La Constitution est le coeur même de la République. Son éventuelle modification doit rassembler une majorité qualifiée de parlementaires. Elle ne peut concerner, tant la procédure est lourde, que des aspects importants du texte fondateur ; de minimis non curat praetor, pourrait-on soutenir.
En 2008, la réforme constitutionnelle ne fut adoptée, grâce aux radicaux, qu’à une voix de majorité, alors même qu’elle instituait des droits nouveaux, notamment la question prioritaire de constitutionnalité. Aujourd’hui, nous sommes saisis d’un texte qui peut paraître important, à savoir remplacer l’adjectif « simple » par l’adjectif « conforme » en ce qui concerne l’avis que le Conseil supérieur de la magistrature donne sur la nomination des membres du parquet. Admettons que convoquer le Parlement pour une modification aussi minime est au mieux suspect, et le rapprochement que certains ne manquent pas de faire avec l’abandon de la révision visant à inscrire la déchéance de nationalité dans la Constitution renforce notre scepticisme. Si l’affaire était si vitale pour les intérêts de la Nation, on n’aurait pas attendu plus de deux années avant de nous ressaisir du texte adopté par le Sénat.
Ces observations ne sont que de pure forme. Il en va autrement du fond, car il faudra nous convaincre de la nécessité républicaine de suivre en tout moment les propositions du CSM et de l’inscrire dans la Constitution alors même que depuis 2008 s’est précisément établie la coutume de suivre ces avis. Il est bien vrai que ces dernières années les pouvoirs du ministère public ont été profondément renforcés, au détriment d’ailleurs des magistrats du siège et du juge des libertés. Ces derniers s’en plaignent avec véhémence. Il est donc paradoxal de renforcer les pouvoirs du parquet sans assurer un renforcement de son contrôle. Il faudrait, jusqu’à l’absurde, suivre les propositions de nomination des procureurs. Si le CSM proposait la nomination de Fouquier-Tinville, dont chacun se rappelle le talent, il faudrait immédiatement l’accepter. Quel abandon du pouvoir politique !