscales en 2013 : nous entendons, depuis plusieurs mois, que cette exécution serait le signe que « trop d’impôt tue l’impôt ». Aucun élément technique ne permet d’étayer une telle affirmation. Dans ce débat sur l’exécution de 2013, comme dans bien d’autres, il faut se méfier des fausses évidences données par les chiffres bruts. Leur analyse nous montre que la faiblesse des recettes en 2013 est due avant tout aux évolutions cycliques de deux secteurs, qui ont entraîné une déconnexion temporaire entre l’évolution des recettes publiques et celle de l’ensemble de l’économie.
Comme je l’ai fait en commission des finances, je voudrais rappeler qu’à l’occasion du dépôt du projet de loi de règlement, le Gouvernement présente au Parlement les comptes de l’État, certifiés par la Cour des comptes, ce qui permet d’en garantir la sincérité et la régularité au Parlement, et aux citoyens. Les comptes de l’armée 2013 ont été certifiés avec cinq réserves, soit deux de moins qu’en 2012. Les réserves levées portent sur l’évaluation du patrimoine immobilier de l’État, ainsi que sur les passifs non financiers, deux sujets majeurs. Nous sommes parvenus en particulier à un suivi fiable des engagements hors bilan de l’État.
Je vois dans ce progrès continu de la qualité comptable le signe de la mobilisation du Gouvernement mais aussi de celle des services de l’État, qui font constamment progresser la qualité des informations financières et patrimoniales – qu’il me soit permis de leur adresser des remerciements, à mon avis trop rares. La France est le seul État de la zone euro à faire certifier ses comptes, ce qui est un gage de crédibilité internationale.
Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de règlement vous montre qu’en l’espace de dix-huit mois, le Gouvernement et la majorité ont amélioré les fondamentaux budgétaires de notre pays, jusqu’à un niveau presque sans précédent depuis 2002. Il faut toujours le rappeler, la situation économique et budgétaire au début de cette législature était très mauvaise. C’est dans ce contexte exceptionnel que nous avons dû adopter en urgence des mesures qui ont non seulement permis de réduire le déficit public, mais aussi de rétablir la progressivité de notre système fiscal après dix ans d’une politique fiscale injuste.
C’est donc le bilan budgétaire des dix-huit premiers mois de la législature qui est l’objet de notre débat cet après-midi. De ce bilan, le Gouvernement et la majorité peuvent être fiers.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Comme vient de le rappeler M. le secrétaire d’État, la LOLF a marqué de grandes avancées pour l’implication du Parlement dans la gestion des finances publiques, tant en amont – avec le vote du budget, qui comprend un volet sur le pilotage des dépenses – qu’en aval, avec le vote d’une loi de règlement, qui permet au Parlement d’examiner la gestion des finances publiques par le Gouvernement.
Pour nous accompagner dans l’examen de cette loi de règlement, la commission des finances a auditionné fin mai le Premier président de la Cour des comptes, avant de l’auditionner une nouvelle fois en tant que président du Haut conseil des finances publiques, sur son avis du 23 mai, puis elle a entendu M. le secrétaire d’État, le 3 juin. À ces auditions s’ajoutent les différentes publications de l’INSEE, notamment celles en rapport avec les finances publiques.
L’élément le plus important de l’exécution budgétaire – l’état de nos finances publiques fin 2013 – est la maîtrise des dépenses publiques, après des années de croissance continue. Les efforts engagés en 2013 ont permis de limiter la croissance de la dépense publique en valeur à 2 % – en deçà des 2,7 % prévus par la loi de programmation –, ce qui n’était pas arrivé depuis 1998, et à 1,3 % en volume – un peu plus que les 0,9 % prévus par la loi de programmation, mais un peu moins que la moyenne constatée sur la période 2009-2013, de 1,4 %. L’augmentation de la dépense publique a toutefois été plus importante que celle du PIB, ce qui a conduit à augmenter le ratio de dépenses rapportées au PIB.
Ces bons résultats, en termes de maîtrise de la dépense publique, s’expliquent essentiellement par la gestion sérieuse que nous avons menée tout au long de l’année. Je voudrais m’attarder sur les dépenses de l’État. Elles ont, pour la première fois, en euros sonnants et trébuchants, reculé entre l’exécution 2012 et celle de 2013, à hauteur de 890 millions d’euros, malgré 8,31 milliards d’euros de dépenses exceptionnelles en faveur de de l’Union européenne, dont 6,52 milliards au titre de la participation de la France au mécanisme européen de stabilité et 1,79 milliard au titre d’arriérés issus du cadre financier pluriannuel 20072013.
Ce bilan satisfaisant est le résultat d’une gestion budgétaire efficace en cours d’année. C’est ainsi que 6,5 milliards d’euros de crédits ont été mis en réserve en début d’année, permettant de maîtriser les dépenses des ministères, et qu’un surgel de 2 milliards d’euros est intervenu dès mars 2013. Au total, 6,5 milliards d’euros de crédits ont ainsi été annulés.
Par ailleurs, témoignage de la confiance des investisseurs étrangers qui achètent des obligations d’État, nous avons bénéficié d’une économie de 1,4 milliard d’euros sur la charge de la dette et d’environ un milliard sur les pensions.
Ces bons résultats sont également liés à la baisse tendancielle des dépenses. La Cour des comptes les évalue à 3 milliards d’euros en 2013. Je sais que la notion de tendance ainsi que la manière de mesurer les baisses de dépenses font débat, en particulier au sein de la commission des finances, mais c’est bien ce chiffre que la Cour des comptes a annoncé, ce qui est une première dans l’histoire de la gestion de nos finances publiques.
S’agissant des recettes, le taux des prélèvements obligatoires est passé de 45,1 % du PIB à 46,2 %. Cette hausse est principalement due à des mesures nouvelles dont le rendement s’établit, en 2013, à 29,4 milliards d’euros. Ce montant tient aux mesures adoptées en loi de finances rectificative de juillet 2012 et en loi de finances initiale pour 2013, lesquelles ont permis de rapprocher la trajectoire des finances publiques de l’objectif d’un déficit public de 3 %.
Pour ce qui est de l’État, les recettes ont représenté 301,2 milliards d’euros, dont 284 milliards de recettes fiscales nettes.
J’en viens au solde. Les efforts consentis en recettes et en dépenses ont conduit à améliorer le solde budgétaire. Le déficit est ainsi passé de 4,8 % du PIB fin 2012 à 4,3 % fin 2013. Cette amélioration serait permise par un ajustement structurel en recettes, amoindri par les effets d’une conjoncture plus défavorable que prévu.
Quant à la dette, dernier pilier des finances publiques, elle continue d’augmenter, du fait de la non-stabilisation du solde. L’encours de dette publique a augmenté de 84 milliards d’euros, ce qui correspond à peu près au montant du déficit.
Je voudrais à présent dresser le bilan de l’exécution des mesures votées en loi de finances initiale 2013 et en loi de finances rectificative. La croissance, M. le ministre l’a rappelé, a été moindre que prévu, ce qui a affecté les résultats d’un certain nombre d’entreprises, et par conséquent leur imposition.
L’écart entre la prévision initiale sur les recettes – 298 milliards – et l’exécution – 284 milliards – s’explique presque exclusivement par l’évolution spontanée de cette croissance. Nous avons pu, en commission, interroger les directeurs de la Direction du Trésor sur ces questions.
Les recettes non fiscales, qui représentent 4,5 % des recettes totales de l’État, ont été moindres que prévu, elles aussi, du fait de la baisse du prélèvement sur la Caisse des dépôts et consignations. Elles se sont tout de même élevées à 13,7 milliards en 2013.
S’agissant des dépenses, nous l’avons dit, en 2013 celle de l’État a fortement diminué, de l’ordre de 4 milliards d’euros, par rapport à la prévision de la loi de finances initiale de 2013. Les normes de dépenses ont été respectées, comme en 2012. L’exécution a ainsi été légèrement inférieure aux plafonds fixés par les normes « zéro valeur » et « zéro volume » de, respectivement, 140 millions d’euros et 3,45 milliards d’euros. Ces chiffres témoignent d’une bonne maîtrise des dépenses publiques.
Pour ce qui est du solde par rapport à la loi de finances initiale, l’écart entre le solde réalisé et celui prévu dans la loi de finances initiale provient essentiellement des moindres recettes, suite à une croissance inférieure en 2013.
Ces bons résultats sont le fruit d’une bonne maîtrise des dépenses publiques. Nous devrions, nous parlementaires, nous saisir de cette occasion pour réfléchir aux leviers dont nous disposons pour contrôler la dépense publique et la gérer.
Pour ce qui est du pilotage des recettes, une dynamique importante est due à la croissance. M. le ministre a rappelé à ce propos le débat qui divise les économistes sur l’élasticité, à savoir si elle est inférieure ou non à 1. À ce sujet, l’Assemblée souhaiterait que la Direction générale du Trésor mette à sa disposition un peu plus d’outils afin d’évaluer plus en amont cette élasticité.
Concernant les dépenses fiscales, l’État a tenté ces dernières années d’en réduire le rythme mais, de par leur nature, elles restent compliquées à piloter. La loi de programmation a fixé un objectif de stabilisation en valeur à 70,8 milliards d’euros alors qu’elles ont atteint 72 milliards en 2013. Notre commission a ouvert un débat à ce sujet.
Enfin, notre commission s’est interrogée sur le renforcement des normes de dépenses par leur élargissement à certains comptes d’affectation spéciale, ce qui répondrait à une recommandation de la Cour. Elle s’est aussi interrogée sur le niveau des restes à payer dans le budget de l’État et les dépenses imprévues – je pense au particulier aux OPEX qui pèsent sur le budget de la défense.
Je vous proposerai, pour conclure, mes chers collègues, d’adopter, comme l’a fait la commission des finances, le projet de loi de règlement pour 2013 qui, comme vous le savez, est une loi de constatation d’un résultat comptable mais surtout l’occasion de dresser un bilan. Les objectifs ont été tenus, grâce à une gestion très sérieuse de la dépense publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Permettez-moi une fois de plus, mes chers collègues, de regretter les conditions d’examen de cette loi règlement. Vous l’avez dit, madame la rapporteure générale, un certain nombre de réunions et d’auditions se sont tenues mais nous passons à peine deux heures à analyser l’exécution 2013. Je le dis chaque année, c’est insuffisant. La commission n’a pu organiser que deux auditions au titre des rapports annuels de performance, l’une se rapportant à la défense, l’autre aux aides aux logements. Sans vouloir polémiquer, j’insiste sur la nécessité de passer plus de temps à analyser l’exécution des comptes de l’année précédente.
L’exécution de 2013 est très intéressante et instructive. M. le ministre, comme Mme la rapporteure générale viennent d’en faire une présentation flatteuse, voire complaisante.
On y trouve du bon mais aussi du moins bon, quand ce n’est pas du franchement inquiétant.
Commençons par les points positifs. Le solde s’est amélioré puisque le déficit public est passé de 4,9 à 4,3 % du PIB, soit 0,6 point de moins et sur le budget de l’État, le déficit diminue de 12 milliards d’euros. Tous ces chiffres sont exacts mais une fois ceci dit, nous devons les comparer avec la trajectoire fixée par la loi de programmation pluriannuelle que la majorité a votée en décembre 2012 – je m’étonne que vous n’ayez pas fait cette comparaison, madame la rapporteure générale, vous qui avez un esprit scientifique. Or, nous sommes très éloignés de l’objectif fixé pour 2013, qui était de 3 % du PIB !
Quant au solde structurel, notion que vous adorez, nous sommes également très loin – 1,1 point d’écart –, à tel point que nous devons enclencher le mécanisme de correction prévu par la loi organique de fin 2012, lors d’une nouvelle loi de programmation à l’automne prochain. Vous auriez dû le souligner.
Je suis inquiet car de tels écarts en exécution sur 2013 nous ôtent tout espoir aujourd’hui de réaliser les objectifs de 2014. D’ailleurs, vous-même avez prévu en janvier un déficit de 3,6 points pour 2014. En avril, cette prévision est passée, dans le cadre du programme de stabilité, à 3,8. La Cour des comptes et, très modestement, le président de la commission des finances, vous assurent que nous achèverons l’année au moins à 4.
Vous me répondrez que l’important est de ne pas franchir la barre des 4,3 car il faut conserver une petite diminution, même infime, de déficit par rapport à 2013. Regardons la réalité en face : je m’étonne que, ni le ministre, ni la rapporteure générale, n’ait évoqué la question de la dette.
Notre dette, fin 2013, dépasse les 94 % du PIB. À raison d’une aggravation de 3 ou 4 % par an, elle franchira les 100 % du PIB fin 2015, et nous n’aurons pas atteint l’objectif de 3 % de déficit ! C’est inéluctable.
Par ailleurs, même si ce solde a diminué, il faudrait descendre à 1 % pour que le déficit stabilise la dette par rapport au PIB. Nous en sommes encore très loin ! Voyez le déficit primaire. Nous sommes le seul pays européen, avec la Grèce, a être encore en déficit primaire. Nous avons beau effacer les intérêts, faire du passé table rase, nous continuons malgré tout à dépenser plus que ce que nous gagnons. Comment ne pas s’inquiéter dans ces conditions ? Si nous franchissons la barre des 100 %, nous entrerons dans une zone dangereuse, où les marges de manoeuvres seront confisquées par les frais financiers, surtout si les taux d’intérêt devaient augmenter, et où, insidieusement, les agents économiques, qu’il s’agisse des entreprises ou des ménages, adopteront face à une dette aussi importante des comportements de précaution, d’épargne. L’entreprise n’investira plus, le ménage différera ses dépenses. Nous devons absolument éviter cette situation à notre pays.
Vous avez déclaré qu’un effort avait été consenti sur les dépenses. Je ne le nie pas car c’est la première fois que la dépense publique, dans son ensemble, n’évolue que de 2 % en valeur. Vous auriez cependant pu ajouter que le PIB, lui, qui représente la richesse, n’augmente que de 1,1 %.
Nous en arrivons à une situation très inquiétante : notre dépense publique, entre 2012 et 2013, d’exécution à exécution, passe de 56,9 à 57,4 % du PIB, ce qui est notre record historique ! Cela n’était jamais arrivé en France ! C’est de surcroît un record au niveau européen et probablement mondial ! Nous avons fait des efforts mais ils n’ont pas été suffisants. Pourquoi ? Regardons la situation un peu plus en détail. Vous avez eu raison, monsieur le ministre, de souligner que, par rapport à la loi de finances initiale, sur le périmètre « zéro valeur », une économie de 144 millions a été réalisée. Je reconnais que cet effort n’a pas été réalisé dans le passé.
Vous avez eu raison. Vous ne l’avez pas souligné, mais je tiens à le faire parce que c’est une performance remarquable.
D’exécution à exécution, le budget de l’État, toutes dépenses confondues, ne progresse que de 600 millions. C’est une bonne orientation, car ce montant s’élevait auparavant à plusieurs milliards.
Mais à y regarder de plus près, que s’est-il passé ? En réalité, l’économie, énorme, se fait sur les frais financiers. Car les frais financiers, dans le budget de l’État, qui porte l’essentiel de la dette, ce sont 44,9 milliards d’euros en 2013, contre 46,3 milliards d’euros en 2012.
Entre-temps, l’endettement de l’État a augmenté de 80 milliards. Autrement dit, plus je m’endette, moins cela me coûte ! Je vous pose la question, chers collègues : cela peut-il durer ? Est-il soutenable, à long terme, de s’endetter toujours plus et de payer toujours moins, en matière de frais financiers ? Bien sûr que non !
Par conséquent, nous devons regarder les choses de plus près en matière de dépenses. Et quand on observe l’exécution infra-anuelle de 2013, il y a de quoi être inquiet ! Ce que je vais dire était vrai il y a deux, trois ou quatre ans. Je le disais déjà à l’époque…
…et je le redis aujourd’hui. Nous avons mis en place une régulation budgétaire par le biais de mises en réserve de crédits, à hauteur de 6 % sur tout ce qui n’était pas masse salariale, soit 7 milliards d’euros. Comment se fait cette régulation budgétaire ? On prend tout bêtement un pourcentage – c’est la technique du rabot –, que l’on applique ensuite à ce que l’on appelle, dans le jargon budgétaire, les dépenses pilotables, c’est-à-dire ce sur quoi il y a une marge. Cela conduit à annuler essentiellement des crédits d’investissement. Ainsi, d’exécution à exécution – en 2012 et 2013 –, l’investissement de l’État a encore baissé. De 11 milliards, on passe à 10 milliards. Jamais l’État n’a aussi peu investi dans notre pays !
Souvenez-vous, chers collègues, nous l’avons vu lors de la loi de finances rectificative, fin 2013 : quels crédits ont été annulés ? Les transports ont été amputés de 400 millions, alors qu’il n’y a plus d’écotaxe, et la défense de 650 millions – autrement dit, la loi de programmation militaire n’est plus respectée. Cela ne peut pas continuer ainsi !
Vous avez parlé d’amélioration du solde structurel et d’efforts structurels. Pour ma part, je rejoins la Cour des comptes, qui dit en toute honnêteté que l’amélioration constatée est due à un effort structurel qui relève du jamais vu, mais qui a porté à 90% sur les augmentations d’impôts, et seulement à 10% sur les dépenses.
Car pour ce qui concerne les dépenses d’intervention, la masse salariale, les frais de fonctionnement continuent d’augmenter.
J’en viens aux recettes. Monsieur le secrétaire d’État, je pense que vous sous-estimez la gravité de la situation. Vous n’avez évoqué, dans les moins-values, que l’impôt sur les sociétés.
Je ne suis pas d’accord avec vous, monsieur le secrétaire d’État. Pour moi, l’élément essentiel, là où s’est produit un changement structurel très inquiétant, c’est l’impôt sur le revenu, et vous n’en avez absolument pas parlé. Au passage, arrêtons de parler du gel du barème pendant deux ans ! Le gel du barème est annuel. Le gouvernement Fillon a pris cette décision pour 2012, le gouvernement Ayrault pour 2013. Nous gagnons tous en crédibilité à dire les choses telles qu’elles sont.
S’agissant de l’impôt sur le revenu, il y a une moins-value de 5 milliards d’euros. Surtout – ce chiffre est très important parce que souligné par la Cour des comptes – la croissance spontanée de nos recette fiscales – c’est-à-dire à législation constante, sans mesures nouvelles – est négative, pour la première fois dans notre histoire, avec une baisse de 4,6 milliards.
Pour conclure, monsieur le président, je vais faire des propositions.
Concernant l’impôt sur le revenu, il faut absolument faire un focus. La rapporteure générale l’a proposé il y a un instant, il faut que nous essayions de comprendre ce qu’il se passe. Je pense qu’il y a des modifications de comportement, notamment au sein des professions indépendantes et dans le haut du barème.
Vous vous réjouissez d’avoir réintroduit de l’équité. Cela étant, je lisais récemment l’excellent rapport de notre collègue Dominique Lefebvre, qui indique que 1 % des ménages paie 48 % de l’impôt sur le revenu. Cet impôt est hyperconcentré, on ne peut pas aller plus loin.
Monsieur le secrétaire d’État, j’espère que nous aurons très rapidement le rapport, que j’attends avec impatience, pour voir ce qu’il s’est passé en 2012. Je pense au départ de certains de nos contribuables, mesuré à l’aune de l’impôt sur le revenu, de l’ISF et de l’exit tax.
S’agissant de l’impôt sur les sociétés, les mesures nouvelles n’ont pas eu le rendement attendu, que ce soit le plafonnement de la déductibilité des intérêts ou le nouveau calcul sur les plus-values sur titres de participation.
Je suis prêt à ce que la commission des finances s’associe au Gouvernement pour voir si, d’un point de vue structurel, il n’y a pas un changement de comportement chez les contribuables, qu’il s’agisse des ménages ou des entreprises.
Nous sommes tous d’accord sur un point, M. Valls le premier : à 46,2 points de prélèvements obligatoires, niveau record historique atteint en 2013, on ne peut plus augmenter les impôts. On peut seulement en améliorer l’efficacité et les redéployer. Par conséquent, il faut veiller à ce que ces impôts rentrent correctement et, si nécessaire, il faut faire des ajustements.
J’ai essayé de faire une intervention constructive et équilibrée. Nous allons dans la bonne direction, mais l’effort qui reste à faire est extrêmement important, et j’estime que vous ne prenez pas suffisamment la direction des réformes structurelles sans lesquelles il n’y a aucun espoir de maîtriser la dépense publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons pour objectif, depuis le début de la législature, de travailler à l’assainissement des finances publiques.
La première étape a été le projet de loi de finances rectificative de 2012. Nous avions l’impérieuse nécessité de stopper une gabegie certainement accentuée par un gouvernement et un ancien Président, davantage en campagne qu’aux commandes de l’État, dans les derniers mois de son mandat : 1 850 milliards d’euros de dettes, soit plus de 90 % de la richesse nationale, un taux de chômage élevé et des inégalités nourries par une décennie de mesures fiscales favorables aux plus aisés.
À en écouter certains, on a l’impression que nous sommes en place depuis plus de dix ans. Pourtant, le budget 2013 est réellement notre premier budget pensé, préparé, discuté et exécuté par le Gouvernement de Jean-Marc Ayraut et la majorité.
Notre volonté d’assainir les finances se concrétise. La réalisation du budget 2013 le prouve, n’en déplaise aux adeptes des critiques trop systématiques qui laisseraient à penser que nous ne serions pas sur la bonne voie.
Nous avons pour objectif d’assurer la sauvegarde, sur le long terme, de nos services publics et de notre modèle social. Pour cela, nous devons poursuivre les efforts de toutes et tous, à juste proportion des possibilités de chacun.
Les efforts entrepris seulement depuis dix-huit mois commencent à payer. Les déficits se réduisent. Le déficit de l’État marque une diminution de 12,3 milliards d’euros par rapport à 2012, contre 3,6 milliards d’euros de 2011 à 2012. Le déficit public a atteint 4,3 % du PIB en 2013, contre 4,9 % en 2012 et 5,2 % en 2011.
Voilà une belle observation, madame Dalloz, que vous auriez dû mettre en pratique bien plus tôt !
Le déficit structurel 2013 est à un niveau bas, proche de celui de 2002, alors que la croissance était faible et limitée à 0,3%.
La dépense a été maîtrisée en 2013, la Cour des comptes le souligne dans son rapport. Les taux d’intérêt particulièrement bas ont contribué en partie à cette maîtrise, mais ils sont aussi le signe incontestable de la confiance des créanciers de l’État dans sa signature, mais aussi dans la politique économique et budgétaire menée.
Cependant, la dégradation de la conjoncture économique et son impact sur les recettes publiques et sur leur élasticité, ont eu une incidence sur le déficit structurel, qui aurait été bien inférieur sans cela. Au total, les recettes ont été inférieures aux prévisions, sans pour autant mettre à mal la situation.
Jusqu’en 2012, un ensemble de mesures générales pesant de manière indifférenciée sur tous les ménages – et simplement injustes – ont été prises. J’en rappellerai quelques-unes, monsieur le président de la commission des finances : le gel du barème de l’impôt sur le revenu, la suppression de la demi-part des veuves, la hausse des taxes sur les contrats d’assurance maladie solidaires et responsables
Depuis le début de cette législature, les mesures adoptées ont, certes, mis chacun à contribution, sans passe-droit, mais l’effort demandé a été proportionné aux revenus de chacun. Nous avons rétabli l’ISF, qui avait été vidé de sa substance par la réforme de 2011. Nous avons rétabli les droits de succession et de donations, que la loi TEPA avait fortement minorés. Nous avons instauré une tranche d’impôt sur le revenu à 45 %. Nous avons abaissé le plafond du quotient familial, qui profite très largement aux ménages les plus aisés quand les ménages les plus modestes n’en profitent pas du tout.
Enfin, pour que personne n ’échappe à l’effort demandé à tous, nous avons renforcé les moyens de la lutte contre la fraude fiscale, avec le succès que l’on sait. Les temps ont bien changé.
Cette politique nous a permis, en faisant payer l’impôt par tous, d’en répartir plus justement la charge en 2013. Les mesures que nous avons adoptées depuis le début de la législature ont effacé les allégements consentis aux plus aisés pendant une décennie. La meilleure preuve du rétablissement de la progressivité du système fiscal est le rendement des impôts qui assurent la redistribution entre les ménages : l’impôt sur le revenu a retrouvé son niveau d’avant 2002. L’ISF, dont l’allégement était totalement incompréhensible, alors que des efforts étaient demandés à tous, a atteint, en 2013, un rendement de 4,5 milliards d’euros.
Nous avons augmenté les prélèvements obligatoires pour réduire le déficit, c’est vrai : mais ces augmentations ont permis de renforcer la progressivité du système fiscal, de demander une plus grande contribution à ceux qui ont davantage de revenus et de patrimoine. Dans le même temps, les augmentations sur les plus aisés s’accompagnent d’allégements pour les plus modestes, et nous allons poursuivre dans ce sens en 2014. Du début à la fin de la législature, notre politique fiscale restera conforme à notre objectif : rétablir la progressivité du système fiscal pour réduire les inégalités : 2013 a été le deuxième acte, après le PLFR 2012.
La réduction de la dépense n’a pas été forcément synonyme de retrait de l’État ou de réduction de notre protection sociale : il existe d’importantes marges d’économies dans tous les champs de l’action publique. Ces économies doivent être faites pour réduire le déficit, mais également pour que chacun constate que l’argent public est employé au mieux, sans gaspillage. Nous devons étudier plus sérieusement cette question. Des doutes ont été émis quant à l’impact potentiel de ces économies sur la croissance et l’emploi, mais le poids de la dette a une incidence particulièrement néfaste.
