Intervention de Alain Marsaud

Séance en hémicycle du 16 avril 2015 à 9h30
Renseignement — Article 3

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Marsaud :

S’agissant des lanceurs d’alertes, je trouve que l’on commence à être imprudent à force de banaliser le système. Moi, je me dis qu’il y a certaines personnes à côté desquelles je n’aurais pas voulu habiter en 1940 ! Qu’est-ce qu’on est en train de créer au sein des services de renseignement, mes chers collègues ? Nous sommes un certain nombre ici à avoir, disons « vécu » avec ces services, éventuellement à avoir collaboré ou travaillé avec eux, et certains d’entre vous en sont les responsables. Nous sommes en train de créer, non pas un OVNI, mais ce que j’appelle un « ARNI », un agent de renseignement non identifié. Nous savons tous que, dans ces services, travaillent des hommes et des femmes qui ont…du caractère, pour ne pas dire plus. Ce sont des gens compliqués dans leur fonctionnement personnel : on n’est pas à la Croix-Rouge ! Tous réalisent des opérations qui sont parfois « à la limite », ce qui requiert une certaine forme de personnalité. Très souvent, on le sait, il existe de véritables conflits entre le chef du service de renseignement et le numéro 2, le numéro 3 ou le numéro 40, qui vont déboucher sur des conflits d’exercice de fonctions. Si cet amendement est adopté, on va inciter le fameux lanceur d’alerte à aller dénoncer, avec le risque que cela déstabilise le service.

Bien sûr, je suis favorable à un contrôle, et je pense même que cela pourrait contribuer à rendre les chefs de service de renseignement plus prudents. Mais là, il s’agit véritablement d’incitation à la dénonciation et à la délation, et non plus de contrôle. Je vous avoue être très réservé sur cet amendement.

En outre, comme l’a rappelé Guillaume Larrivé, il existe, Dieu merci !, l’article 40 du code de procédure pénale, qui, lorsqu’on est en présence d’une infraction – et non pas de faits « susceptibles » d’en constituer une –, fait obligation au fonctionnaire, à l’officier public ou à l’autorité constituée de la dénoncer au procureur de la République. Sincèrement, il serait plus sage de s’en tenir à une bonne interprétation de cet article 40, plutôt que de se lancer dans la mise en place d’un mécanisme de dénonciation pure et simple, qui va déstabiliser nos services et fera régner une ambiance épouvantable.

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