Intervention de Jérôme Lambert

Séance en hémicycle du 15 juin 2016 à 15h00
Exercice par la croix-rouge française de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Lambert :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous sommes réunis pour l’examen de la proposition de loi relative à l’exercice, par la Croix-Rouge française, de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux. En effet, comme l’a rappelé Mme la rapporteure Françoise Dumas, le Président de la République a réaffirmé, à l’occasion du 150e anniversaire de la Croix-Rouge française le 21 juin 2014, le rôle d’auxiliaire des pouvoirs publics de cette association, notamment dans le cadre de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux.

La Croix-Rouge française, association fondée le 25 mai 1864, a été reconnue d’utilité publique par la loi du 7 août 1940. Elle est ainsi considérée comme une société de secours volontaire, autonome et auxiliaire des pouvoirs publics dans le domaine humanitaire. Mais cette reconnaissance d’utilité publique ne lui retire pas son autonomie à l’égard des pouvoirs publics, laquelle lui permet d’agir de manière indépendante.

L’article 1er de ses statuts précise qu’elle a pour but de prévenir et d’apaiser les souffrances humaines, en toute impartialité et sans aucune discrimination. Elle exerce ses missions dans cinq domaines : l’urgence et le secourisme, l’action sociale, la santé, la formation et la solidarité internationale.

Il faut d’ailleurs rappeler que plus de 50 000 bénévoles oeuvrent auprès de la Croix-Rouge française pour répondre aux besoins des personnes ayant subi un préjudice du fait d’une situation humanitaire complexe.

De plus, aux termes des conventions de Genève et des statuts du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, la Croix-Rouge française s’engage à apporter son aide dans toutes les calamités publiques et dans le domaine de la sécurité civile au titre d’auxiliaire des pouvoirs publics. Elle doit aussi diffuser les principes fondamentaux du Mouvement et du droit international humanitaire afin de développer les idéaux de paix, de tolérance et de compréhension. Elle exerce également une mission de rétablissement des liens familiaux afin de maintenir ou de rétablir les liens entre les membres d’une famille et de faire la lumière sur le sort des personnes portées disparues en raison d’un conflit, d’une catastrophe d’origine humaine ou naturelle ou de toute autre situation ayant une incidence sur le plan humanitaire.

C’est précisément ce rôle pivot de la Croix-Rouge française que la proposition de loi dont nous discutons a pour ambition de renforcer. En effet, la mission de rétablissement des liens familiaux s’organise autour de quatre activités : la recherche des membres de la famille ; l’appui à la démarche de réunification familiale ; la transmission de nouvelles aux familles lorsque tous les moyens de communication sont bloqués ou inaccessibles ; la délivrance, enfin, de certains documents par le Comité international de la Croix-Rouge, pour faire valoir un droit, ou par les États.

Des critères stricts sont appliqués pour faire droit aux demandes, en particulier l’existence d’un lien familial ou le fait que la rupture a été causée par une situation humanitaire, de conflit ou de catastrophe. La personne qui formule la demande doit également vivre dans un autre pays que la personne recherchée : la demande peut être formulée, par exemple, par une personne qui vit dans un pays en conflit et souhaite rétablir un lien avec une personne qui vit en France, ou inversement.

Or, force est de le constater, les migrations se multiplient, et un nombre croissant de personnes ont dû quitter leur pays pour des raisons humanitaires ou de conflits armés, par exemple en Syrie, en Ukraine, en République démocratique du Congo ou en Guinée, portant à 299 le nombre de nouvelles demandes de rétablissement des liens familiaux entre janvier et avril 2016.

La continuité du lien familial étant primordiale pour informer et rassurer les familles en cas de séparation, la Commission nationale de l’informatique et des libertés a autorisé la Croix-Rouge française, par une délibération de mai 2012, à mettre en oeuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel, jugeant que la finalité poursuivie est déterminée, explicite et légitime.

Dans le but de renforcer cette mission de rétablissement des liens familiaux, l’article 1er de la proposition de loi permet à la Croix-Rouge française, par dérogation aux dispositions du code des relations entre le public et l’administration, d’obtenir communication de certains documents auprès des administrations de l’État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics administratifs, des organismes de Sécurité sociale et des organismes assurant la gestion des prestations sociales, alors même que ces documents ne sont en principe communicables qu’à l’intéressé. De fait, le soutien apporté, en ce domaine, par l’État et les collectivités territoriales à la Croix-Rouge française doit être encouragé.

L’article 2, quant à lui, autorise la Croix-Rouge française à demander directement les copies intégrales et les extraits d’actes d’état civil aux officiers d’état civil.

L’article 3 reconnaît à la Croix-Rouge française le pouvoir de saisir le représentant de l’État afin de vérifier l’inscription ou non d’une personne sur les listes électorales et, le cas échéant, de prendre communication des données relatives à cette personne.

Un article 3 bis, introduit par la commission des lois à l’initiative de sa rapporteure, reconnaît la compétence de la Commission d’accès aux documents administratifs, la CADA, pour se prononcer sur une demande d’accès à un document administratif ou de réutilisation d’informations publiques faites par la Croix-Rouge française. La CADA se prononce ainsi sur une demande de contestation d’un refus implicite ou explicite de communication d’un document ou d’une donnée par l’administration.

Enfin, l’article 4 apporte des précisions sur les informations qui peuvent être transmises à des tiers sur la personne concernée. En l’occurrence, tant que la personne recherchée n’a pas été retrouvée, aucune information ne peut être transmise. Si la personne recherchée est vivante, ses informations personnelles ne peuvent être communiquées à des tiers qu’avec son consentement écrit ; si elle est décédée, la Croix-Rouge française indique son décès et, le cas échéant, le lieu de sa sépulture aux tiers.

Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste votera en faveur du présent texte.

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