Il faut se souvenir que la politique économique et budgétaire de 2013 menée par le Gouvernement a permis la création de postes dans l’éducation nationale, la formation des enseignants, l’accompagnement de la réforme des rythmes scolaires, l’instauration du CICE, les emplois d’avenir, le rétablissement de tribunaux sur le territoire, le nouveau programme d’investissements d’avenir, l’augmentation des bourses pour les étudiants issus des familles modestes, le soutien aux plus démunis, et bien d’autres mesures longues à énumérer.
Monsieur le président, mes chers collègues, nous faisons face, depuis 2012, à une situation budgétaire historiquement dégradée, qui est le résultat des politiques menées pendant dix ans. Notre responsabilité est de poursuivre l’assainissement des finances publiques : nous remplirons cette tâche dans la justice. Aujourd’hui, je vous propose d’adopter ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame le rapporteur, mes chers collègues, tout va très bien, madame la marquise !
La dette augmente de quatre-vingt-quatre milliards d’euros, réjouissons-nous ! Êtes-vous aveugles ? Sourds, plutôt !
Au mois de décembre dernier, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2013, je vous ai mis en garde contre le dérapage des recettes fiscales prévues. J’avais alors calculé une baisse de recettes fiscales de seize milliards d’euros quand vous annonciez que vous alliez augmenter les recettes de vingt. Je n’obtins à l’époque aucune réponse sur le fond de ma démonstration, tout juste un haussement d’épaules et une remarque désobligeante. En effet, le ministre des finances de l’époque, M. Moscovici, dérogeant à la courtoisie légendaire de son corps administratif d’origine auquel j’ai également l’honneur d’appartenir, avait dit de mon intervention qu’elle était d’un style assez inimitable qu’il ne s’efforcerait donc pas d’imiter et qu’il me la laissait volontiers !
J’ignore s’il fallait m’imiter, en revanche il aurait bel et bien été préférable de m’écouter, au moins parce que j’ai été chargé pendant cinq ans de toute la partie du rapport de la Cour des comptes portant sur les recettes fiscales et m’y connais quand même un peu à ce titre.
À vous qui venez de lui succéder, monsieur le secrétaire d’État, dans cette éminente fonction, je vous recommande surtout de ne pas imiter sa politique. En effet, la Cour des comptes nous donne aujourd’hui raison car son rapport publié fin mai signale une baisse de recettes de 14,6 milliards d’euros. Vous nous avez très professionnellement expliqué, monsieur le secrétaire d’État, que tout cela est dû à l’élasticité des recettes à la croissance et vous avez parfaitement raison, mais fallait-il tenter d’en donner une définition scientifique ?
Laissez-moi vous faire une confidence : l’élasticité, malheureusement, on ne la connaît qu’ex post !
En réalité, personne ne sait pourquoi ni comment les recettes fiscales réagissent à la croissance comme elles le font.
En somme, on ferme le ban et on arrête de creuser !
Telle est la réalité des faits, monsieur le secrétaire d’État. Si vous vous intéressez à l’élasticité fiscale, vous constaterez d’ailleurs qu’elle était maximale lors de la mise en oeuvre du paquet fiscal de Nicolas Sarkozy.
Elle a alors atteint, curieusement, 2,5 % voire 3 %. Peut-être réagit-elle mieux quand on baisse les impôts ? Quoi qu’il en soit, la nette particularité de cette année, c’est que la TVA, l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, c’est-à-dire les trois grandes recettes de l’État, ont toutes les trois réagi négativement aux hausses d’impôt décidées par votre majorité ! L’expression « trop d’impôt tue l’impôt » a souvent été citée dans cet hémicycle mais je la cite à nouveau, car jamais gouvernement n’avait aussi bien illustré l’avertissement de Laffer !
Depuis deux ans, le Gouvernement et la majorité ont tout simplement rompu l’élastique fiscal de la France au nom d’un dogmatisme idéologique inconsidéré. Vous ne nous avez pas écoutés et ce sont les Français qui en paient la note ! Casser le ressort fiscal ne vous aura pas suffi, chers collègues de la majorité. En effet, vous avez asphyxié l’économie et vous vous voyez contraints, deux ans après votre arrivée au pouvoir, de faire marche arrière ! La loi ALUR en est un parfait exemple. Après avoir forcé le Parlement à examiner le texte, vous vous rendez compte que ce que dénonçait l’opposition est vrai. Le Gouvernement choisit aujourd’hui d’appliquer la loi « avec réalisme et pragmatisme », selon les termes de M. le Premier ministre, c’est-à-dire peu ou pas. Pourquoi ? Tout simplement en raison de son effet mortifère dont vous avez pris conscience : le secteur de la construction est en berne, les propriétaires s’appauvrissent et les locataires n’ont plus les moyens de se loger.
Une nouvelle expression me vient à l’esprit pour qualifier votre politique économique. Je l’emprunte à Ronald Reagan, ce qui plaira dans les rangs d’extrême-gauche : « Tout ce qui bouge, on taxe. Ce qui bouge encore, on réglemente. Quand ça ne bouge plus, on subventionne ». Tel est le credo de la politique actuelle du Gouvernement. Vous ne nous avez pas écoutés et ce sont les Français qui en paient la note. Plusieurs entrepreneurs de mon département m’ont tout récemment confié leurs très grandes inquiétudes à propos de la rapide détérioration de la situation microéconomique. En 2013, la moyenne des chiffres d’affaires en Vaucluse a baissé de 15 % et encore de 10 % au cours du premier semestre 2014. Un grand hypermarché de marque nationale a ainsi vu pour la première fois ses ventes alimentaires reculer de 2 %, ce qui est énorme pour le secteur.
Les clients étrangers mettent en vente leurs propriétés. Les entreprises ont beaucoup de mal à payer leurs charges et compriment tous leurs budgets en conséquence. Le coût du travail contraint certaines PME à cesser toute activité et d’autres à privilégier le travail non déclaré. Toutes diminuent leur masse salariale de 20 % à 40 % et il ne se passe pas une journée sans qu’une entreprise de ma circonscription n’annonce un plan social ou une réduction d’effectifs. Vous ne nous avez pas écoutés et ce sont les Français qui en paient la note.
Le meilleur exemple de la rupture de l’élastique fiscal et économique, c’est le produit de la lutte contre la fraude fiscale, annoncé à grand renfort de communication. Voici un scoop à son propos : c’est un échec ! Je renvoie M. Fauré, qui en parlait à l’instant, à la page 88 du dernier rapport de la Cour des comptes. Selon la Cour, si la loi de finances initiale prévoyait un milliard d’euros de recettes au titre du renforcement de la lutte contre la fraude fiscale et bien que les dossiers en cours de traitement représentent un milliard d’euros, comme vous l’avez d’ailleurs récemment annoncé, monsieur le secrétaire d’État, aucun euro n’est effectivement rentré à ce titre dans les caisses de l’État.
La cagnotte annoncée est en réalité très légère. Vous ne nous avez pas écoutés et ce sont les Français qui paient la note. En fin de compte, quel est le résultat d’une telle orientation fiscale ? Que le manque à gagner sur les recettes soit peu ou prou égal au dérapage du déficit en 2013 n’a rien d’anodin. Du coup, vous vous êtes empressés de diminuer les impôts, chers collègues de la majorité, mais il était déjà trop tard, le mal était fait ! La dette atteint des proportions énormes et on nous prête par peur de voir la France chuter en emportant une partie de l’économie financière européenne avec elle !
Voulez-vous un exemple ? Peu de temps après l’adoption du budget 2014, nous avons constaté un début de froncement de sourcil des agences de notations.
C’est ce froncement qui vous a obligés à imaginer dans la précipitation le pacte de responsabilité. Il suffit de constater la coïncidence des calendriers ! Le 8 novembre 2013, l’agence Standard
Cela prêterait à rire si plusieurs dizaines de milliers de Français ne souffraient pas de cette politique économique et fiscale. Malheureusement, nous allons payer chèrement le dogmatisme de vos deux premières années de gouvernement, chers collègues socialistes, qui ont causé à notre économie des dégâts irréversibles.
Je disais en commençant que vous être sourds et aveugles. Vous pouvez vanter avec raison la rigueur de votre politique en matière de dépenses, madame la rapporteure générale, car vous avec en effet réduit les dépenses. Mais une politique de dépenses intelligente ne sert strictement à rien, car pour un milliard d’euros que vous économisez en dépenses, vous en perdez trois en recettes pour la raison que le moteur économique de la France est cassé. En d’autres termes, une bonne politique ne se juge pas uniquement à la dépense, qui est l’alpha et oméga de l’orthodoxie professée par certains, mais au résultat final, c’est-à-dire notre déficit, notre solde et notre dette. À cette aune, madame le rapporteur, nous nous approchons plus d’un match Brésil-Allemagne que d’une véritable victoire économique !
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de règlement est intéressant car il constitue le constat d’échec de la politique que vous avez menée entre votre arrivée au pouvoir en 2012 et aujourd’hui. C’est d’ailleurs cet échec qui explique le début de renversement de votre politique économique et budgétaire. Si en 2012 vous pouviez vous cacher derrière l’excuse de l’héritage, pour l’année 2013 vous avez quelque mal à réemployer l’argument. La situation demeure très grave. La croissance, malgré votre optimisme, est restée en berne.
Je me permettrai de rappeler les propos de notre collègue Pierre-Alain Muet qui déclarait le 19 décembre 2012 à propos des perspectives de croissance pour 2013 que « nous risquons d’avoir une surprise l’an prochain, la croissance peut tout à fait se situer autour de 0,8 % et pourrait même être supérieure à ce taux ». Nous savons ce qu’il en a été, la surprise a été en sens inverse et la croissance n’a pas dépassé 0,3 %. Point n’était besoin d’être grand clerc, néanmoins, pour savoir que les hypothèses retenues étaient parfaitement déraisonnables !
D’ailleurs, les résultats en matière de déficit public sont tout aussi inquiétants. Rappelez-vous, mes chers collègues, l’engagement no 9 du candidat Hollande promettant de le ramener à 3 % en 2013 !
Devenu Président de la République, il a renoncé à cet objectif dès la formulation du programme de stabilité pour 2013 en obtenant de la Commission européenne un report de deux ans. Or, comme je vais vous le démontrer, il est rigoureusement impossible d’atteindre un tel objectif en 2015. En effet, vous avez révisé la prévision de déficit à 3,7 % du produit intérieur brut puis 4,1 %, chers collègues de la majorité, et il s’est élevé en fin de compte à 4,3 %. Dès lors, en dépit du sursis, comment voulez-vous atteindre l’objectif de 3 % en 2015 ? Il faudrait pour ce faire redescendre d’un pas qui est complètement déraisonnable ! Quant à la baisse des déficits publics, de 0,6 % du PIB car nous sommes passés de 4,9 % du PIB à 4,3 %, comment a-t-elle été obtenue ?
M. le président de la commission en a dit un mot tout à l’heure, elle a été obtenue par une hausse massive des impôts de 0,9 % de PIB. Quant aux dépenses, elles ont continué à augmenter par rapport à la richesse nationale, de 0,4 % du PIB. À l’absence complète de rigueur en matière de dépense s’ajoute une baisse des recettes.
Et ce n’est pas fini ! En effet, la dette a également battu tous les records en 2013 et a augmenté de 1 300 euros par Français. Elle s’élève maintenant à 1 925 milliards d’euros, soit 93,5 % du PIB et dépassera probablement 2 000 milliards d’euros avant la fin de l’année 2014. Sur le front des recettes, le vieil adage selon lequel « trop d’impôt tue l’impôt » s’est largement vérifié.
En effet, les recettes du seul budget de l’État ont augmenté de 15,6 milliards d’euros en 2013, majoritairement sous l’effet de mesures nouvelles. L’ancien Premier ministre avait promis le 27 septembre 2012 que neuf Français sur dix seraient épargnés par les hausses d’impôt, mais en fait ce sont bien les classes moyennes qui ont payé la majorité des 14 milliards d’euros d’impôts nouveaux. Je rappellerai quelques chiffres. Six contribuables sur dix ont été touchés par le gel du barème de l’impôt sur le revenu, soit seize millions de foyers. Vous nous en imputez la responsabilité, chers collègues socialistes, mais c’est bien vous qui l’avez maintenu !
Si vous étiez contre, et vos collègues alors dans l’opposition l’étaient, car vous n’étiez pas vous-même député, pourquoi ne pas l’avoir dégelé dès votre arrivée aux affaires, comme vous aviez le pouvoir de le faire ?
Sourires.
La position de l’actuelle majorité sur ce point a quelque chose de quasiment schizophrénique. Citons une deuxième mesure : 95 % des 9,5 millions de salariés effectuant des heures supplémentaires ont été touchés par la fin de leur défiscalisation. Il s’agit de ménages modestes et non de riches. D’ailleurs certains d’entre vous, chers collègues de la majorité, reconnaissent en privé qu’il s’agit d’une terrible bêtise, mais maintenant c’est trop tard !
Citons une troisième mesure : 7,5 millions de retraités imposables ont vu leur retraite amputée de 0,3 %. Sont-ce des riches ? Nullement ! Quant au relèvement du forfait social sur la participation et l’intéressement de 8 % à 20 %, excusez du peu, il a pénalisé 8,8 millions de salariés du secteur privé, soit deux sur trois, qui profitaient chaque année du bénéfice des systèmes d’investissement ou de participation et qui perdront en moyenne 500 euros. Cela, qui l’a fait ?
Il est donc clair que vous avez amputé le pouvoir d’achat des Français. En effet, en 2013, la baisse du pouvoir d’achat a été de 1,9 % par famille, pour l’essentiel, à cause de l’incroyable augmentation des prélèvements obligatoires sur les familles, notamment les familles moyennes et modestes.
Mes chers collègues, cette augmentation considérable, ce ce matraquage fiscal a été non seulement injuste, mais aussi inefficace sur le plan économique.
Le groupe UDI vous avait avertis…
…mais vous n’avez pas voulu nous écouter. Et les chiffres aujourd’hui vous donnent tort.
Pourquoi les recettes fiscales n’ont-elles augmenté que de 14,6 milliards d’euros alors que vous attendiez quasiment le double, y compris la protection sociale ? Comment cela s’explique-t-il ? Au groupe UDI, nous sommes de ceux qui pensons qu’il faut arrêter de parler de croissance potentielle. Les hypothèses que vous retenez sont toujours totalement surestimées. Ainsi avez-vous retenu des hypothèses allant jusqu’à 1,5% ou 1,6 % alors que l’estimation de la Commission elle-même était de 1,1 % au maximum. Et si sur la longue période, la croissance atteint 1%, ce ne sera déjà pas si mal !
Nous vous avions dit également que la chute de la croissance potentielle était liée au sous-investissement. Or, l’investissement, loin de se redresser, est en baisse. Tant qu’il ne sera pas reparti, il ne pourra y avoir de reprise de la croissance potentielle. Et pour que l’investissement reparte, il faut que les entreprises gagnent leur vie. Or, les marges des entreprises françaises sont les plus faibles de toutes les entreprises européennes.
D’après les chiffres de votre rapport, madame la rapporteure générale, le différentiel entre les prévisions de croissance et la réalisation n’explique que 3 milliards. Comment s’explique donc le reste ? Déjà, il y a un dérapage des dépenses fiscales. Vous vous souvenez sans doute que le programme du parti socialiste prévoyait de baisser de 50 milliards la dépense fiscale, laquelle s’élevait à 72 milliards. À lire cela, tout le monde avait éclaté de rire. Une fois arrivés au pouvoir, vous avez toutefois fait montre d’un peu plus de sérieux et n’avez plus envisagé que de réduire cette dépense de 3 milliards. Et de combien a-t-elle diminué – hors CICE bien sûr, car en réalité elle a augmenté de 8 milliards ? De 500 millions seulement. Pourquoi ? C’est cela qu’il faudrait développer dans votre rapport, madame.
J’en viens aux 8 milliards restants, car il reste en effet un écart de 8 milliards à expliquer. On nous dit que l’on ne sait pas très bien à quoi il tient. Eh bien, je vais vous donner, moi, quelques éléments de réponse.
S’agissant tout d’abord de l’impôt sur les sociétés, il faut compter avec l’optimisation fiscale bien sûr. Quand le taux de l’impôt sur les sociétés est fixé à 38 %, soit le plus élevé de toute l’Europe, que font les grands groupes internationalisés ? Permettez-moi ici de vous raconter une anecdote, chers collègues. Je rencontre un vieil ami, directeur financier d’un grand groupe…
…qui a bien sûr son siège au Luxembourg. Je demande à cet ami quelle est l’incidence pour son groupe de l’augmentation de 33 % à 38 % du taux de l’IS. Il me répond : « Mais aucune, Charles. Nous ne payons plus d’impôts en France. Aucune de nos filiales françaises ne fait de bénéfices. Tous les bénéfices sont regroupés au Luxembourg et sur l’ensemble consolidé, nous ne payons que 8 %. »
« Vous pouvez continuer à augmenter le taux de l’IS, a poursuivi cet ami en riant, cela ne changera rien pour nous. »
De même, madame la rapporteure générale, monsieur le ministre, pourquoi les recettes de l’impôt sur le revenu sont-elles inférieures aux prévisions ? Écoutez-vous encore la société ? Pour ma part, je ne rencontre que des gens m’expliquant par exemple qu’ils ne déclarent plus leurs employés à domicile. En effet, comme vous avez beaucoup diminué les avantages fiscaux, le travail au noir est redevenu intéressant. Se développent aussi des formes d’économie dite alternative, qui ne sont autre chose qu’un moyen de contourner le dispositif fiscal. Et plus l’impôt augmentera, plus de telles pratiques se développeront.
Voilà pourquoi les recettes diminuent. Et cela sera récurrent. Car ce qu’il s’est passé en 2013 continue en 2014.
Vous avez d’ailleurs déjà reconnu dans le collectif 5 milliards de pertes de recettes. Et, ce n’est pas moi qui le dis mais la Cour des comptes dans son rapport, les pertes s’établiront plutôt à 8, voire 9 milliards.
S’agissant des dépenses…
Je vais donc passer sur les dépenses, sur lesquelles il y aurait pourtant beaucoup à dire, pour en venir à ma conclusion.
Pour le groupe UDI, ces hausses massives et injustes d’impôts, cette pression fiscale, conjuguées à la non-stabilisation des dépenses, dont la hausse s’est poursuivie, ne pouvaient que conduire à une situation de plus en plus grave. Injuste, cette pratique s’est aussi révélée en 2013 inefficace sur le plan économique, je l’ai déjà dit. Et les 50 milliards d’euros d’économies promises par le Président de la République suite à l’échec de la politique suivie pendant deux ans, et qui sont pourtant nécessaires, ne seront malheureusement pas au rendez-vous. D’après la Cour des comptes, il n’y a pas plus de 20 milliards d’économies identifiées à ce jour.
Mes chers collègues, pour conclure, nous voyons bien que l’année 2013, pour laquelle le Président de la République avait promis aux Françaises et aux Français l’embellie, a été une triste année pour notre économie. C’est pourquoi le groupe UDI, qui vous avait mis en garde et avait fait des propositions courageuses pour redresser les comptes publics, ne peut que voter contre ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, d’année en année, nous allons de prévisions budgétaires optimistes en lois de règlement teintées de désillusions ; 2013 n’échappe pas à ce constat, hélas chronique annoncée. S’il faut saluer la capacité du Gouvernement à respecter ses objectifs en matière de réduction des dépenses publiques, voire à les dépasser, nous nous devons de souligner que cela n’a pas que des conséquences positives. En effet, si les dépenses nettes de l’État sont inférieures de 4 milliards aux crédits ouverts, et, plus significatif, si ces dépenses sont en légère diminution par rapport aux prévisions 2012, la maîtrise des dépenses n’est bénéfique qu’en apparence et ne traduit pas de réforme structurelle. Ce ne sont pas les dépenses de fonctionnement qui diminuent, mais les dépenses d’investissement. C’est bien là que le bât blesse. Comment préparer l’avenir, en particulier l’économie du futur, si on rogne sur les investissements ?
L’élément le plus marquant du budget 2013 restera bien celui de moindres rentrées fiscales : deux fois moins que prévu, soit un défaut de recettes de 14,7 milliards d’euros, répartis de manière à peu près égale entre les taxes sur les sociétés, l’impôt sur le revenu et la TVA. Ce montant est très important et il explique en grande partie le fait que le déficit s’élève à 4,3 % au lieu des 3,8 % prévus initialement, et que la réduction des déficits ne soit que de 12 milliards au lieu des 24 milliards prévus.
Pour ce qui est des recettes, la Cour des comptes signale, une nouvelle fois, que les niches fiscales demeurent, ce qui contribue fortement à miter les recettes fiscales, alors que la diminution totale de la dépense fiscale devait représenter une économie initialement estimée à 3,6 milliards d’euros. Vous le savez, les écologistes ont quelques idées pour réduire l’impact de certaines niches. Puissiez-vous les entendre dans le cadre de la prochaine loi de finances !
Dans le même temps, la croissance a été plus faible d’un demi-point que prévu, s’établissant à 0,3 % au lieu de 0,8 %, ce qui représente 10 milliards d’euros.
En l’absence de collectif budgétaire et alors que l’atteinte de l’objectif d’un déficit limité à 3 % avait été reportée de deux ans, c’est l’emprunt qui, naturellement, a équilibré le budget, portant le déficit à 4,3 %.
Heureusement que la baisse des recettes a été conforme aux prévisions. En réalité, le ralentissement économique a parallèlement conduit à une moindre dépense que prévu, comme pour les prestations sociales indexées sur l’inflation, et à une baisse des taux d’intérêt, ce qui a permis de limiter l’ampleur du phénomène.
Cet écart de recettes est inquiétant dans la mesure où il ne correspond que pour un quart à la non-réalisation des prévisions de croissance, comme l’a indiqué Didier Migaud en réponse à la question que je lui ai posée en commission des finances. La proportionnalité entre recettes et PIB n’ a donc été en rien respectée pour se traduire dans le fameux indicateur d’élasticité à 1,3 en 2013. Je ne doute pas que, même si tout ne peut être prévu, les enseignements en seront tirés pour la prévision 2014.
Au motif d’une forme de volontarisme, certes louable, et d’un optimisme censé restaurer la confiance, la succession des revers, budget après budget, conduit au contraire au pessimisme et au découragement. Cette approche renforce même le sentiment d’impuissance du politique, ce qui est globalement néfaste.
L’année 2013 a par ailleurs été celle de l’entrée en vigueur du CICE. Même si celui-ci n’a été mobilisé que partiellement – 10 % sous forme d’avances pour les entreprises –, on signale déjà quelques effets pervers. La mission d’évaluation qui a débuté son travail devra nous éclairer de telle sorte que ce dispositif n’échappe pas à l’exigence de bon usage de la dépense publique, dont aucune de nos politiques ne doit se dispenser. En particulier, les choix du Gouvernement et des parlementaires devront être éclairés en fonction de l’usage qui aura été fait du CICE.
En effet, celui-ci oblige mutuellement l’État et les entreprises. Il oblige l’État à faire d’importants efforts d’économies de dépenses en s’assurant du bon usage de l’argent public, y compris les aides aux entreprises, et en restaurant la base fiscale, mitée par les niches. Il oblige l’État et ses homologues de l’Union européenne à faire adopter une trajectoire d’extinction de l’évasion fiscale et à s’engager dans une stratégie d’investissements d’avenir, en considérant que la transition écologique et énergétique n’est pas un chantier parmi d’autres, mais le coeur du renouveau économique et social, le seul à même de contribuer à la réduction des déficits, ou en tout cas de permettre des économies de fonctionnement du fait de la diminution de la consommation d’énergie, pour un montant prévu à l’avance à une échéance connue.
Il oblige l’État mais il oblige également les entreprises à faire le meilleur usage de l’argent public, notamment pour créer des emplois ; à ne pas nourrir davantage les revenus des actionnaires et des dirigeants ; à s’acquitter régulièrement des impôts qu’elles doivent en France ; à prendre solennellement la mesure de l’effort colossal entrepris en leur faveur et des conséquences sur les ménages ; à prendre en considération le fait que 250 000 emplois publics ont été perdus tandis que seuls 190 000 emplois privés étaient créés.
Je voudrais terminer par le sujet de la qualification du déficit, structurel ou conjoncturel. En effet, je m’interroge et souhaite vous faire part de mes doutes. La Cour des comptes nous indique que l’exercice 2013 aura permis de réduire le déficit structurel de 1,1 % alors que le déficit conjoncturel aura augmenté de 0,6 %, en raison, dit-elle, de la mauvaise conjoncture.
Mon trouble porte sur ce que l’on entend par déficit conjoncturel. Nous avons tendance à relativiser ce déficit au motif qu’il s’effacerait dans une meilleure conjoncture. Mais la notion fait référence à une conjoncture optimale et donc à une croissance optimale. C’est là un élément de grande fragilité. Quand on sait comment a évolué la croissance depuis quarante ans, des mythiques 6 à 7 % de la fin des années soixante-dix aux 3 à 4% du début des années quatre-vingts, puis des 2% des années quatre vingt dix au quelque 1 % depuis le début de cette décennie, on mesure que cette diminution est inexorable. Il y a donc bien quelque chose de structurel dans ce qu’il est convenu aujourd’hui de qualifier de conjoncturel. Cela doit nous inciter à beaucoup de prudence dans la relativisation du déficit conjoncturel. Je termine sur cette interrogation.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, nous examinons aujourd’hui le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013, adopté en Conseil des ministres le 28 mai dernier. Première exécution budgétaire sous la présidence Hollande, 2013 n’est pas à proprement parler une année de transition, comme le fut 2012. Il s’agit du premier exercice budgétaire plein sous une majorité de gauche depuis douze années consécutives.
