A contrario, nous nous félicitons que les débats au sein de nos deux assemblées aient permis de faire évoluer le texte en privilégiant l’adoption directe des mesures envisagées, sans faire à chaque fois le choix des ordonnances. C’est ce qui s’est passé avec la réforme du tribunal des conflits.
Je terminerai en développant, si vous le permettez, les dispositions de ce projet de loi relatives à la Polynésie française. Nous nous félicitons que le groupe UDI ait permis, grâce à l’action de mon prédécesseur, M. Édouard Fritch, et de mes collègues Jean-Paul Tuaiva et Jonas Tahuaitu – que je salue au passage –, de faire évoluer le texte par l’adoption de plusieurs amendements qui représentent des avancées significatives pour la Polynésie française. Un tribunal foncier sera enfin créé : je rappelle que le principe d’un tel tribunal avait été acté dans le statut d’autonomie de la Polynésie française révisé en 2004, mais qu’en dix ans, ce principe n’avait pas été traduit en actes. Je remercie tout particulièrement Mme la rapporteure pour son soutien actif, de même que M. le président de la commission des lois et – bien entendu – Mme la ministre de la justice, qui a porté une attention particulière à cette demande cruciale pour la majorité des familles polynésiennes.
Permettez-moi de vous donner certaines informations qui justifient que l’on donne la priorité à cette question. Si le partage à l’amiable est le plus courant dans la plupart des régions françaises, ce n’est pas le cas en Polynésie : il faut bien prendre cela en compte. En Polynésie, les partages se font essentiellement par voie judiciaire. Or en l’état actuel de nos moyens, il nous faudrait vingt ans pour épuiser le stock de dossiers. Ce n’est pas acceptable !
Il s’agit donc de trouver une solution concrète pour traiter plus efficacement et plus rapidement les affaires dites « de terres » dont le nombre a triplé en dix ans, s’établissant aujourd’hui à environ 1 800 dossiers. À ce titre, la Polynésie a été sensible à la réactivité de l’État. La chancellerie a dépêché en septembre deux missions – nous vous en remercions sincèrement, madame la ministre – pour analyser les besoins matériels nécessaires à l’amélioration du fonctionnement du palais de justice qui accueillera prochainement le tribunal foncier, et pour évaluer la faisabilité d’une adaptation du code civil pour prendre en compte nos spécificités en matière de droit des successions.
J’insiste sur ce dernier point, mes chers collègues : cette adaptation de notre code civil est tout aussi fondamentale que la création même du tribunal foncier. En clair, la création de ce tribunal n’aurait qu’un impact limité si nous n’allions pas au bout d’une réforme de fond. Tous les acteurs polynésiens qui travaillent sur cette question pourront vous le confirmer, et je pense que les missions de la chancellerie en ont vraiment pris conscience – du moins, je l’espère. Cette réforme législative est nécessaire, compte tenu des circonstances et des réalités de l’histoire polynésienne.
Permettez-moi de vous rappeler quelques données : la Polynésie Française est un territoire de 270 000 habitants répartis sur 118 îles, éparpillées sur une surface maritime très vaste, grande comme l’Europe.
Rendez-vous compte de l’ampleur du travail que peut représenter un dossier de sortie d’indivision, ne serait-ce que sur le plan matériel !
Sachez aussi que la population polynésienne est encore composée de familles dites élargies. Les patrimoines, quant à eux, sont composés de biens indivis, issus de biens de familles remontant souvent au XIXe siècle.