Trois faiblesses caractérisent le raisonnement des rapporteurs.
Premièrement, ils se sont appuyés sur les données du RSI, tout en reconnaissant que celles-ci sont floues. Le rapport note, page 13, que « le RSI ne dispose d’aucune vision en direct sur les flux d’encaissement et de paiement » et, page 15, que les rapporteurs n’ont pas pu obtenir d’état précis et global des solutions de contournement existantes du système d’information défaillant et de leur impact, la gestion des dysfonctionnements se faisant au prix d’un surinvestissement humain « qu’il n’a pas été possible de quantifier ». Pour remédier à ce problème, nous proposons à l’article 8 de la proposition de loi un contrôle accru du RSI par la Cour des comptes.
Deuxièmement, malgré ce manque de données précises, les rapporteurs prennent pour thèse principale, page 8 du rapport, que les anomalies constatées aujourd’hui seraient liées au fait que le RSI fonctionnerait bien mieux qu’avant, ce qui aurait fait ressurgir des problèmes de taxation pour les années où il fonctionnait mal et serait générateur d’incompréhension ou de colère. Voilà qui est contre-intuitif, et surtout faux, car, malheureusement, les dysfonctionnements perdurent bel et bien, comme le démontrent d’ailleurs les rapporteurs qui estiment, en page 14, qu’« il est à craindre qu’une part non négligeable des dysfonctionnements soit appelée à perdurer tant que l’architecture des systèmes d’information ne sera pas totalement revue et transformée » : cela prouve qu’un « ripolinage » ne suffira pas. Les dysfonctionnements du RSI ont une cause structurelle, fort bien soulignée dans le rapport, liée à son organisation informatique.
Troisièmement, les rapporteurs se trompent d’outil et de combat, en proposant de s’appuyer sur un RSI « new age » pour restaurer la confiance, alors qu’ils reconnaissent eux-mêmes que le climat de méfiance envers le régime n’a cessé d’empirer depuis la fin de l’année 2014 pour des raisons structurelles, et cela alors même que Marisol Touraine pronostiquait ici même en novembre 2013, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, que « l’année 2014 verra[it] la résolution de ces problèmes. » On ne résout pas les problèmes logistiques d’une entreprise en nettoyant la vitrine !
Faute de recommander le changement de la colonne vertébrale informatique du RSI, le rapport multiplie les mesurettes cosmétiques. Il suggère d’améliorer la qualité de service par internet, alors qu’il indique, en page 11, que seulement un tiers des assurés utilisent les moyens dématérialisés. Il souhaite rendre plus lisible les courriers du RSI en revoyant les modèles de lettres, alors que le problème est plutôt dans les additions de chiffres. Il promeut naïvement des « réunions Tupperware » avec les partenaires, pour faire de la sensibilisation.
Alors que le rapport Verdier-Bulteau prescrit de l’homéopathie pour patienter, nous réclamons, nous, des antibiotiques pour guérir. Au travers de cette proposition de loi, nous souhaitons qu’en attendant la chirurgie lourde, les dysfonctionnements structurels ne handicapent pas la vie des entreprises et nous proposons que ce soit le Parlement qui restaure la confiance dans le RSI en contraignant ce dernier à une réforme copernicienne.