Que faut-il retenir de cette exécution ? Tout d’abord, la certification des comptes de l’État par la Cour des comptes avec deux réserves de moins qu’en 2012.
Ensuite, et c’est le point le plus tangible relevé par la Cour des comptes dans son rapport « Résultats et gestion du budget de l’État en 2013 », présenté conjointement au projet de loi de règlement comme prévu par l’article 58-4 de la LOLF : la nouvelle majorité a respecté les normes de dépenses et a maîtrisé ces dernières.
C’est un fait majeur qu’il faut souligner, tant l’exercice est contraint : la croissance de la dépense n’a été que de 2 % en valeur, soit à son niveau le plus faible depuis 1998. Ainsi, l’exécution budgétaire 2013 signe une belle amélioration du niveau du déficit public, sans précédent depuis 2002 : le déficit est en effet réduit de plus de 12 milliards d’euros par rapport à 2012. Elle signe également un progrès structurel des finances publiques de l’ordre de 40 milliards d’euros, soit près de 2 points de PIB.
Les dépenses nettes sont en effet en baisse de 890 millions d’euros par rapport à l’exécution budgétaire de 2012. Dans le périmètre large intégrant la charge de la dette et les pensions, elles sont d’ailleurs inférieures de 3,5 milliards d’euros aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2013, du fait notamment de deux facteurs exogènes favorables : une moindre inflation qu’initialement envisagé par le Gouvernement et une moindre charge d’intérêts de la dette.
Notons également le rôle clé de la régulation budgétaire, avec plus de 6,6 milliards de crédits annules en 2013, dont près de 90 % sont imputés sur la réserve de précaution au 31 octobre 2013.
Enfin, dans une proportion mineure, la baisse de la masse salariale, qui plus est à périmètre constant, de 135 millions d’euros, due notamment au gel du point d’indice et à la réduction des effectifs en 2013, a favorablement pesé sur le respect des normes de dépenses.
Toutefois, cette maîtrise recouvrée de la dépense publique ne doit pas masquer l’essentiel, c’est-à-dire l’engagement sans faille de la majorité sur des secteurs stratégiques, notamment dans le cadre des contrats aidés favorisant l’emploi, des bourses étudiantes, des opérations militaires extérieures de maintien de la paix et de l’augmentation des allocations adulte handicapé et des aides personnalisées au logement, en vertu des principes d’inclusion sociale et de lutte contre la précarité.
Cette maîtrise de la dépense n’a pas non plus dispensé la France du respect de ses engagements européens : elle s’est en effet acquittée du versement, pour 6,5 milliards d’euros, de deux nouvelles tranches du Mécanisme européen de stabilité et a participé à l’augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement à hauteur de 1,6 milliard d’euros et à l’augmentation additionnelle, en cours d’exécution budgétaire, du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, pour 200 millions d’euros.
Outre l’effet combiné et conjoncturel de l’inflation moindre et des charges d’intérêts réduites de la dette en 2013, auxquelles s’ajoutent les économies de crédits affectés aux ministères, des mesures d’intérêt général et économique annoncées pour 2014, que le groupe RRDP salue, pèseront en sens inverse sur l’exécution 2014. Il en va ainsi de la stabilisation des effectifs de la fonction publique, attendue en 2014, du maintien des créations de postes prévues dans l’éducation nationale, au nombre de 60 000 d’ici 2017 et des créations de postes par redéploiement dans la police, l’administration pénitentiaire et la justice, de la baisse des effectifs des autres ministères, de la réduction des effectifs des agences de l’État à l’exception de Pôle emploi et des universités, enfin, de la revalorisation des salaires des fonctionnaires de catégorie C au 1er février, qui concerne plus de 1 600 000 agents des fonctions publiques d’État, territoriale et hospitalière, suivie d’une nouvelle augmentation de 5 points d’indice au 1er janvier 2015 pour l’ensemble des fonctionnaires de la catégorie C.
Nous nous félicitons de ces mesures annoncées par le Premier ministre, dans le respect des promesses de campagne, et veillerons à leur bonne transcription dans les textes.
Pour que leur efficacité soit mieux assurée, les économies de dépenses réalisées par ailleurs devront, à l’avenir, être mieux ciblées, plus structurelles – afin d’être pérennes et stratégiques – et mieux pilotées, notamment en direction des agences de l’État.
Je prends l’exemple de l’archéologie préventive : le Gouvernement vient d’abaisser le plafond, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2014, de la redevance d’archéologie préventive, dont la réforme est pourtant engagée depuis mars 2013 en vue de mieux couvrir les besoins de l’Institut national de recherches archéologiques préventives – l’INRAP – depuis l’ouverture à la concurrence de cette activité d’intérêt général. Cette reforme devait engendrer une recette de 20 millions d’euros annuels supplémentaires à partir de 2014, et cette redevance devait procurer à l’INRAP une recette de 122 millions d’euros.
En abaissant le plafond de cette redevance à 118 millions d’euros au profit des spectacles de variétés, le Gouvernement fait le choix d’entrer dans une logique de perfusion budgétaire chronique de l’archéologie préventive publique puisque, comme en 2013, où elle avait obtenu 10 millions d’euros en fin d’exercice, elle devra, pour être à l’équilibre en fin d’exercice, recevoir une subvention d’équilibre, ce qui ne relève d’une vision ni stratégique, ni pérenne, au-delà même du choix politique contestable du refus de la création d’un pole public archéologique rentable à terme.
Le chantier à engager, c’est celui de la modernisation de l’action publique – la MAP –, pour laquelle le Parlement, et plus particulièrement sa commission des finances, doit être mieux associé, tant au diagnostic qu’à la prise de décision, dans le respect, d’ailleurs, de la disposition adoptée par amendement parlementaire en loi de finances pour 2013.
De fait, en 2013, cette maîtrise des dépenses a plutôt pris la forme du rabot, notamment sur les investissements, en baisse de 9,5 %, ou des dépenses d’intervention, en baisse de 500 millions d’euros. Bien que quelques dispositifs majeurs aient été préservés de ce rabot, cela s’est parfois traduit par des sous-budgétisations regrettables et signalées par la Cour des comptes, s’agissant, par exemple, de l’aide médicale d’État ou de celle en direction de l’hébergement d’urgence.
J’en viens maintenant aux recettes, en forte hausse, de l’année 2013. Passons sur les prévisions de Bercy qui manquaient véritablement de prudence ou pêchaient par optimisme – comme l’on voudra –, l’écart total s’élevant à plus de 14 milliards d’euros et ce, malgré plusieurs milliards d’euros de recettes exceptionnelles exécutées, ce résultat s’expliquant principalement par un contexte macroéconomique dégradé et relativement mal anticipé par l’administration.
In fine, tout indique en effet qu’une part minime – de l’ordre de 0,15 % du PIB – de l’écart entre la prévision et la réalisation du solde structurel pourrait être directement liée au moindre impact des mesures adoptées dans le collectif de juillet 2012 et le projet de loi de finances pour 2013. Plus précisément, il s’agit de la taxe bancaire de risque systémique et de la taxe sur les transactions financières, sujets capitaux puisqu’ils concernent les questions du rendement fiscal et de la régulation financière, sur lesquels le Gouvernement, comme la majorité seront forts de propositions lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015.
Non, l’élément majeur, concernant les recettes, n’est pas l’écart entre prévision et exécution, mais bien surtout leur forte hausse nette en 2013 comparativement à 2012 : elles atteignent ainsi plus de 15,6 milliards d’euros et sont portées pour moitié par l’impôt sur le revenu.
Indéniablement, des mesures de justice ont été prises dans le collectif de juillet 2012 puis en loi de finances 2013 sur le haut du barème, tels le rétablissement de l’ISF, la tranche à 45 % ou la reforme du régime des donations.
Nous saluons néanmoins, s’agissant du bas du barème, la réduction exceptionnelle et salutaire de l’impôt sur le revenu adoptée dans le collectif 2014, que le groupe RRDP a votée.
La loi de finances pour 2013 avait déjà revalorisé de 9 % la décote pour compenser les effets du maintien du gel du barème par le gouvernement Ayrault, ce qui aurait permis à environ 366 000 foyers fiscaux d’éviter leur entrée dans l’impôt sur le revenu en septembre 2013. Malgré tout, Bercy a admis il y a six mois une forte inflation du nombre de contribuables soumis à l’impôt sur le revenu en 2013 : le nombre de ménages concernés est passé de 19,7 millions en 2011 à 20,5 millions en 2012 et 21,6 millions en 2013, soit une progression de près de 10 % en deux ans, qui ne résulte qu’en partie de la fusion récente des rôles et avis de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux.
Comme le groupe RRDP l’avait affirmé l’an passé, la part de la hausse des prélèvements obligatoires dans le redressement des comptes publics doit être revue à la baisse. C’est la démarche entreprise par le collectif budgétaire de 2014, à hauteur de 5 milliards d’euros, avec un effort parallèle de rationalisation des dépenses de fonctionnement courant, qu’il faut désormais oeuvrer collectivement à préciser.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, chaque année, quel que soit le gouvernement, l’examen du projet de loi de règlement est l’occasion pour l’exécutif de tirer un bilan qu’il s’efforce de présenter de façon positive : c’est la moindre des choses, et, pour ainsi dire, un classique du genre.
Cette année, le Gouvernement met en avant le fait que les efforts engagés en 2013 ont permis une meilleure maîtrise des dépenses publiques, qui n’ont progressé en valeur que de 2 %, une hausse des recettes d’un peu plus de 15 milliards d’euros, principalement tirée par les mesures nouvelles, et un déficit budgétaire en baisse d’environ 12 milliards d’euros.
Dans un contexte où le chômage s’aggrave dans des proportions très inquiétantes, où la situation économique reflète un climat de marasme persistant, et alors que l’INSEE table sur une croissance de seulement 0,7 % cette année, l’exercice, avouons-le, sonne un peu creux.
Nous retenons surtout que les chiffres avancés dans ce bilan sont très inférieurs aux prévisions initiales. La réduction du déficit public est bien moindre qu’annoncé. Alors que la loi de finances pour 2013 prévoyait un déficit en recul de 24,9 milliards d’euros, cette baisse n’aura atteint que 12 milliards d’euros. Pour traduire la chose en langage courant, cela signifie que les politiques conduites et l’effort demandé aux Français auront été deux fois moins efficaces que prévu.
Si l’on regarde du côté des recettes fiscales en se référant aux documents de la Cour des comptes, on constate qu’elles sont – semble-t-il – inférieures de 14,6 milliards d’euros aux prévisions inscrites dans la loi de finances initiale pour 2013 : il manque 5 milliards d’euros au titre de l’impôt sur le revenu, 6,4 milliards d’euros au titre de l’impôt sur les sociétés et 5 milliards au titre de la TVA.
Si, au réel, les recettes fiscales augmentent, c’est, là encore, dans une proportion moitié moindre que les 28 milliards d’euros initialement prévus.
Nous pourrions imputer ce décalage entre prévisions et résultats à un « manque de prudence », pour reprendre les termes choisis de la Cour des comptes. Valérie Rabault, quant à elle, impute la forte baisse de la croissance spontanée des prélèvements obligatoires – je la cite – au « ralentissement persistant de l’économie française », sans établir cependant de lien entre ce ralentissement de l’économie et la politique conduite depuis deux ans.
Sans tomber dans la caricature en établissant des liens de causalité simplistes, il n’est pas interdit de voir dans le décalage entre prévisions et résultats un témoignage du peu de pertinence des choix opérés. Depuis que la crise économique a commencé, en 2007, de nombreux économistes alertent sur le fait que la réduction à marche forcée des déficits publics en Europe produit un effet strictement opposé à celui qui est officiellement escompté. Les plans d’austérité mis en oeuvre pour atteindre cet objectif sapent toute possibilité de rebond économique, font le lit du chômage et limitent les rentrées de recettes fiscales. On ne peut donc continuer à minimiser l’impact sur la croissance des restrictions du pouvoir d’achat des couches moyennes et populaires, qu’il s’agisse de la hausse de la TVA, du ralentissement de la progression des salaires ou de l’impact récessif de la baisse des dépenses publiques qui, non seulement comprime l’activité et réduit les recettes de l’État, mais échoue, in fine, à oeuvrer au redressement des déficits publics.
Face à cette situation, la droite continue d’incriminer le niveau prétendument trop élevé des dépenses publiques qui, pourtant, ne dérapent aucunement. En effet, en tendance, de 1978 à 2012, les dépenses publiques ont diminué de 2 points de PIB, les dépenses hors intérêts de la dette – c’est-à-dire pour le service public –, ayant quant à elles diminué de 3,5 points, alors que les recettes, pour leur part, ont chuté de 5,5 points de PIB. Ce n’est donc pas le niveau de la dépense publique qui contribue à creuser les déficits : c’est avant tout le manque de recettes. Chacun s’accorde d’ailleurs à constater que la course effrénée au moins-disant fiscal opérée par la droite pendant dix ans en est à l’origine.
Souvenons-nous du rapport de l’économiste Jean-Philippe Cotis, en 2010, sur la situation des finances publiques, qui indiquait qu’en l’absence de ces baisses de prélèvements, la dette publique serait environ 20 points de PIB plus faible qu’aujourd’hui. Une telle constatation devrait nous conduire à nous montrer beaucoup plus vigilants et beaucoup plus entreprenants sur le terrain de la dépense fiscale.
Comme le soulignait M. le premier président de la Cour des comptes devant notre assemblée, les économies sur ce chapitre ont seulement atteint, l’an dernier, 500 millions d’euros, bien loin des 3,6 milliards d’euros attendus.
J’ai eu l’occasion d’insister, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, sur la nécessité de prendre à bras-le-corps la question des niches fiscales, sachant que, l’an dernier, les dix premières ont représenté près de 30 milliards d’euros, soit 40 % des quelque 70 milliards d’euros qu’elles totalisent.
Certains, dans cette assemblée, préfèrent braquer le projecteur sur les dépenses publiques. Ils voudraient, au motif que le déficit s’aggrave, imposer de nouvelles mesures de rigueur, alors que ce dont notre pays, nos entreprises, nos finances publiques ont besoin, c’est au contraire de sortir du marasme par la relance de l’activité, qui ne peut s’entrevoir sans que l’État et les collectivités territoriales n’engagent les dépenses d’investissement utiles au redressement économique. Les déficits publics ne doivent pas être le prétexte ou le faux-nez d’une stratégie de démantèlement de l’État social.
Si les hausses d’impôts des ménages aux revenus modestes et moyens, la hausse de la TVA et la renonciation à une réforme fiscale d’ampleur ont été à nos yeux des choix regrettables, soutenir l’intervention publique et la protection sociale tout en réduisant les inégalités sociales n’est pas, à notre avis, une ambition hors de portée. Elle n’est pas contradictoire avec le redressement économique : elle en est au contraire, pour ce qui nous concerne, le plus sûr moyen.
Les allégements en direction des entreprises, de surcroît sans contreparties, n’offrent en revanche aucune perspective nouvelle, y compris sous l’angle de l’assainissement budgétaire. En effet, ces allégements sont financés par une pression fiscale accrue sur les ménages, une pression sur les salaires, qui vont être tirés vers le bas, au détriment de la consommation des ménages.
Qui peut croire, à gauche, que la baisse des coûts sera synonyme de croissance retrouvée ou que les allégements des prélèvements pesant sur les entreprises iront nécessairement à l’emploi et à l’investissement ? Comme le soulignait récemment Pierre Khalfa, de la fondation Copernic – je le cite – « un employeur n’embauche pas parce que vous baissez les charges, l’effet est marginal. Il crée ou maintient de l’emploi s’il y a de la demande, s’il y a de la croissance. »
L’examen des comptes de l’année 2013 sonne comme un nouveau signal conduisant non seulement à réviser les hypothèses trop optimistes qui sont les vôtres mais, surtout, à changer de logiciel. Ainsi que le rappelait Henri Sterdyniak, directeur du département « économie de la mondialisation » de l’Observatoire français des conjonctures économiques, ceux qui prétendent que les baisses des contributions des entreprises créent mécaniquement de l’emploi se fondent, – je le cite – « sur des travaux américains anciens que démentent toutes les analyses empiriques. Il est à tout le moins difficile d’estimer l’élasticité de ces mesures sur l’emploi. »
Pour 2014 se profile une nouvelle étape de l’austérité avec la baisse du pouvoir d’achat des retraités et des fonctionnaires et une réduction sans précédent des dépenses publiques. Ces mesures risquent d’aggraver encore les conditions de vie de nos concitoyens, de faire reculer non seulement l’investissement public, notamment celui des collectivités territoriales, mais aussi l’investissement des entreprises, la croissance, donc l’emploi.
Cette politique économique et budgétaire que vous préconisez prend désormais directement le contre-pied des engagements pris par le Président de la République devant les Français. Le respect de ces engagements aujourd’hui pourrait, au contraire, contribuer à ressouder la gauche, réconcilier la gauche et le peuple, tant au Parlement que dans le pays. Ce n’est malheureusement pas la voie que vous avez choisie. Nous voterons donc contre ce projet de loi de règlement.
C’est dommage, monsieur Charroux !
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous voici réunis pour examiner l’exécution du budget 2013 et constater les résultats de cette gestion.
Comme un certain nombre de collègues, je regrette la trop faible place attribuée et le peu de temps consacré à cet exercice, dont la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, a pourtant voulu qu’il soit un instrument privilégié du contrôle parlementaire – contrôle sur le respect de la trajectoire financière prévue par nos textes pluriannuels ; contrôle sectoriel également extrêmement utile et éclairant, comme en atteste l’examen particulier, en commission, des crédits de défense ou encore des aides au logement.
Je ne fais que réitérer des regrets maintes fois exprimés sur tous les bancs, mais nous gagnerions à donner plus de profondeur à cette analyse de l’exécution à la lumière des très nombreux enseignements fournis par les rapports annuels de performance. Au travers de ces derniers, ce sont bien la vérité et la sincérité des chiffres qui sont mises en évidence.
Au-delà des regrets de forme, au-delà aussi des chiffres et indicateurs du seul exercice 2013, parfaitement mis en exergue par notre rapporteure générale, il me paraît important de mettre l’accent sur les principales tendances qui se manifestent dans ce projet de loi de règlement.
La première tendance est la baisse des déficits : moins 12,3 milliards d’euros en 2013. Il faut le rappeler, même si cela est cruel aux oreilles de nos collègues de l’opposition : au début de l’année 2012, le déficit public filait vers 5,5 % du PIB au terme d’une gestion pour le moins hasardeuse et erratique ; en 2011, un déficit d’encore 5,1 % du PIB était constaté. Qu’observe-t-on depuis lors ? Le redressement indispensable que nous avons engagé dès juin 2012 a permis d’établir le déficit à 87,2 milliards d’euros en 2012, soit 4,9 % du PIB, puis à 74,9 milliards d’euros, soit 4,3 %.
Ceux qui, hier, ont creusé les déficits, ont beau jeu de nous reprocher de ne pas réduire ce déficit plus rapidement ; la tendance est néanmoins bel et bien à la réduction du déficit public, avec son corollaire, la diminution de la charge d’intérêt de la dette, dont la maîtrise est essentielle au respect de la trajectoire des finances publiques.
La deuxième tendance est la stricte maîtrise de la dépense publique. Là encore, les chiffres parlent d’eux-mêmes et ont été attestés par la Cour des comptes : les dépenses de l’État ont reculé de 890 millions d’euros entre l’exécution de 2012 et celle de 2013 et de 4 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale. C’est la première fois depuis 2008. Là encore, à ceux qui nous demandent d’aller plus vite, plus loin, plus fort, on serait tenté de répondre : que ne l’avez-vous fait vous-mêmes ?
Cette maîtrise impérative de la dépense s’est faite sans porter atteinte aux priorités politiques du Président de la République mises en oeuvre par la majorité : éducation, sécurité, justice, services publics essentiels, ont vu leurs moyens renforcés. Cette baisse des dépenses s’est également opérée malgré la présence, en 2013, de dépenses exceptionnelles non négligeables ; 8 milliards d’euros. Je pense en particulier au Mécanisme européen de stabilité ou encore à la dotation de la Banque publique d’investissement.
Le caractère objectivement conjoncturel de certaines moindres dépenses, comme le compte d’affectation spéciale pensions ou la charge de la dette, ne saurait masquer la stricte rigueur – n’ayons pas peur du mot – qui a caractérisé la gestion de l’État en 2013 et qui s’est traduite notamment par des gels de crédits, des réserves de précaution et, plus largement, par un pilotage extrêmement fin.
La troisième tendance est l’évolution des recettes. Elles augmentent globalement de plus de 15 milliards d’euros, principalement sous l’effet de mesures nouvelles adoptées en 2013. L’opposition nous reproche cela, en oubliant qu’elle-même a eu recours à la hausse des prélèvements, principalement à la fin du quinquennat précédent. Elle oublie également que les cibles respectives, au sein tant des ménages que des entreprises, n’ont pas été les mêmes avant juin 2012 et après cette date.
Une plus grande progressivité a été recherchée et obtenue en matière d’impôt de solidarité sur la fortune, de droits de succession, d’impôt sur le revenu en haut de barème ou encore d’imposition des revenus du capital.
Une fois posée cette appréciation, il apparaît par ailleurs que ce projet de loi de règlement contient, du point de vue des recettes, des éléments qui ne peuvent que nous alerter collectivement.
En premier lieu, l’écart entre les recettes inscrites en loi de finances initiale et l’exécution s’élève à 14,6 milliards d’euros. Les recettes sont le résultat non seulement de la conjoncture, mise en avant à juste titre par M. le secrétaire d’État, et de la surestimation du taux de croissance attendue, dont le gouvernement Fillon avait également dû subir les conséquences en son temps, mais aussi de la difficulté croissante d’établir des prévisions en la matière.
Ces chiffres attestent également que, désormais, le recours à la fiscalité a atteint ses limites et la poursuite de l’assainissement engagé de nos finances publiques devra désormais s’appuyer sur d’autres leviers. Ceci est d’ailleurs en parfaite cohérence avec les mesures prévues dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, qui sont désormais votées, la réforme de l’État et des collectivités locales, ainsi que le choc de simplification ou encore la transition énergétique, autant de facteurs qui viendront, n’en doutons pas, conforter la croissance et, ce faisant, la bonne trajectoire de nos finances publiques. C’est là que se trouve l’étroit mais nécessaire chemin du redressement de notre pays.
De quoi allez-vous parler, monsieur Lamour ? Des crédits de la mission « Défense » ?
En effet, monsieur le secrétaire d’État, je concentrerai mon intervention sur l’exécution des crédits de la mission « Défense ». Ainsi que le président de la commission des finances le rappelait à juste titre, c’est l’un des rares budgets que nous avons pu évaluer avant l’examen de ce projet de loi de règlement. L’exécution de ces crédits pose surtout un certain nombre de questions que nos débats n’ont jusqu’à présent pas permis d’éclaircir.
À plusieurs reprises, au cours des derniers mois, le Président de la République a affirmé que les engagements de la loi de programmation militaire seraient respectés. Je rappelle qu’en 2015, la défense a supporté près des deux tiers des suppressions d’emplois, soit 7 500 postes. Nos armées pouvaient donc légitimement s’inquiéter du sort budgétaire qui leur serait réservé. Ces annonces, pour qui les a dites, comme pour qui les a entendues, revêtent un caractère solennel qu’aucune manipulation budgétaire ne pourra effacer. Or il apparaît que certains éléments de l’exécution 2013 ont dégradé dans des proportions importantes le point d’entrée en loi de programmation militaire, au point de remettre en cause ce texte, qui est pourtant l’horizon de notre défense jusqu’en 2019.
J’évoquerai en premier lieu les conséquences de l’annulation des 650 millions d’euros de crédits du programme 146, « Équipement des forces » – le président de la commission l’a évoquée lors de son intervention –, qui a en partie servi à régler les surcoûts d’OPEX, d’opérations extérieures, au titre de l’auto-assurance, et en partie contribué à la réduction de la dépense publique au titre de la solidarité interministérielle.
Lors de l’examen de la loi de programmation militaire, le Gouvernement a fait voter un amendement permettant d’augmenter de 500 millions d’euros les ressources exceptionnelles « si la soutenabilité financière de la trajectoire des opérations d’investissements programmée [… ] apparaissait compromise. » Cependant, si la première tranche de ces 500 millions d’euros a été votée dans le cadre du premier projet de loi de finances rectificative de 2014, nous n’avons pas la moindre certitude quant au moment où la seconde tranche sera votée, ni même si elle le sera, dans un contexte où les ressources exceptionnelles sont de plus en plus aléatoires, ce qui sera encore plus le cas à partir de 2015 et jusqu’à la fin de la loi de programmation militaire.
Peut-être, monsieur le secrétaire d’État, pourrez-vous nous apporter des précisions sur ce point qui, vous en conviendrez, est crucial pour l’avenir de notre défense.
Je souhaite en second lieu appeler une nouvelle fois l’attention du Gouvernement sur le devenir de 417 millions d’euros de crédits du plan d’investissements d’avenir votés en loi de finances pour 2014 au bénéfice de la mission « Défense », qui ont été consommés pour régler deux fractions de la subvention due au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, le CEA, en 2013.
Dans son rapport sur l’exécution du budget 2013, la Cour des comptes pointe cette opération, qui non seulement met en doute le principe de l’annualité budgétaire, mais aussi risque de poser de réelles difficultés pour l’exercice 2014.
En effet, sur le milliard et demi d’euros voté en loi de finances initiale pour 2014 au bénéfice du programme « Excellence technologique des industries de défense », 417 millions d’euros ont été engloutis dans ce que j’ai appelé, lors d’une précédente séance, un « triangle des Bermudes budgétaire ». Plusieurs fois dans cet hémicycle, monsieur le secrétaire d’État, j’ai demandé si cette somme avait été ou serait compensée, mais jusqu’à aujourd’hui le Gouvernement n’a pas répondu à cette question pourtant précisément énoncée.
Dans ces conditions, nous sommes très loin du respect des engagements financiers pris ici même il y a quelques mois seulement, puisque c’est, semble-t-il, près d’un tiers des ressources exceptionnelles, essentiellement destinées à l’investissement – monsieur le président de la commission, comme vous le rappeliez voilà quelques instants, c’est l’investissement qui pâtit aujourd’hui des arbitrages du Gouvernement – qui manque à l’appel au milieu de cet exercice 2014 ; et je n’évoquerai pas le sort des crédits budgétaires…
En résumé, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’exécution du budget 2013 a été l’occasion de prendre plusieurs mesures qui ont masqué le report de charges d’une année sur l’autre et qui se sont traduites par une réduction substantielle des moyens alloués à notre défense pour l’exercice 2014.
Lors de précédents débats, j’ai dénoncé l’augmentation de la part des ressources exceptionnelles dans le financement de notre défense. Je ne peux, en conclusion de mon intervention, que réitérer cette mise en garde contre la très mauvaise habitude qui consiste, en définitive, à accroître la part d’incertitude dans un secteur ministériel qui, plus qu’aucun autre, requiert de l’anticipation.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi de règlement pour l’année, exercice parlementaire classique à pareille époque, qui traduit en actes et en résultats nos choix en matière de politique économique.
Ce texte confirme la maîtrise des dépenses publiques. Après des années de hausse continue des dépenses en dépit des changements de majorité, hausse qui s’est accentuée sous la législature précédente, les efforts engagés depuis mai 2012 ont permis de limiter leur augmentation à 2 % en valeur et à 1,3 % en volume. Tous les efforts que nous avons déployés tant en dépenses qu’en recettes se sont bien traduits par une amélioration du solde budgétaire, le déficit passant de 4,8 % du PIB en 2012 à 4,3 % en 2013, pour s’établir à 87,6 milliards d’euros, ce qui reste beaucoup trop élevé, me direz-vous.
Cette bonne maîtrise de la dépense, et nous devons en féliciter le Gouvernement, résulte d’une régulation très active au cours de l’année, avec l’application d’une réserve de précaution ; gels et annulations de crédits pour un montant de 4,39 milliards d’euros. Les économies ont été au rendez-vous de l’année 2013 mais doivent encore être amplifiées, avec discernement.
Malgré nos efforts répétés pour lutter contre la fraude fiscale, les moindres recettes liées à une conjoncture encore difficile ont engendré un décalage entre la loi de finances initiale et l’exécution, donc un déficit in fine de 4,3 % du PIB.
Cette bonne gestion du budget de l’État est à mettre en parallèle avec la moins bonne gestion de nos prédécesseurs. Monsieur le président de la commission des finances, vous n’avez cessé de réclamer un projet de loi de finances rectificative durant toute l’année 2013.
À la lecture de ce texte, vous conviendrez avec moi que ce n’était pas nécessaire.
D’ailleurs, si l’ancienne majorité s’était fait une spécialité de voter des lois finances rectificatives à répétition, cela n’a provoqué que hausses d’impôts et inflation vertigineuse de la dépense publique et de la dette.
La politique budgétaire conduite par le Gouvernement sous l’impulsion du Président de la République est sérieuse et nous en avons ici la preuve.
Ces mesures permettent de créer les conditions du redémarrage de la croissance en France. Le déficit de l’État a été réduit de moitié – de moitié ! – par rapport au pic de dépense de 148 milliards atteint en 2010 et il décroît régulièrement depuis le début de la législature.
Grâce à la loi de finances pour cette année et au récent projet de loi de finances rectificative que nous avons adopté, la réduction du déficit public va se poursuivre cette année et au-delà. C’est cette cohérence et cette crédibilité en matière budgétaire qui permettent à la France d’avoir des taux de financement extrêmement bas, donc de limiter la charge de la dette qui pèse sur nos comptes publics.
Je n’apprendrai rien à personne en rappelant que les comptes qui nous sont présentés aujourd’hui ont été certifiés par la Cour des comptes. Nous avons d’ailleurs auditionné préalablement à cette séance publique Didier Migaud, son Premier président. Ce contrôle permet de garantir la sincérité et la régularité de ces comptes.
Cette année, la Cour n’a formulé que cinq réserves, soit deux de moins que l’an passé. Ce constat constitue une évolution significative et positive pour la qualité des comptes de notre pays. Je rappelle que, lors de la première certification, pour les comptes de 2006, ceux d’une autre majorité, il y avait treize réserves.
À l’heure où certains voisins européens souhaiteraient nous forcer à adopter je ne sais quelle règle d’or absurde qui viendrait entraver le pouvoir économique de l’État, je tiens à souligner que la France est le seul État de l’Eurogroupe à faire certifier ses comptes, ce qui est un gage de sérieux. Si la Grèce, il y a quelques années, avait dû faire certifier les siens, le pays s’en porterait peut-être mieux.
Mes chers collègues, je vous invite donc à donner quitus au Gouvernement et à adopter ce projet de loi de règlement des comptes de l’année 2013, qui comportent des améliorations pour la réduction des déficits.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, puisque nous arrivons à la fin de la discussion générale de ce projet de loi de règlement, mon intervention sera à la charnière de ce projet et du débat d’orientation budgétaire.
La stratégie qu’a choisie le Gouvernement quand il est arrivé aux affaires était la bonne : donner la priorité à la réduction des déficits – il fallait arrêter le plus vite possible l’hémorragie de la dette – et soutenir simultanément l’emploi. Si l’on ne retrouve pas les résultats dans les comptes effectifs, c’est tout simplement que la récession qui touche l’Europe depuis trois ans était bien plus profonde et bien plus longue que ce que l’on attendait, bien plus profonde parce qu’elle est malheureusement d’une ampleur comparable à celle qu’a connue l’Europe après la précédente grande crise dans les années 30.
L’on ne sort pas d’une récession de cette importance de façon simple. Cela se voit dans la conjoncture, puisque, après avoir redémarré l’année dernière pendant un ou deux trimestres, la croissance connaît à nouveau un replat. La demande a en effet du mal à repartir lorsque l’on doit réduire les déficits, ce qui pèse forcément sur la croissance.
Le Gouvernement a fait des choix importants sur l’offre, avec le CICE puis tout un ensemble de mesures d’allégement. Il ne faut pas opposer politique de l’offre et politique de la demande, elles n’ont pas le même horizon. Une politique de l’offre, cela joue à moyen terme. Cela change la croissance potentielle, cela permet d’avoir une croissance plus forte dans le futur, ce n’est pas la seule solution pour sortir de la récession. Il faut donc prêter en même temps une forte attention à la demande, d’autant plus que la réduction des déficits, que nous devons poursuivre, aura, on le sait, un effet plutôt dépressif sur la croissance.
Que faut-il donc faire dans cette situation ? Tant que la croissance n’est pas suffisante pour créer des emplois, il est pertinent de continuer à mener des actions massives sur les emplois aidés et l’apprentissage, qui sont le type même de politique conjoncturelle bien adaptée à une conjoncture où l’on doit continuer à réduire les déficits, et essayer d’obtenir le plus rapidement possible le retournement de la courbe du chômage.
L’objectif du Président de la République, qui est d’obtenir le plus vite possible ce retournement, est pertinent, parce que, dans la situation conjoncturelle actuelle, je le répète, c’est l’emploi qui fait la croissance. Quand vous créez un emploi d’avenir, c’est du revenu immédiatement dépensé, un débouché pour les entreprises, de la confiance pour les ménages,…
…c’est-à-dire tout ce qui est nécessaire pour sortir de la récession.
Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas mener en parallèle des politiques d’offre, mais il ne faut pas opposer les deux, il faut avoir les deux.
Une telle politique a marché dans le passé. J’ai eu l’occasion déjà de les citer, nous avons eu l’expérience des emplois-jeunes, qui ont fait redémarrer l’économie sous le gouvernement Jospin, ou, et je me tourne vers la droite, l’expérience de 2006, lorsque M. Borloo a augmenté le nombre d’emplois aidés. Cela a fait redémarrer l’économie, qui s’est alors remise à créer des emplois.
C’est l’action qu’il faut, c’est celle qui manque un peu à la politique du Gouvernement. J’ai écouté attentivement le Président de la République à la conférence sociale et, à ma grande satisfaction, j’ai entendu son message qui est de mettre l’accent sur les emplois aidés, l’investissement et l’apprentissage.
C’est par ces politiques conjoncturelles, qui complètent les politiques structurelles, que non seulement nous sortirons rapidement de la récession mais que nous remettrons notre économie sur le bon chemin.
Une bonne politique économique doit marcher sur deux jambes. J’invite donc encore le Gouvernement à continuer à mettre en oeuvre ce rééquilibrage pour que l’on ait une politique économique efficace dans la conjoncture actuelle.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
L’article liminaire et les articles 1er à 8 ne faisant l’objet d’aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
L’article liminaire et les articles 1er à 8 sont successivement adoptés.
Le projet de loi est adopté.
L’ordre du jour appelle le débat d’orientation sur les finances publiques.
La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, mesdames, messieurs, après la présentation du programme de stabilité et avant l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques, le débat d’orientation des finances publiques nous donne l’occasion de nous retrouver pour discuter des grandes orientations de la politique économique et budgétaire du Gouvernement.
Ce que vous propose le Gouvernement pour la seconde partie de la législature est clair et sans ambiguïté, c’est une politique qui, pour reprendre une expression qui vient d’être utilisée, marche sur ses deux jambes : une politique économique de soutien à l’emploi et à la croissance, une politique budgétaire d’assainissement des finances publiques.
Il faut toujours le rappeler, la politique que nous menons depuis 2012 découle directement de la situation que le Gouvernement et la majorité ont trouvée en arrivant aux responsabilités : une croissance à l’arrêt depuis six ans, ce qui fait que la France dépasse à peine le niveau d’activité qui fut le sien avant la crise, une situation des finances publiques particulièrement dégradée avec un niveau de dette publique sans précédent en temps de paix, à plus de 90 % de la richesse nationale, un taux de chômage sur une trajectoire de hausse considérable, qui frôlait les 10 % de la population active, et, enfin, un déficit commercial de plus de 3 % du PIB fin 2011 et un taux de marge des entreprises à son plus bas niveau depuis une trentaine d’années.
Jusqu’à la fin de la législature, la politique proposée par le Gouvernement vise à mobiliser tous les leviers existants pour permettre à la France de surmonter cette situation, en particulier par un soutien systématique à la croissance et à l’emploi.
Depuis 2012, nous avons fait les contrats de génération, les emplois d’avenir, la loi de sécurisation de l’emploi, nous avons engagé un nouveau programme d’investissements d’avenir et introduit le crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi.
Dans les trois ans qui viennent, le pacte de responsabilité et de solidarité va compléter les mesures déjà engagées. Vous en avez examiné les premières dispositions dans le cadre du projet de loi de finances rectificative et du projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale, je n’y reviens pas.
Nous agissons en faveur de la croissance et de l’emploi et, dans le même temps, nous poursuivons la réduction du déficit public.
Entre le mois de juin 2012 et la fin de l’année 2013, nous avons déjà obtenu des résultats. Le déficit structurel a quasiment retrouvé son niveau le plus bas depuis 2002, et le déficit nominal a diminué régulièrement, passant de 5,2 % du PIB en 2011 à 4,3 % en 2013.
Le Gouvernement vous propose de poursuivre la réduction du déficit, en portant l’évolution de la dépense publique au niveau de l’inflation pour les trois ans à venir, ce qui représente un effort considérable, mais l’objectif peut être atteint, de 50 milliards d’euros d’économies par rapport à la tendance naturelle, je vais y venir dans un instant.
D’ores et déjà, les mesures adoptées pour 2013 ont permis de réduire d’environ 30 milliards d’euros le déficit structurel, et des résultats ont été obtenus sur la dépense : la dépense publique a augmenté en valeur de 2 %, son plus bas niveau depuis 1998. Pour 2014, nous avons proposé, dans le cadre du PLFR et du PLFRSS, 4 milliards d’euros d’économies supplémentaires.
Ces chiffres sont déterminants, mais, au-delà des chiffres, je souhaite aussi vous présenter le sens et l’esprit des travaux que nous menons actuellement.
Le Gouvernement vous propose de réaliser 50 milliards d’euros d’économies sur la dépense publique entre 2015 et 2017. Ce plan a un objectif, c’est de financer nos priorités et de poursuivre l’assainissement des finances publiques. Nous pouvons le réaliser ensemble sans remettre en cause ni la qualité de notre service public ni notre modèle social.
J’ai entendu les craintes qui ont pu être exprimées sur l’incidence de ces économies sur la croissance. Je peux les comprendre et je souhaiterais apporter quelques éléments.
La part que représente la dépense publique dans la richesse nationale a augmenté continûment depuis des décennies, passant de 35 % du PIB en 1960 à 57 % en 2013. Il faut rompre avec l’idée, facile, qu’un bon budget est un budget en hausse.
Il faut rompre avec l’idée que davantage de moyens, c’est nécessairement et automatiquement une amélioration de la qualité du service rendu aux usagers.
Force est de constater qu’augmenter la dépense publique n’est pas forcément gage de croissance. Si tel était le cas, nous serions parmi les premiers pays en termes de croissance, la France se situant dans le lot de tête de l’Union européenne, dont la moyenne des dépenses publiques est proche de 50 % en 2015.
Monsieur le président, qui connaissez bien la situation puisque vous avez eu à la subir pendant cinq années, vous savez quels sont les résultats de la politique que vous avez menée, celle à laquelle nous sommes obligés de réagir.
Ce programme d’économies ne doit pas être pris de manière isolée, en le déconnectant du reste de la politique économique du Gouvernement et du contexte général. Le pacte de responsabilité et de solidarité et la montée en charge du CICE vont soutenir la croissance et l’emploi. Les récentes mesures monétaires annoncées par la Banque centrale européenne vont également soutenir la croissance, rééquilibrant ainsi, au moins au niveau européen, avec ses conséquences en France, ce qu’on appelle le mix de politique économique.
Il faut également bien intégrer le fait que toutes les économies sur la dépense ne se valent pas, car c’est l’efficacité de la dépense publique qui prime. Les économies proposées par le Gouvernement visent à limiter le plus possible l’impact négatif qu’elles pourraient avoir à court terme sur la croissance.
L’investissement public est indispensable pour alimenter la croissance à court et moyen terme. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de préserver ces dépenses, en particulier le nouveau programme d’investissements d’avenir, pour lequel 12 milliards d’euros ont été ouverts et qui sera mis en oeuvre comme prévu.
À l’inverse, certaines dépenses sont sans effet sur la croissance et leur suppression n’aurait donc que peu ou pas d’impact sur l’activité économique. Ce sont par exemple des dépenses de fonctionnement inutiles ou des interventions dont l’efficacité n’est pas prouvée.
Au-delà de ces principes, nous maintenons des priorités, et la répartition prévisionnelle des crédits entre ministères, que vous présentera dans un instant Christian Eckert en est la preuve.
C’est la priorité à la jeunesse tout d’abord, avec le maintien des créations d’emplois dans l’éducation nationale et l’enseignement supérieur et une augmentation des moyens de 1,8 milliard en trois ans.
C’est la préservation de l’avenir et le renforcement de la croissance, avec un budget de la recherche et des dépenses en faveur de l’innovation sauvegardés. L’exécution du programme des investissements d’avenir sera, je l’ai dit, également poursuivie.
C’est la priorité aux créations d’emplois au ministère de la justice, dans la police et la gendarmerie, qui se poursuivent.
C’est une approche fine de chaque mission, par exemple une sanctuarisation des crédits de la mission « Culture » – création, patrimoine, enseignement supérieur artistique, notamment –, rendue possible par des efforts d’économies demandés au secteur de l’audiovisuel.
C’est, enfin, un financement garanti des dépenses résultant des minima sociaux financés par l’État, qu’il s’agisse de l’allocation aux adultes handicapés et, pour partie, du RSA, ainsi que des allocations logement.
Tous ces efforts sont précisés, documentés, inscrits dans la durée, et s’appuient sur des réformes en profondeur des politiques publiques.
Vous connaissez la répartition de ces 50 milliards d’euros ; elle a été faite en fonction de la part de chaque administration dans la dépense publique totale : 18 milliards d’euros sur l’État, 11 milliards d’euros sur les collectivités territoriales, 10 milliards d’euros sur l’assurance maladie, 11 milliards d’euros sur les autres organismes de protection sociale.
Les plafonds des missions du budget de l’État qui vous ont été transmis permettront la réalisation des 18 milliards d’euros d’économies sur la dépense de l’État entre 2015 et 2017. Tous les ministères, tous les opérateurs participeront aux économies. Pour autant, les ministères prioritaires, que j’ai cités – éducation nationale, justice, sécurité –, bénéficieront des moyens supplémentaires et des créations d’emplois qui seront réalisées comme prévu.
Le budget triennal de l’État permet donc à la fois de réaliser les économies prévues et de financer nos priorités. Avec le pacte de responsabilité et de solidarité, c’est une politique cohérente et ciblée que le Gouvernement propose : une politique de soutien à l’emploi et à la croissance, de développement de notre action en faveur de l’éducation, de la justice et de la sécurité, enfin, une politique de réduction des déficits.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous discutons aujourd’hui des orientations de la politique économique et budgétaire que vous propose le Gouvernement pour la deuxième partie de la législature. Ces orientations sont claires et cohérentes : soutenir la croissance et l’emploi et poursuivre la réduction du déficit public. Pour atteindre ces objectifs, les moyens sont connus : le pacte de responsabilité et de solidarité et les 50 milliards d’euros d’économies. Le Gouvernement vous a proposé des premières mesures pour les mettre en oeuvre dès les textes financiers rectificatifs et vous en proposera d’autres cet automne. Ce débat d’orientation budgétaire nous permet déjà de voir la cohérence, la continuité et, je pense, la force de la politique qui est la nôtre.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission des finances, mesdames et messieurs les députés, le débat d’orientation des finances publiques prend cette année un relief particulier avec la présentation du budget triennal 2015-2017 de l’État. À la suite de Michel Sapin, qui vous a présenté la stratégie d’ensemble, je voudrais insister particulièrement sur la partie dépenses de l’État.
Vous connaissez la trajectoire de finances publiques qui vous a été proposée dans le programme de stabilité. Elle est fondée sur la réalisation de 50 milliards d’euros d’économies sur les trois ans à venir, pour poursuivre l’assainissement budgétaire, et financer notre politique et nos priorités en faveur d’abord de l’emploi, de l’éducation, de la justice et de la sécurité.
Cet effort d’économies est équitablement réparti entre l’ensemble des administrations publiques. Sur ces 50 milliards d’euros, la part de l’État est de 18 milliards. Les plafonds de crédits du budget général par ministère pour les trois ans à venir ont donc été déterminés de manière à permettre la réalisation de ces économies. Les dépenses des ministères baisseront en valeur de 1,8 milliard d’euros dès 2015, de 2,1 milliards d’euros en 2016 et de 2,3 milliards d’euros en 2017. C’est donc un effort sans précédent. Mais avant de vous présenter plus en détail ces plafonds, je voudrais rappeler les raisons qui ont conduit le Gouvernement à vous proposer ces économies.
Les débats que nous pouvons avoir sur la dépense sont souvent assez généraux : nous débattons du périmètre d’action de l’État, des liens entre croissance et dépense publique ou de la nécessité de réformer. Mais pour comprendre la dépense de l’État, il faut regarder dans le détail chaque ligne. C’est le travail que nous avons mené avec Michel Sapin et l’ensemble de nos collègues ministres pendant plusieurs semaines, avant que le Premier ministre rende ses arbitrages définitifs pour fixer ce budget triennal. Quand on regarde précisément les dépenses de l’État, on voit qu’il existe des marges d’amélioration importantes.
Dans l’héritage que nous avons reçu en 2012, il n’y a pas seulement la dette et le déficit historiquement élevés, il y a aussi des années d’interventions souvent redondantes ou mal articulées entre elles, de sélection déficiente des investissements, de réflexion insuffisante sur l’optimisation de l’organisation et des processus administratifs et donc des effectifs et des dépenses de fonctionnement courant ; en un mot, des années d’utilisation malavisée de l’argent public puisque, entre 2002 et 2012, alors que la dépense progressait chaque année et que le déficit atteignait des niveaux historiques, nous n’avons pas constaté d’amélioration du service public ni de renforcement de notre modèle social.
Le statu quo, auquel certains nous invitent, est donc impossible : il faut inverser la tendance à l’oeuvre depuis une décennie, examiner et évaluer la dépense publique, pour renforcer l’efficacité de l’action de l’État et réduire le déficit.
J’ai évoqué des marges d’efficience ; elles sont établies et incontestables. En agissant sur ces marges, on peut réaliser des économies sans remettre en cause le champ d’action de l’État ni réduire la qualité du service public ni renoncer à notre modèle social. Les économies que le Gouvernement vous propose ne visent donc pas à remettre en cause par principe la dépense publique en général. Il s’agit de faire des choix, de préserver les dépenses indispensables pour garantir l’efficacité de nos services publics, l’efficacité des dépenses indispensables pour préparer l’avenir, la croissance économique de demain, et donc nos dépenses de redistribution.
Nous le répétons depuis 2012 : la réduction du déficit public, le meilleur ciblage des 1 200 milliards d’euros de dépenses, sont les conditions du maintien de notre modèle, qui peut être préservé sans être financé à crédit.
Au-delà de cette trajectoire de nos finances publiques, c’est aussi un principe ancien, constitutif de notre République, que nous avons gardé à l’esprit en préparant ce budget. Chaque citoyen verse une contribution pour le financement du service public – chaque citoyen, y compris les plus modestes puisque, par exemple, tout le monde paie la TVA, qui est la première ressource de l’État –, chacun est donc en droit de demander des comptes sur l’utilisation de sa contribution. Et c’est au Gouvernement et au Parlement de faire en sorte que l’argent public soit utilisé au mieux et que le service public assume l’ensemble de ses missions avec les ressources strictement nécessaires.
À travers ce budget triennal qui vous est présenté aujourd’hui, le Gouvernement vous propose un service public irréprochable, un État qui utilise de la meilleure façon possible les contributions de chacun. L’enjeu va au-delà de l’impératif budgétaire : il touche au consentement à l’impôt, et donc à la légitimité de l’action de l’État, et aux principes fondateurs de la République et du service public.
J’en viens aux plafonds du budget triennal, dont vous avez pris connaissance aujourd’hui. Ce budget triennal a été construit sur la base de quelques principes. Tout d’abord, tous les ministères, tous les opérateurs participeront aux économies : chaque ministère doit examiner ses dépenses et en évaluer l’efficacité et la pertinence. Pour autant, nous maintenons nos priorités en faveur de l’éducation, de la justice et de la sécurité : les créations d’emplois prévues seront réalisées et gagées sur des suppressions dans les autres ministères pour assurer la stabilisation des effectifs de l’État sur la législature.
Au sein de chaque ministère, les économies seront réalisées en tenant compte de la nature de la dépense, de son évolution tendancielle sur le triennal et des efforts déjà réalisés par le passé. Il faut prendre avec beaucoup de précaution les chiffres bruts fournis par les tableaux car ils ne reflètent pas nécessairement le niveau de mise à contribution des ministères. En effet, la dépense peut croître spontanément dans les trois ans qui viennent et conduire à une hausse tendancielle des crédits, mais cela ne signifie en aucun cas que les ministères en cause ne réalisent pas d’économies significatives qui permettent de contenir cette progression – par exemple, sur le budget des affaires sociales, de l’outre-mer, ou du logement. À l’inverse, des crédits peuvent être en baisse par rapport à leur niveau de 2014 sans que cela signifie que nous renonçons au financement de nos priorités, du fait d’un tendanciel en baisse, qui peut être directement lié, par exemple, à l’amélioration de l’environnement économique ou à l’effet positif des mesures fiscales ou sociales décidées en faveur de telle ou telle priorité.
Le débat d’aujourd’hui porte sur les grandes orientations de la politique budgétaire ; ce n’est pas la présentation détaillée du projet de loi de finances pour 2015, qui viendra en son temps, fin septembre. Je souhaiterais néanmoins anticiper sur les débats que nous aurons à l’automne en vous indiquant plusieurs axes transversaux d’économies que vous proposera le Gouvernement dans le projet de loi de finances.
Les opérateurs et agences de l’État avaient été largement préservés entre 2007 et 2012 ; ils ont connu une croissance cumulée de 15 % de leurs moyens. Nous proposerons des mesures spécifiques pour mettre fin à cette ligne de fuite de la dépense. Les subventions pour charges de service public seront en baisse et, surtout, le plafond des taxes affectées sera abaissé de plus de 1,1 milliard d’euros dès 2015. Pour maîtriser réellement la dépense de ces opérateurs, nous procéderons également à un réexamen systématique des fonds de roulement, qui, s’ils sont importants, pourraient être mobilisés pour des dépenses supplémentaires, en contradiction avec les orientations définies en matière de maîtrise de la dépense.
Des fusions de structures seront aussi mises en oeuvre. L’amélioration du fonctionnement de l’administration conduira également à dégager de nouvelles économies. Par exemple, la dématérialisation des relations avec les usagers sera renforcée. Michel Sapin et moi-même en ferons ainsi un axe central de modernisation du ministère des finances et des comptes publics. La mutualisation des fonctions support sera renforcée en amplifiant la démarche déjà engagée en matière d’achats et d’immobilier. Un chantier spécifique sera consacré aux dépenses informatiques de l’État.
Les services déconcentrés de l’État seront – c’est essentiel – adaptés à la nouvelle carte territoriale. Le Premier ministre a lancé récemment une revue des missions de l’administration territoriale et engagera une optimisation de l’organisation.
S’agissant maintenant de la masse salariale, les effectifs seront stabilisés globalement, comme prévu, sur l’ensemble de la législature. Le gel du point d’indice sera maintenu et l’enveloppe de mesures catégorielles à nouveau réduite, après une baisse de 50 % en 2013. C’est donc un effort particulièrement important, permis par les gains de productivité.
Enfin, les interventions de l’État feront l’objet d’une attention particulière. Par exemple, notre politique du logement est l’une des plus coûteuses en Europe, alors que ses résultats sont plus que mitigés.
Elle fera l’objet de réformes structurelles, sur la base des conclusions d’une évaluation en cours, pour en améliorer l’efficacité et la cibler davantage sur le soutien à la construction.
Je rappelle à cet égard que les moyens de cette politique ne se limitent pas aux crédits budgétaires, mais que doivent être pris en compte et faire l’objet de la même démarche d’évaluation les moyens fiscaux consacrés à cette politique. De plus, les exonérations de charges ciblées sur les territoires prioritaires de la politique de la ville seront également adaptées pour renforcer leur impact sur l’emploi et sur l’activité économique dans les quartiers. Ce débat d’orientation des finances publiques n’est pas une fin en soi, il n’est pas un achèvement, mais l’ouverture d’un travail en profondeur auquel je souhaite que le Parlement puisse s’associer pour obtenir la remise en cause et l’inversion de tendances qui obèrent l’avenir, à cause d’une mauvaise gestion du passé.
Au total, quel que soit le périmètre retenu, la dépense de l’État diminuera au cours du triennal et cette baisse sera concentrée sur 2015. Nous ne remettons pas les économies à la fin de la législature ; nous proposons, au contraire, d’en réaliser la plus grande part dès 2015. Les dépenses des ministères diminueront, par rapport à la loi de finances pour 2014, de 1,8 milliard d’euros en 2015, de 2,1 milliards d’euros en 2016 et de 2,3 milliards d’euros en 2017. En incluant le prélèvement au profit de l’Union européenne, la baisse sera de 1 milliard d’euros dès 2015 et également de 1 milliard en 2017, après un ressaut en 2016, lié à la progression cette année-là du prélèvement sur recettes. En ajoutant les prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales, ce qui correspond donc au traditionnel périmètre dit « zéro valeur », la diminution par rapport à la loi de finances pour 2014 sera de 4,2 milliards d’euros en 2015, de 6,4 milliards d’euros en 2016 et de 11,5 milliards d’euros en 2017. Enfin, sur l’ensemble des dépenses du budget général, y compris charges de la dette et pensions, les dépenses diminueront de 2,5 milliards d’euros en trois ans. Il s’agit bien dans tous les cas, monsieur le président de la commission, d’une diminution en valeur.
Cette diminution conduit donc, au regard du tendanciel d’évolution des dépenses, à une baisse de 18 milliards d’euros des dépenses de l’État, hors dotations aux collectivités territoriales. Je ne doute pas que certains estimeront cet effort insuffisant. Je me contenterai de rappeler qu’entre 2007 et 2012, les dépenses de l’État ont augmenté, en moyenne, d’environ 5 milliards d’euros chaque année. Je vais répéter : entre 2007 et 2012,…
Madame Dalloz, écoutez bien ! Entre 2007 et 2012, les dépenses de l’État ont augmenté, en moyenne, d’environ 5 milliards d’euros chaque année,…
…dont 2,2 milliards d’euros sur la norme en valeur. C’est donc un véritable retournement de tendance que nous avons engagé dès 2014 et que nous amplifions à compter de 2015. D’autres pourraient avoir des craintes sur l’incidence de ces économies sur le service public et sur notre modèle social. Au contraire, je le répète, ces économies sont la condition du maintien dans le temps de notre modèle social : elles ne remettront en cause ni son étendue ni la qualité du service public.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, comme le disait Michel Sapin, un bon budget n’est pas forcément un budget qui augmente : c’est un budget qui garantit que l’argent public est utilisé au mieux ; c’est un budget qui préserve notre modèle social, la qualité du service public et les dépenses d’avenir ; c’est enfin un budget qui sert l’intérêt de tous et non les intérêts particuliers. Si nous sommes d’accord sur ces critères, nous serons d’accord pour dire que le budget de l’État pour les trois années à venir est un bon budget.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, le débat d’orientation des finances publiques est un rendez-vous essentiel : c’est la première brique de la construction d’un budget. Mais, monsieur Sapin – vous qui avez été ministre du travail –, nos conditions de travail sont déplorables ! Nous travaillons sur un rapport gouvernemental – et je ne résiste pas à l’envie de le brandir – dans lequel une seule page, la page 35, parle des finances 2015. Du reste, M. Laignel, président du comité des finances locales, a déclaré dans son avis, après que le comité a examiné ce document, que, pour permettre un avis éclairé, il devait être accompagné des données nécessaires, notamment celles sur l’évolution des dépenses et des recettes par sous-secteurs d’administration publique. Nous ne pourrons donc avoir d’avis, faute d’éléments pour juger. Quant au rapport de la rapporteure générale, il était en ligne à seize heures, sans la moindre trace papier. Certes, le développement durable a quelques qualités, mais pour autant il nous semblerait intéressant de pouvoir disposer physiquement des éléments adéquats. Cela révèle, et je le regrette, un manque de considération du Gouvernement envers la représentation nationale.
Nous sommes maintenant à l’heure de vérité. On ne peut plus nous parler d’héritage, monsieur le ministre, car vous êtes entièrement responsables de cette année 2013 qui a été une année noire pour l’économie française, alors que vous nous aviez promis l’embellie. Aujourd’hui, les indicateurs sont tous au rouge. Le déficit public, qui devait être ramené à 3 % en 2013, est à 4,3 % : ce sont 26 milliards d’euros de dérapage. Il devrait être de l’ordre de 4 % en 2014, soit encore une vingtaine de milliards d’euros en trop. Malgré le sursis offert par la Commission européenne, vous n’atteindrez pas l’objectif de 3 % de déficit en 2015. C’est toute la crédibilité de la France auprès de ses partenaires européens qui est mise à mal.
J’en viens au déficit structurel. Les députés de la majorité sont désormais bien plus silencieux ! Auparavant, nous avions des cours permanents sur le déficit structurel,…
…mais nous savons ce qui s’est passé : nous sommes arrivés à 3,1 %, après avoir dérivé de 1,5 % et avoir dû déclencher le mécanisme de correction. Pour 2014, vous nous promettiez un déficit structurel à 1,1 %, mais finalement vous n’espérez plus que 2,1 %. La dette française va dépasser les 2 000 milliards d’euros à la fin de l’année 2014. Selon la Cour des comptes, elle devrait continuer à exploser en 2015. C’est une facture de pas moins de 30 000 euros qui pèse sur chaque Français et qui met de plus en plus en danger la souveraineté de la France, car les conditions d’emprunts, qui étaient bénéfiques ces dernières années, vont se tendre, et les marges de manoeuvre disparaître.
La croissance, malgré votre optimisme, reste en berne. Notre collègue Karine Berger déclarait le 19 décembre 2012 : « L’année 2013 accrochera sans doute 1 % de croissance ». Nous savons ce qu’il en a été : la croissance n’a pas dépassé 0,3 %. Vos choix politiques doivent donc être remis en cause. Pour 2014, le même scénario se reproduit. Alors que le Gouvernement espère toujours 1 % de croissance, vous-même, madame la rapporteure générale, vous disiez en commission des finances hier matin qu’il faudrait peut-être revoir les chiffres.
En effet, il faut être prudents, puisqu’elle ne sera, selon l’INSEE, que de 0,7 %. Qu’en sera-t-il en 2015 ? Vous n’en dites pas un mot ! Les 1,7 % annoncés seront-ils au rendez-vous ? Permettez-moi malheureusement d’en douter.
En ce qui concerne les impôts, tout le monde se rappelle que le Premier ministre avait promis en 2012 que neuf Français sur dix seraient épargnés par les hausses. Une fois de plus, nous savons ce qu’il en a été. La situation a encore été pire en 2013, puisque c’est 1,9 % de pouvoir d’achat en moins par foyer fiscal. Jamais on n’avait connu une telle baisse depuis 1984 ! Les prélèvements obligatoires n’ont jamais été aussi élevés en France. J’ai d’ailleurs été très heureux d’entendre Michel Sapin dire tout à l’heure que la dépense publique ne garantit pas la croissance.
Ça se saurait !
C’est ce que nous ne cessons de dire depuis de longues années sur les bancs de l’UDI !
Revenons-en aux impôts et au matraquage fiscal. Vous espériez 30 milliards d’euros d’impôts supplémentaires en 2013, mais les recettes n’ont été que de 15,6 milliards d’euros. Le vieil adage selon lequel « trop d’impôt tue l’impôt » est plus que jamais pertinent. Qu’en sera-t-il en 2015 ? Le Premier ministre nous a dit hier que le code du travail allait être retouché, que le problème de la pénibilité serait de nouveau étudié et qu’il allait s’occuper de l’apprentissage. Soit ! Mais si je ne dois dire qu’un mot de l’apprentissage, rappelez-vous, chers collègues, ce qu’a fait le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Il a baissé de 800 millions d’euros les crédits alloués à l’apprentissage et on nous annonce aujourd’hui que 200 millions d’euros vont être débloqués. Faites le compte !
Qui plus est, la prime de 1 000 euros annoncée hier avait été supprimée pour l’année 2014, parce qu’elle n’était pas légale.
À cause de toutes vos erreurs, le chômage continue d’augmenter. Ce sont mille chômeurs supplémentaires chaque mois depuis votre arrivée au pouvoir, quand le Gouvernement nous disait chaque jour qu’il sentait venir l’inversion de la courbe de chômage…
C’était la grande formule alors et désormais on n’en dit plus un mot ! Les contrats de génération sont un échec ; les contrats d’avenir un succès – d’ailleurs, le groupe UDI les avait votés. C’est pourquoi j’ai regretté, il y a quelques jours, que l’on ne calque pas les contrats d’accès à l’emploi sur ces contrats d’avenir et que l’on ne propose pas aux seniors des contrats de trois ans au lieu d’un an, ce qui oblige à souvent renouveler les contrats, sans même un volet de formation.
Monsieur le ministre, le 3 juillet 2012, en réponse au discours de politique générale de Jean-Marc Ayrault, Jean-Louis Borloo avait annoncé que le groupe UDI serait la vigie lucide, indépendante et exigeante de cette législature. Jamais nous n’avons manqué à cette triple exigence. Nous vous avons alertés sans relâche sur les conséquences des décisions prises par le Gouvernement. Le matraquage fiscal, la suppression de la TVA compétitivité, qui a bel et bien été enterrée, même si elle a été recréée sous la forme d’un autre dispositif,…
… je sais que cela vous fait mal de le reconnaître –, la fin de la défiscalisation des heures supplémentaires et 20 milliards d’euros de dépenses nouvelles, dès l’été 2012, ont cassé la croissance et la confiance. Les 0,3 % de croissance en 2013 n’ont fait que le confirmer.
Pourtant, nous avons soutenu certains projets de loi, comme l’accord interprofessionnel ou les emplois d’avenir. Nous nous sommes toujours employés à incarner une opposition constructive, qui n’a malheureusement rencontré aucun écho au sein d’une majorité fragilisée par ses divisions et prisonnière de son dogmatisme. La France ne peut plus attendre, monsieur le ministre ! Lorsque le Président de la République a annoncé en 2013 le pacte de responsabilité et de solidarité pour améliorer la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des ménages, nous espérions qu’il avait enfin compris que l’entreprise n’est pas l’ennemie de l’emploi.
D’ailleurs, n’avez-vous pas également dit, monsieur Sapin, qu’il y avait une « bonne finance » ? Les choses ont évolué depuis le discours du Bourget ! Il y a une bonne et une mauvaise finance : chacun comprendra.
Mais c’est la vérité !
Monsieur le ministre, nous avons toujours dit que le groupe UDI était prêt à soutenir, au nom de l’intérêt général, le pacte de responsabilité et de solidarité et qu’il fallait un sursaut économique pour notre pays. Au nom de ce même intérêt général, nous avions exprimé la même bienveillance lors du discours de politique générale de Manuel Valls, ainsi que lors de la présentation du programme de stabilité budgétaire 2014-2017. J’en veux pour preuve l’abstention de la majorité du groupe UDI sur ce texte.
Nous avons prouvé que nous étions prêts à prendre nos responsabilités pour faire avancer la France. Mais le volontarisme affiché du Premier ministre n’a malheureusement pas survécu à l’épreuve de sa majorité. Il fallait voir lundi dernier, quel jour noir et pathétique c’était, quand le Gouvernement a annoncé la réserve des votes !
Tout s’est libéré le mardi. Jamais, en procédure budgétaire, nous n’avions vu cela. Comme nous vous avions dit en 2013, monsieur Sapin, que la « boîte à outils » du Président de la République était insuffisante pour lutter contre le chômage, nous vous disons aujourd’hui que ce pacte sera insuffisant. C’est un rendez-vous manqué depuis le 31 décembre 2013. En effet, pourquoi attendre janvier 2015 pour faire baisser les charges qui pèsent sur le travail ? Malheureusement, l’amendement de Francis Vercamer pour appliquer cette baisse dès le mois de septembre n’a pas été retenu.
Ensuite, il faut bien comprendre que les entreprises n’ont plus confiance. Pourquoi Manuel Valls a-t-il déclaré la semaine dernière qu’il verrait s’il irait plus loin en 2016 et en 2017, après avoir tiré le bilan du respect des engagements pris par le patronat ?
Pourquoi cette phrase ? Cela veut-il dire que les baisses de charges annoncées pour 2016 et pour 2017 sont sujettes à conditions ? Est-ce uniquement un gage pour votre aile gauche ?
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.
J’entends des voix s’élever… C’est donc significatif. Vous aviez déjà promis que vous baisseriez l’impôt sur les sociétés dès 2015, et c’est remis à 2016, de même que la surtaxe de l’impôt sur les sociétés.
Sourires.
Je conclurai sur les 50 milliards d’économies. La Cour des comptes a dit elle-même que les économies n’atteindront que 20 milliards. Je souhaite que ce soit plus, mais j’ai peur que l’objectif de 50 milliards ne soit pas au rendez-vous.
Nous demandons au Gouvernement d’engager des réformes structurelles courageuses. Il faut les faire sans plus attendre. Vous avez refusé d’avancer sur la réforme des retraites alors que vous aviez là un potentiel de 20 milliards d’euros d’économies, et c’est justement parce que vous n’avez pas eu ce courage que vous avez été contraints de geler les prestations sociales, ajoutant ainsi l’injustice à l’inefficacité. Quant à la réforme territoriale, on sait que ses premiers effets ne se produiront pas avant 2017. S’agissant de la RGPP, elle a été tant condamnée, mais qu’on examine bien votre rapport sur les orientations des finances publiques, on voit qu’il n’y a pas de stabilité dans l’emploi public : moins 25 000 en 2013, et combien d’emplois publics supprimés en 2015, monsieur le ministre ? Dites-le nous.
Enfin, je voudrais terminer sur l’aspect fiscal. On sait qu’il y a des hausses d’impôts considérables en 2013 et en 2014, et qu’en sera-t-il en 2015 ? Les impôts des Français vont-ils, oui ou non, augmenter ?
C’est une question claire à laquelle le Gouvernement doit répondre parce qu’il faut de la clarté et de la visibilité pour le pays.
Un dernier mot en ce cas : nous attendons vos réponses pour engager ces réformes structurelles, monsieur le ministre, et nous serons bien sûr présents pour le rendez-vous budgétaire en étant une force de proposition.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, chers collègues, je vais concentrer mon propos sur deux sujets : la croissance et les déficits. Deux sujets qui animent nos débats, structurent nos politiques et en révèlent l’impact.
Le groupe écologiste ne cessera d’expliquer que nous avons plusieurs problèmes avec la croissance.
le premier problème est lié au fait que la croissance diminue inexorablement depuis trente-cinq ans, et que nous continuons à créer l’illusion d’un retour possible à une époque révolue et à des niveaux de croissance qui n’existeront plus.
C’est pourquoi depuis trente-cinq ans, chacune des périodes de relance par la dépense a été suivie d’une moindre progression des recettes et qu’il a fallu combler la différence par une augmentation des prélèvements obligatoires et par le recours à l’emprunt, sous des gouvernements de gauche comme de droite. Le dernier épisode en date fut celui de l’après-crise, plus violent que les autres en générant une augmentation de la dette de 50 % entre 2007 et 2012.
Le deuxième problème a trait à la fragilisation de l’action publique. Nous observons que le Gouvernement est conduit systématiquement en cours d’exercice à opérer des ajustements imprévus, en dehors de toute stratégie globale et cohérente. C’est notamment ce qui vient de se passer avec le PLFR et le PLFRSS.
Le troisième problème porte sur le contenu de la croissance. Les écologistes ont souligné constamment que l’indicateur utilisé, la croissance du PIB, comptabilise des éléments positifs comme des éléments négatifs ou correctifs.
Ainsi, plus il y a d’accidents de voitures et de maladies, plus le PIB augmente… En sommes-nous plus heureux pour autant ? De même, plus il faut organiser des compensations sociales ou des réparations environnementales, plus cela génère de la croissance. Mais nous voyons bien que cet indicateur est dépassé : non seulement la croissance diminue, mais son contenu est de moins en moins positif en raison des dégâts environnementaux et sociaux qu’il recèle. En conséquence, il convient de mesurer dans le taux de croissance du PIB la part des éléments constructifs et des éléments destructifs pour éviter la fuite en avant.
Le quatrième problème tient au fait que l’indicateur est incomplet : il ne prend en compte ni l’économie souterraine, ni l’économie domestique, ni l’économie collaborative. Pourtant, certaines activités non comptabilisées peuvent constituer des leviers pour améliorer la qualité de vie et notre pouvoir d’achat.
Enfin, cinquième problème : le niveau de croissance est constamment surestimé. Cela met notre sincérité budgétaire à l’épreuve, révèle notre aveuglement et traduit notre difficulté à envisager la fin d’un modèle et notre refus de concevoir la transition. Je ne dis pas que les choses sont faciles, mais il faut empoigner les problèmes.
Après ces trente-cinq années d’errements, d’approximations et d’erreurs, comment doit-on apprécier les prévisions pour 2015 alors que la probabilité est forte que nous soyons conduits, à l’automne prochain, à revoir la prévision de 1 % pour 2014 à la baisse. Pour 2015, il nous faut être conscients que le chiffre de 1,7 % cache un pari risqué – on retient son souffle… En effet, il suppose que le pacte de responsabilité apporte 0,5 point de croissance en plus dès 2015 pour financer la dépense supplémentaire de 10 milliards décidée après l’annonce du pacte de responsabilité en décembre dernier. L’expérience des trente-cinq dernières années montre de manière constante la déconnexion des recettes avec l’augmentation des dépenses.
Pourtant, on doit se réjouir des aides fiscales et sociales qui ont été apportées aux salariés modestes avec le pacte de solidarité, grâce notamment au produit de la lutte contre la fraude fiscale, et le Premier ministre a même annoncé, hier, de nouvelles baisses d’impôts pour les classes moyennes en loi de finances pour 2015. C’est une bonne nouvelle et nous espérons que cette amélioration du pouvoir d’achat permettra de relancer la machine et que l’activité des entreprises en sera dynamisée.
Mais il est dommage que le Gouvernement n’ait pas souhaité amplifier le dispositif des emplois d’avenir. Ça marche, et à raison d’une dépense de 10 000 euros par an et par emploi, à comparer avec les 80 000 à 100 000 euros que coûte un emploi au titre du CICE ou du pacte de responsabilité, je ne comprends pas qu’on se prive de cette « marge supplémentaire », pour reprendre l’expression d’Alain Muet, qui a un effet immédiat, apporte du travail à nos jeunes, sort certaines familles des difficultés et produit de la richesse sociale. Mais on peut encore agir de ce côté-là. Je rappelle que 2 milliards supplémentaires pour ce dispositif, à comparer aux 40 milliards du pacte de responsabilité, ce serait 200 000 emplois immédiats.
Mais nous devons également poser la question du financement de l’ensemble de ces choix et de ces dépenses car si nous ne l’assurions pas, nous pourrions retomber dans les travers des trente-cinq dernières années et observer une aggravation de la dette.
En conséquence, le défi du remboursement de la dette prend une dimension supplémentaire s’il s’agit de financer de nouvelles dépenses fiscales : comment assurer à la fois le remboursement de la dette, le pacte de responsabilité, le pacte de solidarité et les futures baisses d’impôts pour les classes moyennes ? On a compris que les institutions européennes étaient devenues plus complaisantes avec les dépenses fiscales qu’avec les dépenses publiques traditionnelles. Prenons-le donc en compte.
Cette perspective me conduit à revenir sur un sujet que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer avec vous et qui concerne la trajectoire de réduction des déficits publics, plus généralement les économies budgétaires qu’il conviendrait de réaliser pour réduire les déficits.
Il s’agit de réduire la dette mais aussi de financer la baisse des impôts. On se souvient des critiques de notre majorité actuelle à l’endroit de la défiscalisation des heures supplémentaires au motif, entre autres, qu’elles étaient financées par la dette. C’est ce qui nous pend au nez, avec le risque de voir l’action publique s’effondrer si on ne parvient pas à améliorer l’assiette fiscale.
Restaurer l’assiette fiscale, c’est bien là l’enjeu. Notre action doit être résolue en ce sens. Car si tout l’effort porte sur la réduction de la dépense publique, il y a danger, risque de dépression de l’économie et de déprime des acteurs économiques, qu’il s’agisse des ménages ou des entreprises. En effet, la déflation guette en France et dans le reste de l’Europe, ce qui rendrait tellement plus compliqué nos affaires, y compris le remboursement de la dette. Je pense en particulier aux pertes d’emplois publics ou liés à l’action publique, qui se compteraient par dizaines de milliers ; je pense également aux pertes d’emplois dans le secteur privé du fait de la réduction de la commande publique dont les collectivités locales sont les principales commanditaires : écoutez-les, elles sont très inquiètes suite aux annonces de réduction de 11 milliards des dotations d’ici à 2017. Vous avez affirmé, monsieur le ministre, que l’État maintiendrait ses investissements, mais ce serait insuffisant car vous savez que la part des collectivités dans les investissements publics est essentielle. Il faut rester en soutien des collectivités qui investissent.
La trajectoire de redressement et de réduction des déficits ne peut se réaliser sans dégradation sociale et économique qu’à deux conditions : l’amélioration de l’assiette fiscale et l’investissement dans la transition écologique, plus précisément dans les économies d’énergie.
L’amélioration de l’assiette fiscale doit se décliner dans plusieurs domaines. Tout d’abord, je ne vais pas insister sur ce point parce que je l’évoque constamment, sur le terrain de la fraude et de l’évasion fiscales. Je souligne qu’une trajectoire de l’extinction fiscale doit être inscrite à l’agenda européen. L’Union ne peut pas se contenter de nous assigner une trajectoire de baisse des déficits publics si elle n’agit pas en parallèle pour restaurer les assiettes fiscales des États membres.
Nous devons y prendre toute notre part au plan européen mais aussi au plan national. Nous nous devons de peser sur les décisions en la matière et d’être exemplaires. Je suis de ce point de vue déçu et troublé que nous ne saisissions pas l’outil qu’est le pacte de responsabilité pour assainir les pratiques de certaines entreprises. Le discours adressé aux entreprises doit être clair : « D’accord, on vous aide, on réduit vos impôts et vos cotisations sociales, mais vous faites toute la transparence sur vos comptes, votre chiffre d’affaires et les prix de transfert. » Exiger que les entreprises paient normalement leurs impôts apparaît bien comme un minimale vis-à-vis d’une entreprise qui est soutenue par l’État. Et si les recettes supplémentaires liées à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, comme c’est le cas pour le crédit d’impôt voté au PLFR pour les salariés modestes, permettaient de compenser auprès des ménages des pertes de dépense publiques ? Il faudra y voir de plus près.
Une autre exigence est de relancer les investissements sans alourdir le déficit. Puisque des débats, selon moi un peu artificiels, se sont développés sur la question du bon et du mauvais déficit, du déficit structurel et du déficit conjoncturel, il est temps d’analyser précisément ce qu’est un bon investissement à cet égard. Je ne reviendrai pas sur les propos que j’ai tenus sur le sujet lors de mon intervention sur le projet de loi de règlement.
En outre, l’investissement privé ne peut pas servir de modèle à l’investissement public. Ainsi, quand une entreprise privée investit, c’est le plus souvent pour améliorer ses marges bénéficiaires. Or cela ne se passe pas du tout de la même façon pour l’investissement public. Si celui-ci peut créer de la richesse, de l’emploi et améliorer la qualité de vie, les coûts sont souvent élevés et les recettes incertaines – et à des échéances encore plus incertaines. À cet égard, seuls les investissements dans la transition énergétique permettent d’avoir une visibilité certaine et d’assurer rentabilité et retour sur investissement à une échéance précise et connue, et ceci du fait des économies d’énergie ainsi que des économies pour le budget des ménages et pour celui de l’État permises par ces investissements. Il faut insister sur ce point et s’engager fortement dans cette direction. C’est un appel que formule le groupe écologiste pour qu’il soit inscrit comme une priorité dans l’agenda européen, au même titre que la lutte contre l’évasion fiscale. C’est également l’enjeu du renforcement du budget de l’écologie. Ce n’est pas un totem, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État : nous voulons vous convaincre que l’écologie constitue le ferment du renouveau et de la sortie de crise.
Ces deux priorités pourront contribuer à instaurer plus de justice sociale et environnementale, à moderniser notre économie, à dynamiser l’activité des entreprises et l’emploi sur les territoires, ainsi qu’à mieux maîtriser nos déficits et à relativiser la notion de croissance.
Monsieur le ministre, si vous trouvez avec nous les moyens de protéger les plus modestes – je pense aussi aux classes moyennes –, ceux qui se situent au-dessus de 1,1 SMIC et jusqu’à 1,5 SMIC ou 1,6 SMIC, tout en faisant un effort sur la dépense publique et en investissant dans la transition écologique, vous nous trouverez à vos côtés avec conviction.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, l’un des enseignements majeurs du projet de loi de règlement de 2013 dont nous venons de débattre est celui d’une croissance, toujours d’actualité, de la dette accumulée, principalement celle de l’État.
La dette financière s’élève en 2013 a plus de 1 481 milliards d’euros, c’est-à-dire 69 milliards de plus qu’en 2012 et 142 milliards de plus qu’en 2011. À la dette financière, dont la croissance n’a une fois de plus pas ralenti, s’ajoutent les dettes non financières, qui augmentent de 2,8 milliards cette année, les provisions pour risques et charges et la trésorerie passive augmentant pour un montant total de plus de 425 milliards d’euros. Notons toutefois que sur le total des dettes reprises et remboursées en 2013, 4,5 milliards correspondent à la dette résiduelle de l’EPFR. Cela élève donc le passif total de la France l’année dernière à plus de 1 906 milliards d’euros. Les actifs s’élevant pour le même exercice a 969 milliards, le solde net négatif s’établit à plus de 937 milliards d’euros, soit 46 milliards de plus qu’en 2012 et 131 milliards de plus qu’en 2011.
La charge de la dette atteint 44,9 milliards d’euros, en diminution de 1,4 milliard par rapport à 2012. Cette baisse significative tient au faible niveau de l’inflation et des taux d’intérêt, comme je l’ai évoqué précédemment. Les taux moyens à l’émission n’ont en effet jamais été aussi bas – seulement 0,06 % pour les titres à court terme et 1,54 % pour les titres à moyen ou long terme à taux fixe –, ce qui est, selon vos propres termes, monsieur le ministre, une « preuve de la confiance des investisseurs dans la stratégie économique et financière du Gouvernement ». Mais c’est par ailleurs également la preuve d’une amélioration conjoncturelle et non structurelle en termes de pilotage d’ensemble des finances publiques.
Une récente enquête réalisée par le Collectif pour un audit citoyen de la dette publique a été rendue publique fin mai, qui mérite que l’on s’y attarde dans le cadre de nos débats sur l’orientation des finances publiques.
Cet audit montre notamment que, contrairement aux idées reçues et aux débats politiques à courte vue, l’augmentation des dépenses publiques n’explique pas, en soi, et sur une perspective de moyen terme, la croissance de la dette de l’État. En effet, en 30 ans, la part des dépenses publiques a chuté de deux points de PIB. Bien plus important est l’effet, en matière d’accumulation de dette, des décisions politiques toujours plus promptes à prévoir des exonérations ou créer des régimes spéciaux au bénéfice des plus grandes entreprises comme des ménages les plus aisés.
Prenons l’exemple de feu le bénéfice mondial consolidé, puisqu’il ne fait plus polémique. Le BMC était un régime fiscal avantageux accordé à quelques multinationales du CAC 40. Il a permis pendant des années aux sociétés mères de groupes français agréés par le ministre de retenir l’ensemble des résultats de leurs exploitations directes ou indirectes, qu’elles soient situées en France ou à l’étranger, pour l’assiette des impôts établis sur la réalisation et la distribution de leurs bénéfices. En août 2004, Bercy avait même accepté la demande du groupe Vivendi d’y accéder. Et en 2010, une poignée de sociétés en bénéficiaient, parmi lesquelles Total, Vivendi, NRJ et Euro Media Group. Le BMC a finalement été supprimé par le Parlement, mais il a fallu pour cela attendre septembre 2011.
De telles niches fiscales, destinées aux grands groupes, ont été – et sont encore pour certaines – utilisées comme un outil massif de défiscalisation, et non pour leur potentiel économique. C’est ce qu’ont démontré de nombreux rapports institutionnels – comme celui relatif au crédit d’impôt recherche, dont la réforme se fait encore attendre.
Au plan européen, puisqu’il s’agit là du principal théâtre de l’optimisation fiscale des grands groupes, souhaitons que l’accord salutaire sur l’interdiction des montages hybrides, signé fin juin par les ministres des finances de l’Union, mènera à une transposition rapide, dans l’ensemble des pays de la zone, de la révision de la directive « mère-fille ».
Au fil des dernières décennies, les ménages très aisés ont aussi, sous couvert de renverser le paradigme d’une fiscalité prétendument confiscatoire, pu profiter d’un nombre très important d’exonérations, de réductions et de crédits d’impôts. On peut citer l’exonération totale des oeuvres d’art pour le calcul de l’impôt sur la fortune – un sujet cher à notre secrétaire d’État – ou le « bouclier fiscal » de Nicolas Sarkozy.
La complexité géniale de l’architecture de toutes ces niches – dont chacune, on le sait, abrite un chien qui mord – est un phénomène propre à la France. Seule l’Italie connaissait autant d’exonérations, mais nous savons qu’elle est parvenue à se réformer. En 2013, la Cour des comptes en évaluait le nombre à 460, soit seulement quatre niches de moins qu’en 2012, pour un montant stabilisé à 72 milliards d’euros.
Rappelons qu’en 2009, le plafond global des avantages fiscaux était fixé à 25 000 euros, majoré de 10 % du revenu imposable. Ce plafond a d’abord été abaissé pour l’imposition des revenus de 2010 à 20 000 euros, majoré de 8 % du revenu imposable, puis pour 2011 à 18 000 euros, majoré de 6 % du revenu imposable. Sous l’impulsion de la nouvelle majorité, le montant total de certains avantages fiscaux a fait l’objet, pour une même année d’imposition et un même foyer fiscal, d’un plafonnement global fixé à 10 000 euros à compter de l’imposition des revenus de 2013 – compte non tenu bien sûr, des réductions d’impôt pour investissements outre-mer et souscriptions au capital de SOFICA. Nous saluons résolument cet effort de justice fiscale, même si nous devons rappeler ici que le plafonnement ne vaut ni simplification, ni réforme de fond.
L’audit citoyen de la dette incite à prendre un peu de recul historique. Rappelons en effet qu’en 1932, à l’arrivée de Roosevelt au pouvoir, le taux fédéral de l’impôt sur le revenu pour les plus riches était de 25 %. Il a été porté à 63 %, puis à 79 % en 1936, puis encore à 91 % de 1941 à 1964, et n’a pas été réduit avant les années 1970, moment où il a été ramené à 77 %, puis 70 %. Ainsi, pendant près de cinquante ans, le taux supérieur appliqué outre-Atlantique a été en moyenne de plus de 80 %.
Or comme le souligne Thomas Piketty, dont les travaux mériteraient d’être reconnus également en France, cela n’a ni tué le capitalisme, ni empêché l’économie américaine de fonctionner, bien au contraire. Pour une raison simple : ces taux ne s’appliquaient qu’à des revenus excessivement élevés, sur des rémunérations récompensant une vision à court terme et des prises de risque excessives.
Néanmoins, Reagan et les présidents suivants ont brutalement réduit le taux supérieur pour le ramener à environ 30 %, entraînant dans cette voie – ou plutôt dans cette impasse – l’ensemble des pays du nord. Dans le secteur financier, les rémunérations indécentes ainsi permises ont stimulé des comportements insensés et ont clairement contribué à la crise actuelle. Et les dettes des pays riches ont commencé à exploser.
François Hollande ne s’y est pas trompé lorsqu’il a annoncé, pendant la campagne électorale, une taxe de 75 %. L’article 9 du projet de loi de finances pour 2014 a enfin instauré cette « taxe exceptionnelle de solidarité sur les hautes rémunérations versées par les entreprises », ce qu’il convient de saluer. Mais, auparavant, le Conseil constitutionnel avait annulé l’article 12 de la loi de finances pour 2013, qui taxait à hauteur de 75 % les revenus excédant 1 million d’euros.
Pour calmer « le ras-le-bol fiscal » de l’été 2013 et éviter la censure du Conseil, le taux de la taxe exceptionnelle a donc été ramené à 50 %. En outre, celle-ci souffre d’un handicap majeur, celui de ne pas concerner les revenus d’activité que sont, pour les redevables de l’impôt sur le revenu, les bénéfices industriels et commerciaux, les bénéfices non commerciaux et les bénéfices agricoles. Je citerai à ce sujet l’excellent rapport de la commission des finances : « Un cabinet d’avocats […] est dans le champ de la taxe s’il verse à ses salariés une ou des rémunérations excédant 1 million d’euros ; en revanche, les associés de ce cabinet, même s’ils perçoivent une fraction des bénéfices de la société excédant 1 million d’euros, ne sont pas dans le champ. »
Toujours dans le souci de mettre en perspective ces sujets complexes, rappelons qu’en 2012 la répartition des trois principaux impôts sur ménages que sont, dans l’ordre, la TVA, la CSG et l’impôt sur le revenu a fait la part belle à l’absence de progressivité puisque TVA et CSG ont représenté, quel que soit le niveau des revenus, 79 % de l’ensemble. C’est ainsi que l’on saisit la différence entre complexité et complication !
Lorsque l’on sait par ailleurs que le recours aux réductions et crédits d’impôts concernant l’impôt sur le revenu – qui, lui, est progressif – est principalement le fait des ménages les plus aisés, lesquels disposent de l’expertise et des revenus nécessaires, on s’aperçoit que notre système d’imposition pourrait davantage gagner en justice. Cela permettrait de contenir le phénomène, en constante aggravation, de transfert du revenu national vers les 1 % des plus riches et de stagnation du pouvoir d’achat du reste de la population.
Le rôle joué par les taux d’intérêt constitue l’autre principale cause d’accumulation de la dette. Les niveaux démesurés qu’ils ont très souvent atteints, notamment dans les années 1990, pour préparer l’entrée dans l’euro, ont en effet engendré un « effet boule de neige » qui pèse encore très lourdement sur la dette actuelle.
Depuis plusieurs décennies, l’État se finance sur les marchés financiers. Ce choix n’est ni naturel, ni neutre, puisqu’il se fait au détriment des ménages ou des banques – qui pourraient pratiquer un taux d’intérêt réel de 2 % –, voire d’une « banque centrale », pourquoi pas européenne – mais une telle proposition est sans doute suspecte de la part d’un fédéraliste comme moi. Selon les auteurs de l’audit, la dette accumulée serait aujourd’hui inférieure de 29 points de PIB si l’État avait été plus précautionneux à l’égard des taux d’intérêt pratiqués par ses créanciers.
La faiblesse des taux constatée en 2013 ne doit donc pas masquer l’essentiel, ni nous empêcher de nous prémunir durablement contre les aléas des marchés financiers. Notre rôle est en effet de participer activement à la régulation de ces derniers, s’il le faut par une taxation accrue de leurs activités. C’est en effet leur influence auprès des gouvernements successifs qui a généré, entre autres, une accumulation colossale de dette dont la réduction ne saurait uniquement reposer sur les salariés, les retraités et les usagers des services publics.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, ce débat d’orientation des finances publiques est l’occasion d’interroger la représentation nationale sur le chemin qui est emprunté en matière de politique économique, budgétaire et monétaire.
Ce débat fait écho aux récentes discussions qui ont eu lieu dans notre hémicycle sur le projet de loi de finances rectificatif pour 2014 et sur le projet de loi de finances rectificative de la Sécurité sociale. Ces discussions ont montré une nouvelle fois qu’il n’existe pas de majorité, ni à l’Assemblée nationale, ni au Sénat, pour approuver l’orientation du Gouvernement. En effet, seuls 47 % des députés ont accepté son tournant libéral.
Dans vos rêves !
C’est une réalité.
Mais ce débat fait également écho à d’autres prises de position, fondamentales, exprimées par le Premier ministre et par vous-même, monsieur le ministre des finances. « La gauche peut mourir » a dit le premier, et je ne vous ferai pas l’injure d’en nommer le fossoyeur. « La finance, la bonne finance est notre amie » avez-vous ajouté, …
Cela vaut mieux, en tout cas !
…assumant ainsi votre conversion, comme pour refermer définitivement le caveau dans lequel se trouve le discours tenu au Bourget, le 22 janvier 2012, par le candidat Hollande.
Pourquoi est-ce fondamental ? Parce que nous sommes dans un de ces moments historiques de renversement des valeurs, un de ces moments où la tentation est grande, pour les puissances d’argent et l’oligarchie, de solder tout ou partie des acquis de la Révolution française, et surtout de cette égalité sans laquelle, comme disait Condorcet, il n’y a pas de véritable liberté.
Comment peut-on accepter que, dans notre pays comme dans toute l’Union européenne, les inégalités explosent à ce point ? En 2013, les 500 plus grandes fortunes de France ont connu une croissance de 25 %, tandis que dans le même temps, selon l’Observatoire des inégalités, les ouvriers et employés avaient perdu en pouvoir d’achat et en patrimoine !
Une autre étude très récente relève que les couches modestes de la population, les bas revenus – soit moins de 3 000 euros pour un couple avec deux enfants – ne sont plus que 35 % à partir en vacances, contre 44 % en 1998.
Les politiques libérales qui sont menées conduisent donc à une véritable faillite : faillite pour le peuple, qui subit chômage, déclassement, précarité ; faillite pour les comptes publics, avec un endettement et des déficits record ; faillite pour la République, qui est dès lors mise à mal ; faillite pour la planète, qui meurt d’un modèle de développement destructeur.
Et c’est pourtant en faveur de ces politiques que le gouvernement de M. Valls s’est empressé de donner des gages en décidant une cure d’austérité destructrice : 50 milliards d’euros de dépenses sociales et publiques en moins en trois ans, pour financer 41 milliards d’euros de diminution de la contribution des entreprises à l’effort collectif. C’est un manque de courage.
C’est un manque de courage, car c’est s’attaquer aux plus faibles pour donner aux plus forts. C’est continuer à promouvoir ces fortunes qui se construisent sur la rente, sur la rémunération du capital, sur les « privilèges du capitalisme oisif », comme disait Jaurès !
Cependant, ces 50 milliards de réduction font l’objet d’interrogations, voire de critiques. Malgré les paroles apaisantes, l’investissement public est mis à la diète : les investissements d’avenir ne sont même pas tous réalisés – alors qu’ils sont déjà à un niveau très faible, voire déplorable, l’équivalent de 0,6% du PIB –, et ceux des collectivités locales sont promis à l’effondrement du fait des 11 milliards de dotations en moins.
Monsieur le ministre, il aurait fallu tenir tête à Bruxelles et convaincre nos partenaires d’engager une grande politique d’investissement destinée à assurer une réelle transition écologique. Mais cela n’a pas été votre choix.
Au sein même des institutions officielles, des interrogations se font jour. Le Haut Conseil des finances publiques a ainsi mis en doute – et c’est un euphémisme – le choix d’une politique de l’offre contre celui d’une politique de la demande : « Il existe un risque que les effets positifs sur l’emploi des allégements de charges n’atténuent pas les effets négatifs des mesures d’économies et que ces mesures d’économies pèsent davantage que prévu par le Gouvernement sur la croissance. »
Notre rapporteure générale a d’ailleurs récemment formulé un avis semblable en estimant que le plan d’économies de 50 milliards d’euros pouvait avoir un impact négatif de 0,7 % par an en moyenne entre 2015 et 2017 et « entraîner la suppression de 250 000 emplois à l’horizon 2017. » Pour parvenir à cette conclusion, elle s’appuie sur des chiffres donnés par Bercy, qui montrent l’effet récessif de la politique poursuivie.
Les orientations budgétaires présentées à l’occasion de ce débat d’orientation sur les finances publiques sont préoccupantes, car elles marquent la conversion au libéralisme et la domination d’une pensée unique pourtant rejetée par la majorité des habitants de notre pays. Monsieur le ministre, votre politique ne marche pas sur deux jambes, mais bien sur la seule politique de l’offre, celle qui fait du coût du travail la seule variable d’ajustement.
Quand le nombre de chômeurs s’élève à cinq millions, quand le pouvoir d’achat des classes populaires et moyennes se dégrade, quand le service public est attaqué, l’urgence sociale, l’urgence économique, c’est de changer de logiciel. Quand des représentants de salariés, par l’intermédiaire des première et troisième organisations syndicales de France et de la principale organisation chez les enseignants, montrent autant de défiance et de colère, il n’est pas acceptable que le Gouvernement reste droit dans ses bottes.
Si vous persistez à dire qu’il n’y a pas d’alternative à votre politique de fuite en avant, le peuple trouvera de lui-même une autre voie.
Il se tournera non pas vers la droite, en pleine déconfiture, mais vers le repli nationaliste, les discours de haine et de division. En tournant le dos aux négociations en trompe-l’oeil de la conférence sociale, les organisations syndicales ont donc pris leurs responsabilités.
Le Front de gauche, les forces sociales, les écologistes, ceux qui croient encore dans le socialisme doivent prendre les leurs. Il est urgent de revenir aux fondamentaux de la République que sont la liberté, l’égalité et la fraternité.
C’est vrai en matière de fiscalité. Il est ainsi nécessaire de garantir une vraie progressivité de l’impôt pour les personnes physiques, et d’engager une réforme en profondeur de l’imposition des entreprises, pour assurer de véritables contreparties, en termes d’emploi et d’investissement, aux baisses de prélèvements. Il nous faut renforcer la lutte contre l’optimisation et la fraude fiscales, lutter contre la financiarisation de l’économie et ses conséquences délétères sur les entreprises, les PME, les artisans, les salariés et l’ensemble du tissu économique. Il faut, en bref, une nouvelle architecture fiscale.
C’est vrai en matière de pouvoir d’achat. Depuis vingt ans, le poids des dépenses contraintes en matière de logement et d’énergie a plus que doublé. La priorité, pour nous, doit rester le relèvement des salaires, des minima sociaux et des pensions, qui restent les grands oubliés de la politique économique actuelle.
C’est vrai en matière d’investissement. Il faut donner de l’oxygène à l’investissement public et aux collectivités locales, qui sont des maillons essentiels de la vie démocratique et exercent des missions de service public incontournables.
C’est vrai, enfin, en matière d’équilibre des comptes publics, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État. C’est sans aucun doute en agissant sur certaines dépenses que l’on parviendra à cet équilibre. Je reste perplexe devant les niches fiscales et sociales, qui ne cessent de gonfler, sans réel effet. On peut relever le cas des aides à l’emploi mais d’autres méritent d’être étudiés. Comment accepter, par exemple, que les politiques publiques du logement soient de plus en plus gourmandes en crédits ou en dépenses fiscales alors que les mises en chantier n’ont jamais été aussi faibles et les loyers aussi prohibitifs pour trop de nos concitoyens ? Et, si chacun s’accorde à reconnaître que l’efficacité de la dépense publique et l’évaluation de l’utilisation des deniers publics sont des nécessités, je reste un peu perplexe devant la conversion des membres du Parti socialiste, qui veulent aujourd’hui être les champions de la réduction de la dépense publique.
Je vais vous faire une confidence, monsieur le ministre, cher ami : les propositions que je viens d’énoncer, succinctement, s’apparentent à un pacte de relance keynésien et donc à des recettes qui sont l’alpha et l’oméga de la social-démocratie. Je ne sais si je serai puni en place publique à Vierzon parce que je plaide pour cette relance qui n’a pas l’ambition de renverser le capitalisme mais, nonobstant ce clin d’oeil, monsieur le ministre, nombre de nos concitoyens qui ont permis l’arrivée de cette majorité au pouvoir et de plus en plus d’élus locaux et nationaux sont convaincus de la nécessité d’un profond changement de cap, en faveur d’une nouvelle croissance, d’une croissance qui s’appuie sur la transition écologique, sur l’amélioration du pouvoir d’achat et sur la justice fiscale et sociale. Au-delà des avis et des uns et des autres, du recours aux vieilles recettes libérales d’un côté ou aux vieilles recettes étatistes de l’autre, il est urgent, monsieur le ministre, de ne pas arrêter de discuter, et même de nous disputer, pour offrir un nouvel espoir.
Ce débat d’orientation sur les finances publiques pour les années 2015 à 2017 est malheureusement marqué par un manque d’imagination. Il est marqué par les contraintes imposées par les marchés financiers. Oui, il est urgent d’inventer un nouveau chemin pour, comme le disait Jaurès, combattre pour les faibles contre les puissants, pour le peuple contre ceux qui l’oppriment, pour la justice sociale contre l’iniquité et contre l’injustice.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, en 1964, nous parlions du coup d’État permanent ; en 2014, nous pourrions parler du débat économique et budgétaire permanent. Le débat que nous avons aujourd’hui, qui résulte de l’application de la loi organique relative aux lois de finances et qui est une bonne idée, fait suite à six mois de débats qui ont commencé avec l’allocution du Président de la République le 31 décembre dernier et sa conférence de presse du 14 janvier. Ils se sont tenus dans cet hémicycle par deux fois, à l’occasion de la déclaration de politique générale du Premier ministre Manuel Valls puis à l’occasion du débat sur la déclaration faite par le Gouvernement à propos du programme de stabilité. Cela s’est prolongé ces quinze derniers jours avec les débats dont le projet de loi de finances rectificative et le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale ont été l’objet.
C’est dire si le débat a bien eu lieu ! En outre, les choix et les orientations ont d’ores et déjà été affirmés, et ce par quatre fois : lors du vote de la déclaration de politique générale du Gouvernement, lors du vote du programme de stabilité, lors des votes sur le PLFR et le PLFRSS. J’ai donc un peu de mal à comprendre la frustration de celles et ceux de nos collègues qui ont dit hier, notamment en commission, que, dans le meilleur des cas, il n’y avait rien de nouveau dans le débat et, dans le pire, les documents transmis par le Gouvernement étaient d’une indigence inédite. Ce n’est pas parce que les choses sont connues et répétées qu’il faut parler d’indigence !
Je vous remercie, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, d’être intervenus dans ce débat d’orientation budgétaire qui a simplement deux objectifs : d’une part, réaffirmer et consolider ces orientations et, d’autre part, les décliner, les décliner avec courage, constance et cohérence, comme j’avais appelé, lors des débats de la semaine dernière sur les textes financiers, à ce que nous le fassions. Je ne reviendrai donc pas davantage sur ces grandes orientations.
Je rappellerai simplement que le débat d’aujourd’hui intervient dans un contexte particulier. Tout d’abord, nous sommes en procédure de correction automatique. Si je le souligne, c’est pour rappeler qu’il y a des règles de gouvernance, que nous avons adoptées, et elles sont importantes. Si la procédure de correction automatique est appliquée, c’est parce que, par rapport à ce que nous avions voté au mois de décembre 2012, nous avons dérivé. Il y a des raisons à cela, qui doivent être expliquées, et le Gouvernement le fait effectivement : des raisons conjoncturelles, mais aussi peut-être des raisons structurelles. Ainsi est-il nécessaire d’évoluer et de modifier, ce que nous avons commencé à faire avec les textes financiers qui viennent d’être adoptés par notre assemblée.
C’est aussi un débat préparatoire à une nouvelle loi de programmation des finances publiques, dont on connaît déjà l’architecture : c’est celle du programme de stabilité que nous avons transmis à la Commission européenne. Celle-ci a donné un avis plutôt favorable sur ledit programme. Encore une fois, je veux dire à celles et ceux qui en doutent que le débat européen porté par le Président de la République, je n’en doute pas, aboutira, en particulier sur l’action de l’Europe. Il ne faut pas continuer à dire que l’on va différer sempiternellement les efforts.
Nous aurons donc une loi de programmation des finances publiques qui s’inscrira dans les orientations que nous avons arrêtées au printemps. Il y aura aussi un nouveau budget triennal. Vous nous l’avez présenté, monsieur le secrétaire d’État au budget. À ce stade, je veux simplement saluer cet effort parce qu’on voit bien que c’est difficile. D’ailleurs, des journaux, de référence, sont capables de faire des éditoriaux qui estiment, d’un côté, que ce n’est pas suffisant et, de l’autre, que c’est trop, que c’est trop difficile. En tout cas, les priorités sont annoncées.
Pour conclure, soulignons notre cohérence, et notre constance, et donc notre efficacité : le débat sur la trajectoire, nous l’avons eu, et cette trajectoire va être confirmée. Celui sur la maîtrise de la dépense publique, nous l’aurons, en le déclinant lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015. J’ai bien entendu vos orientations et l’énoncé de votre méthode. De même, nous aurons le débat sur la stratégie de baisse des prélèvements obligatoires. Pour les entreprises, nous avons voté à la fois une trajectoire et des mesures pour 2015. Pour les ménages, nous avons aussi voté des mesures, et nous nous sommes inscrits dans une démarche, sur la base du rapport issu du groupe de travail sur la fiscalité des ménages, qui vise à engager une réforme, en particulier sur le bas de barème.
Je voudrais simplement dire un mot, amicalement, à notre rapporteure générale. Dans son rapport, que nous venons de découvrir, elle fait une projection sur l’évolution des prélèvements obligatoires, avec une comparaison sur ce qui se passe entre les entreprises et les ménages. En termes de méthode, je pense d’abord qu’il faudrait partir de 2007 et aller jusqu’en 2017. Et puis, je ne suis pas certain que les concepts d’entreprises et de ménages soient finalement très pertinents, parce que, si on entrait dans le détail, on s’apercevrait qu’il y a différentes catégories de ménages et différentes catégories d’entreprises, que les politiques fiscales menées entre 2007 et 2012 et celles menées depuis 2012 ne sont pas les mêmes. Je pense donc, comme je l’ai demandé hier, qu’il faut approfondir rapidement ce travail, le détailler de manière très complète, pour déterminer sur qui ont effectivement pesé les prélèvements obligatoires. On n’en tirera pas forcément les mêmes conclusions. En tout cas, madame la rapporteure générale, pour ma part, je n’en tire pas les mêmes conclusions que vous dans votre rapport.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, que dire ?
Sur la forme, d’abord, nous aurions pu espérer que ce débat d’orientation sur les finances publiques soit l’occasion d’examiner des éléments nouveaux. Il n’en est rien. Nous espérions que vous documenteriez les économies que vous nous annoncez. Que nenni ! Nous attendions des éléments de compréhension de votre méthode de calcul. Il n’y en a pas. Rien sur la méthode du Gouvernement, c’est dommage.
Il y a deux heures, Mme la rapporteure générale – je comprends que cela puisse se justifier si elle est surchargée de travail – mettait en ligne son propre rapport sur le document d’orientation des finances publiques. Nous n’avons bien sûr pas pu l’examiner. Et puis j’apprends tout à l’heure, en entrant dans l’hémicycle, qu’est distribué depuis ce matin un nouveau rapport préparatoire, qui n’a pas été remis à la commission des finances, laquelle n’a donc pu en discuter ; il est simplement distribué, pas en catimini, mais nous ne l’avions pas. Je viens donc de le découvrir.
Vous m’autoriserez une citation, car je crois qu’elle illustre bien les conditions dans lesquelles nous travaillons, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État. Qu’on se moque du Parlement, on peut l’entendre,…
Moi, je ne l’entends pas !
…mais, en l’occurrence, vous avez dépassé certaines limites. S’agissant de l’évaluation du tendanciel des dépenses de l’État, vous finissez, après avoir donné toutes les possibilités de construction de ce tendanciel, par les mots suivants : « La construction du tendanciel retenu lors de la programmation 2015-2017 sera détaillée au sein des documents annexés au prochain projet de loi de finances pour 2015. » On nous donne donc des chiffres de tendanciel sur trois ans, tout en nous expliquant que nous en aurons les clés de calcul l’année prochaine.
Franchement, de telles conditions de travail sont inacceptables. Je voudrais que vous l’entendiez ! J’ai imaginé en entrant dans l’hémicycle tout à l’heure quelle aurait été la réaction du prédécesseur de l’actuel président de la commission des finances. Imaginons M. Cahuzac confronté à ces conditions de travail ! Jamais il n’aurait accepté de travailler dans de telles conditions.
C’est proprement inacceptable. Plus on avance, plus les conditions de travail montrent qu’on se moque du monde.
La méthode Coué, c’est bien, mais, franchement, elle a des limites. Je tenais à le dire, avec un peu de colère et de conviction.
Sur la forme toujours – même si c’est aussi une question de fond –, j’ai cru trouver enfin, en lisant votre calcul du tendanciel, une explication au fait que les 58 milliards d’euros d’économies dont il était question au mois de novembre 2013 sont devenus, comme par hasard, 50 milliards d’euros. En effet, j’ai cru comprendre que vous aviez gagné ainsi huit milliards d’euros en passant d’une hypothèse de hausse naturelle des dépenses de 1,6 % à une hypothèse de 1,5 %. Si ça, c’est une vision juste du débat d’orientation des finances publiques, vous me faites sincèrement peur !
Ces remarques portaient sur la forme, mais elles montrent bien une certaine impréparation. Distribuer un document le jour même, sans qu’il soit consulté par personne, sans qu’il soit étudié, sans même que vous documentiez le tendanciel avec lequel vous avez travaillé, cela montre une véritable impréparation. Je serais presque tentée de dire que cela montre l’amateurisme dont fait preuve ce gouvernement aujourd’hui. On a le sentiment qu’il manque vraiment un pilote dans l’avion France.
Parce que le débat d’orientation est tributaire des résultats d’aujourd’hui, vous m’autoriserez à revenir sur l’exécution 2013. Celle-ci est tellement éloignée du prévisionnel que vous aviez établi que je crains fort que l’avenir, c’est-à-dire les années 2014, 2015 et 2016, n’en soit fortement affecté.
Quelles étaient les prévisions du Gouvernement ?
Le rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques rendu le 17 juin dernier nous montre à quel point la réalité est éloignée de vos prévisions.
Quatre constats en ressortent, ne vous en déplaise, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État.
La réduction du déficit budgétaire est très sensiblement plus faible que prévu et la dette a continué à croître de façon importante. Malgré leur forte hausse, les recettes fiscales sont en net retrait par rapport aux prévisions. Les dépenses sont maîtrisées : elles baissent à la fois par rapport à 2012 et par rapport à la loi de finances initiale. Enfin, la Cour dénonce quelques irrégularités qui demeurent dans la gestion budgétaire ainsi que des sous-budgétisations récurrentes.
Je ne vais pas m’attarder sur ces différents constats.
Le dérapage du déficit de l’État dans l’exécution fait qu’il atteint 74,87 milliards d’euros, soit 3,6 % du PIB, alors que le déficit voté dans la loi de finances initiale pour 2014 était de 62,31 milliards d’euros. Vous voyez la différence : 12,56 milliards d’euros !
Les recettes fiscales ont été inférieures de 14,6 milliards d’euros à vos prévisions. Les hausses d’impôts ont rapporté deux fois moins que prévu.
Les trois impôts sont concernés. Selon la Cour des comptes, ces moins-values sont en grande partie liées à l’évolution spontanée des recettes fiscales, qui a été très fortement négative. Toujours selon la Cour des comptes, elles ne sont imputables que pour un quart à la moindre croissance du PIB en valeur, contrairement à ce que vous affirmez. Enfin, lors de son audition par la commission des finances le 28 mai dernier, Didier Migaud a reconnu que les prévisions de recettes « manquaient de prudence. »
Les dépenses ont atteint 298,65 milliards d’euros en 2013, soit un niveau inférieur à la prévision de la loi de finances initiale. C’est le seul constat positif que je ferai ce soir ! Grâce à des facteurs exogènes favorables, les dépenses ont été en retrait de près de 4 milliards d’euros par rapport à ce qui était prévu : la charge de la dette a diminué de 1,41 milliard d’euros, l’inflation a été moins importante que prévue – le taux d’inflation s’établit à 0,7 %, alors que la prévision était fixée à 1,75 % –, et les dépenses exceptionnelles ont été inférieures de 1 milliard d’euros par rapport à 2012.
Nous en venons à un sujet de fond : les grandes composantes de la dépense. Le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, a regretté que les dépenses d’investissement, qui diminuent, constituent une variable d’ajustement, alors que les dépenses de fonctionnement ont de nouveau augmenté. Les dépenses d’intervention baissent de 440 millions d’euros, mais pas les nouveaux dispositifs. Au-delà de la régulation budgétaire, la Cour des comptes réclame des économies structurelles et ciblées sur certaines dépenses.
Enfin, la croissance de la dette ne ralentit pas : de là vient notre grande inquiétude quant à l’avenir. La dette s’élève à 1 457 milliards d’euros à la fin de l’année 2013, soit 71 milliards d’euros de plus en un an. Cette progression de la dette est masquée par des taux historiquement bas. Les derniers chiffres publiés par l’INSEE le 30 juin dernier signalent que la dette brute a augmenté de 45,5 milliards d’euros entre le dernier trimestre 2013 et le premier trimestre 2014. Le besoin de financement pour l’année 2013 s’élevait à 186,3 milliards d’euros. La réduction du déficit budgétaire a été pratiquement compensée par l’alourdissement des charges d’amortissement de la dette de l’État et des dettes reprises.
L’encours de la dette négociable de l’État est passé de 1 386 milliards d’euros fin 2012 à 1 457 milliards d’euros fin 2013. Vous qui aimez comparer la situation actuelle à celle d’avant 2012, vous trouverez là des chiffres significatifs !
On notera une augmentation du taux de détention de la dette par les non-résidents ; ce taux passe de 62,2 % fin 2012 à 64,5 % au troisième trimestre de l’année 2013. Le problème, c’est que les amortissements atteindront un niveau record entre 2015 et 2017. L’agence France Trésor a dû conduire en 2013 une politique de rachat active pour préparer ces échéances à venir. Des craintes perdurent quant au financement pour l’année 2015.
Monsieur le ministre, le constat de la Cour des comptes est implacable. En période de faible croissance, l’effort fiscal ne peut suffire pour réduire le déficit budgétaire. La Cour des comptes estime qu’il existe un doute quant au respect du budget 2014 et de la trajectoire d’évolution des finances publiques votés par le Parlement. Le Gouvernement maintient une prévision de déficit à 3,8 % fin 2014. En réalité, le déficit devrait atteindre 4 %. Sur ce point, j’appelle à une plus grande sincérité des comptes : s’ils étaient plus sincères, vous seriez plus crédibles !
La situation de la France apparaît comme moins maîtrisée que celle de ses voisins européens. Plus particulièrement, l’écart continue de se creuser avec l’Allemagne. Les résultats français ont surtout été obtenus par l’augmentation des recettes fiscales : alors que les dépenses publiques françaises rapportées au PIB ont augmenté de 0,5 point, elles ont diminué de 0,3 point dans l’Union européenne.
Je dirai, pour conclure, que nous voyons parfaitement à quel point la politique budgétaire du Gouvernement est inadaptée à la situation économique. La méthode Coué ne suffit plus ! Il faut, à tout prix, mener des réformes courageuses, pour répondre aux priorités que sont, d’une part, la compétitivité et l’emploi, et d’autre part, le pouvoir d’achat des familles.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, comme l’a très bien dit Marie-Christine Dalloz, le rapport présenté par le Gouvernement est tout à fait indigent. Il ne nous apprend rien. Mais je ne vous en veux pas trop pour autant, car vous aurez la possibilité de passer une session de rattrapage ! Vous aurez en effet l’occasion de vous rattraper au moment de l’élaboration et de la discussion de la nouvelle loi de programmation des finances publiques, qui devrait intervenir à la fin du mois de septembre et au début du mois d’octobre. Je pense que cette loi, rendue nécessaire par le mécanisme de correction prévu par la loi organique du 17 décembre 2012, devrait constituer pour le Gouvernement une étape très importante pour, enfin, gagner un peu en crédibilité.
À ce sujet, je veux vous faire une proposition, car je pense qu’il y va de l’intérêt général. Je constate que nous connaissons, aujourd’hui, un véritable climat de défiance. Nous avons passé quinze jours à examiner les deux budgets rectificatifs : au cours de cette période, j’ai eu l’impression que personne ne croit plus en rien ! Une partie importante de la majorité exprime sa défiance ; nos concitoyens, eux aussi, expriment une défiance générale.
Tout d’abord, comme notre collègue Dominique Dord l’a très bien montré cet après-midi, lors des questions au Gouvernement – c’est d’ailleurs vous, monsieur Sapin, qui lui avez répondu –, le cap a changé par rapport aux engagements présidentiels, et par rapport aux premiers mois de la nouvelle majorité. Au-delà de cela, nous estimons, comme l’a bien expliqué Philippe Vigier, que le pacte de solidarité et de responsabilité va dans le bon sens.
Mais comment voulez-vous croire à cette nouvelle orientation, à cette volonté de baisser les prélèvements obligatoires, alors qu’elle est constamment remise en cause ? Je prendrai plusieurs exemples.
D’abord, le CICE. Il est vrai qu’au moment de sa conception, nous l’avons critiqué, car nous aurions préféré une baisse directe de charges. Mais ce dispositif, qui est en train d’être mis en place, a aussi des avantages : je le reconnais. Pourtant, nous avons examiné – et repoussé – en commission des finances des dizaines d’amendements remettant en cause le CICE, ou le soumettant à des conditions.
Mettez-vous, messieurs les ministres, à la place des chefs d’entreprise. Ceux-ci voient bien comment le CICE est traité. Ils voient bien, aussi, ce qui se passe dans la loi de finances rectificatives en matière d’impôt sur les sociétés : aucune baisse d’impôt, au contraire, on prolonge d’un an la surtaxe. Les baisses de charges patronales et salariales – qui vont dans le bon sens, je le répète – …
…sont pour l’année 2015, c’est-à-dire l’année prochaine. Nous vous avons pourtant fait des propositions, que Philippe Vigier évoquait il y a un instant. Une chose est certaine : sans confiance, il n’y a pas de redressement possible. Même les macroéconomistes avertis, qui sont nombreux à la commission des finances – je n’ai pas dit : trop nombreux, monsieur le ministre – en conviendront.
Restaurer la confiance : tel est l’objet de ma proposition.
La défiance vient de ce que l’on ne croit plus en rien, y compris à votre nouveau pacte. Elle est alimentée par des imprécisions, des zones d’ombre. Prenons l’exemple des 50 milliards d’euros d’économies annoncées : on ne sait pas vraiment où elles porteront ! Nous venons à l’instant d’apprendre, de la bouche de Christian Eckert, que des mesures dures seront prises. Je reconnais que les chiffres qu’il a donnés à l’instant témoignent d’une réelle volonté de réaliser des économies. J’en prends acte, mais je poserai deux questions.
D’abord, que se passera-t-il du côté des collectivités territoriales ? Leur dotation baissera, mais diminueront-elles vraiment les dépenses qu’elles devraient maîtriser, c’est-à-dire les dépenses de personnel et de fonctionnement ? Elles risquent, à l’inverse, de diminuer drastiquement leurs dépenses d’investissement, d’augmenter les impôts locaux, voire d’augmenter leur dette.
Deuxième question, à propos des compensations – sujet qui a empoisonné la discussion sur le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale. Nous sommes d’accord pour baisser les charges, mais il faudrait nous dire clairement comment l’État compensera les pertes de recettes pour la Sécurité sociale.
La défiance est aussi alimentée par la politique en zigzag du Gouvernement. Je ne prendrai qu’un exemple, que Philippe Vigier a évoqué tout à l’heure. Les crédits liés aux contrats d’apprentissage devaient diminuer de 800 millions d’euros ; finalement, la baisse ne sera que de 600 millions d’euros. Je me réjouis de cette différence de 200 millions d’euros, mais le Gouvernement a-t-il une doctrine ? A-t-il un cap ? A-t-il des convictions ?
Avec votre indulgence, monsieur le président, j’en viens à ma proposition.
Sourires.
Après la conférence sociale, au mois de septembre prochain, il faudrait, monsieur le ministre, réunir une grande conférence des finances publiques. Il s’agirait de réunir autour d’une table, sous la plus haute autorité possible, l’ensemble des responsables des finances publiques, c’est-à-dire l’État – vous-même, monsieur le ministre – mais également les collectivités territoriales – communes, départements, régions – et les représentants de chacune des branches de la Sécurité sociale, en ajoutant même l’UNEDIC.
Toutes ces personnes auraient une vision consolidée des comptes publics, et arrêteraient ainsi de tenir un discours syndical. J’ai lu l’avis du Comité des finances locales présidé par M. Laignel : on ne peut pas continuer comme ça, on ne peut pas continuer à accuser en permanence l’État de tous les maux, tout en lui demandant éternellement des compensations !
Nous aurions donc intérêt à réunir tout ce petit monde. Nous éviterions ainsi bien des déboires, car les chaises ne resteront pas vides. Il n’y aura pas, dans cette conférence, de CGT, de FO, pour quitter la salle. De quoi discutera-t-on ? Des interactions, parce que tout se tient, et de la nécessaire solidarité à l’égard de l’État.
On discutera de tout cela en se centrant sur la dette. Le problème de la dette devient en effet dangereux : nous atteindrons le taux de 100 % d’endettement à la fin de l’année 2015. Cela pose un vrai problème d’équité intergénérationnelle.
Je suis plutôt confiant en la nature humaine : je pense qu’un tel exercice pourrait avoir de l’intérêt. L’intérêt du Gouvernement est en effet de restaurer la confiance, par rapport à une nouvelle orientation qui n’a pas que des inconvénients.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, je commencerai par rappeler brièvement l’objectif de ce que l’on appelle le « chaînage budgétaire vertueux ». Après l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013, et après les prévisions pour l’année 2014 et le fameux pacte de stabilité, nous en venons au débat d’orientation des finances publiques.
Je regrette que nous ne disposions pas de plus de données – cela aurait été utile, notamment pour la réunion de la commission des finances qui a eu lieu hier. Je rappelle cependant à nos collègues de l’opposition que cette difficulté est naturellement liée au caractère historique des efforts en dépense qui sont engagés. Nous en avons parlé précédemment : ces efforts sont poursuivis. Il faut pour cela du temps, et de l’adaptation.
Mme Laurence Dumont remplace M. Denis Baupin au fauteuil de la présidence.
À l’occasion de ce débat, je reviendrai sur trois points. Premièrement, je veux répondre à M. le président de la commission des finances, qui ne voit pas quel est l’objectif de la politique du Gouvernement. Pour ma part, je vois bien quel est cet objectif : il repose sur un triptyque.
Il s’agit d’abord du soutien aux entreprises, avec le CICE,…
…vous l’avez rappelé, et les premières mesures du pacte de responsabilité. Il y a donc un vrai soutien à l’investissement, aux entreprises. Nous avons bien remarqué – l’INSEE nous l’a encore fait observer il y a quelque temps – que l’investissement hors immobilier des entreprises françaises baisse depuis le début des années 2000.
Il est désormais inférieur à celui de l’Allemagne et des autres grandes économies développées européennes.
Le soutien aux entreprises est ainsi le premier volet de ce triptyque. Le deuxième volet est le soutien aux ménages. Cet objectif est évidemment social, mais il fait sens également en termes de soutien à la consommation, c’est-à-dire en termes de débouchés pour les entreprises. Nous voyons bien, précisément, que l’utilisation de leur outil de production est assez faible, tout simplement parce qu’elles manquent de débouchés pour écouler les produits qu’elles fabriquent.
Le projet de loi de finances rectificative que nous venons de voter comprend des réductions d’impôts pour les ménages aux revenus les plus modestes, pour un montant total de 1,16 milliard d’euros. Enfin, ce débat confirme le redressement des comptes publics, qui est un objectif affirmé du Gouvernement, avec une baisse du déficit et une baisse des dépenses publiques.
Je souhaite aborder un deuxième point à l’occasion de ce débat d’orientation des finances publiques. Il s’agit de la capacité du Gouvernement de piloter les dépenses. Comme nous l’avons vu tout à l’heure à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013, les dépenses qui sont aujourd’hui sous norme ou qui sont pilotées ont été tenues. La question de la tenue des autres dépenses se pose donc ! Quelques chiffres pour illustrer cette description : aujourd’hui, 280 milliards d’euros de dépenses de l’État sont sous norme, sur un total de 368 milliards ; pour l’assurance-maladie, 170 milliards sur 302 sont sous norme ; pour les collectivités territoriales, 50 milliards sur 100 sont sous norme. Nous voyons bien que tout un périmètre de dépenses n’est pas normé : ce sont ces dépenses qui échappent le plus à la démarche de sérieux budgétaire engagée.
Cela nous amènera sans doute à reposer la question de ces normes à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2015. Nous verrons alors quelles dépenses il est possible d’inclure dans le périmètre des normes.
Enfin, je voudrais aborder la question de l’investissement, qui a été précisée par monsieur le ministre. L’investissement privé est soutenu par le CICE et le pacte de responsabilité. L’investissement public, quant à lui, est soutenu par le PIA 1, qui s’élève à 37 milliards d’euros, et le PIA 2, de l’ordre de 12 milliards d’euros. Au total, 6 milliards d’euros ont été dépensés, ce qui signifie qu’une quarantaine de milliards d’euros doivent encore être investis dans des projets.
J’ai une question à ce propos, messieurs les ministres : pourrons-nous disposer, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, d’un échelonnement de l’exécution de ce programme d’investissement de quarante milliards d’euros, qui est essentiel pour la croissance économique de notre pays ?
Nous comptons sur les entreprises qui bénéficient aujourd’hui du CICE et du pacte de responsabilité. Je compte également sur votre sagacité, votre enthousiasme et votre persévérance pour que ce programme d’investissement public de 40 milliards d’euros puisse être rapidement exécuté.
Je n’ai pas trouvé de réponses à cette question dans les documents que vous avez transmis.
Je salue le Gouvernement qui, contrairement à ce qu’ont affirmé certains collègues de l’opposition, a lancé un deuxième programme d’investissements d’avenir de 12 milliards d’euros, ce qui est un effort important. Nous comptons sur le versement effectif des quarante milliards d’euros qu’il reste à investir au titre de ces programmes d’investissement.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, un débat d’orientation des finances publiques ne mobilise pas forcément beaucoup de monde dans l’hémicycle.
C’est dommage, car il s’agit bel et bien de l’orientation de notre politique économique au cours des trois années qui viennent. Certes, ce débat revêt un caractère très macroéconomique, mais il est indispensable pour savoir où nous en sommes et ce que nous allons faire.
Je voudrais appeler l’attention de mes collègues sur deux sujets en particulier, la gestion du cycle économique et l’évolution des prélèvements obligatoires, en m’appuyant sur l’excellent rapport de notre nouvelle rapporteure générale de la commission des finances.
Je commence par la question de la gestion du cycle, qui revient à traiter celle du solde structurel. En commission, nous avions soulevé plusieurs difficultés. Nous avons du reste adopté, pour y remédier, un amendement sur lequel vous souhaitez revenir, ce qui ne pose aucun problème.
La vraie question est la suivante : où en est-on du cycle économique de la France ? Dans le rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques, l’écart de croissance, sur lequel repose l’état des lieux de l’économie française dressé par les lois de finances, diffère selon les quatre sources citées. Ainsi, l’écart de production est estimé en 2015 à moins 3,1 % par le programme de stabilité, à moins 3,4 % par l’OCDE, à moins 2,4 % par la Commission européenne, et à moins 2 % par le FMI. Le projet de loi de finances rectificative, quant à lui, prévoit un écart de production de moins 3 % en 2014.
Je vous avoue être incapable aujourd’hui d’indiquer où nous en sommes dans dans le cycle économique de la France. Je constate simplement que le retard de croissance keynésien est très important. En effet, un écart de croissance d’au moins 3 % en 2015, alors qu’il était d’environ 0 % en 2012 d’après les chiffres du Gouvernement, signifie qu’une grande partie du chômage s’explique par une faiblesse de la demande, selon le vocabulaire économique, c’est-à-dire une faiblesse du cycle économique.
Nous avons besoin de réponses, notamment sur la fermeture exacte du cycle de la France : quelle fut la dernière année où nous n’avons pas connu de crise de la demande ? Est-ce 2011 ou 2012 ? Quelle est la situation de notre économie aujourd’hui ?
La difficulté de la situation économique me conduit à poser une seconde question. Je salue la volonté de réduction des dépenses publiques de 21 milliards en 2015 mais, en examinant l’évolution des projections des dépenses, j’ai découvert à mon grand étonnement que le budget qui baissait le plus était celui du ministère du travail : moins 15 % en cinq ans, alors même que nous sommes dans un cycle économique très négatif, que la croissance fait défaut, et qu’il faudrait soutenir l’emploi par des emplois aidés !
En second lieu, je souhaite évoquer la question des prélèvements obligatoires. La rapporteure générale a annoncé une baisse programmée de 19 milliards d’euros des prélèvements des entreprises, baisse qui a retenu toute l’attention de l’opposition.
Ce chiffre intègre l’ensemble des mesures déjà adoptées, y compris pendant la première année. C’est considérable ! Cela signifie que nous baissons les prélèvements des entreprises, quoi qu’en disent certains grincheux du MEDEF.
La situation des ménages est beaucoup plus inquiétante. Dans son rapport, Mme la rapporteure générale évoque une augmentation de 20 milliards d’euros à l’horizon 2017. Vous allez sans doute contester ce chiffre, messieurs les ministres. Pour autant, même si cette augmentation se limite à 15 ou 20 milliards d’euros, elle risque de porter atteinte au pouvoir d’achat et à la consommation des ménages. Ne faut-il pas, dans les mois ou années qui viennent, procéder à des ajustements sur les prélèvements obligatoires pesant sur les ménages ?
Enfin, je pense, contrairement à ce qu’a dit M. Lefebvre, que ce débat d’orientation budgétaire est riche d’informations et de discussions nouvelles : il dessine une trajectoire sur trois ans et prévoit des évolutions majeures des prélèvements pesant sur les entreprises et les ménages ainsi que des dépenses publiques.
À ce stade, je retiens que notre politique économique repose bien sur deux jambes, mais l’une est peut-être un peu plus courte que l’autre. Il importe désormais de savoir si nous allons choisir d’égaliser la longueur des jambes, pour éviter que nos perspectives budgétaires ressemblent à un dahu, selon l’expression de M. Sansu, ou si nous allons en rester là.
En conclusion, notre ennemi est bien sûr le déficit de la France et notre amie est la croissance.
Il convient de ne pas attaquer notre amie. Puisque vous avez abandonné beaucoup d’ennemis ces derniers jours, monsieur le ministre, je voudrais vous citer cette phrase d’Abraham Lincoln : « La perte d’un ennemi ne compense pas celle d’un ami ».
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, une réduction limitée des déficits très en deçà des objectifs fixés, une situation actuelle des finances publiques préoccupante, une dette qui continue d’augmenter, des comptes publics plus dégradés que ceux de la moyenne européenne, des prévisions de déficit qui risquent d’être dépassés, et l’absence de réformes structurelles pour enrayer le dérapage de la dépense publique : tel est le constat, accablant et sans appel, qu’a dressé le Premier président de la Cour des comptes lorsqu’il a été auditionné par la commission des finances de notre assemblée.
Au même moment, monsieur le ministre des finances, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, vous vous félicitiez au Conseil des ministres d’une « amélioration notable et structurelle des finances publiques, d’une maîtrise des dépenses publiques et de la cohérence et de la crédibilité de la stratégie gouvernementale ».
Votre aplomb n’a d’égal que votre déni face à l’échec de votre politique. Les satisfecit que vous vous adressez n’ont pour contrepartie aujourd’hui qu’une inertie irresponsable, qui conduit chaque jour un peu plus notre pays vers ce qui ressemble à une catastrophe économique et sociale.
Malgré tout, vous restez optimistes. Vous êtes bien les seuls : 80 % des Français ne sont pas confiants, quand 80 % des Allemands ont une grande confiance dans leur gouvernement. La Commission européenne, le Haut conseil des finances publiques et la Cour des comptes ne le sont pas davantage. En effet, toujours le même scepticisme règne du côté de la rue Cambon sur vos prévisions de déficit et de croissance. Vous tabliez sur 3,6 % de déficit, vous annoncez finalement 3,8 % et la Cour des comptes l’estime à 4 % au mieux, si et seulement si votre prévision de croissance était la bonne.
Mais, là encore, comme vous l’avez surestimée, puisque de 1 % elle se réduira comme peau de chagrin à 0,4 %, le déficit dérapera encore forcément cette année. La prévision du déficit n’est pas affaire de prédiction et la méthode Coué n’a pas sa place en matière de croissance.
Cette année encore, vos objectifs gouvernementaux ont, vous me pardonnerez l’expression, du plomb dans l’aile : au minimum 5,3 milliards d’euros de recettes fiscales en moins ont, en effet, de quoi ralentir sérieusement une trajectoire, que vous nous annonciez toute tracée.
Du côté des dépenses, les délestages intempestifs auxquels vous procédez en cours d’année et, surtout, le faible niveau de l’inflation et la baisse de la charge d’intérêts de la dette vous permettent peut-être de maintenir à peu près le cap cette année, mais gare aux imprévus qui provoqueraient de dangereuses secousses ! Et je ne parle même pas des 21 milliards d’économies que vous projetez de réaliser en 2015, dans le cadre du plan de 50 milliards d’économies sur la période 2015-2017, qui resteront malheureusement un voeu pieu, irréalisable en l’absence de profondes réformes.
Là encore, la Cour des comptes ne vous suit pas, puisqu’elle précise que vous n’avez documenté que 30 milliards sur les 50 milliards annoncés. De la même façon, elle ne vous suit pas quand vous prétendez ramener le déficit public sous la barre des 3 % et stabiliser la dette en 2015.
La seule certitude que vous pouvez avoir, messieurs les ministres, est la suivante : tant que de véritables réformes structurelles, telles que la réduction du nombre de fonctionnaires, la flexibilité et la durée du travail, le recul de l’âge de la retraite et la baisse des charges sociales, ne seront pas décidées, l’embellie économique et sociale que vous nous promettez restera une belle illusion.
Pourquoi vous évertuer à prévoir le meilleur, alors que les Français n’ont justement plus aucune illusion et découvriront, de toute manière, le pire, d’autant que ces erreurs de prévisions devront être payées. Et qui paiera, sinon les entreprises et les classes moyennes déjà étranglées fiscalement ? Faute d’économie budgétaire d’envergure, c’est inévitable.
Le recours à l’impôt marginal injuste accélérera des mouvements migratoires déjà bien entamés et finira d’épuiser le potentiel fiscal de notre pays. Les annonces faites aux entreprises se réduiront à un tour de passe-passe : vous promettez des baisses de charges, mais ce ne seront que des minorations de hausses prévues.
Pire, vous reprendrez d’une main ce que vous aurez accordé de l’autre. La Cour des comptes l’a d’ores et déjà annoncé : sur les 35 milliards d’euros d’allégements issus du pacte de responsabilité pour les entreprises, vous augmentez parallèlement d’autres prélèvements pour un montant de 21 milliards.
Comment pouvez-vous afficher un tel enthousiasme, quand la France continue à détruire des emplois ? Comment notre ministre du travail peut-il se contenter de vouloir ramener le taux de chômage de 10,5 % à 9,5 %, quand l’Allemagne et l’Angleterre sont quasiment en situation de plein-emploi ? Cette ambition traduit l’aveu d’impuissance d’un Gouvernement qui a fait sienne la vieille rengaine mitterrandienne : en matière de lutte contre le chômage, on a tout essayé.
Le chômage serait donc toujours une fatalité pour les socialistes. Nos partenaires européens nous prouvent le contraire. Alors que les Allemands, les Anglais, les Suédois, et les Canadiens ont entrepris des réformes de structures avec les succès que l’on sait, vous avez déjà perdu deux ans à vendre du politiquement correct de gauche, entretenant une routine idéologique impuissante à retrouver les chemins de la croissance.
Si votre pacte de responsabilité laisse entrevoir l’abandon de vos vieilles doctrines, il pêche, hélas, par sa tardiveté, son manque d’audace pour regagner le terrain perdu et j’ai peur qu’il ne s’enlise dans des tergiversations budgétaires interminables au sein même de votre propre majorité. Nous venons d’en être les témoins.
J’espère que vos bonnes intentions affichées envers les entreprises et les classes moyennes ne céderont pas devant le front politique et social auquel vous devrez faire face. Enfin, vous l’avez compris, je suis loin de partager votre enthousiasme sur les perspectives de nos finances publiques et sur le destin vers lequel vous engagez la France.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je m’interrogerai sur le contexte global dans lequel nos recettes sont envisagées, sur les diminutions de dépenses notamment en matière d’investissement et enfin sur l’impact de la hausse de la dette, qui devrait être l’élément majeur de l’exécution budgétaire 2015.
Les recettes, d’abord. La pression fiscale a considérablement augmenté au cours des exercices 2013 et 2014. C’était votre choix. Pourtant, dans l’exécution, on a plutôt constaté des moins-values en la matière. Nous avons eu des débats en commission des finances, mais la vacuité des réponses de l’administration du budget en charge de ces anticipations m’a conforté dans l’idée que tout le monde navigue à vue sur cette question.
Le Gouvernement serait bien inspiré d’être particulièrement modeste lorsqu’il annonce des baisses d’impôts à des contribuables chauffés à blanc par une hausse sans précédent de leurs impôts ; il risque de se voir reprocher, par un effet « boomerang », les mesures rassurantes promises aux classes moyennes pour 2015.
Sur le volet recettes, il faudra, dans le cadre de la construction budgétaire globale, s’interroger sur le fait que le coin fiscal français, l’un des plus élevés de l’OCDE, modifie quotidiennement le comportement de nos concitoyens.
L’évitement de l’impôt est, dans de nombreux secteurs, flagrant. Et je ne parle pas de ceux qui quittent le territoire. La politique fiscale, telle qu’elle est construite aujourd’hui, empiète sur notre croissance. Elle altère la dynamique de nos recettes : de ce cercle vicieux vous ne sortirez pas en 2015.
À titre d’exemple, il faudra attendre fin 2016 pour que l’effet économique du CICE devienne supérieur à l’impact négatif induit par les mesures prises pour le financer.
L’effort sur la maîtrise des dépenses de l’État en 2014 est indéniable et je tiens à le souligner à mon tour, comme l’a fait le président de la commission des finances. Le Gouvernement a annoncé dans ses lettres de cadrage une accélération de ce mouvement : je ne peux que m’en réjouir. Toute autre attitude eût été incohérente avec les propos que j’ai pu tenir ici, à cette tribune, lors des discussions budgétaires précédentes.
Il y a quelques bonnes notes quand même !
Cependant, quand on y regarde de près, j’ai quelques doutes sur certaines coupes drastiques, et notamment celles pesant sur les collectivités territoriales. En ce moment, elles font leurs comptes. À Lyon, le maire et président de l’agglomération a annoncé qu’il allait baisser de moitié son programme d’investissement. À Strasbourg, c’est la même chose. À Orléans, nous allons, à l’échelle de l’agglomération, diminuer dans les mêmes proportions le niveau de nos investissements.
Pourquoi ? Tout simplement parce que la baisse des dotations de l’État affecte directement l’auto-financement de ces mêmes collectivités, lesquelles ont déjà supporté toute une série de charges qu’elles ont dû absorber cette année, fruit de décisions prises non par elles mais par l’État.
Baisse de l’autofinancement, baisse de la capacité d’emprunt, et donc baisse des investissements. Dois-je rappeler que l’investissement des collectivités représente 50 milliards d’euros, soit les trois quarts de l’investissement public ? On va donc droit vers une diminution d’environ 20 milliards des dépenses d’investissement des collectivités locales, ce qui représente une baisse de 1 % de PIB de croissance structurelle pour 2015.
Souvenez-vous de l’efficacité du remboursement anticipé du FCTVA sur la croissance 2010-2011 ! Les proportions étaient mêmes : 10 milliards d’euros ont été injectés dans les collectivités locales, et l’effet a été immédiat sur leurs investissements. C’est dire que la baisse d’un quart de la dotation de l’État à ces mêmes collectivités va avoir un impact majeur sur des secteurs économiques très consommateurs de main-d’oeuvre. Et c’est d’autant plus paradoxal que le Gouvernement pousse l’Europe à investir dans les territoires. Comprenne qui pourra !
Ma troisième inquiétude porte sur la dette. Elle dépassera 100 % du PIB au plus tard au premier trimestre 2015. Aussi vivons-nous une époque paradoxale : les banques centrales émettent beaucoup de monnaie, et, devant, de concert avec les acteurs institutionnels, constituer des réserves en euros, elles cherchent des emprunteurs importants. Parmi eux, seule la France émet plus de dette qu’elle n’en rembourse. Cette situation constitue pour les investisseurs une aubaine. C’est pour nous, évidemment, un piège.
Un piège terrible, pour notre futur et pour notre situation budgétaire à venir. Pour la première fois depuis vingt-six mois, dans la situation budgétaire de la France pour le mois de mai, le paiement des intérêts progresse. Il avait régulièrement baissé lors des mois précédents. Il s’agit donc d’un point d’inflexion de la baisse de la charge de la dette à l’intérieur de nos propres comptes, alors même que les taux d’intérêt sont particulièrement favorables, puisque nous avons atteint des niveaux historiquement bas. Nous avons donc accru notre vulnérabilité, et nous pourrions le payer très cher.
Pour conclure, l’élaboration du budget pour 2015 va être périlleuse. De nombreuses hausses de recettes justifiées par le lancement du CICE sont déjà encaissées à un niveau plus faible qu’attendu alors que le versement aux entreprises, qui a démarré en 2014, va progresser de 50 % en 2015. On ne voit pas à l’horizon un redémarrage de la croissance, notamment pour les raisons que j’ai indiquées en préambule. Les orientations que le Gouvernement a esquissées ne peuvent être réalistes que si, en même temps, il donne aux acteurs économiques les moyens de s’adapter, aux collectivités territoriales et aux entreprises plus de liberté, et plus de souplesse au marché du travail ainsi qu’au secteur du logement.
Bref, les orientations budgétaires telles que vous les présentez aujourd’hui ne peuvent s’envisager que dans un cadre beaucoup plus général de réforme structurelle du pays. Je vous souhaite donc bon courage !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons, dans cet hémicycle comble, un devoir de vérité à l’égard des Français. La politique meure des postures et des impostures, qui sont autant de petites lâchetés.
Il y a des morts vivants !
Essayons d’en sortir pour tirer notre pays vers le haut. De quoi parlons-nous ? D’un vieux pays, le nôtre, qui a choisi, au fil du temps, de s’enfoncer dans la dépense, le déficit et la dette publique. Ouvrons les yeux : depuis bientôt quarante ans, la France a exprimé une préférence collective pour la dépense à crédit, reportée sur les générations suivantes. Il faut remonter à 1980, c’est-à-dire au gouvernement de Raymond Barre, sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing…
Sourires.
…pour trouver le dernier excédent des administrations publiques, à 0,2 % du PIB – j’avais quatre ans. La dette publique ne dépassait pas, alors, 21 % de la production nationale. Elle s’approche aujourd’hui de 100 %. Si je tiens à rappeler ce chiffre vertigineux, mes chers collègues, c’est pour preuve de ma bonne foi. Ce n’est pas l’élection de 2012 qui a ipso facto dégradé les comptes publics. Le mal est très ancien.
Mais rien n’indique, hélas, que vous soyez capables de guérir le malade. Qu’avez-vous décidé ? Vous avez d’abord choisi, depuis deux ans, de faire subir à l’économie française un choc fiscal récessif sans précédent.
Suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires, augmentation du forfait social, gel partiel du barème de l’impôt sur le revenu, réforme des prélèvements sociaux des travailleurs indépendants, cotisations au salaire réel pour les salariés à domicile, contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, plafonnement des niches fiscales, nouvelles tranches d’impôt sur le revenu, abaissement de l’avantage procuré par le quotient familial : la liste, non exhaustive, est fastidieuse. La facture l’est plus encore. Ce sont, nous le savons, plus de 50 milliards d’euros d’impôts nouveaux qui ont été prélevés sur les Français depuis l’élection de M. Hollande à l’Élysée, et qui se sont ajoutés, c’est vrai, aux milliards d’euros prélevés sur la décision du gouvernement de François Fillon.
Le taux de prélèvement obligatoire était de 43,8 % en 2011. Il est désormais, nous le savons, de 45,9 %, triste record historique, à 7 points au-dessus de la moyenne européenne. Le bombardement fiscal est tellement disproportionné qu’il pourrait être enseigné, demain, comme une parfaite illustration de la fameuse courbe de Laffer. C’est ce que montre l’exécution du budget de 2013 : les hausses d’impôt ont rapporté deux fois moins que prévu, les recettes fiscales sont inférieures de plus de 14 milliards d’euros à ce qui était prévu dans la loi de finances initiale.
La faiblesse des taux d’intérêt a heureusement permis de diminuer la charge de la dette et de contenir les dépenses. Mais cela ne suffit pas à limiter le dérapage du déficit de l’État, qui s’élève à près de 75 milliards d’euros, soit 12 milliards de plus que ce qui avait été voté.
La dette continue donc à exploser. Elle s’élève à 1 457 milliards d’euros à la fin de l’année 2013, soit une augmentation de plus de 71 milliards d’euros en un an. La vérité, mes chers collègues, est que la capacité de financement de la France ne peut que se dégrader, l’encours des emprunts à rembourser, 104 milliards d’euros cette année, 144 milliards en 2015, plaçant la France dans la main des marchés financiers et de ses créanciers étrangers.
Une remontée des taux d’intérêt pourrait nous plonger demain, ou après-demain, dans une situation financière catastrophique. La Cour des comptes ne s’y trompe pas, qui juge que « les efforts d’ajustement restent en deçà de ce qu’exige la situation actuelle des finances publiques et demeurent fragiles en l’absence de mesures structurelles ».
Messieurs les ministres, vous avez la chance d’être au pouvoir. Alors exercez-le pleinement ! Arrêtez de jouer la montre en multipliant les colloques, les conférences sociales, les commissions et les rapports ! Interdisez, autant que possible, à vos collègues des ministères dépensiers de faire voter un fatras de normes et de charges nouvelles qui désespèrent les Français qui veulent travailler. Cessez de faire semblant ! Secouez les conservatismes ! Recentrez l’État sur ses missions régaliennes ! Coupez les branches mortes ! Expliquez et assumez vos choix. N’écoutez pas Karine Berger !
Sourires.
Mettez vraiment la France en mouvement ! Bref, cessez, définitivement, d’être socialistes ! Si vous n’y parveniez pas, la France continuerait à s’enfoncer un peu plus chaque année, pour le malheur des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)
À cette heure-ci, et devant cette nombreuse assistance, je ne voudrais pas être trop long, mais la moindre des choses est de nourrir le débat, qui est intéressant, avec quelques éléments de réponse.
Ce débat d’orientation, nous y prenons part pour nous écouter, les uns et les autres, sans jamais, monsieur Larrivé, renoncer à ce qui est au fondement même de nos valeurs et de nos engagements politiques. Nous sommes là pour débattre, parfois même pour nous disputer, s’il le faut : cela fait partie du débat démocratique que j’ai toujours plaisir à avoir avec vous, monsieur Sansu.
Lorsqu’on est au pouvoir, il y a des choses que l’on sait faire, et d’autres que l’on a du mal à faire. Que savons-nous faire aujourd’hui ? Nous savons piloter la dépense publique. Nous l’avons fait en 2013 et en 2014. Et nous vous proposons de le faire, dans des conditions relativement précises, en 2015, qui nous permettent d’avoir des perspectives pour 2016 et pour 2017. Toutes celles et tous ceux qui demandent à ce que les choses soient plus documentées – pour reprendre ce terme épouvantable – ont parfaitement raison de le vouloir, de le souhaiter. Nous le faisons par étapes, et évidemment, lors du débat sur le projet de loi de finances initiale pour 2015, nous aurons à préciser les choses. Ça nous savons le faire, pour chaque mission, chaque ministère, tout en respectant nos priorités. Piloter la dépense publique, même à la baisse, ne veut pas dire ne pas avoir de priorités, lesquelles peuvent se traduire par des dépenses en augmentation.
S’agissant, par exemple, de la mission « Travail », que je connais bien, si on l’examine à l’horizon de 2017, il paraît légitime, dès lors que nous nous battons pour qu’il y ait moins de chômage, de considérer que les dépenses publiques diminueront dans ce domaine-là. Ces éléments sont en corrélation. Je l’avais moi-même expliqué lorsque j’étais ministre du travail, et je ne vois pas pourquoi cela changerait aujourd’hui, à moins que l’on ne considère que nos politiques sont par définition vouées à l’échec, y compris dans le domaine du chômage.
Il existe une deuxième catégorie de décisions que nous savons prendre – et ce n’est pas toujours simple –, il s’agit des mesures fiscales nouvelles.
Il est arrivé à tous les gouvernements de prendre des mesures de hausse fiscale. Elles peuvent être discutées, et même disputées. Ce que nous constatons, aujourd’hui, c’est que « ça suffit », pour reprendre une expression du Premier ministre. Aujourd’hui, qu’il s’agisse de redonner des marges aux entreprises – baisses de cotisations ou baisses d’impôt – ou du pouvoir d’achat aux ménages, en particulier aujourd’hui les plus modestes, c’est par des mécanismes de diminution des cotisations ou de l’impôt que nous souhaitons pouvoir le faire.
Faut-il le faire plus – certains ont dit que, si notre politique marchait sur deux jambes, l’une était plus grande que l’autre ? Cela fait tout à fait partie du débat, je le comprends absolument. Mais nous marchons bien sur deux jambes : jamais je n’oppose la politique de l’offre à la politique de la demande. D’ailleurs, je ne comprends pas toujours les termes : tout ce que je sais, c’est qu’il faut qu’il y ait plus d’activité, plus de capacité de travail dans les entreprises, les commerces, ainsi que chez les artisans, parce que c’est ainsi que se recréeront les emplois qui sont absolument nécessaires pour lutter, dans la durée, contre le chômage.
Je sais aussi faire quelque chose qui est très important, et qui a été souligné par les uns et par les autres – M. Alauzet n’est pas parmi nous mais d’autres députés en ont parlé – : lutter contre la fraude et l’optimisation fiscales. Je trouve qu’en la matière, avec Christian Eckert, nous avons des sujets de satisfaction.
Je ne veux pas traiter uniquement de la sortie de l’ombre de ces comptes qui étaient cachés à l’étranger. Elle nous permet aujourd’hui de récupérer un certain nombre d’arriérés d’impôt et de pénalités, et elle nous permettra demain d’élargir la base d’imposition, qu’il s’agisse des revenus que procurent ces sommes ou de l’impôt sur la fortune qui leur sera appliqué. Nous savons et nous nous battons, et cela ne peut se faire qu’au niveau européen et international, contre l’optimisation fiscale car il y a là, encore, des batailles à mener pour éviter que, par des mécanismes que chacun ici connaît bien – mère-fille, notamment –, on obtienne des prix de transfert tout à fait anormaux. Certaines entreprises échappent totalement, chez nous comme ailleurs, à l’impôt. Un mécanisme qui permet à une entreprise qui gagne beaucoup d’argent de ne payer des impôts nulle part est totalement amoral et anormal. c’est pourquoi nous luttons contre de tels dispositifs.
Je sais également quelles sont les mesures susceptibles de permettre à notre croissance de reprendre. Certes, on peut s’interroger sur son niveau, son rythme et sa place dans le cycle économique. Mais j’ai une conviction à ce sujet : les modèles d’hier ne sont plus les modèles d’aujourd’hui et de demain. Quelque chose de très profond s’est passé. La crise que nous avons connue n’est pas unique : elle consiste en une juxtaposition de crises.
Cette juxtaposition a profondément remodelé des éléments qui faisaient consensus dans le fonctionnement de notre économie, et qui aujourd’hui suscitent plutôt des interrogations, me semble-t-il. Mais il y a une chose dont je suis persuadé, c’est que nous ne retrouverons plus des niveaux de croissance de 3 ou 4 %, quel qu’ait été le retard ou le potentiel. C’est la raison pour laquelle le degré, l’enrichissement en emplois de notre croissance est un élément absolument décisif de la bataille.
Voilà pourquoi nous nous battons pour la transition écologique, qui, certes, apporte peu de croissance mais crée beaucoup d’emplois et, grâce à la diminution des dépenses contraintes – celles qui pèsent le plus sur le budget des ménages – libère du pouvoir d’achat.
Il y a ce que nous savons faire et ce qui en résulte : le niveau de croissance, et celui du déficit. Débattons aujourd’hui de ce que le politique sait faire et de ce qu’il peut décider. Nous vous proposons de maîtriser et de diminuer les dépenses publiques de façon ciblée et intelligente. Car certaines dépenses publiques, celles qui concernent la jeunesse, la recherche et l’innovation, sont essentielles pour préparer l’avenir ; d’autres sont indispensables à la croissance : ce sont les dépenses d’investissement, qu’elles soient consenties par les collectivités locales, l’État ou le secteur privé.
Nous reparlerons des dispositions fiscales, s’il doit y en avoir de nouvelles en 2015, en faveur des classes moyennes tout particulièrement – je vous ai écouté avec beaucoup d’intérêt, monsieur Alauzet.
Le reste tient à la scène internationale et à ce que nous serons en mesure de faire au niveau européen, tant en matière d’investissement que de politique monétaire. Mais à quoi cela sert-il d’avoir une bonne politique monétaire – mieux adaptée à notre situation – si nous n’avons pas les outils qui nous permettent de faire redescendre ses effets bénéfiques jusque dans nos entreprises ?
Oui, l’investissement est au coeur du sujet ! Nous ne parviendrons à retrouver une croissance durable que grâce à des investissements de qualité, à même de créer des emplois et de transformer notre société, y compris du point de vue écologique. C’est donc bien à des assises de l’investissement et de son financement, que le Président de la République nous à invités à lancer, que j’ai l’intention de convier M. le président Carrez, et non à je ne sais quelles assises de la dépense publique.
Effectivement, madame Berger, je distingue la bonne finance : en être l’ami n’empêche pas de ressentir de l’aversion pour la mauvaise finance. Combattre la mauvaise finance, c’est mettre en valeur celle qui permet, grâce aux prêts qu’elle consent, de financer le budget – puisqu’il demeure malgré tout quelques déficits ! – et de financer les investissements, porteurs de transformation et d’emplois, des entreprises, de l’État et des collectivités locales.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :
Suite de la discussion en deuxième lecture du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures trente-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly